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Les règles relatives à la concurrence

Conclusion du chapitre

A. Les règles relatives à la concurrence

La loi du 11 juillet 1999 portant sur les télécommunications en Mauritanie est dans une large mesure une copie collée de la loi européenne du 13 mars 1996 dite loi de « pleine concurrence ». Les ressemblances en ce qui concerne les conditions d’octroi de licences sautent aux yeux. Le constat vaut aussi pour les règles relatives à l’accès libre au marché et au libre exercice de la concurrence.

Dés lors, les télécommunications deviennent soumises aux principes du libéralisme économique tels que la libre circulation des biens et des services et la libre initiative privée288. Or, pour assurer l’effectivité de ces principes, l’établissement de mesures correctrices de la concurrence (1) constitue un gage de garantie contre la perpétuité des pratiques anti-concurrentielles (2).

286 CURIEN. N et GENSOLLEN. M., Economie des télécommunications, ouverture et réglementation, édition Economica, 1992, p.232.

287 Ibid., p.233.

288 DERIEUX. E., Droit des médias, op.cit., p.787.

1. Les mesures correctrices de la concurrence

L’accès au marché des télécommunications se fait de manière objective, transparente et non discriminatoire (article 12). Cela signifie que les nouveaux entrants comme les opérateurs les plus anciens jouissent des mêmes droits et s’acquittent des mêmes obligations. Par extension, l’accès équitable au marché veut dire que tous les opérateurs sont égaux par rapport à l’utilisation des ressources limitées, à savoir les servitudes, les fréquences et l’universalité des télécommunications (article 12). Ainsi l’emprunt d’un passage sur le domaine public routier recueille une permission inconditionnelle de l’autorité de régulation 289. Cette règle est valable aussi bien pour l’opérateur historique Mauritel S.A que les nouveaux entrants Mattel S.A et Chinguettel S.A. A contrario, les gestionnaires ou les propriétaires des passages publics non routiers ont l’embarras du choix. Toutefois, s’ils acceptent, cela doit être acté sous la forme d’une convention, conformément aux contraintes de transparence d’objectivité et de non discrimination290. Quant au domaine privé, il peut faire l’objet de servitudes dans les mêmes conditions et contraintes du domaine public. C’est dire la transparence et la non discrimination.

S’agissant de l’universalité des télécommunications291, celle-ci ne se posait pas auparavant pour la simple raison que sous un régime monopolistique tous les abonnements appartiennent au même opérateur, de ce fait la fluidité de

289 AMMI. C., La concurrence dans les télécoms ; stratégies et perspectives, op.cit., p.65.

290 Ibid., p.64.

291 A noter que l’universalité des télécommunications est hétéroclite à la notion de service public universel défini dans l’article 1 de la loi du 11 juillet 1999 comme « l’accès aux services de télécommunications pour tous, dans des conditions raisonnables, en permettant un abonnement a ceux qui en ont les moyens et en installant pour les autres un nombre suffisant de télé centres ou de centres communautaires, afin de leurs éviter de longs déplacements ». Alors que l’universalité des télécommunications signifie « la faculté pour tout abonné de n’importe quel opérateur de communiquer avec tout autre abonné d’un autre opérateur ».

Voir AMMI. C., La concurrence dans les télécoms ; stratégies et perspectives, op.cit., p.65.

communication entre les différents abonnés est quasi-naturelle. L’arrivée sur le marché des nouveaux opérateurs à tout bouleversé. Partant, entre les abonnés de l’opérateur Mattel S.A et de l’opérateur Chinguitel S.A, l’échange des messages SMS fut impossible. Il a fallu que l’autorité de régulation intervienne pour mettre de l’ordre. Après avoir réuni les deux opérateurs en question le 10 mai 2009, l’ARE leur a fixé dix jours pour résoudre définitivement ce problème292 afin de préserver le caractère universel des télécommunications.

