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La proposition de loi n° 147 de Monsieur Jean-Pierre FOURCADE

Paragraphe premier – Les projets et les propositions d’organisation de la continuité dans les services publics

B. Les principales propositions de loi

1. La proposition de loi n° 147 de Monsieur Jean-Pierre FOURCADE

Monsieur Jean-Pierre FOURCADE constate l’absence quasi totale de dialogue entre les partenaires sociaux et souligne la négligence du règlement pacifique des conflits dans les services publics. Selon lui, la conciliation, la médiation et l’arbitrage tels qu’ils existent dans le Code du travail sont inadaptés aux services publics car leur mise en œuvre est trop lourde et leurs délais sont longs. En outre, l’arbitrage est difficilement imposable à l’État dans la mesure où cette procédure à des conséquences sur les finances publiques. La grève n’est plus l’ultime recours mais un préalable à la négociation. Il est donc nécessaire de définir une procédure particulière de la médiation pour les services publics. En ce qui concerne le service minimum, Monsieur Jean-Pierre FOURCADE souligne qu’il n’existe que des lois particulières qui interdisent l’exercice du droit de grève et deux dispositifs d’organisation du service minimum relatifs au service public de la radio et de la télévision et au service public du contrôle de la navigation aérienne. En dehors de ces mesures, les services minimums dépendent uniquement de l’appréciation de l’autorité administrative ou de la direction de l’entreprise publique, sous le contrôle du juge administratif. En cas d’incapacité d’intervention de ces

132 Au cours des développements, l’existence de quelques-unes des nombreuses propositions de loi pourra être soulignée en

fonction de leurs intérêts par rapport aux différents thèmes abordés.

133 Proposition de loi n° 147, texte précité, note 15. En 1992, le Sénateur FOURCADE a repris en partie sa proposition n°

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autorités, le gouvernement ne dispose que de la réquisition pour maintenir la continuité des services publics134.

Pour faire face à cette situation, la proposition de 1987 de Monsieur Jean-Pierre FOURCADE tend à instituer une procédure de médiation préalable et à assurer un service minimal en cas de grève dans les services publics. Elle a servi de modèle – suivi ou non – pour les auteurs des propositions suivantes. Certaines des propositions plus récentes ont exclu le dispositif de médiation pour ne reprendre que le moyen d’assurer la continuité en le précisant quelque peu135.

Le rapport LOUVOT136 souligne que la proposition de loi vise à tirer les conséquences des graves perturbations entraînées par les grèves dans le secteur public qui ont fait apparaître une double insuffisance : l’insuffisance des procédures de négociation et des modes de règlement pacifique des conflits ; l’insuffisance des moyens de faire respecter la nécessaire continuité du service public dans les secteurs vitaux pour la Nation. Le but de la proposition de loi est de compléter les dispositions existantes afin de poser des principes clairs et valables pour l’ensemble des activités mettant en cause la continuité des services publics. Elle institue le principe d’un service minimal dans tout service public, dès lors que l’ordre public, la sécurité des personnes et des biens, les liaisons et communications indispensables à l’action gouvernementale ainsi que la continuité du service public nécessaire aux besoins essentiels du pays, l’exigent. Des décrets doivent déterminer les modalités de ce service minimal dans chacun des services concernés, définir les services et les catégories de personnels strictement indispensables à l’exécution de ce service et désigner les autorités administratives responsables de cette mise en œuvre (nouvel article proposé : L. 521-4-1). La proposition prévoit également le droit de l’autorité hiérarchique de requérir assorti de sanction (nouveaux articles proposés : L. 521-4-2 et L. 521-5), la médiation obligatoire avant le dépôt du préavis (nouveaux articles proposés : L. 521-2-1 à L. 521-2-4) et la responsabilité civile à l’égard des usagers assortie de sanction (nouvel article proposé : L. 521-7).

134 Or, ce dispositif a montré ses limites lors de la grève dans les Houillères de bassin et les Charbonnages de France (loi du

13 juillet 1938 ; décrets de réquisition du 2 juillet 1963).

135 Proposition de loi n° 280, texte précité, note 116. Ce texte définit les activités concernées par les mesures proposées alors

que la proposition de Monsieur Jean-Pierre FOURCADE (1987) souhaite qu’elles soient déterminées par décrets.

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Cette proposition institue donc une obligation de service minimum dans l’ensemble des services publics dont l’application se ferait par le biais de décrets afin, selon le même rapport, de garder « une souplesse rendue nécessaire par la diversité des situations appréhendées »137.

À la fin de l’année 1992, marquée par d’importantes grèves dans le secteur public et par l’initiative de la R.A.T.P. de mettre en place une « mission permanente de conciliation », Monsieur Jean-Pierre FOURCADE a déposé, à titre personnel, une autre proposition de loi138 qui n’est qu’une variante de la proposition n° 147. Elle ajoute un 3ème alinéa à la proposition du nouvel article L. 521-4- 1 qui prévoit qu’un accord doit être signé dans les entreprises, établissements et organismes chargés de la gestion d’un service public, entre la direction et les organisations syndicales représentatives pour déterminer le service minimal à assurer. À défaut, ce sont des décrets qui le définiront. Cet ajout laisse entrevoir un souci d’adaptabilité du futur service minimum aux circonstances. En revanche, cette seconde proposition ne reprend aucunement les sanctions liées au droit de requérir et encore moins la responsabilité du service public vis-à-vis de l’usager.

