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4.2 Facteurs ayant une influence sur la satisfaction professionnelle : une multiplicité des modèles

4.3. Les facteurs influençant la satisfaction professionnelle des enseignants

4.3.4. Quatrième facteur : les conditions de travail

Pour une large partie de la littérature du domaine (Duffy & Lent, 2009 ; Huang & Waxman, 2009 ; Lent, 2008 ; Mtika & Gates, 2011 ; Rhoades & Eisenberger, 2002), la satisfaction professionnelle des enseignants est directement dépendante des conditions qui leur sont offertes dans les établissements scolaires pour réaliser leur travail. Ainsi, même si pour certains auteurs cela reste encore discutable (par exemple : Shen et al., 2011), plus les conditions de travail sont optimisées, plus la satisfaction professionnelle croît. A l’inverse, lorsque les conditions se détériorent alors cette dernière décroît poussant parfois à des

abandons professionnels, voire dans certains cas d’insatisfaction prononcée à des départs anticipés à la retraite (Lantheaume & Helou, 2008 ; Macadams, Lucas, & Donnellan, 2012).

Les conditions de travail recouvrent dans la littérature bon nombre de dimensions parmi lesquelles apparaissent le plus souvent : la charge de travail face à laquelle sont placés les enseignants ; l’autonomie octroyée à ces derniers pour réaliser leur travail ; les diverses reconnaissances matérielles du travail effectué dont en particulier le salaire et la sécurité de l’emploi. L’exercice dans un établissement de type privé ou public ne serait pas, par contre, discriminant pour la satisfaction professionnelle (Akhtar, Hashmi, & Naqvi, 2010). Ces résultats contrastent avec ceux de Demirel (2014) affirmant qu’en Turquie les enseignants d’écoles privées seraient plus satisfaits que ceux exerçant en écoles publiques.

La tendance actuelle à l’accroissement de la charge de travail et des attentes en termes de productivité des salariés n’épargne pas le domaine de l’enseignement. Les travaux mettant, par exemple, en exergue l’accroissement ces dernières années des missions allouées aux enseignants sans aménagement particulier de leurs conditions de travail sont nombreux (voir par exemple : Felix & Saujat, 2008 ; Lantheaume & Helou, 2008 ; Maroy, 2008 ; Merini, Thomazet, & Ponte 2010). Parmi ces conditions, celles relatives à l’aménagement du temps de travail ont été tout particulièrement étudiées. Ainsi, lorsque les enseignants ont un emploi du temps surchargé et que leurs missions se multiplient, ils ne peuvent plus vraiment préparer correctement leurs enseignements et récupérer entre ceux-ci. Ils finissent alors par s’y épuiser (Hargreaves, 2003 ; Liu & Ramsey, 2008 ; Maroy, 2008 ; Skaalvik & Skaalvik, 2009), se démotiver (Sari, 2005) et in fine développer de l’insatisfaction professionnelle (Boyle et al., 1995 ; Liu et al., 2007 ; Liu & Ramsey, 2008 ; Papanastasiou & Zembylas, 2005 ; Sari, 2005 ; Skaalvik & Skaalvik, 2009). Compte tenu du stress engendré (Boyle et al., 1995 ; Skaalvik & Skaalvik, 2011), ce vécu peut conduire, comme souligné en amont, à l’abandon momentané ou définitif de la profession (Leung et al., 2006 ; Skaalvik & Skaalvik, 2011 ; Smithers & Robinson, 2003 ; Suadicani, Bonde, Olesen, & Gyntelberg, 2013).

