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Dans cette optique, notre travail de mémoire poursuit l’objectif d’apporter un éclairage sur une dimension singulière du patrimoine alimentaire québécois : celle d’une production agricole qu’est la fraise de l’île d’Orléans. Dans cet ordre d’idée, nous avançons que la fraise de l’île d’Orléans s’avère éclairante pour, dans un premier temps, illustrer que l’étude de la patrimonialisation alimentaire ne se restreint pas aux produits inscrits sur une liste officielle et, dans un deuxième temps, montrer que les mécanismes de construction patrimoniale ne sont pas linéaires et embrassent un large éventail de possibilités. Pour un sujet aussi complexe, notre interrogation se formule simplement : de quelle manière la fraise de l’île d’Orléans s’inscrit-elle dans un processus de patrimonialisation? Nous proposons donc d’analyser les différentes formes de patrimonialisation à l’œuvre dans ce cas, soit le réinvestissement du passé, l’ancrage dans un territoire précis, la transmission, mais surtout, les stratégies de valorisation établies par les producteurs, les ministères du Tourisme et de l’Agriculture, les chaînes d’alimentation et les consommateurs.

Avant de poursuivre, nous devons exposer les définitions retenues pour désigner le patrimoine alimentaire et la patrimonialisation. À la lumière de la production savante, nous avons décidé de procéder à une synthèse des théories qui nous interpellaient spécialement. Par patrimoine alimentaire, nous entendons l’ensemble des éléments matériels et immatériels relatifs à l’alimentation, issus de mesures de valorisation, d’un savoir-faire soumis à la tradition et à l’innovation, d’une construction – reposant sur un cadre spatio-temporel et un système de valeurs – orchestrée par une variété d’acteurs pour qui ils doivent faire sens et dont la légitimation ne quémande pas une certification ou une labélisation.

Quant à la patrimonialisation, elle nous apparaît comme une construction sociale évoluant en fonction des prises de conscience patrimoniales, fondée sur des discours et des mesures de valorisation menant à l’emblématisation d’un produit, des activités festives, des lois et parfois même à une certification. Cette construction s’effectue par un réinvestissement du passé à partir du présent et sur un système de valeurs partagé par une collectivité pour qui il fait sens. Le processus de légitimation peut également reposer sur une reconnaissance interne et

externe constamment réactualisée par des mesures de valorisation n’ayant toutefois nul besoin d’être institutionnelle. Une fois campées, ces définitions permettent de mieux saisir le processus de réflexion derrière l’élaboration de nos hypothèses qui s’arriment essentiellement à la question de la « construction patrimoniale », un phénomène enclenché bien avant la reconnaissance officielle du patrimoine immatériel par le gouvernement.

Notre première hypothèse s’articule autour de deux éléments conditionnels à la réactualisation du processus de reconnaissance de la fraise de l’île d’Orléans : l’adaptation de producteurs à la périssabilité du fruit et l’accessibilité du produit aux consommateurs. Dans un premier temps, nous soutenons qu’à la différence de certains produits patrimonialisés puisant leur légitimité dans une forme de mimétisme des variétés, nous devons appréhender la patrimonialisation de la fraise de l’île sous l’angle d’une condition essentielle à la survie du fruit, l’innovation, qui se décline ainsi : l’adaptabilité des producteurs aux facteurs externes et à la nature hautement périssable d’un produit vendu la plupart du temps à l’état frais. Dans un deuxième temps, nous avançons que l’accessibilité de la fraise orléanaise, assurée par sa valeur économique abordable et la diversification de la commercialisation, agit comme vecteur d’appropriation chez les Québécois, faisant de la fraise de l’île d’Orléans un patrimoine alimentaire populaire et vivant.

