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CHAPITRE II : La maturation des miARNs et des ARNs messagers

2. Les ARNs messagers : un gène, plusieurs messages

2.2. L’épissage alternatif

2.2.3. Les éléments régulateurs en trans

2.2.3.2. Les protéines SR

peuvent aussi se lier à des séquences inhibitrices introniques (ISS) et favoriser l’exclusion d’un exon (Martinez-Contreras et al., 2006). Cependant, plusieurs études ont montré qu’elles peuvent être impliquées dans l’activation d’un exon (Chou et al., 1999 ; Han et al., 2010). Il est à noter que les protéines hnRNP se lient à des motifs ARN souvent dégénérés, qui peuvent être reconnus par d’autres protéines hnRNP ou SR, conduisant ainsi à une compétition entre ces protéines pour se lier aux mêmes séquences.

Enfin, les protéines hnRNP (hnRNP A, B, D, E, K, F, H, I, L, Q, et R) régulent aussi la stabilité, la polyadénylation, l’export, le transport et la traduction des ARNm (LaBranche et

al., 1998 ; Guang et al., 2005 ; Zhang et al., 2006).

2.2.3.2. Les protéines SR

En 1990, les équipes de Adrian Krainer et James Manley identifient la protéine ASF/SF2, conduisant ainsi à la mise en évidence d’une nouvelle famille de protéines régulant l’épissage : les protéines SR (Krainer et al., 1990 ; Ge and Manley, 1990). Ces protéines possèdent un ou plusieurs domaines de liaison à l’ARN et un domaine RS, riche en aRginine et Sérine, et sont divisées en deux sous-groupes : les protéines SR, dites classiques, et les protéines SR-Like (Long and Caceres, 2009).

Les protéines SR possèdent en commun (1) une organisation de leurs domaines, (2) un rôle dans l’épissage constitutif et alternatif, (3) un phospho-épitope identique au niveau du domaine RS reconnu par l’anticorps mAb104 et (4) la particularité d’être hautement solubles dans le sulfate d’ammonium à 50-60% de saturation mais insolubles dans le chlorure de magnésium à 20 mM (Long and Caceres, 2009). Chez l’homme, cette famille de protéines est constituée de 12 membres (figure 22).

Ces protéines comportent classiquement un ou de deux domaines de liaison à l’ARN de type RRM (« RNA Recognition Motif »), et un domaine de liaison aux protéines (domaine SR), contenant plus de 40% de di-peptides arginine-sérine (Manley and Krainer, 2010).

Le domaine RRM de liaison à l’ARN est caractérisé par une topologie de type ȕ1Į1ȕ2ȕ3Į2ȕ4 (4 feuillets ȕ anti parallèles et 2 hélices Į perpendiculaires l’une à l’autre). Il possède au niveau des brins ȕ1 et ȕ3 deux motifs conservés RNP1 et RNP2 qui incluent les résidus aromatiques phénylalanine (F) et tyrosine (Y) (Cléry et al., 2008). Au sein de ce motif, l’ARN adopte une structure spécifique qui dépend des résidus du domaine RRM, expliquant ainsi comment le domaine RRM d’une protéine SR donnée est capable de reconnaître spécifiquement un ensemble de séquences dégénérées.

Figure 23 : Rôles des protéines SR dans la sélection des sites d’épissage.

(Long and Caceres, 2009)

A. Définition de l’exon: les proteines SR se fixent aux éléments activateurs d’épissage exoniques (ESE), recrutent snRNP U1et U2AF65 et stabilisent les interactions entre snRNP U1 et le site 5’ d’épissage et celles de U2AF65 et le site 3’ d’épissage.

B. Inhibition des protéines hnRNP : les protéines SR se fixent aux éléments ESE et empêchent la liaison des protéines hnRNP aux éléments inhibiteurs d’épissage exoniques (ESS) favorisant ainsi l’utilisation des sites d’épissage.

C. Les protéines SR forment un réseau via leur domaine RS, d’interaction protéine-protéine, permettant de juxtaposer les sites 5’ et 3’ d’épissage.

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Enfin, certaines protéines SR possèdent un second domaine RRM composé de différents acides aminés aussi nommé pseudo-RRM de fonction inconnue. Récemment, l’équipe du Dr Allain a mis en évidence que le domaine pseudo-RRM de ASF/SF2 a un rôle régulateur de l’épissage (Cléry et al., 2013).