La satisfaction professionnelle est aussi influencée par l’autonomie dont peuvent bénéficier les enseignants dans la réalisation de leur travail au sein des établissements scolaires (Crosso & Costigan, 2007 ; Fabra & Camison, 2009 ; Pearson & Moomaw, 2006 ; Shen et al., 2011 ; Skaalvik & Skaalvik, 2011). Pour certains auteurs, tels que par exemple Skaalvik et Skaalvik (2011), c’est là sans doute la condition première de leur satisfaction professionnelle. Autrement dit, plus la marge d’autonomie octroyée aux enseignants pour réaliser leur travail est importante, en termes par exemple de choix de contenus à enseigner

et/ou de méthodes pédagogiques à exploiter, plus ils sont satisfaits professionnellement (Menon & Christou, 2002 ; Nir & Bogler, 2008). En gagnant en autonomie, les enseignants réalisent en effet un travail de plus grande qualité, prennent confiance en eux et s’en trouvent au final davantage satisfaits (Shen et al., 2011). A l’inverse, lorsqu’ils travaillent avec une autonomie réduite, par exemple dans des établissements scolaires au sein desquels la participation aux décisions collectives est limitée, les enseignants ont tendance à être moins satisfaits professionnellement (Bogler, 2002 ; Moè et al., 2010 ; Nguyen, Taylor, & Bradley, 2003). Les enseignants se montrent donc également plus satisfaits s’ils participent aux décisions de l’établissement et à la vie de la communauté (Smylie, 1994 ; Talbert & McLaughlin, 2006). Le manque d’autonomie engendre, en effet, des frustrations au quotidien dans la réalisation du métier, dues par exemple à la durée de certaines décisions administratives engageant l’ensemble de la voie hiérarchique, source de stress et d’insatisfaction professionnelle (Menon & Christou, 2002 ; Skaalvik & Skaalvik, 2011). A l’inverse, certains auteurs (par exemple : Jones, 1993 ; MacPherson, 1985) relèvent que le manque de participation aux décisions de l’école et d’autonomie dans le travail engendre du stress, de l’insatisfaction professionnelle voire parfois du burnout.

La satisfaction professionnelle est enfin influencée par les diverses reconnaissances dites « matérielles » du travail effectué comme, par exemple, la sécurité de l’emploi, le salaire ou encore la nature des évaluations pédagogiques. Même si en France, être enseignant vaut encore généralement pour être assuré de la sécurité de son emploi, ce n’est pas (ou plus) le cas dans d’autres pays. Au sein de ces derniers, la satisfaction professionnelle est donc directement soumise à la sécurité ou pas de conserver son emploi sur la durée (Kloep & Tarifa, 1994). Ainsi, plus les enseignants sont assurés de cette stabilité professionnelle, plus ils sont satisfaits. Ils s’installent en effet dans un certain « confort d’emploi » (Munthe, 2003) qui leur permet avec le temps d’accroître la qualité de leur travail, de s’accomplir personnellement et d’être finalement satisfaits professionnellement (Mtika & Gates, 2011). Pour certains auteurs tels que par exemple MacAdams et al. (2012), cette condition est d’autant plus importante que la difficulté à maintenir une certaine satisfaction professionnelle croît avec l’ancienneté dans la profession. Outre la sécurité de l’emploi, le salaire et ses évolutions au cours de la carrière professionnelle influencent aussi la satisfaction professionnelle des enseignants. Un salaire, pouvant être qualifié d’adéquat, participe en effet du bien être au travail et de l’amélioration de la satisfaction professionnelle (Hendrix, Robbins, Miller, & Summers, 1998 ; Judge et al., 2000). A l’inverse, une rémunération

inadéquate couplée à des conditions de travail jugées difficiles conduit progressivement à de l’insatisfaction professionnelle (Leung et al., 2000 ; Papanastasiou & Zembylas, 2005) et à du stress (Leung et al., 2000).

