• Aucun résultat trouvé

La question du fascisme de Maurras

2. Réception de la figure de Charles Maurras : 1952-2013

2.7 La question du fascisme de Maurras

Comme nous l’avons vu, l’Université américaine a produit, entre les années trente et les années soixante, une importante littérature savante sur Maurras et l’Action française. Cependant, si les recherches de Hayes ou de Brogan avaient eu une influence marginale sur l’Université française dans les années trente, il va en être tout autrement de leurs élèves, Weber, Osgood et Tannenbaum. Leurs travaux, et plus particulièrement ceux de Weber, vont

160

Bruno Goyet, Charles Maurras, op. cit. p. 115. 161 Journal Le Monde des 15 juin et 1er Juillet 1976.

71

contribuer à fixer pour longtemps l’image d’un Maurras apaisé sur le territoire hexagonal, alors que les débats intellectuels sur le fascisme de Maurras divisent profondément les universitaires étrangers. En effet, de toutes les problématiques historiographiques que Maurras aura laissées aux historiens, celle de son fascisme demeure certainement la plus controversée. Ainsi est-il fort difficile d’établir un consensus.

Cette question lancinante oppose, à l’étranger, les tenants d’un Maurras qui se serait rapidement retranché, après la Grande Guerre, dans le camp d’un conservatisme ultramontain de bon ton, plus préoccupé de sa postérité littéraire que du coup de force politique qu’il appelait de ses vœux au temps de sa jeunesse militante, aux tenants d’un Maurras plus politique, précurseur direct de cette idéologie radicale, qui n’aurait jamais véritablement rompu avec elle. L’étude historique de cette pensée, de cette vie et de cette œuvre implique pourtant une neutralité discursive qui permette d’en établir clairement les structures. Toutefois, dans le cas de Maurras, les oppositions restent passionnées. Nous ne saurions trancher parmi des exposés qui ne sont pas le fait direct de notre travail. Nous les présenterons donc synthétiquement avant d’analyser les problématiques qui touchent à leur réception en France. Cependant nous ne pouvons éviter cette question brûlante du fascisme de Maurras, en ce qu’elle apparaît d’autant plus importante qu’elle représente une piste essentielle de lecture qu’il s’agisse de la réception tronquée de son œuvre poétique, ou de l’ostracisme complet dont cette œuvre va pâtir dans les milieux littéraires.

L’image d’un Maurras apaisé, plus conservateur que proprement fasciste est généralement issue des travaux des départements d’études romanes des universités américaines, particulièrement ceux de la génération d’historiens et de politicologues des années soixante qui avaient connu les purges du Maccarthisme. Leurs travaux tentent de combattre la distorsion du concept de totalitarisme et plus particulièrement les récupérations qu’en font les universitaires et les intellectuels conservateurs proches des milieux ultras du catholicisme ou du protestantisme ainsi que les propres travaux de Hayes, touché d’un violent retour à la foi dans les années vingt, et dont ils jugent la typologie du nationalisme, plus célèbre sous le nom de classification de Hayes, par trop globalisante. Elle situe en effet clairement le nationalisme intégral de Maurras dans la cinquième catégorie, aux côtés de G. d’Annunzio et de Mussolini comme de Wagner et Hitler.

Parallèlement, ces universitaires demeuraient fortement marqués, pour ne pas parler de traumatisme, par les pressions qu’ils avaient pu connaître durant la chasse aux sorcières. De façon implicite, le fait de détacher Maurras du fascisme permettait de laver l’opprobre et les suspicions qui pouvaient peser sur leurs travaux et sur leurs personnes. En outre, la tentation

72

était grande, et commune, de rapprocher Maurras de Franco ou de Salazar en le situant dans une mouvance plus acceptable de la hiérarchie des droites radicales, le national-catholicisme, théorisé par le spécialiste américain de l’Espagne franquiste, Stanley G. Payne. Cette approche participait indirectement d’un rapprochement de leurs travaux et de leurs départements vis-à-vis de la politique étrangère américaine durant la guerre alors que nombre de leurs collègues avaient sciemment accepté de jouer divers rôles d’experts militants au service de leur gouvernement pour maintenir la péninsule ibérique hors du conflit.