L’intervention de l’autorité de régulation est indispensable également non seulement pour arrêter la tarification, aménager le plan de numérotation (a) mais aussi pour inciter au partage des installations et organiser l’interconnexion entre les opérateurs (b).

a) Tarification et numérotation

En application des articles 37 et 38 de la loi du 11 juillet 1999 la tarification des services des télécommunications s’établit à partir d’un montant maximum de communications qui est fixé annuellement par les opérateurs. Ces derniers ont l’obligation de mettre à la disposition de leurs clients les tarifs maximums de paniers de communication. L’autorité de régulation contrôle l’effectivité de ces tarifs. Dans son rapport de 2000 l’autorité de régulation pointe du doigt la cherté des tarifs interurbains293 et internationaux294 et dénonce la faiblesse des tarifs des communications locales excessivement bas et bon marché295. Selon l’autorité de

292 Consulté en ligne sur le lien suivant : www.are.mr

293 Les tarifs interurbains varient 80 UM et 320 UM la minute. Pour le calcul il est pris en compte uniquement la position géographique par rapport à la capital Nouakchott.

294 Pour un appel international, il faut compter entre 169 et 833 la minute, tarifs qui sont loin d’être justifiés. Voir le rapport de l’autorité de régulation, 2000, op.cit., p.19.

295 La faiblesse des tarifs des communications locales trouve explication dans l’existence des subventions croisées entre services.

régulation « ces distorsions créent de facto une structure tarifaire qui, si elle est maintenue, ne permet pas à l’opérateur historique de faire face à la concurrence, ce qui risque d’avoir des effets négatifs sur sa privatisation et sur le développement du secteur général {…} 296». Par conséquent, l’Etat décide de subventionner les communications internationales. Cette politique ne produira pas non plus les effets escomptés. Par la suite, le conseil national de régulation dans sa décision du 1er juillet 2000 a fixé une fourchette allant de 81 à 279 UM pour les appels interurbains et internationaux. Une autre date à retenir est le 4 novembre 2000 : l’exclusivité sur l’international sera levée par le décret n°

2000/128/PM/MPTT. Le 2 novembre de la même année, le conseil national de régulation prend une autre décision importante portant sur le plafond moyen pondéré autorisé d’une communication locale portée à 15UM au lieu de 16 UM la minute pour une durée expérimentale de 12 mois.

Ces décisions ne visent guère l’unification des tarifs, chose qui serait incompatible avec la logique concurrentielle, mais plutôt l’harmonisation des tarifs, c’est-à-dire que l’autorité de régulation, l’organisme chargé de contrôle tarifaire se contente désormais de fixer aux opérateurs de télécommunication

« des objectifs globaux »297 en leur laissant, toutefois, l’entière liberté de fixer leurs tarifs dans les limites bien comprises des taux plafond préalablement fixés par l’ autorité de régulation.

Notons bien que la fixation des taux plafond se fonde sur une approche évaluative des coûts dite Price-cap régulation298. En l’occurrence la validité de

296 Rapport annuel de l’autorité de régulation, 2000, op.cit., p.18.

297 CURIEN. N et GENSOLLEN. M., Economie des télécommunications, ouverture et réglementation, op.cit., p.123.

298 Celle-ci se caractérise « par une plus grande marge de manœuvre laissée aux opérateurs dans la fixation de leurs tarifs : ceux-ci sont libres, pourvu qu’un indice global, parfois plusieurs indices, connaissent, en termes réels, une évolution décidée a l’avance et non remise en cause pendant une durée longue (plusieurs années) », voir CURIEN. N et GENSOLLEN. M., Economie des télécommunications, ouverture et réglementation, op.cit., p.124.

celle-ci s’étalait sur un an, du 4 novembre 2001 au 4 novembre 2002299. Simplement, cette approche présente deux menaces :

- d’abord, elle peut se révéler dangereuse vis-à-vis des entreprises, dans l’hypothèse où les coûts et les charges sont très élevés par rapport au plafond fixe pondéré. Une telle situation peut être fatale pour la santé économique des entreprises des télécommunications. Il est de plus en plus probable que cela arrive du moment où « la disponibilité et la fiabilité des données de bases »300 font souvent défaut. Or, l’efficacité de cette approche exige la considération et la comptabilisation de toutes

« les prévisions de recettes et de charges »301 ;

- ensuite, cette approche peut s’avérer dangereuse pour les consommateurs, dans le cas de figure où le coût de production est banal comparé aux bénéfices faramineux réalisés302.

