Dans toute la suite, nous fixons un point o ∈ N, ainsi que les réels C,R > 0 donnés par le lemme de l’ombre 6.3.5. La preuve suit la preuve usuelle du théorème de différentiation des mesures de Borel. On va d’abord prouver le théorème lorsque h(z) =´
N (∞)kF(o, z;ξ)dη(ξ), avec η = f νFo, où
f : N (∞)→R est continue et positive ou nulle, en approchant les fonctions L1par des fonctions conti-
nues, et en utilisant les fonctions maximales à la Hardy-Littlewood (voir [AS] pour la stratégie initiale) pour traiter le cas où f est intégrable sur N (∞). Le cas où η est singulière sera une application plus ou moins directe du lemme de l’ombre (de la minoration pour être précis).
On rappelle que eh0est la fonction F -harmonique obtenue en considérant les masses des mesures finies νFz.
Cas d’une mesure à densité continue. Nous traitons ici le cas des mesures η = f νFo, avec f continue positive ou nulle.
Proposition 6.3.8. Soit f : N(∞)→R+une fonction continue, et h : z ∈ N 7→´
N (∞)kF(o, z;ξ)f (ξ)dνFo(ξ),
la fonction F -harmonique correspondante. Alors, pour tout ξ ∈ N(∞), on a :
lim z →ξ
h(z)
e
h0(z)= f (ξ),
où la convergence est non-tangentielle.
Preuve. Nous allons dans un premier temps montrer que la convergence a lieu lorsque z tend vers ξ0 tout en restant sur le rayon géodésique [o,ξ0), puis montrerons que l’on peut toujours se ramener à ce cas.
En guise de remarque préliminaire, mentionnons que puisque kF(o, z;ξ) = dνF
z/dνFo(ξ), nous avons h(z) =´
Supposons donc que (zi)i ∈N est une suite convergeant vers ξ0 tout en restant sur le rayon géo- désique [o,ξ0). Nous pouvons, quitte à extraire, supposer que la distance dist(o, zi) tende vers l’infini tout en croissant strictement. Alors, Oi(ξ0) = OR(o, zi) est une suite strictement décroissante d’ouverts relativement compacts qui converge vers {ξ0}.
Soit ε > 0. Alors il existe un i0tel que pour tout i ≥ i0, l’on ait |f (ξ)− f (ξ0)| < ε pour tout ξ ∈ Oi(ξ0). Alors, pour tout z ∈ [o,ξ), nous pouvons écrire :
h(z) e h0(z)− f (ξ0) = ˆ cOi0(ξ0) (f (ξ) − f (ξ0)) dνF z(ξ) mass(νF z)+ ˆ Oi0(ξ0) (f (ξ) − f (ξ0)) dνF z(ξ) mass(νF z) .
Si l’on applique cette formule à un zi, avec i ≥ i0, alors on voit que la deuxième intégrale est contrôlée par ε.
Quant au premier terme, nous pouvons le majorer par (νFzi(cOi
0(ξ0))/mass(νFzi))2Sup f . Il s’agit
donc, pour conclure, de montrer que limνFzi(cOi
0(ξ0)) = 0.
Puisque zi→ξ0 radialement, la suite d’ombres OR(ξ0, zi) est une suite croissante d’ouverts qui converge vers N (∞) \ {ξ}. En particulier, pour un certain i1> i0, on acOR(o, zi0)⊂OR(ξ0, zi1). Par le
lemme6.3.2, nous avons pour tout i > i1, OR(ξ0, zi1)⊂OR(zi, zi1). Ainsi, on trouve que pour tout i > i1,
on a νF zi(
cO
R(o, zi0)) ≤ νFzi(OR(zi, zi1)).
