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En considérant les enjeux mis de l’avant par les écrits scientifiques, nous nous questionnons sur les conditions de participation au programme Sport-études. Ce qui nous intéresse particulièrement, c’est l’influence de celles-ci sur le développement des jeunes. En effet, selon ce que nous avons présenté, les conditions de participation à un tel programme font en sorte que les élèves-athlètes sont dans un contexte d’apprentissage particulier. Si celui- ci semble favoriser l’adoption d’une démarche d’excellence sportive et de réussite scolaire, on s'interroge cependant sur les orientations du programme et les moyens pris pour réaliser les objectifs de performance, de participation et de développement personnel nécessaires à un développement positif du participant.

Dans cette optique, il nous apparaît pertinent de nous pencher sur les conditions de participation au programme Sport-études, car la littérature actuelle ne nous permet pas d’avoir suffisamment d’information sur le sujet. De surcroît, vu l’ampleur et la popularité du programme, il nous apparaît approprié de jeter des éclairages sur le profil des participants, les mécanismes de fonctionnement et les finalités du programme dans le but de mieux comprendre les impacts engendrés en termes développementaux.

Comme bien des choses dans la vie, la pratique sportive évolue dans le temps. À une époque où on note une baisse de la participation sportive en général (Tremblay et al., 2010), on se rend compte également qu’elle se fait de plus en plus en contexte de pratique organisée (Clark, 2008). Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce changement de type de pratique, notamment les vertus accordées au sport (Coakley, 2011), des changements de la structure familiale (Coakley, 2009), ou encore les diverses opportunités que le sport offre (bourses

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d’études, popularité, fortune, etc.) (Coakley, 2009; Gould et Carson, 2004). Est-ce qu’il y a lieu de penser que ces changements de mentalité ont contribué à l’essor du programme Sport- études qui est passé d’une dizaine de participants à plus de cinq milles, en moins de trente ans (LeRoy et al., 2013)? La question mérite d’être posée.

Suite à la brève présentation du programme Sport-études, plusieurs interrogations surgissent, notamment par rapport aux visées réelles et aux moyens pris pour les atteindre. D’une part, les écrits officiels du MÉES présentent le programme Sport-études comme un projet à vocation particulière qui vise à offrir les meilleures conditions pour combiner à la fois succès scolaire et atteinte de l’excellence sportive. Les études sur la dimension scolaire du programme ont démontré que les participants performent aussi bien, sinon mieux, que leurs homologues du cheminement régulier (Perreault, 2005). En ce qui concerne le volet sportif, le peu d’études ou de mesures d’efficacité nous laisse perplexes quant à l’atteinte de visées d’excellence sportive et aux effets que celles-ci engendrent sur le développement des participants. Avec la hausse de l’intérêt pour le champ d’études des pratiques sportives et les processus développementaux des jeunes, nous sommes de plus en plus inclinés à jeter un regard critique sur ce qui influe de façon positive ou négative sur le développement du jeune sportif dans une démarche d’excellence (Baker, Cote, et Abernethy, 2003; J. L. Fraser-Thomas et al., 2005; Malina, 2010). En effet, nous nous interrogeons particulièrement sur l’effet que peut avoir la participation, dès l’entrée au secondaire, soit vers 12 ans, dans un programme sportif où la visée d’excellence serait prédominante.

Au moyen de cette étude, nous visons une meilleure compréhension des mécanismes mis en place pour favoriser les missions scolaires, mais plus particulièrement sportives du programme Sport-études. Dès lors, tant par ses visées que les moyens pris pour y arriver, nous souhaitons mieux comprendre qui sont les bénéficiaires du programme et qu’elles sont les incidences de sa participation sur leur développement. En d’autres termes, notre question générale se lit comme suit :

Quels sont les effets de la participation au programme Sport-études sur le développement des élèves-athlètes?

