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Partie 2 - Revue de littérature

3 La note : ou la nécessité de reformuler le débat qu’elle suscite

3.4 Une urgence supplémentaire : re-considérer la note en référence aux apprentissages

être construite en référence aux apprentissages participerait notamment à abolir la perspective normative en évaluation sommative, à proposer d’autres outils, à remettre au centre du raisonnement évaluatif les objets de savoir et une acuité portée sur les progrès des élèves, au travers de démarches de formation visant la modification des postures et des pratiques d’évaluation sommative. Sacré défi ! En effet, comme le précisent Mottier Lopez et Laveault (2008), « le fait même de situer l’élève par rapport à ses apprentissages plutôt que par rapport à ses pairs constitue une révolution copernicienne caractérisée par une évaluation critériée plutôt que normative » (p. 8). Cette littérature va donc dans le sens d’une de nos questions : à quelles conditions cette révolution des pratiques de notation est-elle possible ?

On le voit, les éléments cités jusque-là sont fondamentaux dans la tentative de mieux décrire et comprendre les pratiques de notation, situées idéologiquement et historiquement. En suivant Mottier Lopez et Figari (2012), nous faisons l’hypothèse qu’ils appellent à penser une cohérence de l’évaluation sommative à l’aune de modèles théoriques, afin de sortir de pratiques souvent trop intuitives. Nous avons choisi dans notre recherche le modèle de l’alignement curriculaire : son mode de structuration, son rapport étroit avec les pratiques réelles ainsi que l’abondante littérature dont il est l’objet nous ont encouragé à le considérer comme un modèle pouvant être au service de la compréhension de la pratique évaluative sommative et de la notation.

4 Un modèle27 pour appréhender la cohérence de l’évaluation sommative : l’alignement curriculaire

La question de la cohérence de la pratique évaluative a mobilisé bon nombre de chercheurs (e.

g., Bateman et al., 2009 ; Biggs, 2003 ; Harlen, 2005, 2012 ; Royce Sadler, 2009) qui ont chacun à leur manière montré le rapport étroit qui existe entre les processus d’enseignement, d’apprentissage et d’évaluation. Mottier Lopez et Laveault (2008) expriment cet intérêt de la manière suivante : « Cette recherche de cohérence et d’articulation des trois domaines est tout à fait caractéristique des évolutions les plus récentes de l’évaluation en éducation » (p. 9). On voit donc ici que cette question offre des perspectives de recherche et de formation larges.

La littérature qui traite spécifiquement du modèle d’alignement curriculaire repose sur le même postulat. Elle est issue d’un champ de la recherche bien circonscrit : celui des curricula. Ce modèle soutient donc l’idée que toute pratique d’évaluation est en forte cohérence avec les objectifs prescrits, l’enseignement dispensé, les tâches d’apprentissage proposées aux élèves et les activités effectivement réalisées par ces derniers (e. g., Anderson, 2002 ; Biggs, 1999, 2003 ; Gauthier, Mellouki, Bissonnette & Richard, 2005 ; Martone & Sireci, 2009). L’enjeu pour l’évaluation est ici de porter sur les apprentissages prévus et effectifs. Dans ce sens, le modèle implique de considérer l’élaboration d’épreuves évaluatives sommatives comme un processus complexe, dynamique, spécifique et centré sur les apprentissages. À ce titre, la littérature consultée dans ce champ est univoque à deux niveaux. Tout d’abord, la notion d’alignement renvoie à une conceptualisation de la cohérence entre les différentes dimensions du modèle élaborée à l’aune d’une taxonomie d’habiletés cognitives appariées à des contenus. Ensuite, la dimension curriculaire renvoie au fait que cette cohérence se doit d’être ancrée dans un curriculum.

4.1 L’alignement curriculaire : un réseau conceptuel

En 2005, Gauthier et ses collègues publient un état de la recherche sur les écoles efficaces et la réussite scolaire des élèves à risque en Amérique du Nord. En s’appuyant sur l’analyse de nombreux travaux, ils montrent que « l’alignement curriculaire apparaît grandement susceptible d’améliorer la qualité de l’enseignement et l’efficacité des écoles » (p. 28)28. Certes,

27 Nous insistons sur la distinction entre modèle et modélisation dans notre cadre conceptuel (Partie 3).

28 A l’aide du moteur de recherche ERIC, ils relèvent que de 1966 à 2005, 245 recherches ont été publiées sur ce thème, mais qu’aucune méta-analyse n’a toutefois été réalisée.

sa mise en œuvre ne garantit pas à elle seule et de facto de meilleurs apprentissages. Mais il demeure que c’est un des facteurs de la réussite, l’une des clés de voûte du succès de toute réforme en éducation (Brophy, 2000).