A présent, nous pouvons envoyer, par une isométrie γi ∈ π1(B), zi sur le domaine fondamental, compact, qui contient o, et que nous notons K . Lorsque i croît indéfiniment, γizi1est envoyé à l’in-
fini, et l’ombre OR(γizi,γizi1) a un diamètre qui tend vers zéro. On a donc :
νFzi(cOR(o, zi 0)) ≤ ν F zi(OR(zi, zi1)) = ν F γizi(OR(γizi,γizi1)) −→ i →∞0. En conséquence, il existe i2> i1> i0tels que pour tout i > i2, νFzi(
cO R(o, zi0)) ≤ ε. Ainsi, lorsque i > i2, on a : ¯ ¯ ¯ ¯ h(zi) e h0(zi)− f (ξ0 ) ¯ ¯ ¯ ¯ ≤ 2Sup f ε + ε = (2Sup f + 1)ε. Cela prouve bien que l’on a limh(z)/h(zi) = f (ξ0).
Nous affirmons à présent que le cas général se traite ainsi. Supposons par exemple que (zi)i ∈N est une suite convergeant vers ξ0dans la topologie conique, tout en restant à distance ≤ r du rayon géodésique [o,ξ0). Il existe alors une suite (zi′)i ∈Nde points appartenant à [o,ξ), et telle que pour tout
i ∈ N, on ait dist(zi, z′i) ≤ r . Alors, B(zi,R)⊂B(z′i,R +r ) et on a OR(zi,R)⊂OR+r(z′i,R +r ). Il s’agit alors de répéter ce qui précède avec des ombres de taille R + r , et non de taille R. La preuve est alors finie. ä
Fonction maximale. Pour une mesure de Borel finie sur N(∞), η, nous définissons la fonction maxi- male par rapport à νF
o par la formule suivante pour ξ ∈ N(∞) :
Mη(ξ) = Sup z∈co,ξ
η(OR(o, z))
νFo(OR(o, z)) .
Nous prouvons dans le lemme suivant ce fait utile que la fonction maximale est faiblement νF o- intégrable :
Lemme 6.3.9. Soit η une mesure de Borel finie sur N(∞), et C5la constante fournie par le lemme de
quintuplement6.3.7. Alors il existe une constante A > 0 telle que pour tout α > 0, on ait :
νFo[Mη> α] ≤
A
Preuve. La preuve de ce fait utilise le caractère “quintuplant” de la mesure νF
o, ainsi que le théorème à la Vitali (voir les lemme6.3.7et théorème6.3.3).
Pour α > 0, nous introduisons l’ensemble Borélien Eα= {ξ ∈ N (α); Mη(ξ) > α}. Ainsi, pour tout
ξ ∈ Eα, il existe zξ∈ [o,ξ) tel que :
η(OR(o, zξ)) > ανFo(OR(o, zξ)).
En particulier, puisque zξ∈ [o,ξ), le Borélien Eαest recouvert par les ombres OR(o, zξ). Nous pou- vons extraire du recouvrement par les ombres OR(o, zξ) un recouvrement (OR(o, z))z∈Z indexé par un ensemble discret Z . Par le théorème à la Vitali, il existe un sous-ensemble Z∗⊂ Z telles que les ombres (OR(o, z))z∈Z∗ soient deux à deux disjointes, et telles que Eα⊂Sz∈ZOR(o, z)⊂Sz∈Z∗O5R(o, z).
En utilisant la propriété de quintuplement, et le fait que les ombres OR(o, z), z ∈ Z∗sont deux à deux distinctes, nous avons alors la chaîne d’inégalités suivantes :
mass(η) ≥ X z∈Z∗ η(OR(o, z)) ≥ α X z∈Z∗ νFo(OR(o, z)) ≥ Cα 5 X z∈Z∗ νFo(O5R(o, z)) ≥ Cα 5ν F o µ [ z∈Z∗ O5R(o, z) ¶ ≥ Cα 5ν F o(Eα).
On peut à présent conclure la preuve en multipliant cette inégalité par C5/α. ä
Proposition principale. La proposition suivante est l’ingrédient technique principal pour prouver le théorème6.2.1. Nous définissons Vr(o,ξ) comme le r -voisinage du rayon géodésique [o,ξ). Proposition 6.3.10. Soit η une mesure de Borel finie sur N(∞), et h la fonction F -harmonique corres-
pondante.
