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Partie III : réforme des subventions du marché du blé, quelle politique privilégier ?

Chapitre 5 : modification du cadre théorique et modélisation du marché du blé

1. Le marché du blé dans la matrice

1.2. Le marché du blé dans la MCS

Les variables présentées dans le tableau ci-dessus sont introduites dans la matrice en éclatant le secteur agricole en deux comptes distincts : Blé et autres cultures. Étant donné que ces mêmes variables existent pour le total du secteur agricole, le fait de les introduire ne devrait pas poser de problème d’équilibre de la MCS. Malheureusement, ces données qui proviennent de sources diverses déséquilibrent la matrice, au niveau de la valeur de l’offre de bien composite et de la valeur de la production au coût des facteurs, un déséquilibre apparait entre les lignes et les colonnes. Face à cette situation, il est impossible de savoir précisément quelles sont les données qui sont à la source de ce déséquilibre, en sachant que toutes ces valeurs sont de 2009, mais proviennent de sources différentes. Comme pour la construction de la MCS agrégée, des écarts existent pour une même donnée en fonction de la source d’information exploitée. Afin d’atteindre l’équilibre macroéconomique de la MCS, nous appliquerons l’équilibrage selon les mêmes méthodes présentées dans la partie précédente. Nous retenons la matrice équilibrée selon la méthode « Cross Entropy » pour les raisons

suivantes : contrairement aux autres méthodes, celle-ci permet de fixer certaines variables. Dans notre cas, ces variables concernent la consommation des ménages 𝐸𝑏𝑙é, la production de blé 𝑉𝐷𝑏𝑙é et l’importation 𝐼𝑀𝑏𝑙é.

Les subventions du marché du blé :

Une fois la matrice équilibrée, nous introduisons les données relatives aux subventions versées au marché du blé. Initialement, les subventions alimentaires ne sont pas représentées dans la MCS d’une manière explicite. Elles sont d’une part comprises dans les transferts intergouvernementaux, et d’autre part, la valeur des subventions est diminuée des différents flux d’impôts exprimés en valeurs nettes. En effet, le calcul des taxes dans la MCS se fait en valeur nette de subvention. Les droits de douane et les impôts indirects prélevés sur la valeur du produit composite ne prennent pas en compte les subventions, qu’elle soit destinée à la production (déduite des impôts sur la production) ou à la consommation (déduite sur les taxes et droits de douane appliqués aux produits composites).

Quand on parle de subventions ici, on fait allusion aux subventions qui touchent au prix à la consommation du blé sur le marché intérieur. Il nous faut donc comprendre la manière avec laquelle l’État verse cette catégorie de subventions pour maintenir un prix du blé fixe et relativement bas sur le marché intérieur. Car au final, c’est cette mesure d’intervention publique, appelée plus communément « subventions à la consommation » dont nous souhaiterions simuler l’élimination. Elles sont directement versées à l’office national des céréales (OAIC), qui est chargé d’acheter le blé sur le marché international et aux producteurs nationaux et de les revendre à un prix fixé par les pouvoirs publics. Mis à part quelques périodes de forte baisse des prix internationaux, ce prix, appelé « prix de rétrocession » a presque tout le temps été inférieur au prix du marché international, et au prix d’achat de la production nationale. L’OAIC ne fait que compenser la différence, entre le prix international et le prix à la production d’une part, et le prix à la consommation finale d’autre part. C’est cet écart qui constitue le budget des subventions à la consommation.

À ne pas confondre avec le prix minimum garanti (PMG) pour la production nationale, qui lui n’est pas considéré comme une subvention directe, il n’y a pas de budget prévu à cet effet.

C’est juste un rachat de la production nationale de blé à un prix fixe que l’État s’engage à payer aux agriculteurs. Il ne comprend pas de versement d’aides directes à la production ou de versement de compensation comme c’est le cas pour les subventions à la consommation. Le PMG est tout simplement un prix à la production de blé que nous considérons comme une variable fixe dans le modèle.

Certes, il existe une autre catégorie de subvention en amont, servant à soutenir la production nationale de blé. Ces subventions interviennent à différents niveaux du processus de production et sont versées à travers deux fonds : le fonds national de développement et de l’investissement agricole et le fonds national de la régulation des produits agricoles. Elles concernent les subventions des intrants, l’irrigation, l’infrastructure de stockage…etc. Ces subventions n’influencent pas le prix à la consommation du blé sur le marché intérieur, elles servent uniquement à soutenir la production en augmentant les rendements et les volumes produits. De toutes les manières, cette production est rachetée par l’État qui est chargé de la

remettre sur le marché à un prix réglementé. Nous aurions pu modéliser ces subventions si nous voulions étudier l’impact des aides directes de l’État sur la performance du secteur du blé. Mais cette question n’est pas au centre de notre étude, qui s’intéresse à la régulation du marché intérieur du blé sous l’angle des prix à la consommation. En effet, le fait d’avoir

privilégié l’angle de l’impact sur la sécurité alimentaire de la population nous pousse à nous

intéresser principalement à cette dernière catégorie de subvention. La MCS et le MEGC seront donc ajustés pour prendre en compte les subventions à la consommation afin de répondre à nos questions de recherche. Reste à savoir maintenant, de quelle manière pourrait- on les inclure dans la MCS ? Pour y parvenir, nous devons nous baser sur les informations recueillies dans la première partie de la thèse.