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Ultimement, notre objectif est de mieux comprendre les incidences de la participation au programme Sport-études sur le développement des élèves-athlètes. Nous ferons l’explicitation du référentiel théorique qui sous-tendra notre étude en envisageant de répondre à notre question générale. Nous mettrons notamment l’accent sur le rôle de l’environnement comme agent de développement psychosocial de l’athlète.

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Chapitre 2 : Cadre théorique

Dans le précédent chapitre, nous avons mis en évidence la nécessité de mieux comprendre quels étaient les effets de la participation au programme Sport-études sur le développement des élèves-athlètes. En soulignant ceux potentiellement néfastes sur le développement physique, social et psychologique d’un athlète engagé dans une pratique sportive intensive et s’étant spécialisé trop rapidement, nous y avons décelé une problématique possible. Ce chapitre se consacrera à la présentation de l’approche et des concepts théoriques adoptés dans le cadre de cette étude permettant de mieux comprendre le processus développemental de l’élève-athlète du programme Sport-études.

Pour ce faire, nous ancrons notre travail dans la perspective bioécologique du développement humain afin d’expliquer et de comprendre les mécanismes sous-jacents au développement d’un individu. Conséquemment, nous présentons en détail l’approche du développement positif de l’adolescent (DPA) que nous avons brièvement abordé dans le chapitre précédent. Soulignons que celle-ci s’imbrique en partie dans la perspective théorique bioécologique. Enfin, nous abordons le développement du talent sportif, en présentant le modèle développemental de la participation sportive de Côté et Fraser-Thomas (2016). À l’aide de ce modèle, nous aurons les outils pour mieux comprendre la structure du programme Sport-études et les différentes trajectoires qu’un athlète peut emprunter en fonction de ses objectifs. En soit, ces outils nous permettront de répondre à notre question de recherche.

Lorsque nous avons présenté les différentes statistiques liées à la pratique sportive chez les jeunes, nous avons pris soin de distinguer les différents termes telle la participation sportive de la pratique sportive. Dès lors, puisque le sport est un concept central à notre étude, il va de soi que nous prenions le temps de le définir. Comme mentionné par Coakley (2009), il est très difficile de définir précisément le concept de sport, puisque d’une culture à l’autre, sa perception et sa conception changent. Le sport est, à proprement dit, une pratique sociale complexe, où se manifeste un ensemble de valeurs distinctes (Steenbergen, 2001). Est-ce que faire du jogging est un sport au même titre que s’entrainer en vue du 5000 mètres aux championnats régionaux? Ces deux moyens d’action ont, certes, des retombées positives à

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plusieurs niveaux, tels les bienfaits sur la santé physique et psychologique (Coakley, 2009), mais peut-on dire que l’un est une activité physique alors que l’autre est un sport?

Dans le cadre de ce travail, nous définirons ici le sport en nous appuyant sur Létourneau, Laberge et Thibault (1994) cités dans Thibault (2001). Selon ces auteurs, « le sport désigne

une activité physique qui fait appel à des habiletés motrices, qui nécessite des installations et de l’équipement particuliers, qui est régie par des organismes officiels et qui s’exerce sous la forme de compétitions » (p.213). Par cette définition, nous excluons donc la pratique d’activité

physique au sens large, à partir du moment où celle-ci vise principalement le plaisir ou la promotion de la santé chez son pratiquant et dans un cadre non conscrit (exemple : faire du

jogging ou jouer au basketball au parc). Nous excluons également ce qui forme un nouveau

panorama de sports tels les sports d’aventure, les sports spectacle ou les sports santé (Steenbergen, 2001). Bien que ces nouvelles activités sportives gagnent en popularité, nous ne les incluons pas dans notre concept de sport et nous nous en tiendrons à l’analyse de tout sport qui rencontre la définition ci-dessus. À titre de précision, lorsque nous parlerons des activités qui ont trait au sport (ex. : entrainements ou compétitions), nous utiliserons l’expression « pratique sportive ».

Cette distinction étant faite, nous présentons dans ce qui suit la perspective bioécologique de Bronfenbrenner (1999), qui sera notre pierre d’assise pour bien comprendre comment un individu se développe et se définit au sein de son environnement.