Dans sa décision N°003 du 04 novembre 2001 portant encadrement des tarifs des services de communication locale de Mauritel , l’autorité de régulation affirme la liberté tarifaire qui selon elle est « associée à l’instauration d’un marché concurrentiel ce qui permet aux tarifs d’être fixés par la loi de l’offre et de la demande »303. Cependant l’ARE se réserve le droit d’intervenir afin de prévenir les menaces qui planent sur le marché, ainsi corriger les distorsions constatées304.

299 Rapport annuel de l’autorité de régulation, 2001, p.17.

300 Ibid., p. 18.

301 CURIEN. N et GENSOLLEN. M, Economie des télécommunications, ouverture et réglementation, op.cit., p.125.

302 Ibid., p.125.

303 OULD HOUIEBIB. C., « la mise en place d’un système de tarification » Echos de l’autorité, bulletin d’information de l’autorité de régulation en Mauritanie, n°01, 2001, p.32.

304 L’article 1 de cette décision dispose in fine que « l’autorité de régulation se réserve le droit d’introduire un encadrement pour tout ou partie des tarifs de ces services s’il apparaît que Mauritel bénéficie d’une situation dominante et en abuse ». En effet, cela concerne aussi les autres opérateurs.

En outre, il est nécessaire de préciser que la politique d’encadrement tarifaire ne s’applique qu’aux services des télécommunications fixes. Les services des télécommunications mobiles étant fraichement ouverts à la concurrence sont épargnés 305 . En revanche, les opérateurs des télécommunications sont soumises à une déclaration des chiffres d’affaires par service pour empêcher la compensation entre segments du marché306 , et des enquêtes périodiques sont réalisées pour s’assurer de la qualité de service qui peut être délaissé en raison de la cherté de certains appareils307.

Concernant la numérotation, en application de l’arrêté R0131 de 2008 définissant les modalités d’établissement et de gestion d’un plan national de numérotation, d’un annuaire et des services d’urgence et de renseignement, l’établissement de celle-ci est une prérogative de l’autorité de régulation qui met en place un plan national de numérotation (PNN) pour une durée au moins égale à dix ans et qui veille à sa mise à jour tous les deux ans.

Il est prévu que la répartition des numéros, préfixe et bloc de numéros réponde au principe de numéros courts pour les services d’urgence et les services d’assistance aux usagers308 et de numéros relativement longs pour les abonnés aux réseaux des opérateurs mobiles cellulaires, réseaux maritimes et mobiles analogiques terrestres et le service fixe. Un PNN a été mis en œuvre par l’ARE le 31 mars 2001 répondant aux besoins des opérateurs et aux règles

305 OULD HOUIEBIB. C., « la mise en place d’un système de tarification, op.cit., p.32.

306 En matière des télécommunications les tentations sont fortes pour faire supporter aux consommateurs des trafics interurbains et internationaux largement surtaxés ou les pertes causées par la sous-taxation des communications locales. Une sorte de subventions croisées. Voir CURIEN. N et GENSOLLEN. M., Economie des télécommunications, ouverture et réglementation, op.cit., p.218.

307 En 2002 et 2003 l’autorité de régulation a diligenté plusieurs enquêtes dans des différentes villes de Mauritanie sur la qualité de couverture du réseau, le taux de perte des appels et le taux de coupure des appels. Dans l’ensemble les résultats de cette enquête sont satisfaisants. Voir le rapport annuel de l’autorité de régulation, 2003, p.15.

308 Tels que le numéro 17 pour la police secours et le numéro 11 pour le signalement d’un dérangement.

internationales applicables en la matière. Il est important, enfin, de souligner que la mise du PNN sous le contrôle de l’ARE permet une grande transparence et une nette objectivité309

b) Interconnexion et partage des infrastructures

Aux termes de l’article 1er de la loi n° 99-019 du 11 juillet 1991 portant sur les télécommunications, l’interconnexion est l’ensemble des « liaisons physiques, logiques et commerciales entre les réseaux de télécommunications ouverts aux publics permettant à l’ensemble des utilisateurs de communiquer librement entre eux, quels que soient les réseaux auxquels ils sont raccordés ou les services qu’ils utilisent ». L’article 39 évoque la possibilité pour tous les opérateurs de communiquer les uns avec les autres, ainsi que l’accès aux services proposés par les uns et les autres.

