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Partie I: Prix internationaux des produits alimentaires et régulation des marchés

Chapitre 1: le marché du blé en Algérie : description et analyse

5. Politique de prix

5.2. Les prix à la consommation

Jusqu’au jour d’aujourd’hui, les prix à la consommation sont contrôlés pour les trois produits dérivés du blé : la semoule, le pain et la farine. Les commerçants, grossistes ou détaillants majoritairement privés sont contraints de vendre les produits finis à un prix fixé par l’État. Ces prix à la consommation finale servent de référence sur laquelle l’État se base pour établir les prix de cession des grains (produits localement ou importés) par l’OAIC aux minoteries et semouleries (Chehat. 2006).

Mais la politique de soutien des prix à la consommation a évolué à partir de 1985, à la suite de la hausse continue des prix des grains sur le marché international, le prix international du blé a augmenté à un rythme de croissance annuelle moyenne de 7,75% entre 1985 et 1995. À cette période7, on assistera à la mise en place d’un fonds de soutien des prix permettant d’allouer des subventions à l’organisme régulateur, en l’occurrence l’OAIC. L’écart croissant

7 Voire annexe 9. Historique du prix international du blé entre 1970 et 2014

0, 175, 350, 525, 700, 875, 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014

Prix à la production en USD Prix international en USD

entre les prix internationaux des grains et leurs prix de cession aux industriels rendra rapidement de plus en plus insupportable le poids de ces subventions alors même que l’Etat devait faire face au poids d’une dette extérieure de plus en plus lourde. En 1994, les pouvoirs publics étaient contraints de mettre en œuvre un programme d’ajustement structurel comportant, entre autres, la réduction progressive des subventions accordées à la consommation. À partir de cette date, le mécanisme de contrôle des prix est réformé. Les prix à la consommation pour le pain, la farine et la semoule ont augmenté afin de réduire un tant soit peu le montant des compensations. Cette hausse des prix à la consommation permettra également de se rapprocher partiellement des prix réels des blés sur les marchés internationaux, du moins jusqu’en 2005, date à laquelle, le budget des subventions à fortement augmenté, en conséquence d’une hausse continue du prix du blé sur le marché international, ce qui s’est fait aussi tôt ressentir sur le budget des subventions.

Figure 8. Évolution des subventions à la consommation du blé en milliard de dinar

Source : publication annuelle de la loi de finance (rubrique du crédit de fonctionnement)

Le montant des compensations versé par l’État à l’OAIC pour combler l’écart entre le prix international et le prix de rétrocession aux industriels a été multiplié par 14 entre 2006 et 2013, passant de 11 milliards de dinars à 160 milliards. En voulant maintenir un prix à la consommation artificiellement bas, les pouvoirs publics doivent assumer l’évolution des prix internationaux, sur lesquels, ils n’ont aucune emprise. Le poids budgétaire des subventions en constante augmentation est également dû au fait que les prix de tous les produits dérivés du blé n’ont pas subi d’augmentation. Du stade de l’approvisionnement au stade de consommation finale en passant par l’industrie de transformation, les prix du blé et de ses dérivés ont stagné depuis plusieurs années. Comme le montre le tableau suivant, le prix de la baguette et de la farine restent inchangés depuis 1996 et depuis 2007 pour la semoule.

0, 45, 90, 135, 180, 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013

Les subventions à la consommation de blé

Tableau 11. Les prix à la consommation des produits subventionnés

Produit Prix fixé par les pouvoirs publics Libellé Depuis

Blé dur Semoule

courante

Semoule extra

Prix entré semoulerie

2007

2280 DA/Q 2280 DA/Q

3250 DA/Q 3500 DA/Q Prix sorti semoulerie

3400 DA/Q 3700 DA/Q Prix de cession aux détaillants

3600 DA/Q 4000 DA/Q Prix de cession aux consommateurs

900 DA 1000 DA Prix du sac de 25 kg

Blé tendre 1285 DA/Q Prix entré semoulerie 2004

Farine de panification

2000 DA/Q Prix de cession aux boulangers 1996

Baguette de pain amélioré (250 g)

8,5 DA Prix de vente au consommateur 1996

Baguette de pain amélioré (500 g)

17 DA Prix de vente au consommateur 1996

Baguette de pain courant (250 g)

7,5 DA Prix de vente au consommateur 1996

Baguette de pain courant (500 g)

15 DA Prix de vente au consommateur 1996

La détermination des prix réglementés ci-dessus découle de plusieurs éléments. En premier, nous avons le prix de base, qui correspond soit au prix de revient, acheté aux producteurs locaux, soit au prix de revient à l’importation. Il comprend la valeur d’achat en coût et fret, augmenté des droits de douane, des frais bancaires (de financement dans certains cas), des assurances et des prestations de service portuaires. On rajoute à ce prix de base, les redevances, celles-ci comprennent : la redevance de financement et de magasinage et la redevance de péréquation des frais de transport. Nous obtenons donc un prix supérieur au prix de base. Pour qu’au final, les pouvoirs publics déterminent le Prix de rétrocession aux transformateurs qui est fixé depuis 2008 à 2 280 DA/q pour le blé dur et depuis 2004 à 1285 DA/q pour le blé tendre.

Conclusion

À travers le temps, la filière blé est devenue hautement stratégique pour l’Algérie, la production locale de blé est incapable de satisfaire la totalité de la demande intérieure, le recours structurel aux importations contribue de façon importante à la disponibilité interne du blé et des céréales en règle générale. Par conséquent, le taux de dépendance aux marchés internationaux pour ce produit est assez important et représente une moyenne annuelle de 70 % de la consommation intérieure sur la période (1992-2011)8. Cela est dû à plusieurs raisons dont, l’augmentation de la moyenne de consommation par individu, de l’augmentation de la consommation globale entraînée par la croissance démographique, de la stagnation de la production nationale, de la faiblesse de la surface agricole totale par habitant et des conditions climatiques difficiles et aléatoires.

C’est dans un contexte aussi mitigé que les politiques alimentaires sont mises en œuvre en Algérie. Mais au-delà des résultats qu’enregistre la filière, les politiques de régulations sont également influencées d’une part, par l’évolution des prix internationaux des produits agricoles et d’autre part par l’environnement macroéconomique dans lequel le pays évolue (niveau de revenu de l’État, mouvement de libéralisation, économie rentière… etc.). C’est pour cette raison que nous analyserons dans le chapitre suivant, l’évolution du dispositif de régulation du marché du blé en Algérie ainsi que sa relation avec le marché international. Cette analyse permettra de dresser le parallèle entre les politiques de la filière, les prix internationaux et l’organisation du marché du blé.