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Chapitre II. Chimie du brome et radiolyse de

D. Propriétés physicochimiques du brome

L’utilisation de solutions d’ions bromure provenant de la solubilisation de NaBr ou de la dissociation de HBr implique des conditions physicochimiques différentes, notamment sur la valeur du pH de la solution amenée à être irradiée. La figure ci-dessous représente le diagramme E-pH du brome en solution :

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Figure II-2 : Diagramme E-pH du brome en solution.

D’après le diagramme E-pH de l’eau et par superposition avec celui-ci, on peut affirmer que l’ion bromure est stable en solution. Dans le cadre de ce travail, le potentiel électrochimique de la solution est suffisamment faible pour éviter la réaction entre Br- et l’eau, et entre Br- et O2. De plus, le pH des solutions d’étude est toujours inférieur à 3, ce qui empêche la formation de Br2 tant que le potentiel électrochimique de la solution reste inférieur à 1,18 V.

Tableau II-7 : pH des solutions d’acide bromhydrique principalement utilisées dans l’étude.

HBr (M) 0,01 0,1 0,3 0,6 0,9

pH 2 1 0,5 0,2 0

Intéressons nous à l’effet de la température sur les solutions de bromure.

L’effet de la température est l’un des enjeux majeurs de cette étude. Peu d’études font référence à l’effet de température sur les solutions de bromure. Nous nous intéressons ici principalement à la stabilité des solutions dans un large domaine de température et aussi aux

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éventuels changements au niveau de l’absorption optique, surtout de l’espèce Br-

, en fonction de la température.

Par expérience et par le fait, détaillé dans le premier chapitre de ce mémoire, que la constante diélectrique de l’eau ne favorise pas la solubilité des espèces ioniques, on s’attend à ce que les sels Na+Br- ou K+Br-, extrêmement solubles à température ambiante, finissent par produire des précipités. Ces précipités n’étant pas contrôlés ne nous permettraient que difficilement de remonter à la concentration de Br- en solution. D’autre part, cela pose des problèmes techniques dans les tuyauteries de faible diamètre utilisées dans les expériences sous pression. C’est pour cela que notre choix s’est porté rapidement sur les solutions acides. Comme nous le verrons plus loin, cela pose d’autres problèmes comme la corrosion à haute température ou, mais cela est vrai aussi pour les sels, la formation d’agrégats non dissocié de HBr. Ce dernier point est bien sûr lié à l’évolution du pKa avec la température.

Evolution du spectre d’absorption de Br-

avec la température

Les spectres d’absorption des solutions de bromure en fonction de la température ont fait l’objet de très récentes études. Lin et al. viennent en effet de publier l’évolution du spectre d’absorption de solutions de bromure de sodium en fonction de la température jusqu’à 300°C8. Le spectre d’une solution de Na+Br- situé dans l’UV, en dessous de 250 nm, se déplace vers le rouge quand la température augmente (Figure II-3). Ce spectre est caractéristique d’un spectre dû à la transition électronique lors d’un transfert de charge à la sphère de solvatation (CTTS pour Charge Transfer To the Solvent) car il est très sensible au changement de température. Ceci est observé naturellement pour tous les spectres de CTTS connus comme tous les autres halogènes en solution ou encore, les spectres des électrons solvatés. Le déplacement vers le rouge du spectre CTTS est expliqué par l’évolution de la taille de la sphère de la deuxième couche de solvatation autour de l’ion Br-. Nous nous attendons à avoir le même type de comportement pour les solutions acides de HBr.

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Figure II-3 : Spectres d’absorption de solutions aqueuses de 1 mM NaBr à différentes

températures.

Evolution du pH d’une solution de HBr en fonction de la température

Pour ce qui concerne la dissociation de HBr à température élevée, il semble qu’il y ait un manque crucial de données expérimentales. Cependant on peut essayer de retrouver le comportement de la dissociation en prenant les données existantes de la phase gaz et les calculs d’évaluation des énergies de solvatation. Proche du point critique (374°C) et au-delà, c’est l’effet de la pression et donc de la densité du fluide qui va extrêmement influencer la solvatation comme le confirme l’étude de Flanagin et al.14

. La compressibilité de l’eau déjà en condition sous-critique fait que la constante diélectrique de l’eau peut prendre des valeurs variées mais faibles comparées à celle connue à température ambiante. La Figure II-4 montre les isobares autour du point critique (CP).

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Figure II-4 : Isobares dans le diagramme Température, Densité de l’eau. Les lignes de

mêmes constantes diélectriques ont été ajoutées en tirets. (C.P. : Critical Point).

Comme l’article de Flanagin et al. ne traite pas du cas du brome, ne s’arrêtant qu’au cas du chlore, nous avons voulu avoir une estimation de l’évolution de l’énergie de solvatation d’un ion Br-par l’eau en fonction de la température. En première approximation, on peut prendre le modèle de Born15 qui permet de calculer l’énergie libre de solvatation Asol d’une particule sphérique de charge q et de rayon a par un solvant de constante diélectrique  par la formule suivante :

Avec q=1, a (le rayon ionique de Br- vu dans le tableau II-1) = 1,96 Å et les valeurs de  issues de la Figure II-4, on peut recalculer l’énergie libre de solvatation de Br- dans l’eau à différentes températures. Nous avons collecté ces valeurs dans le Tableau II-8.

Tableau II-8 : Estimation de l’énergie libre de solvatation de l’ion bromure en appliquant le

modèle simplifié de Born.

T (°C) densité  1-1/ Asolv(kcal mol-1)

27 1 80 0,9875 -83,4

127 0,95 50 0,98 -83

227 0,75 30 0,967 -81,9

327 0,55 20 0,95 -80,5

427 0,15 1,5 0,333 -28

On s’aperçoit que la valeur de l’énergie libre de solvatation ne subit pas de véritable changement dans le domaine sous et supercritique où les valeurs de la constante diélectrique

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chutent. On peut donc avancer raisonnablement que l’acide HBr reste complètement dissocié jusqu’à des températures de l’ordre de 350°C.

Néanmoins, il est connu que la constante de dissociation de l’eau chute lorsque la température augmente. Cela est par exemple rappelé dans la Figure II-5 issu du rapport qui montre la variation du pKe jusqu’à 300°C. Elle modifie sensiblement la conception du pH à température élevée.

Figure II-5 : Influence de la température sur le pKe16.

Ainsi dans ce même rapport, on peut se rendre compte de l’impact de la température sur le pH d’une solution de 10-2

M de HCl (Cf Figure II-6). Une solution de HBr de même concentration subirait approximativement la même évolution du pH. Cela corrobore bien le calcul de l’énergie de solvatation précédent.

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Figure II-6 : Evolution du pH d’une solution de 10-2 M de HCl16.