Ces dispositions sont intéressantes à plus d’un titre :

- elles sont d’abord encourageantes et incitatives pour les nouveaux opérateurs car elles leur reconnaissent un droit à l’interconnexion opposable à l’opérateur dominant. A cet égard, la société mauritanienne des télécommunications Mauritel a publié en décembre 2000 un premier catalogue d’interconnexion présentant en détails l’offre commerciale et technique ainsi que les tarifications qu’elle propose310. Pareillement,

« tout autre opérateur de réseaux ouverts au public doit répondre favorablement à toute demande d’interconnexion, sous réserve de sa

309 AMMI. C., La concurrence dans les télécoms ; stratégies et perspectives, op.cit., p.64.

310 Voir le catalogue d’interconnexion au réseau téléphonique de Mauritel, décembre 2000 consultable sur le lien électronique swww.are.mr/pdfs/catalogmauritel.pdf .

capacité technique suffisante»311. L’autorité de régulation s’assure que les conditions et les tarifications d’interconnexion ne sont pas excessives, en ce sens où elles mettent en jeu la loyauté et l’effectivité de la concurrence (article 39). Cependant, tout refus d’interconnexion demeure inadmissible, sauf si la demande est techniquement irréalisable ou irrationnelle par rapport aux besoins éprouvés par la société demanderesse et /ou dont la satisfaction causerait des dommages, dégradations collatéraux au niveau des réseaux et services offerts aux abonnées312 (article 40) ;

- ensuite, ces dispositions protègent les nouveaux entrants encore fragiles vis-à-vis de la dominance de l’opérateur historique 313 déjà bien installé314. En leur permettant d’accéder sur une base juste et égalitaire aux infrastructures construites au préalable par Mauritel, le législateur prémédite « {…} le développement des réseaux privés d’entreprises et leur ouverture à des tiers font peser le risque d’une croissance anarchique.

Si de nombreux systèmes incompatibles entre eux se mettaient en place, les sous-ensembles ainsi constitués, fermés sur eux-mêmes, deviendraient, comme dans le cas de l’informatique, les chasses gardées des divers opérateurs »315, ce qui aurait pu arriver si on avait consacré un traitement spécial à Mauritel. Sur le plan du droit commun, il n’existe plus de différences relatives au statut public ou privé de l’opérateur. Les qualificatifs « réseaux de télécommunications ouverts au publics » employés par le législateur ne laissent plus place à une quelconque dichotomie. Il s’agit désormais d’un ensemble homogène et compact des

311 AMMI. C., La concurrence dans les télécoms ; stratégies et perspectives, op.cit., p.65.

312 A ce titre l’exemple américain sert d’appui. En effet, voir CURIEN. N et GENSOLLEN. M, Economie des télécommunications, p.98.

313 Ibid.

314 DUTHEIL DE LA ROCHERE, La concurrence dans la société de l’information, op.cit., p.21.

315 CURIEN. N et GENSOLLEN. M, Economie des télécommunications, ouverture et réglementation, op.cit., p.122

opérateurs. Cependant, les différences tenantes au droit de la concurrence demeurent316 ;

- il nous paraît enfin que ces dispositions, au-delà de leur préoccupation de l’intérêt des usagers, présentent des vertus concrètes sur la protection et l’amélioration du service universel à qui la stimulation de la concurrence est doublement profitable. Cette dernière permet un meilleur service universel et un coût moins élevé et qui serait imputable aux opérateurs eux-mêmes à travers le fond d’accès au service public.

Globalement, l’accès aux infrastructures ne s’arrête pas à l’interconnexion.

Celle-ci constituerait « un type particulier d’accès mis en œuvre entre opérateurs de réseaux public » 317, comme le souligne la directive européenne Accès du 7 mars 2002. Le partage des infrastructures et le dégroupement de la boucle locale en sont d’autres. Nous y reviendrons dans la suite de cette étude car ces règles, comme celles qui suivent, concernent la société de l’information dans sa totalité.

2. Les pratiques restrictives du libre exercice de la concurrence

Ce sont les règles qui résultent du triptyque : ententes, abus de position dominante et concentration. Il n’est pas étonnant que le législateur national mauritanien ait mis spécialement l’accent sur l’abus de position dominante (a) et l’état de dépendance (b). Il nous semble que dans un marché des télécommunications nouvellement dérèglementé, l’opérateur historique demeure continuellement tenté d’abuser excessivement de sa position dominante sur le marché. Ainsi, exploiter en sa faveur l’état de dépendance dans lequel se trouve

316 EL IDRISSI. M, « la pertinence du régime juridique des télécommunications, issu de la loi 24-94 », revue franco-maghrébine de droit, presses universitaires de Perpignan, n°13, 2005, p.130.