Parmi les autres conditions de travail ayant une influence sur la satisfaction professionnelle des enseignants, il est aussi possible de relever l’âge et l’origine sociale des élèves. Il est à noter que dans la plupart des études, l’échantillon des participants couvre l’ensemble des niveaux de classe. Toutefois, Bentea et Anghelache (2012) montrent par exemple dans une étude récente menée en Roumanie que le niveau de satisfaction professionnelle est significativement plus élevé chez les enseignants travaillant auprès d’élèves du primaire. Van Maele et Van Houtte, (2011) montrent, quant à eux, que « l’éducabilité » des élèves, elle-même dépendante de leur origine sociale, est aussi à considérer comme un facteur influençant la confiance des enseignants, leurs activités de classe et in fine leur satisfaction professionnelle. En effet, parmi les conditions de travail, les interactions avec les élèves et les parents sont déterminantes pour les enseignants. Le type d’interaction que les enseignants peuvent tisser avec ces acteurs influence directement leur satisfaction professionnelle. Depuis de nombreuses années, l’influence des interactions avec les élèves sur la satisfaction professionnelle des enseignants est étudiée. Il y a déjà 40 ans, Lortie (1975) soulignait ainsi déjà que plus la relation avec les élèves était superficielle, c’est- à-dire essentiellement tournée vers le contenu disciplinaire enseigné, plus l’insatisfaction des enseignants était significative. A la même époque, Holdaway (1978) montrait combien la réussite des élèves était la première source de satisfaction professionnelle chez les enseignants. Depuis de nombreux travaux ont été réalisés. Ils montrent dans leur ensemble que la satisfaction professionnelle des enseignants est d’autant plus importante que l’attitude des élèves à leur égard, par exemple en termes de confiance, est positive (Shen et al., 2011 ; Van Houtte, 2007 ; Lantheaume & Helou, 2008) et qu’ils font preuve d’une attitude scolaire (Sweeney, 1982 ; Taylor & Tashakkori, 1995). Pour Veldman, Tartwijk, Brekelmans, et Wubbels (2013), la satisfaction professionnelle des enseignants apparait positivement liée à la qualité des relations établies par les enseignants avec leurs élèves. De façon complémentaire, certains auteurs soulignent que la satisfaction professionnelle des enseignants est aussi soumise au constat qu’ils font de la capacité des élèves à réaliser, avec ou sans leur aide, le travail qui leur est demandé (Gaziel & Maslovaty, 1998 ; Taylor & Tashakkori, 1995) et obtiennent en conséquence de bons résultats (Van Houtte, 2007). En retour, un enseignant plus satisfait aidera plus attentivement ses élèves (Chen, 2007 ; Ciftci et al., 2011 ; Van den

Berg, 2002) et établira de meilleures interactions avec ceux-ci (Chen, 2007 ; Convey, 2014 ; Huang & Waxman, 2009 ; Van den Berg, 2002). Il n’en reste pas moins que, comme le soulignent par exemple Van Campenhoudt et al. (2004), « la relation aux élèves est devenue problématique pour beaucoup d’enseignants, source de stress et de tensions » (p. 15). Le travail avec des élèves non volontaires, voire difficiles, et n’ayant pas le niveau scolaire attendu, a en effet, de plus en plus de répercussions négatives sur la satisfaction professionnelle des enseignants ainsi que sur leur stress au travail (Kalekin-Fishman, 1986 ; Kasten, 1984 ; Taylor & Tashakkori, 1995 ; Van Campenhoudt et al., 2004).

Les interactions pouvant être établies avec les parents peuvent aussi influencer, même si c’est dans une moindre mesure, la satisfaction professionnelle des enseignants (Lison & De Ketele, 2007). Des relations positives marquées par la confiance et le soutien sont en effet source de satisfaction pour les enseignants (Day et al., 2007 ; Frenay & Meuris, 1995). Elles contribuent à réduire leur stress au travail (Rascle & Irachabal, 2001) et permettent d’éviter les situations d’épuisement professionnel (Day et al., 2007). A l’inverse, lorsque les parents apparaissent aux yeux des enseignants comme trop présents dans leur travail, ils en deviennent alors une véritable source d’insatisfaction professionnelle et de stress (BlackBranch, 1996).

4.3.5. Cinquième facteur : les aides à dispositions des enseignants pour réaliser

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