C’est notamment le cas de Hayes qui avait été nommé, en 1942, ambassadeur en Espagne, avec cet objectif pour principal ressort. L’image d’un Maurras apaisé, alors largement diffusée par l’université américaine, procède donc indirectement d’un engagement militant au sein de la division axiologique qui structure l’idéologie américaine contemporaine, opposant l’axe de la liberté à celui des totalitarismes fascistes, rouges ou noirs : elle permet de légitimer les positions troubles de la diplomatie américaine, plus favorable à un accord avec Vichy qu’avec de Gaulle, peu apprécié de Roosevelt qui craignait des prétentions dictatoriales jusqu’à la dernière année du conflit. Selon la même perspective, il n’était aucunement contradictoire de s’entendre avec Augusto Pinochet pour faire barrage au communisme en Amérique du Sud. Il n’est pas indifférent que les typologies du nationalisme associent, selon cette perspective, les nationalismes « latins » de Vichy, du franquisme, de l’Estado nuvo, de la dictature chilienne et du premier fascisme Italien.

Cette image d’un Maurras conservateur fit consensus un temps, notamment en Allemagne où l’Université a longtemps conservé des modes de pensée et de fonctionnement issus de l’entre-deux-guerres, ce qui a induit de fortes continuités dans certaines analyses. C’est particulièrement le cas d’Armin Mohler, spécialiste de la révolution conservatrice allemande, qui refuse d’assimiler Maurras au fascisme en le situant parmi les théoriciens de la droite traditionnaliste. Mohler décrit Maurras comme intellectuellement hermétique aux bouleversements provoqués par la Révolution Russe et incapable d’appréhender des problématiques intrinsèques au monde moderne. Il s’agit là d’une analyse assez proche de celle qui avait été élaborée en Allemagne ou même en France, dans les années trente et quarante.

Très rapidement après la publication des travaux de Weber, d’autre travaux, contradictoires, voient le jour. Autant l’ouvrage de Weber conférait une vision acceptable du nationalisme maurrassien, autant les travaux de l’historien Allemand Ernst Nolte entraînent des polémiques du fait d’une perception fascisante de l’Action française, laquelle découle de la re-conceptualisation de la notion de totalitarisme. Dans son étude, Der Faschismus in

73 seiner Epoche, Nolte tente de définir l’idéal type du fascisme par une démarche à la fois

historique et philosophique qui cherche le socle fondamental de cette idéologie. Pour lui, le fascisme n’est pas un système original mais une réponse au communisme qui emploie les mêmes principes pour le combattre. Le fascisme se définit ainsi et avant tout par son antimarxisme essentiel, puis par les similitudes qu’il transpose du système communiste : appui d’une classe sociale dominante, – dans le cas du fascisme, la classe bourgeoise – érection d’un parti unique et élimination systématique des opposants politiques, enfin processus de propagande de masse en vue d’établir la légitimité de ce régime dans les consciences.

Il ne s’agit plus, dès lors, d’une opposition linéaire mais circulaire, celle des extrêmes qui se touchent, parmi lesquels Nolte cherche des points de concordance. Une analyse phénoménologique de l’Action française, du fascisme italien et du nazisme le conduit ainsi à une image nettement préfasciste du mouvement maurrassien. Selon Nolte, l’Action française représente l'une des trois facettes du fascisme avec le national-socialisme allemand et le Parti national fasciste, si l’on considère que la cause de leur formation respective est un antimarxisme fondateur. Selon lui, la France aurait connu un fort mouvement fasciste par l'importance du poids de l'idéologie de Maurras dans la société, dans la période de l’entre-deux-guerres, qu’il qualifie d’« époque du fascisme », par la radicalisation des ligues nationalistes et conservatrices au cours de trois vagues de réaction, premièrement au Cartel des gauches, puis au Bloc des gauches et enfin au Front populaire. Cependant la limite du système de Nolte naît de la vision monolithique qu’elle donne des régimes totalitaires sans tenter d’en percevoir les particularismes, s’opposant ainsi à des analyses plus attentives aux différences et aux circonstances.