1. Alors pour tout r > 0 , il existe une constante Cr> 0, telle que pour tout ξ ∈ N (∞), et pour tout
z ∈ Vr(o,ξ), on ait :
h(z) ≤ CrMη(ξ).
2. Si C > 1 est la constante donnée dans le lemme de l’ombre, on a pour tout z ∈ N :
h(z) ≥ C−1 η(OR(o, z))
νFo(OR(o, z))
.
Avant de prouver cette proposition, voyons comment elle nous permet de prouver notre théorème à la Fatou.
Preuve de la première partie du théorème à la Fatou. Soit η une mesure de Borel finie sur N(∞) et
h, la fonction F -harmonique correspondante : pour tout z ∈ N, h(z) =´
la décomposition de Lebesgue η = f νF
o+ ηs, où f ∈ L1(N (∞),νFo), et où ηs est singulière par rapport à
νFo. Nous pouvons ainsi séparer l’intégrale deux morceaux et écrire h = h1+ h2où, pour tout z ∈ N :
h1(z) = ˆ N (∞) kF(o, z;ξ)f (ξ)dνFo(ξ), et h2(z) = ˆ N (∞) kF(o, z;ξ)dηs(ξ). Pour prouver le lemme suivant, nous recopions la preuve du théorème 7.7 de [Ru].
Lemme 6.3.11. Pour νFo-presque tout ξ ∈ N(∞), le quotient h1(z)/eh0(z) converge vers f (ξ) lorsque z
tend vers ξ non-tangentiellement.
Preuve. Comme dans la preuve du théorème de densité de Lebesgue (cf [Ru]), nous allons utiliser des approximations de f par des applications continues. Pour alléger, nous noterons ||.|| pour la norme usuelle de L1(N (∞),νFo). Fixons r > 0, et considérons la fonction définie par :
Trf(ξ0) = lim z →ξ0 ˆ N (∞)|f (ξ) − f (ξ0)|k F(o, z;ξ)dνF o(ξ),
où z converge vers ξ0tout en restant dans Vr(o,ξ0). Notre but est de prouver que pour ν-presque tout
ξ0, Tfr(ξ0) = 0.
Soit n ≥ 1 un entier. On peut trouver une fonction continue positive ou nulle fn: N (∞)→R+telle que ||f − fn|| < 1/n. Puisque fnest continue, on a par le théorème6.3.8Trfn= 0. Ainsi, si φn= f − fn:
Trf(ξ0) ≤ Tφrn(ξ0).
En utilisant que z ∈ Vr(o,ξ), en appliquant la première partie de la proposition6.3.10à la mesure |φn|νFo, et en remarquant que eh0est bornée sur N , on obtient la majoration suivante, valide quel que soit ξ0∈ N (∞) : ˆ N (∞)|φn(ξ) − φn(ξ0)|k F(o, z;ξ)dνF o(ξ) ≤ ˆ N (∞)|φn(ξ)|k F(o, z;ξ)dν(ξ) + ˆ N (∞)|φn (ξ0)|kF(o, z;ξ)dν(ξ) ≤ CrM|φn|νF o(ξ0) + |φn(ξ0)|Sup z∈N e h0(z).
Ainsi, il existe une constante C′
rtelle que l’on ait pour tout ξ0∈ N (∞) :
Tfr(ξ0) ≤ Cr′ h M|φn|νF o(ξ0) + |φn(ξ0)| i . En particulier, étant donné ε > 0 :
n Tfr> 2C′ rε o ⊂nM|φn|νFo > ε o ∪ {|φn| > ε}. Une application de l’inégalité de Markov nous donne :
νFo[φn> ε] ≤||φn||
ε ≤
1
εn.
Une application du lemme6.3.9nous donne :
νFohM|φn|νF o > ε i ≤A ε||φn|| ≤ A εn.