Dans la littérature, l’alignement curriculaire est problématisé au regard de son mode de structuration. Deux niveaux principaux peuvent être différenciés. Le premier investigue la cohérence qui existe entre les pratiques d’enseignement, les évaluations internes à la classe et les « standards » externes (e. g., Porter, 2002 ; Squires, 2009). Les travaux produits montrent notamment le peu de validité qu’ont les évaluations externes si elles ne sont pas en cohérence avec les processus d’enseignement et d’apprentissage et les pratiques évaluatives réelles des enseignants.

Le second mode de structuration de l’alignement curriculaire analyse à quelles conditions l’évaluation interne, d’un point de vue général, peut être en cohérence avec les processus d’enseignement et d’apprentissage et le curriculum. C’est ce second mode de structuration qui nous intéresse, notre problématique de recherche étant centrée sur les pratiques effectives d’évaluation sommative d’enseignants en exercice. Dès lors, puisque la littérature relative au modèle met en lien les objectifs prescrits et les tâches évaluatives avec les démarches d’évaluation, nous nous orienterons vers une série de recherches qui traitent de curriculum, de référentiel, d’objectifs, d’objets, de tâches. Une attention particulière sera accordée à la notion de cohérence d’alignement curriculaire, centrale, qui mérite selon nous une attention particulière. Puis, nous aborderons la littérature sur la pondération et la notation pour concrétiser ce qui se joue lorsque l’on parle d’évaluation sommative au sein du modèle, en documentant, au travers de recherches significatives, à quelles conditions ces éléments entretiennent des liens de cohérence en référence au modèle de départ. Ce travail nous amènera à concevoir une acception « élargie » du modèle.

4.2 Un modèle linéaire

Un des principaux chercheurs à avoir développé le modèle de l’alignement curriculaire au cœur des pratiques enseignantes est Biggs29 (1999, 2003, 2010). Conjuguant une approche des apprentissages qu’il nomme cognitiviste avec le principe que ces derniers doivent se référer à des objectifs prescrits, il modélise le rapport de cohérence qui existe entre les processus

29 Ses travaux portent sur l’enseignement supérieur, mais leurs apports sont transposables à la scolarité obligatoire, comme l’ont montré une partie des recherches citées dans cette partie.

d’enseignement et d’apprentissage, idéalement référencés à un curriculum, et les pratiques évaluatives sommatives. Selon lui, « the teaching methods used and the assessment tasks, are aligned to the learning activities assumed in the intended outcomes » (2003, p. 13). Dès lors, l’alignement curriculaire est un système dont les composantes (objectifs du curriculum, tâches d’apprentissage et démarches d’évaluation sommative) interagissent étroitement.

Dans une logique pragmatique, il définit les quatre étapes qui permettent cet alignement : - La définition des objectifs visés ;

- Le choix et la conception des tâches d’apprentissage pour les travailler au cœur des processus d’enseignement ;

- La phase d’évaluation, à prévoir en relation avec les deux points précédents ;

- La production de la note, elle-même en congruence avec les apprentissages visés et réalisés.

Les éléments principaux et essentiels de l’alignement curriculaire que nous allons considérer dans le cadre de notre recherche, bien qu’à certains égards insuffisamment théorisés par l’auteur selon nous, sont présents. Nous retrouvons également ici deux étapes clés de toute démarche évaluative sommative : les pratiques d’évaluation et les pratiques de notation. Nous observons sur ce point que Biggs, comme par exemple Anderson (2002), les met en étroite interdépendance, tout en les distinguant et en passant rapidement sur leurs caractéristiques propres. Nous y reviendrons plus loin, et très spécifiquement dans notre cadre conceptuel, puis dans nos chapitres de résultats. Enfin, nous observons que cette linéarité n’est que peu remise en question et qu’elle s’appuie sur la notion de cohérence.

4.3 Une taxonomie pour lire la cohérence d’alignement curriculaire

Dans la littérature sur l’alignement curriculaire, les pratiques évaluatives et les objectifs du curriculum entretiennent des rapports de cohérence conçus d’un point de vue d’habiletés cognitives et de contenu. Par exemple, enseigner l’analyse de texte demande des pratiques quotidiennes en classe sur cet objectif et cet objet de savoir, et il doit en aller de même pour les démarches d’évaluation. C’est la raison pour laquelle les chercheurs consultés parlent d’une cohérence d’alignement curriculaire construite à l’aide d’une taxonomie (e. g., Anderson, 2002 ; Biggs, 2003).