Quant à notre deuxième hypothèse, elle souligne que le processus de patrimonialisation de la fraise orléanaise est caractérisé par un inversement proportionnel de son système de valeur. Jusque dans les années 1960, on observe que la valeur économique est l’incitatif dominant des mesures de valorisation du fruit, une situation qui ne rejette en rien les valeurs sociales et symboliques ; au contraire, elles coexistent en un tout cohérent depuis le début du XXe siècle. Seulement, c’est au tournant des années 1970, et encore plus dans les années 1980, que ces dernières s'épanouissent et occupent une place grandissante dans le système de valeurs sur lequel s'édifie la patrimonialisation de la fraise de l'île. En témoigne l’évolution du sens conféré à la consommation de produits régionaux, à la fabrication de confitures ou encore à l’autocueillette. La variable socio-économique semble aujourd’hui aussi importante que la variable économique, un phénomène qui illustre le potentiel de patrimonialisation d’une telle coexistence.

3 - Corpus

Parce qu’il évolue constamment, qu’il est le reflet des enjeux de son époque et surtout, parce qu’il implique une foule d’acteurs relevant des sphères politique, économique et sociale, le patrimoine alimentaire sollicite un corpus très varié. C’est pourquoi la construction de ce dernier se décline en trois catégories de sources fort distinctes: écrites, numériques et orales.

Sources écrites

À des fins stratégiques et pour éviter l’éparpillement, nous avons fait porter notre choix sur des sources illustrant la participation d’une majorité d’acteurs. C’est pour cette raison que la décision d’étudier les fonds sur le tourisme s’est révélée particulièrement appropriée dans l’optique où le tourisme concerne une multiplicité de protagonistes touchant de près ou de loin le secteur agricole: les gouvernements fédéral et provincial, les municipalités, les producteurs, les commerçants, la population locale et bien entendu, les touristes. Surenchérit à l’avantage de représentativité des acteurs celui d’une démarche de valorisation retraçable. On sait qu’à partir du dernier quart du XIXe siècle, l’État provincial québécois amorce un effort de dynamisation du secteur touristique, davantage marqué vers le début du XXe siècle : « Au cours des années 1920, le programme de promotion touristique de l’État accorde une place singulière à l’île d’Orléans dans son premier véritable guide »79 où en 1930, l’île semble

déjà « investie de valeurs socioculturelles liées à l’identité canadienne-française »80. Grâce aux guides touristiques et aux brochures qui « restent des sources d’informations incontournables »81 pour quiconque souhaite étudier le patrimoine, on peut aisément déterminer les biens que le gouvernement a décidé de mettre en valeur.

79 Serge Gagnon, « L’intervention de l’État québécois dans le tourisme entre 1920 et 1940. Ou la mise en scène

géopolitique de l’identité canadienne-française », Hérodote, 4, 127, 2007, p. 162.

80 Ibidem.

81 Guillaume Marceau et al., « Gestion territorial et valorisation du patrimoine : Vers un développement

Pour retracer cette démarche de valorisation, on peut également consulter les plans d’action annuels, les politiques adoptées par le Conseil du Tourisme – plus largement du ministère – qui détaillent les velléités et les mesures d’actions planifiées pour ladite année. En raison de l’étendue significative du cadre temporel (un peu plus d’un siècle), notre préférence revient aux documents de synthèse. Ceci vaut également pour les documents produits par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation au Québec et par l’Association des producteurs de fraises et framboises du Québec. Avant de poursuivre avec leur contribution, mentionnons que nous retenons les dossiers réalisés par la Municipalité régionale de comté (MRC) de l’île d’Orléans en ce qui a trait au tourisme et à la culture. Grâce à ce genre de document, on peut évaluer différents axes : l’appropriation du territoire, les mesures de préservation et de mise en valeur, l’implication citoyenne, le développement d’organisations et de services.

Les sources relatives au tourisme et à la culture permettent d’aborder une certaine facette de la patrimonialisation alors que les documents axés sur l’agriculture et la culture fruitière lèvent le voile sur un autre aspect. Au cœur de cette catégorie, on retrouve les documents réalisés par des associations et les publications officielles du ministère de l’Agriculture. Sous le nom de Bulletin, le ministère de l’Agriculture rédige, en plus des rapports annuels, des publications concernant l’alimentation et la vie rurale. Ayant travaillé sur les discours alimentaires au Québec (1914-1945), Caroline Durand montre que l’étude de ces bulletins est particulièrement efficace pour traiter de la dichotomie modernité et tradition, mais aussi pour mesurer le contenu des messages porteurs d’indices idéologiques, culturels et sociaux véhiculés par l’État82. Ces discours normatifs et argumentatifs reflètent, en plus des crises

sociales et des réactions qu’elles génèrent, la participation des multiples acteurs agissant à la valorisation du mode de vie « traditionnelle » par l’évocation du « bon vieux temps » dans le but de favoriser l’introduction des nouveaux aspects de la modernité83. En reconsidérant le

concept de la patrimonialisation, ces discours sont pertinents dans l’optique où ils exposent la manière dont se décline cette quête de filiation avec le passé.

