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Réactions et Solutions

Dans le document LES ADOLESCENTS FACE AUX IMAGES VIOLENTES (Page 116-119)

Nous nous appuierons plus précisément ici sur les observations faites pendant les ateliers. Ils ont confirmé la différence de culture médiatique entre les deux établissements du groupe 1, de façon plus marquée encore que l’année précédente. Les jeunes de l’établissement 1 sont assez éloignés de la culture médiatique mainstream, à la différence de ceux de l’établissement 2. Aussi la présentation des résultats intermédiaires, qui était au cœur des ateliers, évoquait-elle souvent des programmes qu’ils ne connaissaient pas ou très superficiellement, il leur était alors difficile de commenter les verbatim des adolescents enquêtés. Mais on a pu retrouver la tendance à l’intellectualisation déjà soulignée : Aude a ainsi fait part de sa façon de regarder The Walking Dead et d’en apprécier le réalisme psychologique, malgré son caractère « manichéen ». Ils ont constaté que depuis qu’ils avaient quitté le collège ils n’entendaient plus parler de téléréalité, mais Agathe a déclaré qu’en tant que relevant de « la culture de masse », il était « intéressant, si on se place d’un point de vue critique, [d’observer ces émissions], pour comprendre la société en général ». Elle avait entendu des critiques sévères de l’émission Mariés au

premier regard, qu’elle n’avait pas vue pour autant. Face aux émissions d’enquête policière, Aude est

sensible au caractère factice de la représentation de la police, elle trouve que le style en est « romancé », « ça donne l’impression que [les policiers] sont fiers d’être filmés » et témoigne d’une réception ironique du programme, « pour rigoler ». Ils ont été en revanche très peu sensibles à la dimension éventuellement stigmatisante de ces programmes pour les jeunes de banlieue, ce qui renvoie à la fois à leur fréquentation sociale éloignée de ces publics, et à leurs fréquentations médiatiques.

Dans l’établissement 2, avec des origines sociales plus mixtes socialement, et probablement moins favorisée que l’année précédente, un attachement moins intense à la réussite scolaire que dans l’établissement 1, les jeunes ont spontanément réagi sur le caractère inadapté des émissions de téléréalité pour des enfants. Certains, comme Kim ou Sarah, en étaient de fervents adeptes, Kim allant jusqu’à enregistrer les programmes qu’elle ne pouvait pas voir. Tous connaissaient suffisamment ces programmes pour être choqués à l’idée qu’un des verbatim évoquait avoir vu Secret Story « depuis 9 ans », donc à partir de 6 ans. C’est la sexualité débridée qui y est évoquée qui leur paraissait gênante, la sexualisation des filles « qui font des stripteases », le vocabulaire grossier, les fautes de « syntaxe ». Kevin est allé jusqu’à parler de « poison » à leur propos, tout en s’appuyant sur ses propres visionnages. « C’est débile, y a rien, ça n’apporte rien, et c’est encore moins intéressant qu’une série débile ». Isabelle revendiquait une réception ironique, « ça nous fait rire, et voilà. Ils ont argumenté à partir du caractère influençable des enfants : « 6 ans c’est l’âge où on construit notre pensée, si on regarde ce genre d’émissions on risque de penser pareil » (Kim), « ils vont penser que c’est la réalité » (Isabelle). Ils ont eu une attitude très critique envers les émissions d’enquête policière. Jakarta a évoqué « une vision faussée de la police », mais aussi « une vision des jeunes des quartiers sensibles » caricaturale, la surreprésentation des jeunes de banlieue, l’absence de la délinquance en col blanc. Plusieurs d’entre eux ont évoqué comme Stéphanie le fait que « ça joue sur les stéréotypes et c’est dangereux de regarder ça. Si on regarde ça depuis la campagne […] on va se faire des idées dans nos têtes ». « Moi quand je vais dans le 93, j’ai pas peur pour ma vie, je me cache pas, fin voilà… Faut juste faire attention aux idées qu’on véhicule » (Sarah).

Ils ont ensuite tenu une longue discussion sur la diversité des formes de rap, sensibles aux tendances commerciales de certains chanteurs comme Gradur ou Booba qui mettent en avant le côté voyou des garçons, mais aussi d’autres comme Kery James « qui font passer des vrais messages ».

Sur les programmes d’information ils se sont montrés très méfiants. Ils se sont révélé à la fois spectateurs réguliers des chaines d’information en continu, et très critiques sur leurs « amalgames » comme Sarah qui prétend distinguer les faits qui l’intéressent, et les commentaires, qu’elle ne souhaite pas entendre.

Ils ont proposé dans les deux établissements de nombreuses pistes pour accompagner mieux les préadolescents sur internet que nous regrouperons ici. Le sérieux de leur implication, la diversité des solutions et les nuances apportées sur les différentes solutions font partie des caractéristiques du

groupe 1. La plus grande richesse de vocabulaire, l’habitude de l’élaboration critique dans leur scolarité, et probablement dans les relations avec les parents, font que les jeunes se sont emparés volontiers de ces questions et ont pu développer collectivement des pistes d’action.

Contrôle et interdictions pour les plus jeunes

- Remplacer les recommandations sur les jeux vidéo par des interdictions - Contrôler l’âge d’accès pour les sites

- Mieux sécuriser les sites

Régulation, filtrage et prévention sur les réseaux sociaux et les sites internet

- Renforcer la régulation des plateformes

- Diffuser des vidéos d’information des jeunes sur Facebook, sur les enjeux de la publication (remplacer les CGU par des petites vidéos)

- Filtrage des propos racistes par des algorithmes et par des filtres humains, permettant éventuellement un blocage du compte à l’instar de ce qui est fait sur la play station quand on hacke des jeux

- Filtrage des images choquantes et envoi d’un texte avant l’image expliquant son contenu

- Filtrage des images avec du sang, avec des armes

- Préférence de certains pour le filtrage, pour éviter la sensation de formatage par l’école et tenir compte de la diversité des points de vue parentaux sur les interdits (notamment en matière de racisme).

- Sanctionner des vidéos comme celle de Mojito dégradant l’image de la femme.

Rôle de l’école et prévention

- Education, sensibilisation des enfants aux bonnes pratiques sur internet dès le primaire

- Favoriser l’expression des émotions des enfants - Analyser les stéréotypes présents dans les médias

- Organiser une consultation collective en face à face avec une figure d’autorité - Organiser une consultation individuelle avec un psychologue pour éviter les

problèmes des suiveurs et des tyrannies de groupe.

Rôle des jeunes

- Système de parrainage, ou d’ambassadeurs, avec des lycéens qui expliqueraient les bonnes pratiques auxquels les enfants pourraient mieux s’identifier.

Parents

- Renforcer l’information des parents

- Renforcer le contrôle des parents sur les publications d’image - Renforcer la communication parents-enfants

Les jeunes de l’établissement 2 davantage exposés que les jeunes de l’établissement 1 ont été plus inquiets de la nature des messages racistes et violents qui circulent sur internet. Les jeunes de l’établissement 1 plus focalisés sur les problèmes de harcèlement et de publications intempestives. Les solutions proposées dans les deux établissements se rejoignent pour un certain nombre d’orientations, notamment sur le renforcement du filtrage, l’appel aux algorithmes, et le renforcement de la prévention. Les jeunes de l’établissement 2 ont été nombreux à souhaiter un renforcement des interdits pour l’accès des plus jeunes aux sites adultes et aux jeux vidéo de guerre.

Groupe 2 : un choix marqué en faveur de l’évitement intégriste

du sexuel

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