Plusieurs formes de taxonomies existent dans les études scientifiques, exploitées comme des

outils compréhensifs. Mais c’est au niveau des taxonomies cognitives que la recherche a été la plus productive, avec diverses tentatives de hiérarchiser la complexité des habiletés cognitives en jeu dans tout processus d’apprentissage (e. g., Biggs, 2003 ; Marzano, 2001). Nous n’avons toutefois pas relevé de consensus sur une taxonomie dans les travaux consultés. En effet, selon leur ancrage épistémologique et leurs méthodologies, les chercheurs opèrent des choix différents pour caractériser spécifiquement l’apprentissage, ce qui prouve que la détermination d’une taxonomie traduit un rapport particulier aux conceptions que l’on a de ce dernier (Pellegrino, 2006), voire à la discipline concernée30. La littérature que nous retenons ici est celle qui a problématisé cette cohérence curriculaire à l’aide de la taxonomie d’Anderson et Krathwohl (2001)31, et ceci, pour trois raisons.

La première raison qui justifie notre choix de retenir cette taxonomie vient du fait que ces chercheurs l’ont construite sur la base de celle de Bloom (1969, 1971), qui a longtemps fait référence, mais qu’ils ont actualisée au regard de l’avancée des recherches sur la cognition.

Bloom, dans une perspective alors béhavioriste, avait théorisé l’activité mentale en six paliers, successifs et montant en complexité, afin de fournir un outil théorique pour appréhender au mieux l’apprentissage (connaître, comprendre, analyser, synthétiser et évaluer). Cet outil, visant à étayer les pratiques réelles, a depuis montré ses limites, puisque nous savons aujourd’hui que l’on n’apprend pas par paliers ou par couches (on peut être capable de comprendre un phénomène tout en ne connaissant pas par cœur toutes ses dimensions), mais de manière systémique.

La deuxième raison est que d’autres chercheurs se sont appuyés sur cette taxonomie pour produire des résultats intéressants en partant de l’étude des pratiques d’enseignement-apprentissage et d’évaluation sommative. Par exemple, au niveau du CEGEP au Québec, Bateman et ses collègues (2009) ont mis en évidence, à objectifs communs, les forts écarts qui existent dans les pratiques d’enseignement en salle de classe, et surtout, dans les pratiques évaluatives sommatives.

Enfin, la perspective cognitiviste de cette taxonomie nous semble pertinente pour caractériser la cohérence curriculaire dans les pratiques évaluatives sommatives. Dans cette perspective, l’apprentissage y est conçu comme la capacité à maîtriser des objectifs formulés en termes

30 Nous pensons notamment à la taxonomie élaborée par Bodin (2010) pour les mathématiques, inspirée également de celle d’Anderson et Krathwohl (2001).

31 La taxonomie est disponible au point 1.2.8 de la partie 6 des annexes.

d’habiletés cognitives appariées à des contenus. Les auteurs qui suivent cette perspective accordent donc de l’importance, du point de vue de la cohérence, à deux éléments clés : la complexité de l’habileté cognitive en jeu, et conjointement, les caractéristiques de l’objet disciplinaire (Hammerness, 2006). L’objectif d’apprentissage n’est donc pas ici décrit par son niveau de complexité uniquement. Il n’aboutit pas non plus à un raisonnement linéaire qui l’enfermerait dans une méthode d’enseignement et d’apprentissage donnée. Il peut dès lors être défini comme une capacité comprenant une dimension générale et spécifique. La première dimension renvoie à l’activité mentale de l’élève (se souvenir, analyser, différencier, etc.), ou aux habiletés cognitives de la taxonomie. La seconde se rapporte au contenu sur lequel porte l’apprentissage en question : la relative en français, les isométries en mathématiques, etc. Ce contenu fait référence aux caractéristiques des objets spécifiquement disciplinaires (Marton &

Tsui, 2004). Il est d’ailleurs intéressant ici de constater que Cardinet, en 1984 déjà, mettait l’objet de savoir au centre des réflexions. Il posait clairement, en précurseur, cette « cohérence nécessaire entre objectifs, enseignement, évaluation et remédiation » (p. 42).