82 Caroline Durand, « L’alimentation moderne pour la famille traditionnelle : les discours sur l’alimentation au

Québec (1914-1945), Revue de Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 3, 2011, p. 60.

Pour les mêmes raisons énoncées ci-haut sur les contraintes du cadre temporel, nous privilégions les périodiques originaires d’une longue tradition, comme ceux du ministère de l’Agriculture et celles d’une coopérative agricole majeure. D’abord Bulletin de la Société

coopérative agricole des fromagers du Québec en 1916, le périodique élargit son public cible

en adoptant deux ans plus tard le nom de Bulletin des agriculteurs. Miroir du contexte social, politique et économique au moment de sa parution, il couvre plusieurs sphères de l’agriculture (expositions agricoles, conseils, rapport de production, nouvelle technologie) et s’adresse à l’ensemble des agriculteurs vivant en milieu rural. Quiconque souhaite étudier les continuités, les changements, les intérêts et les actions pour la valorisation du milieu agricole et les effets de l’industrialisation peut se fier à ce genre de documents84. Jocelyne Mathieu,

spécialisée dans la question des arts ménagers du XXe siècle85 s’est notamment basée sur Le

Bulletin des agriculteurs pour traduire les évolutions du rôle des femmes au XXe siècle et

les discours portant sur les valeurs de l’État86.

Finalement, on ne peut occulter la principale catégorie de sources exploitées pour notre travail : la multitude d’articles de journaux (La Presse, Le Soleil, L’Action catholique). Bien qu’il n’existe pas un fonds d’archives portant sur la fraise de l’île d’Orléans, les articles de presse nous ont permis de découvrir des informations essentielles sur les décisions adoptées par le ministère de l’Agriculture, les difficultés rencontrées par les producteurs de l’île, les périodes de récoltes, de ventes et de cueillette de fraises, les marchés (Saint-Roch, Champlain) et la commercialisation. L’importance de ces publications journalières, hebdomadaires ou mensuelles (revues) réside dans le principe selon lequel elles s’adressent à un large public et comportent plusieurs éléments : textes d’opinion, informations factuelles, illustrations et annonces publicitaires. Elles reflètent donc l’univers à la fois quotidien et exceptionnel de la population québécoise, leurs préoccupations et leurs intérêts. Comme certains chercheurs en histoire le soulignent, la presse est un excellent moyen pour atteindre

84 Tous les numéros se prêtent à la consultation soit sur le site de la Bibliothèque des Archives nationales du

Québec, soit sur le site internet officiel du Bulletin des agriculteurs.

85 Jocelyne Mathieu, « Le territoire domestique comme lieu d’un patrimoine discret », in Laurent Sébastien et

al. Patrimoine et valorisation des territoires, Paris, L’Harmattan, 2012, p. 49-166.

86 Jocelyne Mathieu, « Le Bulletin des agriculteurs : pour vous mesdames : L’empreinte d’Alice Ber (1938-

« l’esprit public »87 et étudier les activités quotidiennes d’une population88. Subjectif la plupart du temps, le contenu des articles de presse renvoie à un processus de choix permettant d’évaluer non seulement les idées et les valeurs que les autorités souhaitent véhiculer, mais également de comprendre celles qui font sens pour le lectorat. Autrement dit, c’est par cette voie que nous arriverons à mesurer en partie le rôle des consommateurs dans le processus de patrimonialisation de la fraise de l’île, mais aussi à pallier aux silences des autres sources concernant des aspects essentiels de notre démonstration abordés précédemment.