Dans la même ligne d’interprétation, à la fin des années soixante-dix l’historien israélien Zeev Sternhell va pousser plus loin l’analyse phénoménologique du fascisme de Maurras initiée par Nolte et renouveler l’approche du fascisme français. Son travail, plus historique que celui de Nolte, cherche particulièrement l’origine de la future idéologie fasciste. Selon lui, celle-ci n’est pas née dans les nations où elle a su faire autorité mais paradoxalement dans les nations européennes de la fin du XIXème siècle où l’idéologie parlementaire était la plus installée, c’est-à-dire en Angleterre et surtout en France. La France serait le véritable berceau du fascisme et une terre propice à l’extension de ses théories compte tenu d’une forte tradition antilibérale et anti-individualiste, bien que le fascisme à la française ne soit pas arrivé au pouvoir avant 1940. Selon cette analyse, Sternhell réfléchit au lien complexe qu’entretiennent fascisme et démocratie. Il tente de démontrer, contre le

74

présupposé historique, que le fascisme ne s’oppose pas, génétiquement, au principe démocratique mais s’extrait de celui-ci, comme un aboutissement autoritaire face à l’échec démocratique. Il s’appuie sur les exemples de l’Espagne du Directoire, de l’Italie et de la France durant et après la première guerre mondiale, ainsi que sur la naissance du nazisme pour appuyer ses théories. Cependant, le fascisme ne saurait se confondre avec l’ancienne idéologie contre-révolutionnaire. Le fascisme étant un mouvement propre à l’ère de masse du XXe siècle, il naît de la fusion du nationalisme, d’éléments d’extrême droite et d’éléments de gauche.

Ses recherches sur les cénacles maurrassiens amènent cet historien à situer la naissance de l’idéologie fasciste en France, autour de l’Action française d’avant 1914. Le courant naîtrait de la rencontre du nationalisme antirépublicain de la mouvance maurrassienne et du syndicalisme révolutionnaire de Georges Sorel, au sein notamment du Cercle Proudhon de Georges Valois, sorte de satellite socialisant de l’Action française. La dimension fasciste du mouvement n’est pas à chercher dans les phénomènes de radicalisation successifs et de droitisation du mouvement qui ponctuent les années vingt et trente mais dès l’immédiat Avant-guerre, via les tentatives de séduction des milieux syndicalistes de l’extrême gauche antisémite. C’est d’ailleurs dans cet alliage surprenant du socialisme et du nationalisme lors de ses années de formation politique qu’il perçoit le fascisme de Maurras. Selon cette perspective, Sternhell analyse Maurras comme un penseur préfasciste, précurseur du futur National Socialisme allemand et source intellectuelle des théoriciens fascistes italiens et allemands au même titre que Sorel ou Drumont. Son travail se limite néanmoins par certains de ses aspects idéologiques, en ce sens qu’il s’inscrit lui-même dans une démarche revendicative des aspirations de la mémoire juive à la reconnaissance de la participation de Vichy et de la France au drame du génocide, notamment lorsqu’il analyse la résistance que les maurrassiens avaient opposée aux fascistes français comme l’expression de leur proximité.

Pour Bruno Goyet, l’université française et les milieux intellectuels vont se trouver constamment agités par les controverses étrangères. C’est néanmoins la perception américaine qui domine, au point que l’ « on peut parler d’une fixation wébérienne de l’image de Maurras en France. » 162. Ainsi, pour Pierre Nora, « Maurras était réactionnaire par principe, sa clientèle par réaction d’épiderme. », comme si la réception de l’image de Maurras par les milieux savants dépendait très étroitement de l’actualité américaine. Or Maurras est déjà présent dans l’historiographie française qui va recevoir ces travaux américains suivant le

75

prisme de sa propre tradition, que l’historiographie américaine est venue conforter. Maurras ne peut être considéré comme un fasciste puisqu’il n’y a pas de fascisme français, ou presque, que le fascisme demeure restreint à des individualités marginales au sein des ligues, partis et journaux, et que son audience fut très limitée. Les ligues étant héritières du bonapartisme via le boulangisme, les mouvements fascistes se réduisent dans cette perspective à des groupuscules absents du paysage politique.

