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Partie 7 - Premier chapitre de résultats : six portraits d’enseignants

2 Portrait 1 : Fernand, enseignant de mathématiques

2.1 Les dimensions des pratiques évaluatives de Fernand sur lesquelles il porte son

l’alignement curriculaire élargi.

Avant la formation

2.1.1 Les dimensions de la pratique évaluative sur lesquelles Fernand porte son attention avant la formation

Fernand explique, au cours de son entretien et dans son écrit, que son problème réside essentiellement dans la pondération : « Dans une évaluation, quel poids donner, je veux dire, sur chaque partie, sur chaque objectif, ou sur chaque… que j’évalue. Pour moi, c’est le plus difficile ». Pourtant, il est au clair sur sa manière de concevoir ses évaluations, sur les éléments qu’il juge importants, à savoir :

- Les contenus mathématiques, qu’il appelle « des gestes ou outils mathématiques » ; - Le lien étroit existant entre son enseignement et l’évaluation : « j’ai déjà une idée du

test au début du thème, en tout cas, de là où j’aimerais aller » ;

- Le contenu et la progression des élèves : « ça veut dire que pour chaque thème, j’ai décortiqué tout ce que l’élève, tous les gestes que l’élève doit savoir faire ». Il évalue en test significatif essentiellement des contenus complexes, même si « y a toujours quand même une partie technique dans le TS, mais elle est vraiment résiduelle ».

Quatre éléments caractérisent la manière avec laquelle Fernand élabore les évaluations sommatives. Nous les reprenons et les mettons en relation avec le discours de Fernand :

127 Fernand a réalisé seul les deux épreuves, travaillant dans un autre établissement que ses trois collègues de discipline.

- Les exercices sont en rapport avec l’enseignement dispensé. Ils ne permettent pas aux élèves de « répondre au hasard ». Ils « sollicitent leur intelligence et les outils qu’ils ont acquis ». Lorsqu’il explicite sa pratique de design128 des tâches, il précise :

« Déterminer à l'aide des moyens d'enseignement un lot d'exercices types qui pourraient figurer dans le test. Ceci afin de les faire travailler, en trier les enseignements et aider les élèves à identifier les outils mathématiques nécessaires à leur résolution ».

- Les objectifs « font référence au PER » et sont posés sur l’évaluation, traduits, par souci de transparence. C’est un travail important à ses yeux, car il met en évidence les éléments clés qui seront évalués. Toutefois, le PER est aussi une contrainte. Là, il critique l’organisation des contenus : « ces découpages en degrés, en années, etc., ils vont pas toujours dans le sens de ce que j’ai appris en maths et de ce que comme on peut utiliser les ressources des élèves et le temps, c’est surtout ça ». Malgré ces limites, dans son premier texte, il explique qu’il « entre » par le Plan d’études pour déterminer ce qu’il y a à évaluer lorsqu’il élabore une épreuve : « Comme je sais qu'il peut y avoir des différences dans les progressions d'apprentissages entre les VG et les VP je commence par un passage par le PER. Ce passage me permet de modifier et de compléter ce que j'ai imaginé faire travailler aux élèves ». Suit une réflexion sur l’importance des contenus mathématiques dans le parcours des élèves : « Je sais par expérience que les propriétés des figures revêtent une importance particulière dans la suite du programme de VP ». Ce travail s’accompagne de l’identification et du choix des éléments de progression des apprentissagesévalués.

- La pondération est pensée au regard des apprentissages : « Identifier pour le test quelles compétences seront génératrices de points ». Par ailleurs il recherche à donner le même poids à chaque partie, même si le tout sera noté à l’aune d’un barème préexistant : « Il ne restera plus qu'à vérifier l'équilibre entre les différentes parties. Pour cela je n'ai pas de critères définis. Je me base sur mon feeling/expérience et mon intuition. L'échelle sera le barème fédéral (nbre de pts atteints / nbre de pts total x 5) +1 ».

- L’échelle est toujours présente en amont : « y a l’échelle complète, ça veut dire, de tant de points à tant de points ben ça fait 6, de tant de points à tant de points ça fait 5,5 ».