Sources numériques

Parce que nous étudions un processus en perpétuel mouvement, l’utilisation des sources numériques nous semblait incontournable. Dans le même ordre que les guides touristiques, les brochures et tout autre document relié aux thématiques culturelles, les sites internet permettent d’explorer les mesures de patrimonialisation. À cet effet, nous retenons les sites officiels de l’Office du tourisme de Québec89 et du tourisme de l’île d’Orléans90, de même

que ceux du réseau Terroir et Saveurs (lancé par l’Association de l’Agrotourisme et du Tourisme Gourmand du Québec)91 et Savoir-faire île d’Orléans92. Concernant les sites reliés au tourisme du Québec et de l’île d’Orléans, les informations sont très similaires à celles que nous retrouvons dans les sources écrites poursuivant le même objectif. Par contre, le site internet du réseau Terroir et Saveurs se démarque dans le sens où il contient des renseignements portant uniquement sur la restauration, les produits du terroir et les activités gourmandes. Dans la foulée, les recherches web nous ont permis d’accéder aux contenus des menus des nombreux restaurants. Il faut savoir que la plupart des établissements étudiés investissent le concept d’une offre basé sur le respect des saisons et les produits locaux. Cela

87 Pierre Renouvain, « La presse et l’histoire », Matériaux pour l’histoire de notre temps, 49-50, 1998, p. 83. 88 Fernande Roy et Jean de Bonville, « La recherche sur la presse québécoise. Bilan et perspectives »,

Recherches sociographiques, 41, 1, 2000, p. 44.

89 Site de l’Office du tourisme de Québec, [en ligne], URL : https://www.quebecregion.com/fr/europe/, page

consultée le 13 avril 2018.

90 Site Tourisme Île d’Orléans, [en ligne], URL : http://tourisme.iledorleans.com/en/, page consultée le 13 avril

2018.

91 Site Terroir et Saveurs, [en ligne], URL : www.terroiretsaveurs.com/en/index.html, page consultée le 13 avril

2018

92 Site Savoir-faire Île d’Orléans, [en ligne], URL : http://savoirfaire.iledorleans.com/, page consultée le 13 avril

posait un défi majeur dans la mesure où la carte des restaurants est constamment renouvelée. Les recherches dans internet nous ont toutefois permis de retrouver certaines versions moins récentes, parfois archivées sur le site officiel du restaurant ou sur les réseaux sociaux.

Sources orales

Dans une perspective multidisciplinaire, le sujet de la patrimonialisation est étudié par les disciplines des sciences sociales dont plusieurs recourent aux enquêtes de terrain. Si les enquêtes orales soulèvent quelques critiques, surtout concernant le manque d’objectivité, c’est pourtant cette subjectivité qui nous préoccupe, car elle indique les sélections, les omissions, la connotation méliorative ou péjorative du sens conféré à un objet – alimentaire dans notre cas – par le témoin : « la source orale, même quand elle est factuellement erronée, est vraie du point de vue du narrateur. Elle parle moins des évènements que des significations qu’il leur donne »93. Le patrimoine se définit lui-même comme une

construction subjective reposant sur des tris, des découpages et une réorganisation des éléments qui « méritent » une valorisation94.

Fort de ce constat, la subjectivité des témoignages ne se présente pas comme une faiblesse, mais plutôt comme un indice favorisant la compréhension du processus de patrimonialisation. L’histoire orale s’avère un moyen privilégié par les études et les institutions vouées à la préservation et la valorisation du patrimoine. L’histoire orale permet, comme le montrent Paula Hamilton et Linda Shopes, de questionner la construction sociale du bien public. Elle se dégage des discours gouvernementaux et institutionnels et permet d’investir de nouvelles avenues en laissant la parole à d’autres acteurs. Ainsi, nous prévoyons interroger les producteurs de fraises de l’île d’Orléans – des acteurs ayant une grande part de responsabilité dans la construction du patrimoine alimentaire.

93 Hélène Wallenborn, L’historien, la parole des gens et l’écriture de l’histoire : le témoignage à l’aube du

XXIe siècle, Loverval, Éditions Labor, 2006, p. 50-51.

