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Objectifs

Dans le document LES FONDS SOUVERAINS02 (Page 36-42)

Tous les fonds souverains ont un but commun : transférer de la richesse vers le futur. Leurs objectifs plus précis sont variés :

stabilisation des revenus (3.1) ;

constitution d’une épargne au profit des générations futures

(3.2) ;

financement des retraites (3.3) ;

optimisation du rendement (3.4) ;

diversification de l’économie (3.5).

Souvent, ces objectifs coexistent, se combinent ou changent avec le temps. Ainsi, un fonds initialement constitué à des fins de stabilisation peut évoluer en fonds d’épargne ou en fonds de retraite.

© Groupe Eyrolles – © Les Echos Editions

3.1

. Stabilisation des revenus

Les fonds de stabilisation (stabilization funds) ont pour objectif de lutter contre la volatilité des prix des matières premières et, partant, de stabiliser les revenus provenant de leur exportation.

En effet, le marché des produits de base, notamment du pétrole, est soumis à des fluctuations brutales et importantes des cours.

Les États dont l’économie dépend de l’exportation de ces produits subissent de plein fouet ces variations. Leur budget peut se trou-ver déséquilibré entre des dépenses fixées sur plusieurs années et des revenus fortement irréguliers.

Les fonds de stabilisation permettent de protéger l’économie et les finances de ces États contre une telle volatilité. Ils sont chargés de substituer un revenu stable et récurrent aux recet-tes f luctuanrecet-tes et cycliques issues des ressources naturelles. Ils font fructifier ces recettes en période de cours élevé en les pla-çant dans des instruments déconnectés du marché des matières premières. Grâce aux revenus produits par ces instruments, ils ont la faculté d’absorber les chutes de cours et de couvrir en période de baisse les besoins en financement de leur gouver-nement.

Tel est le premier objectif des fonds de rente minière, tels que KIA au Koweït, le Reserve Fund de Russie, le Fonds de Régulation des Recettes d’Algérie, le Libyan Investment Authority, le State General Stabilization Fund du sultanat d’Oman, le Oil Income Stabilization Fund du Mexique et l’Economic and Social Stabilization Fund du Chili (contre la volatilité des cours du cuivre).

Le financement des fonds de stabilisation provient généralement d’excédents de revenus par rapport à un prix de référence de matière première. Par exemple, le fonds du Koweït reçoit une partie prédé-terminée des revenus du pétrole ; celui du Chili est alimenté par les revenus du cuivre dépassant une valeur de référence déterminée chaque année par les autorités.

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L’objectif de stabilisation peut aussi trouver à s’appliquer aux pays asiatiques trop dépendants du commerce extérieur. Les fonds de stabilisation leur permettent de se protéger contre une chute des exportations ou un changement dans les conditions de change. Il s’agit là aussi de lisser les recettes budgétaires et fiscales du pays concerné en les isolant des cycles de l’économie. C’est l’un des objets du fonds GIC de Singapour (voir 20.2).

3.2

. Épargne intergénérationnelle

Les fonds d’épargne (saving funds) ont pour objectif de péren-niser les revenus issus de ressources naturelles non renouvelables et, partant, de constituer une épargne au profit des générations futures. En effet, les matières premières et, en conséquence, les ressources y afférentes sont tarissables. Les États dont l’économie dépend de ces matières premières sont confrontés, dans un souci d’équité, à la nécessité de pourvoir aux besoins des générations futures lorsque la ressource qui fait la richesse présente de l’État sera épuisée.

Les fonds d’épargne, également appelés fonds intergénération-nels, permettent de répartir les revenus des ressources naturelles de manière équitable à travers les générations. Ils convertissent des actifs non renouvelables en actifs financiers pérennes. Ils agissent comme un mécanisme d’épargne forcée et font fructifier la richesse d’aujourd’hui pour constituer le patrimoine de demain.

Tel est l’autre objectif des fonds de rente minière, tels que ADIA à Abu Dhabi (voir 18.1), les fonds du Koweït, du Qatar, de Libye ou de Norvège. Les fonds de stabilisation ayant fortement augmenté ces dernières années, il est probable qu’une part croissante des excé-dents de liquidités du secteur public ira désormais alimenter les fonds intergénérationnels.

Ces fonds permettent également de lutter contre les effets per-vers d’une trop grande exploitation des ressources naturelles,

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connue sous le nom de « maladie hollandaise »7. Le placement des rentes minières d’un pays dans un fonds souverain empêche qu’elles ne soient dépensées, ce qui permet au reste de l’économie de ne pas souffrir de la hausse des prix et des taux de change qui en résulteraient.