La proposition n° 147, qui est l’une des plus complètes qui aient été déposées, tend, d’une part, à privilégier la négociation des partenaires sociaux et à éviter l’affrontement, et d’autre part, à assurer, dans un cadre préalablement défini et acceptable par tous, la continuité du service public nécessaire à la sauvegarde des besoins essentiels du pays.

L’accueil réservé à cette proposition, par les partenaires sociaux contactés par Monsieur Jean- Pierre FOURCADE, est plutôt mitigé139. En effet, le Mouvement des Entreprises de France [M.E.D.E.F.], l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture [A.P.C.A.] et l’Union Patronale des Syndicats Professionnels du Gers souscrivent complètement à cette proposition. D’autres syndicats adhèrent de manière conditionnelle à cette proposition. C’est le cas de la Confédération française des travailleurs chrétiens [C.F.T.C.] dans la mesure où elle est favorable à la médiation pour le règlement des conflits du travail, mais considère que celle-ci doit s’exercer suivant les modalités respectant le droit de grève, y compris dans les services publics. Cette confédération présente une série d’observations complètes et de suggestions en vue de l’amélioration de la proposition n° 147. La Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises [C.G.P.M.E.] propose d’étudier plus

137 Idem, p. 42.

138 Proposition de loi n° 189, texte précité, note 111. Infra, p. 397.

139 SÉNAT, Rapport n° 207, op. cit., note 136, p. 54 (M.E.D.E.F., A.P.C.A. et Union Patronale des Syndicats Professionnels

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nécessaire de pouvoir garantir aux citoyens un service public ; créer un service minimum ne résoudra pas le problème. Elle suggère de régler les difficultés en amont pour éviter le conflit.

Selon la C.F.D.T., pour qu’une grève soit efficace, il ne faut pas non plus en user et en abuser. Le législateur est intervenu pour concilier le droit de grève et la continuité. Mais la règle légale (préavis et obligation de négocier) n’a pas eu toute l’efficacité escomptée notamment dans le secteur des transports. Elle suggère de faire un diagnostic des différentes situations, secteur par secteur et de privilégier la négociation pour trouver les solutions les plus adaptées en associant et en responsabilisant les acteurs principaux de la grève.

La Commission des affaires sociales propose un texte plus complet intitulé « proposition de loi visant à prévenir les conflits collectifs du travail et à garantir le principe de continuité dans les services publics ». Cette proposition comporte trois articles qui reprennent les idées exposées par la Commission. Une nouvelle modification de la proposition ajoute un quatrième article (article 2 bis) qui prévoit le recours au scrutin secret lorsqu’il y a vote du déclenchement de la grève. Cette dernière version est adoptée le 11 février 1999 mais seulement par le Sénat. En 2002, cette proposition de loi est redéposée, le Président du Sénat l’ayant transmise à son homologue de l’Assemblée Nationale146. Cette proposition de loi n’a jamais fait l’objet d’un examen à l’Assemblée Nationale.

Qui plus est, en 2003, le sénateur ARNAUD, faisant fi du travail de la Commission des affaires sociales ne reprend pas le texte modifié par le Sénat et dépose une nouvelle proposition147. La nouvelle proposition ne comprend qu’un seul article, toutefois beaucoup plus élaboré que celui de la proposition n° 491. En effet, la proposition n° 98 – contrairement à la proposition n° 491 – prévoit la négociation du service minimum entre les partenaires sociaux. Elle désigne également les autorités compétentes en la matière à défaut d’accord. L’article est divisé en quatre paragraphes : le premier précise les conditions dans lesquelles les entreprises, organismes, établissements publics ou privés chargés de la gestion d’un service public régulier de transport de voyageurs par voie terrestre, aérienne ou maritime garantissent la continuité du service ; le deuxième est propre aux services de la navigation aérienne et du contrôle de la circulation aérienne ; le troisième indique les modalités de définition du

146 Texte adopté n° 68, Sénat, 11 février 1999 ; proposition de loi n° 84 transmise par M. Le Président du Sénat, texte précité,

note 111.

147 Il estime que le Sénat a réduit la portée de son texte en prévoyant que les organisations syndicales de salariés et les

employeurs devaient négocier les modalités de la mise en œuvre de procédures destinées à améliorer le déclenchement de grèves (voir les motifs de la proposition de loi n° 98, texte précité, note 112). Le Sénat ne précisait plus, il est vrai, la mise en place du service minimum comme le faisait la proposition initiale et mettait l’accent sur la nécessité de mettre en place un dialogue social.

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service minimum et le quatrième et dernier paragraphe prévoit le caractère illicite de la grève ne respectant pas ce texte. Cette nouvelle mouture est bien meilleure que la première dans la mesure où son auteur prévoit un dispositif plus complet. Reste à connaître l’avenir réservé à cette nouvelle proposition de Monsieur Philippe ARNAUD. Compte tenu du contexte actuel – de nombreuses propositions ont été déposées ces douze derniers mois – il est peu probable qu’une Commission spécialement formée se penche sur ce texte. En revanche, elle sera peut-être utilisée pour les prochains travaux parlementaires sur ce thème.

3. Les propositions de loi n° 1404 et n° 1597 de Monsieur Dominique

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