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Questionnaire d’investigation de l’utilisation des technologies de l’information

1. Technologies de l’information dans le domaine de la santé

4.5 Intégration des éléments HF&E dans la méthode

4.5.1 Questionnaire d’investigation de l’utilisation des technologies de l’information

Puisque les individus sont le centre de l’ergonomie, c’est par la connaissance de ceux-ci que débute l’évaluation. Afin de connaître les utilisateurs et leurs représentations face aux technologies de l’information, puisque de ceci dépend une partie de l’adoption de la TICS (Agarwal et al. 2010), la méthode s’ouvre par un questionnaire de l’analyse de leurs habitudes d’utilisation des technologies, mais hors du contexte professionnel. Nous relatons ici ce qui a motivé ce choix et comment nous avons construit ce questionnaire (en annexe, dans le cahier d’évaluation ergonomique).

La démarche répond tout d’abord à un article de Ellaway (Ellaway 2008), qui s’adresse aux enseignants du domaine médical pour leur offrir les 5 compétences clés en informatique. Dans ce papier, elle reprend le terme des « immigrés numériques », explicitant ainsi la dissonance cognitive ressentie par ceux qui ne sont pas nés à l’ère du tout numérique.

La résistance à l’implémentation des TICS par des individus réfractaires est évidemment multifactorielle, entre inertie sociale, perceptions d’une perte de maîtrise, croyances, tout ceci participant d’un phénomène dont les causes sont encore mal définies (Samhan 2015), et probablement pétrie d’affects (Xu and Montague 2015). Il y a également le fait théorisé par certains que l’usage final ne sera réalisé que si une intention d’usage (l’acceptabilité) est obtenue, celle-ci étant composée de champs interreliés (Dillon and Morris 1996) : utilité, perception, utilisabilité, mais ces considérations sortent du cadre de ce travail.

Néanmoins, il nous a paru nécessaire d’explorer l’existence de cette dissonance cognitive au travers du questionnaire, car il est alors possible d’avoir une réponse immédiate et d’offrir un soutien si l’on est capable d’identifier les individus qui en souffrent.

C’est ce que fait en un sens Cunningham (Cunningham et al. 2007), lorsqu’elle rapporte l’utilisation d’un questionnaire pour investiguer les compétences

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informatiques et les besoins en formation d’employés du domaine de la santé. Le rapport final regroupe ainsi trois grandes classes de compétences :

“(1) the use of information per se for public health practice, (2) the use of information technology to increase individual effectiveness, and (3) the management of information technology projects to improve the effectiveness of the public health enterprise”.

Le résultat de son projet met en lumière des divergences substantielles entre le niveau exigé pour les tâches demandées et les compétences démontrées, dans le sens que le pourcentage de répondants qui avaient atteint la cible recommandée était bas, et ce même parmi les plus hauts niveaux de l’équipe.

Un autre point très intéressant à nos yeux se dessine : lorsqu’il a été demandé aux sujets d’étude de fournir un feedback sur ce questionnaire, ceux-ci n’ont pas trouvé pertinents les points explorés, vis-à-vis de leurs tâches quotidiennes. Si l’auteur conclut qu’avant que le système de santé ne puisse profiter des TICS, les aptitudes relevantes des employés doivent être identifiées, c’est à notre avis un autre point essentiel qui émerge : ce sont les représentations des utilisateurs qui doivent être explorées, et l’usage qu’ils font des technologies, dans le contexte privé, affectif.

C’est exactement le postulat que défend Verdier (Verdier 2007) dans son ouvrage. Le chercheur nous parle de l’étude qu’il a réalisée pour comprendre comment des formateurs de l’enseignement (et donc hors du domaine de la santé, les TIC) agissent et réagissent face aux technologies de l’information et de la formation. Les technologies, plus qu’un problème de compétence pure, modifient l’identité de l’utilisateur. Ses travaux lient :

• Les usages des TIC dans la sphère professionnelle et privée. Il investigue alors le nombre de TIC que les individus utilisent.

• Le niveau de sophistication de ces usages, par exemple pour la création de supports pédagogiques.

• Sont également finement relevés les discours émis par les individus au sujet des TIC, les interactions multiples entre formateurs, ainsi qu’entre les formateurs et les TIC.

Pour le questionnaire, nous nous sommes donc attachés à transposer vers le milieu de soin les travaux de Verdier. Ceci découle sur la classification des

individus en trois groupes, dont les caractéristiques sont présentées dans le Tableau 2, ci-dessous.

Tableau 2 Synthèse des types d'utilisateurs des technologies de l'information et leurs caractéristiques individuelles

Type de l’individu

Résistant Fonctionnel Expert

Définition de la situation

Cite 0 à 2 usages Cite 3 à 6 usages Cite 7 à 9 usages Peu ou pas d’outils.

Usages basiques

Outils et leurs fonctionnalités.

Usages autonomes

Maîtrise du hardware comme du software Logique d’usage De la médiation Utilitaire Identitaire

Signification

Projection dans les IT.

Affirmation Transition vers une autre identité

« Identité active » Affirmation de leur identité, celle générée par les IT

Les individus peuvent donc être résistants aux technologies, fonctionnels ou experts. Le questionnaire permet ainsi d‘identifier ceux qui auront besoin du soutien le plus intensif à l’arrivée des nouvelles technologies (les résistants), pour les aider à maîtriser les outils et parce que leur discours négatif peut saboter les implémentations ; seront également identifiés les meilleurs avocats de la technologie (les experts).

La présence de chaque type d’individu lors de la validation des diagrammes de workflows est indispensable, comme on le verra plus bas.

Pour conclure cette partie, l’on peut dire que le questionnaire constitue également l’occasion d’une première prise de contact avec l’équipe.

Dans le chapitre 5 seront présentés à titre d’exemple les résultats de l’étude concernant les types d’individus rencontrés parmi la population infirmière des unités d’oncologie médicale stationnaire et ambulatoire.

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