Le domaine RS, riche en arginine et sérine, permet des interactions protéine-protéine, et notamment avec le domaine SR d’autres protéines (Wu and Maniatis, 1993). Les protéines SR sont capables d’interagir entre elles, ou avec le domaine RS des protéines « SR-like » comme U2AF et U1-70K. Ainsi, les protéines SR peuvent se lier, via leur domaine RRM, à des séquences exoniques de type « ESE » et recruter, via leur domaine RS, les protéines U2AF35 et U1-70K (figure 23A). Ces interactions permettent alors de stabiliser la fixation de la snRNP U1 sur le site 5’ d’épissage et la fixation de la sous-unité U2AF35 sur le site 3’ d’épissage, conduisant ainsi à la reconnaissance et donc à l’inclusion de l’exon (Singh and Valcarcel, 2005). La liaison de ces protéines SR peut aussi inhiber la fixation de protéines hnRNP à des séquences ESS, et ainsi prévenir la fixation d’un inhibiteur de l’épissage (figure 23B). Les interactions des protéines SR entre elles ainsi qu’avec les protéines U2AF et U1-70K permettent la juxtaposition des sites 5’ et 3’ d’épissage (figure 23C).

Enfin, la phosphorylation des protéines SR au niveau de leurs résidus sérines influence l’activité et la localisation de ces protéines (Long and Caceres, 2009). Pour exemple, la phosphorylation des domaines RS de ASF/SF2 et SC35 par la protéine kinase SRPK1 (SR Protein Kinase) conduit à l’import de ces protéines SR au sein du noyau, et favorise l’interaction du domaine RRM avec l’ARN (Lin et al., 2005 ; Cho et al., 2011).

A côté de ces protéines SR classiques, il existe des protéines dites « SR-Like », qui possèdent, elles aussi, un domaine RS et peuvent jouer un rôle de régulation dans l’épissage, la transcription et/ou le remodelage de la chromatine (Boucher et al., 2001). Toutefois, ces protéines « SR-Like » qui ne possèdent pas toujours un domaine RRM, ne sont pas systématiquement reconnues par l’anticorps mAb104 et ne sont pas particulièrement solubles en sulfate d’ammonium. Parmi ces protéines, on retrouve les protéines U2AF65 et U2AF35, la protéine U1-70K de la snRNP U1, les co-activateurs d’épissage SRm160 et SRm300, et les protéines TRA2Į et TRA2ȕ (Dauwalder et al., 1996 ; Beil et al., 1997 ; Blencowe et al., 1999) (figure 24).

Lors de ma thèse, j’ai étudié l’implication de TRA2-ȕ dans la régulation de la biogenèse de miARNs spécifiques. Je vais donc présenter succinctement cette protéine.

Figure 24 : Organisation structurale des protéines SR-like.

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TRA2-ȕ, qui est codé par le gène SFRS10, est constitué de deux domaines RS entourant un domaine RRM. Cette protéine est l’orthologue humain de Tra2, un facteur d’épissage qui régule la détermination sexuelle de la drosophile (Dauwalder et al., 1996 ; Nayler et al., 1998). Enfin, TRA2-ȕ est un régulateur de l’épissage alternatif qui reconnaît un motif ARN de séquence AGAA (Stoilov et al., 2004 ; Cléry et al., 2011).

Ainsi, TRA2-ȕ1 régule positivement l’inclusion de l’exon 10 de MAPT, codant pour la protéine TAU (Jiang et al., 2003). Chez des patients FTDP-17 (« démences frontotemporales avec syndrome parkinsonien liées au chromosome 17 »), la délétion de trois nucléotides génère un site sous-optimal qui n’est plus reconnu par TRA2-ȕ, ce qui conduit à l’exclusion de cet exon et donc à une protéine TAU altérée.

Enfin, la liaison de TRA2-ȕ à un motif AGAA situé dans l’exon 7 du gène SMN2 stimule l’inclusion de cet exon (Cléry et al., 2011). Cette régulation est importante car la perte du gène SMN1 (Survival Motor Neuron 1) conduit chez l’homme à une amyotrophie spinale (SMA=Spinal Muscular Atrophy). Il existe un paralogue de SMN1, SMN2, mais qui ne peut pas compenser la perte de SMN1 suite à un changement de nucléotide (C->T) dans l’exon 7 de SMN2. Cette simple modification de séquence entre SMN1 et SMN2 altère une séquence activatrice d’épissage (ESE) dans SMN2, conduisant à l’exclusion de l’exon 7 et donc à la production d’une protéine SMN2 tronquée non active (Pellizzoni et al., 1999 ; Hofmann et

al., 2002 ; Young et al., 2002). TRA2-ȕ étant capable de réguler l’inclusion de l’exon 7 de

SMN2, il constitue donc une cible thérapeutique potentielle.