Cette analyse, héritée de l’historien et politologue René Rémond dans Les droites en

France, est approfondie par les travaux de Serge Berstein, Pierre Milza ou Michel Winock.

Universitaire jouissant d’une extrême reconnaissance dans son pays, René Rémond y joue un rôle prééminent, un peu comme le fit Hayes aux Etats-Unis. Catholique militant et expert utilisé par le gouvernement de son pays, personnalité brillante ayant une influence considérable sur ses élèves et ses collègues, il a établi une classification des droites qui, comme celle de Hayes, va longtemps s’imposer dans les études françaises. Il rejette la possibilité d’un fascisme français puisqu’il n’y a pas eu de grand mouvement de masse fasciste en France et par conséquent d’arrivée au pouvoir, légale ou violente, comme ce fut le cas en Allemagne ou en Italie.

Pour lui, la France a été protégée du fascisme par plusieurs éléments politiques, sociologiques et économiques : premièrement parce que les répercussions de la crise américaine y ont été moins graves que chez ses proches voisins, notamment l’Allemagne, deuxièmement parce que l’esprit démocratique hérité des Lumières était implanté plus solidement qu’en Allemagne, en Italie ou en Espagne, et bien relayé par des institutions influentes au sein des élites intellectuelles, enfin parce que la droite monarchiste et catholique n'a pas été attirée par le fascisme. Elle a été retenue dans une attitude conservatrice par Maurras et l'Action française, dont la tradition intellectuelle et esthétisante ainsi que la capacité à construire une structure de pensée imposante et cohérente163, offrait à l’ensemble de la droite radicale des ressources hautement valorisées en termes de dignité intellectuelle164. Le nationalisme maurrassien apparaissait, par là même, plus convaincant qu'une doctrine fasciste fluctuante. Rémond définit ainsi la droite française comme relative à trois traditions : légitimiste, orléaniste et bonapartiste. L’Action française n’en serait qu’une synthèse imparfaite. Elle devrait son échec discursif et politique aux profondes contradictions doctrinales de Maurras, qui aurait su préserver son intégrité idéologique malgré les périodes

163 Paul Mazgaj, Imaginig fascism, the cultural politics of the French Young Right, Associated University Presses, Cranbury, Eng 2007, p.43 (Notre traduction).

164

Michel Dobry, Février 34 et la découverte de l’allergie de la société française à la révolution fasciste, Revue française de sociologie, 30 (3-4), juillet 1989, p 521.

76

de tension qui ponctuent les années trente, comme il le fit le 6 février 34 ou devant la guerre civile espagnole : « L’Action française a tout ensemble rajeuni un royalisme déclinant et renouvelé sa doctrine, doté d’un système de pensée la passion nationaliste et risqué une synthèse originale de leurs apports, même contraires. Elle a fourni à la droite une philosophie délibérément réactionnaire qui a imprégné une partie de l’opinion française. »165

.

Pour Bruno Goyet, cette analyse semble toutefois participer du refoulement de la conscience nationale face aux lourdes questions que soulève la période opaque de l’Occupation, que l’éclatement du syndrome de Vichy ne va permettre d’ébranler totalement. Les thèses de Nolte puis de Sternhell vont être réfutées par la plus part des historiens français qui ont développé un champ d’analyse selon lequel les conservateurs français n’ont pas étés contaminés par le fascisme. Mais cette unanimité n’est pas univoque, en raison des doutes que provoque l’apport des analyses étrangères. Ainsi le philosophe et politologue libéral Raymond Aron, célèbre pour sa dénonciation de l'aveuglement et de la bienveillance des intellectuels français à l'égard des régimes communistes, s’interroge : « En lisant le livre de Zeev Sternhell, je me suis demandé si je n’ai pas méconnu les prémices de la Révolution nationale qui surgit en 1940 à la faveur de la défaite. Ai-je mésestimé la force de l’antisémitisme, la menace du fascisme ? La France était-elle, comme l’écrit Z. Sternhell, « imprégnée de fascisme ? » » Mais Aron maintient son point de vue quant à la personne de Maurras : « Favorable [Maurras] à Salazar et à Mussolini (non sans réserves), il ne manifesta jamais la moindre sympathie au national-socialisme qu’il détestait en tant que germanique et romantique, aux antipodes de l’ordre antique qui demeurait à ses yeux le modèle éternel de la sagesse et de la beauté. »166.