Cette problématique de la cohérence n’est donc pas nouvelle. La centration toutefois sur l’idée d’une cohérence curriculaire, en termes d’alignement, qui insiste spécialement sur les relations qui doivent exister entre toutes les composantes du modèle, du curriculum à la notation, est pour nous novatrice. En effet, elle responsabilise l’enseignant qui devient expert des contenus à enseigner (Klenowski & Wyatt Smith, 2014), afin qu’il puisse avoir conscience de la complexité des apprentissages visés pour les décrire. En d’autres termes, cela signifie que le choix de la taxonomie reflète la complexité des contenus qui vont être évalués (Gagné, Dumont, Brunet & Boucher, 2013). Sur ce point, les auteurs consultés sont d’accord : cette démarche est d’une grande ampleur, et un enseignant tout seul aurait du mal à la réaliser (Li, Klahr & Siler, 2006). D’où la nécessité d’un travail de concertation pour déterminer les critères d’alignement curriculaire d’un point de vue d’évaluation sommative en référence à une taxonomie (Webb, 2007).

4.4 Une cohérence « top down » et « bottom-up »

La cohérence de l’alignement curriculaire, telle que partagée dans la littérature, peut se penser à partir de chaque composante du modèle (enseignement, apprentissage ou évaluation). La plupart des auteurs ayant travaillé sur la question (e. g., Walvoord & Johnson Anderson, 2009) la thématisent dans sa perspective « top-down» (p. 18), c’est-à-dire du curriculum jusqu’aux tâches d’évaluation. Là, il s’agit pour l’enseignant d’affiner les objectifs, de les décliner en

unités d’apprentissages significatives afin de les concrétiser dans des tâches. Mais ce travail de mise en lien peut également se réaliser dans un mouvement ascendant, dans une perspective

« bottom-up ». Par exemple, l’enseignant analyse des tâches évaluatives au regard de leur cohérence avec les objectifs du curriculum. Dans les deux perspectives, l’idée est de mettre au centre de la réflexion une inscription de la cohérence dans des contenus et des apprentissages référencés, jusqu’à la pondération et la notation. Mais que signifie une perspective « bottom-up » ou « top-down » considérée depuis la formulation de critères, ou à partir de l’élaboration d’échelles de notation ? Et dans quelle mesure ces perspectives sont-elles toujours pertinentes pour penser cette question de cohérence des pratiques évaluatives ?

5 Une acception de l’alignement curriculaire nécessairement élargie

Cette acception élargie renvoie à un enjeu théorique : mettre en évidence les différentes dimensions « cachées » de l’évaluation sommative, à savoir la pondération et la notation. En effet, dans toutes les sources consultées, rares sont celles qui problématisent ces deux phases du processus évaluatif. Pourtant, elles sont cruciales à nos yeux, et présentes dans l’immense majorité des contextes scolaires.

Au sein même des travaux sur l’alignement curriculaire également, peu nombreuses sont les recherches qui ont théorisé ces questions de pondération et de notation. Si certains auteurs (e.

g., Royce Sadler, 2009) sont allés jusqu’à modéliser des manières très précises de formuler des critères et de construire des échelles alignées d’un point de vue curriculaire, nous avons été surpris de constater que leur conceptualisation au sein même du modèle est souvent peu approfondie selon nous, et surtout, peu contextualisée. Par exemple, peut-on penser la cohérence curriculaire de la même manière dans un système où il existe potentiellement onze notes32 et dans un autre où il n’y en a que quatre, dont une seule signifiant l’échec, comme en Finlande ou en Suède ? Dès lors, il nous semble fondamental d’étendre le modèle de l’alignement curriculaire au travers d’un développement conceptuel que sont ses deux dernières composantes. Nous le schématiserons ainsi :

1 2 3

Objectifs du curriculum

Tâches évaluatives

Pondération Notation

32 Comme c’est le cas dans le canton de Vaud.

Figure 1 : Modélisation de l’alignement curriculaire élargi

Nous observons alors ici le rapport de cohérence réciproque que chaque composante entretient avec ses voisines, dans une perspective dialectique, d’où les flèches doubles. Cela étant, précisons l’importance d’inscrire cette modélisation dans les processus d’enseignement et d’apprentissage. Comme nous l’avons dit déjà, rendre compte d’un processus d’alignement en en faisant fi serait incohérent. De ce fait, et en nous référant aux pratiques réelles, nous devrons considérer que parfois les composantes n’entretiennent pas, directement, un rapport « en cascade »33. Par exemple, de nombreuses sources sur les critères (e. g., Andrade, 2005 ; Meier, Rich & Cady, 2006 ; Reddy & Andrade, 2010 ; Royce Sadler, 2005) montrent que la pondération est un acte intimement lié à une forme de caractérisation des objectifs, sans forcément passer directement par l’élaboration des tâches évaluatives. En effet, il n’est pas rare de voir des enseignants, tous cycles confondus, formuler des critères d’évaluation en se référant essentiellement aux objectifs qu’ils disent évaluer, sans prendre forcément en considération les consignes de travail.