Nous pouvons choisir n arbitrairement grand. Nous trouvons donc, en faisant tendre n vers l’in- fini, que {Tfr > 2Cr′ε} est nul pour νFo, et ce pour tout ε. Cela prouve bien que pour un ensemble de mesure pleine de ξ0, Tfr(ξ0) = 0. En choisissant r arbitraire, cela prouve que l’on a un ensemble plein pour νFo constitué de ξ0∈ N (∞) pour lesquels limz →ξ0h(z) = f (ξ0), la convergence étant non-
tangentielle. ä
Lemme 6.3.12. Supposons que η soit singulière par rapport à νFo, et soit h la fonction F -harmonique
correspondante. Alors pour νF
o-presque tout ξ0∈ N (∞), on a limz →ξ0h(z) = 0, quand z converge vers
ξ0non-tangentiellement.
Preuve. Nous utilisons le théorème de différentiation des mesures (théorème6.3.4). Puisque η est singulière par rapport à νFo, on a pour νFo-presque tout ξ0,
lim z →ξ0
η(OR(o, z))
νFo(OR(o, z))= 0, la convergence z →ξ0étant non-tangentielle.
Fixons-nous ξ0, et choisissons r > 0, ainsi que ε > 0 et (zi)i ∈Nqui converge vers ξ0tout en restant dans Vr(o,ξ0). Nous demandons, sans restriction, que la suite des dist(o, zi) soit strictement crois- sante. Nous déduisons de ce qui précède l’existence d’un indice i0tel que pour tout z ∈ Vr(o,ξ0) plus loin de o que zi0, on ait η(OR(o, z))/νFo(OR(o, z)) ≤ ε.
Nous pouvons alors décomposer la mesure η = η1+η2où η1= η|cOR(o,z
i0)et η2= η|OR(o,zi0), de sorte
que pour tout z ∈ N, h(z) = h1(z) + h2(z), où
hj(z) = ˆ
N (∞)
kF(o, z;ξ)dηj(ξ), j = 1,2.
Nous pouvons appliquer ici la première partie de la proposition6.3.10: on a pour tout z ∈ Vr(o,ξ0) plus loin de o que zi0:
h2(z) ≤ CrMη2(ξ0) ≤ Crε,
la dernière inégalité étant vraie parce que par le choix de i0, on a pour tout z ∈ Vr(o,ξ0) plus loin de o que zi0, η(OR(o, z))/νFo(OR(o, z)) ≤ ε.
Reste à majorer la première intégrale. Comme dans la preuve de la proposition6.3.8, nous pou- vons trouver i1> i0tel que pour tout i ≥ i1, on ait kF(o, zi;ξ0) ≤ ε : en particulier, pour tout i > i1,
h1(zi) ≤ εmass(η).
Nous trouvons donc, pour tout i ≥ i1, h(zi) ≤ ε(1+Cr). C’est bien que limi →∞h(zi) = 0 et ce pour toute suite (zi)i ∈N, et tout r > 0. Cela conclut la preuve du lemme. ä Preuve de la seconde partie du théorème à la Fatou. Nous supposons donnée une mesure de Borel finie η, qu’on suppose singulière par rapport à νFo. Le théorème de différentiation des mesures6.3.4
nous dit qu’alors pour η-presque tout ξ, on a : lim z →ξ
η(OR(o, z))
νFo(OR(o, z))= ∞ la convergence z →ξ étant non-tangentielle.
D’autre part, la seconde partie de la proposition6.3.10assure l’existence d’une constante C telle que pour tout z, h(z) ≥ C−1η(OR(o, z))/νF
o(OR(o, z)). Cela implique donc la seconde partie du théo- rème à la Fatou : pour η-presque tout ξ,
lim
la convergence z →ξ étant non-tangentielle.
Finalement, le théorème à la Fatou est prouvé si l’on sait que la proposition est vraie. Le reste du
travail sera donc de prouver cette proposition. ä