Depuis les années 1950, la majeure partie de l'historiographie française s'oppose à la thèse marxiste du fascisme comme solution à la crise du capitalisme, au concept de fascisme cohabitant avec la démocratie dans l'Entre-deux-guerres, et à la collaboration volontaire des milieux industriels. Cette démonstration s’appuie sur un système qui croise la problématique de la pureté idéologique des mouvements avec leur poids politique sur la sphère nationale. Toutefois, les apports de chercheurs étrangers, ceux de Robert Soucy ou de Paul Mazgaj, ont néanmoins permis l'instauration d'une controverse scientifique autour de l'existence et de la notion de fascisme en France. A la fin des années 1970, Robert O. Paxton impose le débat en balayant la thèse hexagonale du bouclier Pétain et la non existence d’un fascisme français.

165

Rémond, René, Les droites en France, Aubier-Montaigne, coll. Historique, Paris, 1992, p.184. 166 Raymond Aron, Mémoires, 50 ans de réflexions politiques, Julliard, Paris, 1983, p.101.

77

Dans son article sur « Le fascisme » dans l’histoire des droites en France, Philippe Burrin donne une conception plus nuancée du fascisme de Maurras et s'interroge sur la spécificité du fascisme français, en analysant notamment la réception du fascisme au sein de la société française. Plus récemment, un ouvrage collectif de neuf chercheurs français et étrangers placé sous la direction de Michel Dobry renouvelle l'approche de la question. Il dénonce la logique classificatoire des droites autoritaires qui a longtemps prévalu, et met l'accent sur les relations, les espaces de concurrence et de conjonctures historiques où les différentes droites ont agi et se sont redéfinies. Ainsi, les diverses contributions montrent les mécanismes de réappropriation, en France, des succès des fascismes européens. L’ouvrage tente également de démontrer le lien de parenté qui préexiste au sein des nombreuses composantes de la droite avec le fascisme authentique, dans la filiation de la thèse de Robert O. Paxton qui, le premier, a considéré le régime de Vichy comme étant le produit d'un long processus d'incubation.

Récemment, les travaux du cycle pluridisciplinaire « l’Action française, culture, société, politique », initiés par Michel Leymarie et Jacques Prévotat, ont proposé, par des approches socioculturelles, de mieux évaluer le degré d'imprégnation de la société française par les idées maurrassiennes. L'analyse des sociabilités, des réseaux et des moyens de diffusion doctrinale, celle des régions où elle est implantée, comme la mise en évidence des oppositions qu'elle a rencontrées permettent de prendre la mesure de cette importante implantation idéologique et d’en comprendre la pérennité. Le cycle s’est également intéressé aux réceptions extra-hexagonales du maurrassisme et en montre l’importante influence hors-France, soulignant par là même la dimension internationale, peu connue, de Charles Maurras.

Cependant la longue permanence de la thèse hexagonale a permis d’assurer à Maurras une place de conservateur nationaliste dans l’éventail politique français. Il y joue parfaitement le rôle de mauvais génie nécessaire aux polémiques constitutives de l’histoire politique française. Malgré certaines convergences qu’il est difficile de méconnaitre avec le fascisme, elles n’apparaissent « pas suffisantes pour faire de l’écrivain provençal un précurseur du fascisme. ». Paradoxalement, ce sont donc des éléments « folkloriques », méridionaux, félibréens, qui permettent à l’université française d’accepter une réhabilitation mesurée de la discursivité maurrassienne. Mais, si, en apparence, ce discours semble appuyer celui de la réhabilitation des fidèles, il va avoir pour conséquence d’invalider de façon durable les