Cette pratique semble stable : « généralement je bouge pas l’échelle. […] Y a pas de raison qu’elle bouge », comme utiliser des seuils fixes, ou des échelles standardisées :

« j’utilise tout bêtement ibaremes, pis comme c’est justement une accumulation de

128 Nous parlons d’élaboration de tâches au niveau de nos catégories conceptualisantes.

points, ben je mets, j’utilise le barème fédéral [...], car il faut en utiliser un ». Toutefois, Fernand exprime que pour lui, le barème doit être en rapport avec l’évaluation, car en tant que tel, sa signification est limitée : « pour moi, ces barèmes ils n’ont pas beaucoup de sens […] j’entends des collègues qui me disent « ah ouais, non mais en VP, il faut que ce soit au moins 75%». Et pour moi, ça a pas de sens, parce que c’est lié au test ».

Il ne s’autorise pas à bouger les seuils pour les TS, pour lesquels « c’est toujours le barème fédéral ». La raison invoquée est le nombre de points : « Sur les TS, on est sur quelque chose comme quarante points, cinquante points, donc, je veux dire, l’échelle elle se répartit, les pourcentages ils sont plus harmonieux, je dirais, de façon naturelle, mathématique ». Cela dit, le nombre de notes imposées par le Département a une influence : « ce nombre de notes contraint ma liberté d’évaluateur ».

Nous observons qu’avant d’entrer en formation, Fernand semble au clair sur des éléments de sa pratique qu’il juge comme stables et d’autres qui le questionnent davantage. Nous voyons que ces derniers se situent principalement au niveau de la pondération, mais nous faisons ici l’hypothèse qu’ils concernent aussi la notation, puisque des tensions existent dans son rapport aux barèmes.

Pendant la formation

2.1.2 Les points de cohérence et de ruptures d’alignement observés par Fernand dans ses pratiques d’évaluation sommative lorsqu’il se réfère au modèle de l’alignement curriculaire élargi pendant la formation

Rappelons ici brièvement les trois temps de la réponse à cette sous-question :

- Présentation des données brutes en nous centrant sur les parties qui ont suscité un débat ou qui mettent en évidence des zones de tensions, de discussions, et en respectant l’ordre chronologique dans lequel elles ont été produites (ici : épreuve 1, épreuve 2, écrit 2).

- Présentation d’un tableau de synthèse de ces éléments que nous interpréterons en référence aux catégories conceptualisantes que nous avons définies.

- Commentaires de nos résultats.

2.1.2.1 Première évaluation créée pendant la formation

Cette évaluation porte sur les isométries et les propriétés des polygones. Elle se destine à des élèves de 9e VP (Voie Prégymnasiale) et n’a pas encore été mise en œuvre au moment où elle

est présentée et discutée. L’objectif du PER est mentionné au travers de ses composantes.

L’échelle est posée en amont avec des seuils pour chaque note.

Figure 7 : Fernand, épreuve 1, géométrie, page de garde

L’épreuve est constituée de quatre tâches. Les points figurent à côté de chacune d’entre elles.

La manière avec laquelle ces derniers sont attribués est précisée dans la table de spécification qui suit (Figures 6 et 7). Les éléments de discussion relevés par le formateur129 sur cette page

129 Rappelons que nous sommes le formateur. Pour une discussion critique sur son rôle dans cette recherche, le lecteur se dirigera vers la conclusion finale de ce manuscrit.

Mathématique Evaluation significative

Géométrie

MSN 31 - Poser et résoudre des problèmes pour modéliser le plan et l'espace ...

... en définissant des figures planes par certaines de leurs propriétés géométriques ; ... en utilisant des propriétés des figures et leur décomposition en figures élémentaires pour les construire et les reproduire ;

Pour les 3 premiers exercices il y a un point par exercice pour le respect de la consigne.

Pour chaque dessin il y a un point pour la précision et le soin apporté à sa réalisation Nom : ...

Prénom :...

Date : ...