94 Maria Gravari-Barbas et Alexandre Abry, Habiter le patrimoine : Enjeux, approche, vécu, Rennes, Presses

4 - Méthode

Ayant pour thème principal la patrimonialisation, ce mémoire entend préconiser l’approche historique en mettant toutefois à profit certains emprunts à la démarche ethnologique. Les sources écrites et numériques seront davantage analysées sous l’angle historique alors que notre initiation à l’approche ethnologique nous permettra d’enquêter auprès de témoins et acteurs du phénomène de patrimonialisation de la culture fruitière à l’île. Cette collaboration ne cherche pas à circonscrire le rôle de chacune des disciplines en leur attribuant une période donnée, mais une tendance se dégage néanmoins : la méthode historique couvre davantage les périodes antérieures à la fin du XXe siècle alors que la méthode ethnographique entend ratisser la période plus récente, c’est-à-dire le milieu du XXe siècle jusqu’à aujourd’hui. Bien entendu, ces deux domaines se chevauchent et seront mis à contribution simultanément.

Sources écrites

Le choix d’une approche qualitative permettra d’appréhender l’évolution du processus de patrimonialisation par l’analyse des actions et des décisions se rattachant au secteur de la culture de la fraise, mais aussi par les discours émis par les instances ministérielles, les associations, les producteurs, les consommateurs, les restaurateurs et tout autre acteur/institution susceptible d’avoir participé de près ou de loin au processus de patrimonialisation de la fraise orléanaise. Dans cette optique est privilégiée l’analyse de contenu, plus précisément du discours. Afin de cerner les passages portant sur la fraise de l’île, l’utilisation de mots-clés écrits dans un moteur de recherche permettra de retrouver l’information des documents numérisés. Ces mots-clés appartiennent au champ lexical de la fraise. Grâce à des fiches de lecture et des grilles d’analyse, consignées dans des dossiers en fonction des thématiques qu’elles soulèvent, chaque source pourra être traitée et exploitée adéquatement. Ainsi, nous avons établi 13 dossiers permettant, selon nous, de couvrir les multiples facettes du phénomène abordé : le potentiel du territoire, l’innovation/développement, les menaces et dangers sur la production, la commercialisation dans les marchés (publics et grandes surfaces), la transformation industrielle et domestique (conserves et recettes), la consommation, la cuisine régionale, le tourisme/agrotourisme,

l’ouverture de la saison, l’autocueillette, les festivals, la symbolique du fruit et l’identité (fierté et sentiment d’appartenance). Dans le haut des fiches d’analyse se retrouvent les informations concernant la notice, le contenant, le lieu de conservation, l’auteur, le destinataire, la date, le titre du document et finalement la thématique, suivies d’un sommaire du contenu et d’une analyse de document. Cette analyse permettra de dresser un bilan des éléments que l’on souhaite traiter de manière plus exhaustive et qui se retrouveront, pour une lecture rapide, consignés dans une grille située au bas de la fiche – une sorte de résumé succinct de l’analyse. Chaque information sera ensuite classée dans les dossiers créés thématiquement à cet effet.

À la vue de la littérature, il apparaît clair que « le patrimoine ne prend sens et valeur collective que dans le processus historique d’identification, de sélection et de valorisation95 ». Parce

que nous privilégions l’analyse historique, nous voudrons d’abord retracer les grandes étapes de la réactualisation de la patrimonialisation en cernant le phénomène et l’évènement auxquelles elles se rapportent : l’industrialisation, l’urbanisation, la Première et la Deuxième Guerre mondiale, la Révolution tranquille et l’émancipation gastronomique, par exemple. Nous pourrons dès lors dégager les grandes tendances et les moments déterminants de cette construction patrimoniale relative à la fraise de l’île d’Orléans.

Ensuite, nous apporterons un éclairage sur les discours et les mesures de valorisation, analysés à partir du dispositif tridimensionnel proposé par Jacinthe Bessière : le temps (référence au passé), l’espace et la légitimation basée sur les trois valeurs exposées par Vincent Veschambre – la valeur symbolique, économique et sociale96. Entre dans cette catégorie le rapport à la tradition et à l’innovation. Les formes d’actions et d’initiatives, comme la création d’associations et le déploiement de mesures de diversification de la