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solution aqueuse

C. Influence de la concentration en capteurs chimiques

1. La capture chimique : principe

La méthode de capture dans le cas de la radiolyse de l’eau est une méthode d’observation indirecte qui permet de remonter à la réactivité d’une espèce radicalaire bien précise par des réactions avec des capteurs chimiques. Les capteurs chimiques sont donc des solutés présents dans la solution susceptibles de capter les espèces radicalaires issues de la radiolyse du solvant afin de convertir ces espèces réactives en espèces plus stables et facilement détectables. Les capteurs sont conventionnellement utilisés dans le cas des études de radiolyse stationnaire.

La méthode de capture est également adaptée pour stopper les réactions chimiques qui pourraient perturber la mesure du rendement au cours du temps. Par exemple, l’eau oxygénée peut être consommée par les radicaux HO• et H• mais aussi par les électrons hydratés :

Tableau I-10 : Exemple de capture chimique par H2O2.

Réactions Constantes de vitesse9

(1010 dm3 mol-1 s-1) H2O2 + eaq- HO• + HO- 1,3

H2O2 + H• HO2• + H2 1,0 H2O2 + HO• HO2• + H2O 0,003

En capturant à la fois les électrons hydratés et les radicaux hydroxyles, ces réactions de destruction peuvent être inhibées.

La réaction de capture est une réaction bimoléculaire. Tant que la dose et le débit de dose sont assez faibles, la concentration du radical R ([R] en mol dm-3) est bien moins importante que celle du capteur S ([S] en mol dm-3). Dans ce cas, la concentration du capteur S peut être considérée comme constante comparée à celle du radical R. En effet la concentration du radical peut varier de manière très importante en fonction du temps. Dans la plupart des études utilisant la méthode de capture, on considère que la réaction de capture peut être traitée comme une réaction d’ordre 1 avec une constante de vitesse apparente égale au produit kRSS :

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avec R le radical issu de la radiolyse de l’eau réagissant avec le capteur S pour former le produit P.

La vitesse de réaction (c'est-à-dire le produit kRSS) est appelée pouvoir de capture et son inverse 1/kRSS, homogène à un temps, donne une échelle de temps approximative de la réaction de capture et une estimation du temps de vie du radical en présence du capteur. Ensuite, en sélectionnant un capteur et sa concentration, on peut contrôler l’échelle de temps de capture durant laquelle les radicaux transitoires formés lors de la radiolyse de l’eau sont convertis en produits. Par conséquent, lorsque la concentration du capteur augmente, le radical est capté de plus en plus tôt dans les grappes par le capteur aux dépens des recombinaisons. Le rendement radiolytique G(R) diminue donc.

Il est à noter que strictement parlant l’échelle de temps doit être attentivement interprétée comme une transformation de Laplace. Cependant, l’approximation définie ci-dessus n’est valable normalement que pour des échelles de temps supérieures à 10 ns puisque les réactions intra-grappes et intra-traces sont négligeables à cette échelle de temps69.

Puisque l’observation directe de certaines espèces dignes d’intérêt issues de la radiolyse de l’eau reste quelque chose de très difficile à réaliser, la mesure du rendement est alors accessible par l’utilisation des capteurs chimiques. Ce capteur doit respecter certaines conditions, notamment le fait qu’il doit affecter le moins possible les conditions chimiques, à part bien entendu les modifications dues aux réactions de capture. En travaillant à de fortes concentrations en capteur, les réactions de capture se produisent à des temps de plus en plus courts et ces réactions entrent en compétition avec les réactions intra-traces et les phénomènes de diffusion de manière plus significative. Les radicaux primaires n’ont plus le temps de se recombiner et leur rendement primaire associé mesuré est surestimé.

2. Quelques exemples de capteurs du radical HO

Malgré son importance, le radical HO• reste difficile à observer directement par des méthodes de radiolyse pulsée ou stationnaire (techniques développées dans le chapitre III) du fait de son absorption faible dans le domaine de l’UV. Des méthodes de capture ont été développées dans le but de mesurer le rendement radiolytique de HO•. Ainsi, Milosavljevic a déterminé le rendement du radical HO• en réalisant des expériences de radiolyse pulsée de solutions aqueuses d’ions thiocyanates70

. De plus les travaux de Appleby en 1985 et de Yamashita en 2008 ont permis de déterminer le rendement radicalaire de HO• par irradiation avec différents ions lourds d’énergie élevée sur de solutions aqueuses d’ions bromure et d’ions formiate et

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d’observer la production de H2O2. Les travaux de Baldacchino en 2009 sur le synchrotron HIMAC concernant l’utilisation d’une sonde fluorescente pour détecter le produit final après réaction avec les radicaux HO•, produits par l’irradiation sous ions carbone et argon, ont permis d’obtenir des valeurs de rendement primaire de HO• à plusieurs échelles de temps allant de la nanoseconde à la microseconde.

Les rendements de HO• à l’échelle de quelques nanosecondes ont également été estimés par LaVerne en 1989 par l’irradiation de solutions de formiates par un faisceau d’hélions71, et par Taguchi72 qui a notamment utilisé le phénol comme capteur. Dans les deux cas, l’énergie des ions n’étant que de quelques MeV, les rendements obtenus sont intégrés sur toute la longueur de la trace d’ion (vide infra le chapitre concernant les moyens d’irradiation et l’explication du TEL moyen/TEL constant et du rendement radiolytique différentiel).

3. Capteurs utilisés dans ce travail

Les capteurs employés dans le cadre de ce travail sont à la fois les protons (capture de l’électron hydraté) puisque le travail est centré sur les solutions acides, et les ions bromure (capture du radical hydroxyle) de l’acide bromhydrique ou du bromure de sodium.

Le gaz de saturation employé lors de certaines expériences constitue également un capteur. Par exemple le protoxyde d’azote N2O est un capteur de l’électron hydraté et de l’atome d’hydrogène. L’oxygène moléculaire O2 est quant à lui principalement un capteur de l’atome d’hydrogène en milieu acide.