317 L’article 2 de la directive 2002/19/CE du 7 mars 2002 relative aux communications électroniques, JOCE, n° L 108 du 24 avril 2002, p.11.

à son égard les nouveaux entrants, « ne serait que par habitude »318 compte tenu non seulement de son statut mais encore du fait qu’il a hérité de l’ancien système monopolistique la conservation des installations essentielles319.

a) L’abus de position dominante

Au sens de l’article 16 de la loi n° 99-19 la notion de position dominante s’appréhende de plusieurs façons. Est en position dominante tout opérateur qui comptabilise à lui seul plus de 25% du marché intérieur de télécommunications, de sorte qu’il y exerce une influence significative. Le pourcentage demeure le critère substantiel établi par le législateur mauritanien pour définir la notion de la position dominante. Toutefois, d’autres considérations pour ne pas dire d’autres critères accidentels entrent en jeu. Le chiffre d’affaires et le contrôle des moyens d’accès aux services et réseaux de télécommunications en sont les principaux. Ainsi, serait en position dominante tout opérateur qui détient un chiffre d’affaires très important par rapport à la taille du marché ou qui contrôle les infrastructures essentielles, chose qui lui permet d’ores et déjà de mettre des barrières à l’entrée, par exemple la fidélisation de la clientèle à travers le mécanisme de la différenciation du produit320. Peut être pris en compte, aussi, l’accès des opérateurs à des ressources financières et leur expérience dans la fourniture de produits et services de télécommunications.

Dans tous les cas, la notion de position dominante varie selon les circonstances car, en réalité, d’autres situations de position dominante peuvent se présenter, notamment les ventes liées ou la rupture soudaine des relations commerciales sans préavis (article 1232.3 du code de commerce mauritanien).

318 DUTHEIL DE LA ROCHERE. J., La concurrence dans la société de l’information, op.cit., p.21

319 Ibid.

320 AMMI. C, La concurrence dans les télécom ; stratégies et perspectives, op.cit., p.157.

De fait, l’article 16 de la loi n° 99-19 semble théoriquement copier les dispositions de l’article l.420-2 du code de commerce français qui dispose : « est prohibée, dans les conditions prévues à l’article l.420-1, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises d’une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées ». La définition de la position dominante n’est pas aussi variée que cela 321. La jurisprudence communautaire est tranchante, selon laquelle la position dominante revêt une attitude monopolistique ou un comportement indépendant de l’opérateur qui se permet d’agir en dehors de toute contrainte concurrentielle322. Cette position jurisprudentielle a été affirmée dans d’autres arrêts323.

On voit donc qu’il y a un décalage entre les dispositions du droit interne français et le droit communautaire. Ce dernier dans son ancien article 82, al.1 du traité CE devenu article 102 interdit l’abus de position dominante « sur le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci ». Cette interdiction ne souffre aucune exception, contrairement au droit interne français qui identifie au moins trois situations d’exception : conformément à l’article l.420-4 du code de commerce, l’interdiction saute lorsqu’ elle résulte d’un texte législatif ou règlementaire, lorsqu’elle est justifiée par le développement du progrès économique et social et enfin lorsqu’il y a un accord d’exemption par décret324. Dans son article 1236, le code de commerce mauritanien emboite le pas de son

321 DUTHEIL DE LA ROCHERE, La concurrence dans la société de l’information, op.cit., p.84.

322 Déc. Com, Continental Can, 9 décembre 1971, n°72621 IV, 26.811, JOCE L, 8 janvier 1972.

323 Voir arrêt United brands, la décision de la Cour de justice de la communauté européenne du 14/02/78 et l’arrêt Hoffmann-Laroche, décision de la Cour de justice de la communauté européenne du 13/02/1979.

323 Voir arrêt United brands, la décision de la Cour de justice de la communauté européenne du 14/02/78 et l’arrêt Hoffmann-Laroche, décision de la Cour de justice de la communauté européenne du 13/02/1979.