Dans le cadre conceptuel, nous présenterons donc une nouvelle acception de l’alignement curriculaire cette fois-ci élargie, dans une perspective systémique, étant donné que c’est à l’aune des apprentissages menés en classe au quotidien que l’évaluation sommative devrait idéalement être organisée. Dans ce sens, nous questionnerons la conception étapiste que Biggs et ses collègues ont de l’alignement curriculaire, qui renvoie davantage à des actions structurées en termes de phases qu’à des processus de mise en lien permanents des différentes composantes du modèle. Pour cela, nous commencerons par documenter le rôle du curriculum dans le modèle de l’alignement curriculaire.

5.1 Les conditions pour un curriculum à des fins d’alignement curriculaire

La littérature consultée pose un certain nombre de conditions pour qu’un curriculum soit utilisable à des fins d’alignement. Constat intéressant : elles font toutes référence à la nécessité d’expliciter et de rendre visibles les contenus et les niveaux d’exigence des apprentissages, d’un point de vue de complexité et de contenus (e. g., Anderson, 2002 ; Biggs, 2003 ; Biggs & Tang, 2007, 2011 ; Squires, 2009). Le curriculum devrait par ailleurs aider les enseignants à connaître les niveaux des élèves relativement à l’enseignement dispensé et à l’évaluation mise en œuvre.

33 Ce qui aboutira, en fin de recherche, à une nouvelle perspective systémique du modèle présentée dans notre conclusion (Partie 9).

Ces éléments nous obligent donc à considérer qu’aucun curriculum, de facto, n’offre la possibilité de penser cet alignement curriculaire. Dans ce sens, la littérature montre qu’avant de penser à un alignement potentiel, il s’agit de définir ce qu’est, précisément, un curriculum, et en quoi il va permettre, ou non, un raisonnement aligné curriculairement.

Les sources consultées s’accordent à dire que l’enjeu majeur, dans une perspective d’alignement, est de construire une cohérence curriculaire entre le contenu du curriculum, l’enseignement et les tâches évaluatives (Hermann, Webb & Zuniga, 2007). Comme le précise Muller (2006), il s’agit pour l’enseignant de « se préoccuper, en premier lieu, de la dynamique des relations entre les “entités“ composant un curriculum » (p. 107). C’est sans doute un premier pas. Dans notre contexte romand par exemple, il s’agit d’analyser dans quelle mesure le Plan d’Études Romand (PER) est un curriculum, et corollairement, à quelles conditions il peut jouer le rôle de référentiel d’évaluation pour les enseignants. L’enjeu est donc de taille.

Ceci d’autant plus que Mottier Lopez, Tessaro, Dechamboux et Morales Villabona (2012) ont montré que l’usage du PER par les enseignants « est indirect pour définir les contenus et les objectifs de leurs évaluations certificatives internes, ce qui représente un décalage avec les recommandations institutionnelles qui incitent les enseignants à utiliser le plan d’études comme référence première » (p. 8).

Certains travaux, comme ceux de Carulla, Corti, de Pietro, Kassam, Roth, Sanchez Abchi et Singh (2013), ont tenté de problématiser cette tension. Ils mettent notamment en évidence l’importance de différencier référentiel et curriculum. Leurs caractéristiques sont-elles communes ? Quels éléments les différencient ? Et quel impact cela a-t-il sur les pratiques évaluatives des enseignants, en référence à ces repères ? De leur côté, Cros et Raisky (2010) présentent le référentiel comme « un outil de médiation normatif permettant aux activités humaines de s’y référer pour étudier un écart ou des différences » (p. 107). Son rôle serait alors

Certains travaux, comme ceux de Carulla, Corti, de Pietro, Kassam, Roth, Sanchez Abchi et Singh (2013), ont tenté de problématiser cette tension. Ils mettent notamment en évidence l’importance de différencier référentiel et curriculum. Leurs caractéristiques sont-elles communes ? Quels éléments les différencient ? Et quel impact cela a-t-il sur les pratiques évaluatives des enseignants, en référence à ces repères ? De leur côté, Cros et Raisky (2010) présentent le référentiel comme « un outil de médiation normatif permettant aux activités humaines de s’y référer pour étudier un écart ou des différences » (p. 107). Son rôle serait alors