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Nous avons énoncé le théorème5.2.4sous l’hypothèse d’un flot hyperbolique feuilleté préservant le volume dans les feuilles. C’est bien le cas du flot géodésique tangent aux feuilles Gt, qui comme il est bien connu, préserve la mesure de Liouville des feuilles. Nous avons alors le théorème suivant. Theorème 5.4.1. Soit (M,F ) une variété close feuilletée munie d’une métrique feuilletée dont les feuilles

sont négativement courbées. Alors si le flot géodésique feuilleté admet un état de su-Gibbs, F a une me- sure transverse invariante.

4.2

–Condition suffisante sur les densités

φ

u

-harmoniques : une géné-

ralisation d’un résultat de Matsumoto

Un résultat de Matsumoto. Étant donnée une mesure φu-harmonique, sur chaque feuille typique est définie une fonction φu-harmonique, obtenue en prolongeant les densités locales. Associée à cette fonction φu-harmonique, qu’on peut appeler fonction caractéristique de la feuille, il y a une mesure de Borel finie η sur la sphère à l’infini de la feuille.

Dans [Mat], Matsumoto définit ces objets pour les mesures harmoniques, et prouve que dans le cas des feuilletages par variétés hyperboliques, si m est une mesure harmonique qui n’est pas totale- ment invariante, alors :

– la fonction harmonique caractéristique d’une feuille typique est non bornée ;

– la mesure η associée sur la sphère à l’infini d’une feuille typique est singulière par rapport à Lebesgue.

Une version de ce théorème dans le cas des feuilletages transversalement conformes par surfaces hyperboliques, se trouve dans [BGM], et repose sur le travail de [DK] sur l’exposant de Lyapunov du mouvement Brownien feuilleté.

Nous proposons de prouver un théorème analogue dans le cas des mesures φu-harmoniques, ce qui donnera une nouvelle preuve, ne faisant pas appel aux propriétés du mouvement Brownien, mais aux propriétés d’absolue continuité des horosphères, du théorème de Matsumoto.

Fonctions et classes de mesure caractéristiques. Avant d’énoncer le théorème à proprement par- ler, nous devons expliquer précisément quels sont les objets que nous associons à une feuille typique pour une mesure φu-harmonique m.

Nous avons vu à plusieurs reprises comment utiliser le lemme de Ghys (voir4.3.5) les densités locales φu-harmoniques de la mesure m sur une feuille typique : obtenant ainsi la fonction caracté-

ristique hL. Bien sûr, elle n’est déterminée qu’à une constante multiplicative près, puisque sa déter-

mination dépend d’un choix de plaque initial.

Par définition d’une fonction φu-harmonique, le relevé au revêtement universel de h

L s’écrit comme intégrale du noyau ku(o, z;ξ) contre une certaine mesure de Borel finie ηLdéfinie sur eL(∞). Ici

encore, seule la classe de mesure [ηL] est déterminée indépendamment d’un choix de plaque initial. Nous avons ainsi défini la classe de mesure caractéristique sur la sphère à l’infini d’une feuille typique. Sur la sphère à l’infini de toute feuille L de F , nous pouvons définir la classe de visibilité, en pous- sant par le flot géodésique la mesure de Lebesgue restreinte à une fibre unitaire tangente à L. Nous rappelons que puisque L se réalise comme feuille d’un feuilletage d’une variété compacte, le feuille- tage centre-instable est absolument continu, de sorte que cette classe de mesure soit bien définie.

Condition suffisante pour l’existence de mesure transverse invariante. Nous pouvons alors énon- cer le théorème suivant qui donne une condition suffisante sur la classe caractéristique sur la sphère à l’infini d’une feuille typique pour l’existence d’une mesure transverse invariante par holonomie. En suivant Matsumoto, nous nous dirons qu’une certaine propriété est vérifiée pour m-presque toute

feuille, s’il existe un ensemble de Borel X saturé par le feuilletage et de mesure pleine pour m tel que

toute feuille passant par X vérifie cette propriété.

Theorème 5.4.2. Soit (M,F ) une variété close feuilletée munie d’une métrique feuilletée dont les feuilles

sont négativement courbées. Soit m une mesure φu-harmonique qui n’est pas totalement invariante.

Alors pour m-presque toute feuille L, la classe de mesure caractéristique associée [ηL] sur eL(∞) est sin-

gulière par rapport à la classe de visibilité.

Nous rappelons que pour des feuilletages dont les feuilles sont hyperboliques, les mesures φu- harmoniques coïncident avec les mesures harmoniques usuelles au sens de Garnett. De plus, en cour- bure constante, la sphère à l’infini est une variété lisse, et toutes les transformations d’holonomies du feuilletage centre instable sont lisses de sorte que la classe de visibilité soit donnée par la classe de Lebesgue à l’infini. Nous obtenons alors, dans le cas où les feuilles sont des variétés hyperboliques, une nouvelle preuve du théorème de Matsumoto :

Corollaire 5.4.3 (Matsumoto). Soit (M,F ) une variété close feuilletée par des variétés hyperboliques.

Soit m une mesure harmonique qui n’est pas totalement invariante. Alors pour m-presque toute feuille

L, la classe de mesure caractéristique associée [ηL] sur eL(∞) est singulière par rapport à la mesure de

Lebesgue.

De plus la fonction harmonique caractéristique d’une feuille typique n’est pas bornée.

Preuve. Le fait que la classe caractéristique d’une feuille typique pour une mesure harmonique non totalement invariante soit singulière par rapport à la mesure de Lebesgue est une conséquence im- médiate de ce qui précède, et du théorème5.4.2.

Le fait que la fonction caractéristique d’une feuille typique ne soit pas bornée vient du fait qu’alors sa classe caractéristique est singulière par rapport à Lebesgue, et du théorème de Fatou usuel pour les fonctions harmoniques (voir le théorème 11.24 [Ru]) : pour Lebesgue-presque tout point ξ de la sphère à l’infini, la fonction harmonique caractéristique croît indéfiniment lorsque l’on tend vers ξ

non-tangentiellement. ä

Lien avec les états de su-Gibbs. La première étape dans la preuve de ce théorème est la réduction au cas des mesures φu-harmoniques ergodiques. Nous avons prouvé un théorème de décomposition ergodique pour les mesures φu-harmoniques : voir le théorème5.3.14: nous pouvons donc l’utiliser pour nous restreindre au cas des mesures ergodiques.

Soit à présent, m une mesure φu-harmonique ergodique telle qu’il existe un ensemble de Borel X saturé par le feuilletage de mesure positive tel que la classe caractéristique de toute feuille passant par X ne soit pas singulière par rapport à la classe de visibilité. Alors, par ergodicité, cet ensemble est de

mesure pleine. Le théorème5.4.2est conséquence de la proposition suivante, ainsi que du théorème

5.4.1:

Proposition 5.4.4. Supposons qu’il existe une mesure φu-harmonique ergodique m telle que la classe caractéristique de m-presque toute feuille de F ne soit pas singulière par rapport à la classe de visibilité. Alors son relevé canonique µ est un état de su-Gibbs.