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Règles de l’Union européenne

Dans le document LES FONDS SOUVERAINS02 (Page 124-127)

12. Cadre juridique international

12.2. Règles de l’Union européenne

L’UE prévoit également un certain nombre de règles en matière d’investissements étrangers dans ses États membres. Le système européen, bien qu’indépendant de celui de l’OCDE, ne peut être plus restrictif que celui-ci en matière de libéralisation.

12.2.1. Principe : libre circulation des capitaux

La libre circulation des capitaux est un principe fondamental du traité instituant la Communauté européenne (traité CE). L’article 56 du traité CE dispose ainsi que « toutes les restrictions aux mouve-ments de capitaux entre les États membres et entre les États mem-bres et les pays tiers sont interdites ». Le principe de libre circula-tion des capitaux s’applique donc non seulement à l’intérieur de l’UE, mais aussi entre les États membres et les pays tiers.

Les investissements directs, sous forme de participation à une entreprise conférant la possibilité d’influer sur sa gestion et son contrôle, et les investissements de portefeuille, sous forme d’ac-quisition d’actions dans la seule intention de réaliser un place-ment financier, constituent des mouveplace-ments de capitaux au sens de l’article 56 du traité CE6. Par conséquent, un investisseur d’un pays tiers doit être traité par un État membre sans discrimination par rapport à un investisseur d’un autre État membre.

En outre, les dispositions du traité CE relatives à la libre circu-lation des capitaux n’opèrent pas de distinction entre les inves-tisseurs publics et les invesinves-tisseurs privés. Ainsi, un investisseur

6 Directive 88/361/CEE du Conseil, annexe I, 24 juin 1988.

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public d’un État tiers, tel un fonds souverain, doit être traité de la même manière qu’un investisseur privé d’un État de l’Union.

12.2.2. Exception : sécurité nationale

Les États membres peuvent prendre des restrictions au principe de libre circulation des capitaux lorsque la sécurité l’exige. Ainsi, l’article 58, 1. b) du traité CE autorise un État membre à « prendre des mesures justifiées par des motifs liés à l’ordre public ou à la sécurité publique » et l’article 296 du traité CE lui permet de « pren-dre les mesures qu’il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d’armes, de munitions et de matériel de guerre ».

Toute mesure prise par un État membre et susceptible d’em-pêcher ou de limiter l’acquisition d’actions dans une entreprise de cet État ou de dissuader les investisseurs étrangers d’investir dans le capital de celle-ci constitue une restriction à la libre cir-culation des capitaux.

Selon la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE)7, ces restrictions ne sont conformes au droit européen que si elles sont :

justifiées par des motifs liés à l'ordre public ou la sécurité

que ou par des raisons impérieuses d’intérêt général ; il faut une menace réelle et suffisamment grave, affectant un intérêt fondamental de la société ;

adaptées, c’est-à-dire propres à garantir la protection des

rêts mis en danger ;

7 CJCE 23 octobre 2007, aff. 112/05, Commission c/ Allemagne ; CJCE 28 septem-bre 2006, aff. 282/04 et 283/04, Commission c/ Pays-Bas ; CJCE 2 juin 2005, aff.

174/04, Commission c/ Italie ; CJCE 4 juin 2002, aff. 483/99, Commission c/ France ; CJCE 4 juin 2002, aff. 503/99, Commission c/ Belgique ; CJCE 14 mars 2000, aff.

54/99, Église de Scientologie.

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proportionnelles : elles ne doivent pas aller au-delà de ce qui

est requis pour que l’objectif qu’elles poursuivent puisse être atteint ;

prises en dernier ressort : cet objectif ne doit pas pouvoir être

atteint par des mesures moins restrictives ;

précises : les intéressés doivent être en mesure de connaître les

circonstances spécifiques dans lesquelles la restriction s’appli-que, conformément au principe de sécurité juridique ; il a ainsi été jugé qu’un régime qui soumet à autorisation préalable les investissements directs étrangers de nature à mettre en cause l'ordre public et la sécurité publique, sans autre précision, ne répond pas à ce critère ;

susceptibles de recours.

Il existe au sein de l’UE vingt-sept législations nationales visant à contrôler les investissements étrangers, toutes différentes — que ce soit au niveau des intérêts à protéger, des opérations soumises à contrôle ou des procédures applicables — et plus ou moins dis-cutables sur le plan de la conformité au droit européen.

12.2.3. Vers une extension ?

Pour éviter les disparités des réglementations nationales et amé-liorer la sécurité juridique, certains recommandent l’adoption par l’UE d’une définition des secteurs stratégiques qui devraient être préservés. Toutefois, l’appréciation du caractère stratégique d’une activité diverge grandement selon les États et l’obtention d’un accord à vingt-sept sur une notion commune semble difficile. L’on peut également s’interroger sur la compatibilité d'une telle défini-tion avec les règles de l’OCDE de toute extension des excepdéfini-tions au principe de liberté.

D’autres vont pourtant plus loin et préconisent la mise en place d’un mécanisme communautaire spécifique, se substituant aux dispositifs similaires en vigueur dans chacun des États membres, par lequel l’UE serait en mesure d’interdire ou de soumettre à

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conditions tout projet de prise de participation dans une entre-prise d’un État membre, émanant d’un investisseur sous contrôle extracommunautaire et mettant en cause la sécurité ou un autre intérêt stratégique national ou européen8.

L’Assemblée nationale française s’est prononcée le 30 juillet 2008 pour que « l’Union prenne elle-même la responsabilité de définir un cadre lui permettant, ou permettant aux États membres, de réagir face à des investissements qui toucheraient des entreprises ou des secteurs stratégiques ou particulièrement sensibles, venant ainsi compléter des réglementations nationales dont la compatibilité avec les règles européennes de concurrence reste incertaine ».

À ce stade, l’Union a exclu une intervention réglementaire européenne et privilégie l’utilisation des instruments existants au niveau des États membres, sous le contrôle de la CJCE.

13. Mesures nationales de protection

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