3.3

. Financement des retraites

Certains fonds souverains ont pour objectif de financer des engagements de retraite implicites. Ils sont constitués pour faire face aux déficits futurs des systèmes de retraite par répartition, liés au vieillissement de la population, d’ici 2030. Il s’agit de lis-ser l’effet d’un choc démographique à venir en provisionnant une partie des besoins de financement futurs y relatifs.

Le fonds accumule et place des réserves financières tant que le contexte démographique demeure favorable, puis les utilise pour contribuer au financement des retraites lorsque les besoins s’ac-centuent sous l’effet du vieillissement. Cela permet de compléter les autres moyens visant à assurer l’équilibre financier des sys-tèmes de retraite par répartition — durée de cotisation, taux de cotisation et taux de remplacement — et de mieux répartir dans le temps et entre les générations les efforts financiers nécessaires pour assurer la pérennité des régimes.

7 Selon ce phénomène économique, ainsi dénommé car il trouve son origine aux Pays-Bas dans les années 1960, la richesse d’un secteur exportateur peut conduire à un appauvrissement d’autres secteurs de l’économie. En particulier, la hausse des exportations d’une ressource naturelle, et donc des recettes y afférentes, entraîne, d’une part, une augmentation de la consommation locale résultant elle-même en une hausse des prix et, d’autre part, un afflux de devises générant une appréciation de la monnaie locale. La hausse des prix et des taux de change a pour conséquence une augmentation des prix de revient comme des prix de vente à l’exportation des produits en provenance des autres secteurs exportateurs de l’économie et nuit à la compétitivité de leurs exportations.

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Tel est l’objet par exemple du National Wealth Fund russe, du Future Fund australien, du Superannuation Fund néo-zélandais, du National Pensions Reserve Fund irlandais, du Pension Reserves Fund chilien (différent du Stabilization Fund précédemment cité) et du Fonds de Réserve pour les Retraites (FRR) français (voir page 216).

Contrairement aux fonds de pension (voir 7.2), les fonds sou-verains n’ont pas d’engagements de retraite explicites et ne sont pas financés par des cotisations des employés ou des entrepri-ses. Leurs règles de financement sont destinées à leur permettre de couvrir les besoins futurs, tels qu’estimés. Sauf circonstances exceptionnelles, les retraits sont interdits et requièrent l’autorisa-tion des plus hautes autorités de l’État.

3.4

. Optimisation du rendement

Certains fonds souverains ont pour objectif d’optimiser le ren-dement des réserves de change. Tel est le cas des sociétés de pla-cement de réserves (reserves investment corporations) qui, selon la définition du FMI, « sont créées pour accroître la performance des avoirs de réserves ».

Une partie des réserves de change est nécessaire à la politique monétaire et à la gestion des taux de change : ce sont les réserves officielles détenues par les banques centrales. Elles sont gérées très prudemment et à court terme, dans un double objectif de sécurité et de liquidité (voir 7.1). Elles doivent en principe couvrir au moins trois mois d’importations ou le montant des engage-ments extérieurs à court terme du pays.

Pour le solde, ces réserves peuvent être gérées de façon plus optimale que dans le cadre classique appliqué aux réserves officielles. À cette fin, elles sont placées dans un fonds sou-verain pour être investies en actifs plus risqués et diversifiés, ce qui en augmente le rendement. C’est l’objet par exemple des

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fonds CIC de Chine (voir 21.1), GIC de Singapour (voir 20.2) ou KIC de Corée.

3.5

. Diversifi cation de l’économie

D’autres fonds souverains ont pour objectif de prendre des par-ticipations stratégiques. Tel est l’objet des fonds de développement (development funds) qui, selon le FMI, servent « à financer des projets socio-économiques ou à promouvoir des politiques indus-trielles propres à stimuler la croissance de la production poten-tielle d’un pays ». Ils peuvent revêtir la forme de holdings de par-ticipations de leur État d’origine et agir comme le bras armé de celui-ci.

Ces fonds peuvent financer des infrastructures, nouer des par-tenariats industriels ou investir dans des secteurs stratégiques pour le développement de leur pays. C’est le cas par exemple des fonds Temasek de Singapour (voir 20.1), Khazanah de Malaisie, Public Investment Fund d’Arabie Saoudite, Mubadala d’Abu Dhabi (voir 18.2), ICD de Dubaï ou QIA du Qatar.

QIA a ainsi créé des joint-ventures avec Total pour la gestion du gazoduc Qatar Emirats, avec Suez Environnement pour équi-per les nouvelles villes de l’émirat en services de distribution d’eau et d’énergie, ainsi qu’en services de traitement de déchets, et avec GDF Suez pour fournir des services aux collectivités locales qataries. Citons également Gulf Investment Corporation, fonds souverain créé par six États du Golfe Persique, qui a conclu avec GDF Suez en août 2008 un accord pour le déve-loppement d’un projet d’énergie hydraulique au Bahreïn pour environ USD 2 milliards.

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