Classe : ...

sont les suivants130 :

- Un questionnement sur la pertinence d’évaluer la deuxième composante de l’objectif (… en utilisant des propriétés des figures …) à hauteur de 3 points ;

- Une interrogation sur la convocation de composantes du PER plutôt que d’éléments de progression des apprentissages ;

- Le fait que, dans l’échelle, des critères soient appariés à des points, et que ce sont ces derniers qui servent à déterminer les seuils de chaque note.

Figure 8 : Fernand, épreuve 1, géométrie, tâche 1

Ici, le formateur questionne la distribution des 14 points.

130 Le bien-fondé de ces éléments est présenté dans la partie 6 relative à la méthodologie.

Figure 9 : Fernand, épreuve 1, géométrie, tâche 2

Figure 10 : Fernand, épreuve 1, géométrie, tâche 3

Figure 11 : Fernand, épreuve 1, géométrie, tâche 4

Sur l’ensemble de l’épreuve, le formateur interroge Fernand sur les caractéristiques des objets de savoir évalués, en lui demandant s’ils sont selon lui tous présents.

En complément, deux « tables de spécification » accompagnent l’évaluation de Fernand. La première met en rapport les tâches ou parties de tâches avec les objectifs évalués, ce qui permet notamment à Fernand de mettre en évidence le poids donné à chaque objectif.

Figure 12 : Fernand, épreuve 1, géométrie, table de spécification 1

La seconde tente de faire le rapport entre les points accordés aux composantes de l’objectif MSN31, jugées plus parlantes par Fernand, et la construction de la note. Nous observons ici que, dans un premier temps, il a gradué les nombres de points référés à chaque dimension de l’apprentissage en tenant compte de leur rapport avec les tâches puis, dans un second temps, il a exploité ce travail pour déterminer le seuil de chaque note en additionnant les points.

Figure 13 : Fernand, épreuve 1, géométrie, table de spécification 2

2.1.2.2 Seconde évaluation créée pendant la formation

Cette évaluation porte sur les aires et périmètres. Elle se destine à des élèves de 9e VP (Voie Prégymnasiale) et n’a pas encore été passée par les élèves au moment où elle est présentée en séminaire 3. Les objectifs sont mentionnés dans un langage traduit. L’épreuve est constituée de onze questions. Les points figurent à côté de chacune d’entre elles. L’échelle est fixée en amont et figure sur la première page.

Sur cette page, les éléments de discussion mis en évidence par le formateur sont les suivants : - Le rapport entre les objectifs annoncés et les éléments de progression des apprentissages

du PER semble peu clair ;

- Le fait que l’objectif 2 est pondéré à hauteur de 20 points, alors que les 1 et 3 ne valent respectivement que 5 points demande justification ;

- Le rapport entre les questions 1, 4a et 6a avec les objectifs évalués mérite d’être explicité ;

- L’apparition de demi-points dans l’échelle, alors qu’ils ne sont pas mentionnés dans les exercices, interroge ;

- Le fait que la réalisation de croquis et de dessins est dotée de points et que cela ne se rapporte à aucun objectif mentionné. Idem pour les phrases ;

- L’effet d’aplatissement de l’échelle, qui mériterait justification.

Figure 14 : Fernand, épreuve 2, géométrie, page de garde

Pour ne pas surcharger le texte, nous ne reproduisons ici que les questions 3, 8 et 9 ayant fait l’objet d’une mise en discussion par le formateur131, discussion menée en séminaire de formation sur la base du document écrit.

Figure 15 : Fernand, épreuve 2, géométrie, tâche 3

131 L’épreuve complète peut être consultée à l’annexe Partie 5, 9.1.2.

L’élément de discussion porte ici sur le rapport entre ce problème et les contenus évalués.

Figure 16 : Fernand, épreuve 2, géométrie, tâche 8

Ici, c’est l’attribution des 5 points qui est interrogée.

Figure 17 : Fernand, épreuve 2, géométrie, tâche 9

Là, le formateur questionne les questions « à tiroir » en prenant comme exemple celle-ci.

Puis, un document de type « table de spécification » montre dans quels exercices et avec quelle pondération les progressions d’apprentissage du PER sont évaluées. On peut également y observer une tentative de calcul de total de points par progression d’apprentissage du PER, et