L’analyse du système de régulation du marché nous renseigne d’une part, sur la manière avec laquelle les subventions au prix à la consommation sont calculées, et d’autre part, à travers quel canal elles sont versées pour soutenir le prix à la consommation de blé.

Dans les faits, le budget alloué aux subventions est totalement financé par les pouvoirs publics. Ce financement est alloué sous forme de transfert public pour soutenir la consommation finale des agents (ménages et entreprises) en blé et ses dérivés. Dans notre modèle, la nouvelle variable représentant ce transfert est appelée (𝑆𝑈𝐵𝑏𝑙é). Elle ne représente

pas un transfert direct vers les agents concernés, mais un transfert vers le produit composite « blé », initialement rajouté à la MCS.

Par conséquent, la valeur de cette variable est inscrite à l’intersection de la ligne correspondant au produit composite « blé », compte 31A, et de « État », compte 6. Ce qui suppose que ce flux est une dépense de l’État au bénéfice de la consommation du produit « blé ». Ou bien, on pourrait l’exprimer autrement, en considérant la variable (𝑆𝑈𝐵𝑏𝑙é) comme un transfert social, ou une aide de l’État reçu par le marché du blé lui-même. Une fois cette variable rajoutée, et afin de garder la cohérence initiale de la MCS, nous devons modifier d’autres variables qui contiennent implicitement, dans leur calcul la valeur des subventions qui vient d’être rajoutée. À cet effet, et afin de respecter l’équilibre initial de la MCS, nous devons retracer le cheminement du versement de ces subventions comme dans les faits, pour cibler les variables à modifier. Nous commençons premièrement par la variable des transferts intergouvernementaux, qui inclut entre autres les transferts de budget provenant de l’administration centrale (ministère ou autres) vers les organismes chargés de la subvention des différents secteurs. L’OAIC, en tant qu’organisme chargé des subventions, reçoit son budget à travers les transferts intergouvernementaux, dans lesquels est inclus le montant des subventions à la consommation du blé (𝑆𝑈𝐵𝑏𝑙é).

Premièrement, afin de ressortir la valeur des subventions à la consommation dans la matrice, nous la déduisons de la valeur des flux intergouvernementaux. Le budget des dépenses de l’État (𝐶𝐺𝐸𝑡𝑎𝑡) ainsi que la valeur de ces revenus (𝑌𝐸𝑡𝑎𝑡) ne change pas, nous procédons simplement à une réaffectation des dépenses pour des raisons de modélisation. Nous voulons au final que les subventions à la consommation du blé apparaissent implicitement dans la MCS.

Deuxièmement, nous rajoutons la valeur des subventions (𝑆𝑈𝐵𝑏𝑙é) au montant des impôts indirects appliqué au produit composite du « Blé ». Comme nous l’avons expliqué plus haut, cet impôt est calculé en valeur nette de subvention, c’est-à-dire qu’il y a eu une déduction de la subvention à la consommation du blé à partir de l’impôt initial que verse la filière blé à l’État. C’est cette valeur nette que nous retrouvons dans la MCS agrégée. En rajoutant la valeur des subventions à cet impôt, nous rétablissons l’équilibre général de la matrice. La valeur du produit composite est maintenant augmentée des subventions à la consommation, en ligne et en colonne. La valeur de ce qui est offert sur le marché local est donnée en valeur totale incluant les subventions. En effet, en prenant en compte les subventions à la

consommation, la valeur de ce qui est vendu comme blé sur le marché local est plus élevée (en colonne), mais le montant de ce que payent les ménages (𝐸𝑏𝑙é) et les différents secteurs (𝐶𝐼𝑏𝑙é,𝐽) pour la consommation de blé (en ligne) reste la même. Les valeurs de ces deux consommations (𝐸𝑏𝑙é et 𝐶𝐼𝑏𝑙é,𝐽) sont rajoutées à ce que verse l’État comme différence de prix. C’est la différence entre la valeur de l’offre de blé sur le marché local (en colonne) et la valeur de la consommation de ce produit par les différentes catégories d’agents (en ligne). Au final, nous obtenons le même total de la valeur de l’offre locale et la valeur de la consommation intérieure.

Le tableau suivant résume les étapes de modifications apportées à la MCS-Algérie de base.

Tableau 22. Synthèse des modifications de la MCS de base

Agent Produit I MEN État ……. Agriculture Blé Autres …… Total Facteur L WL K RK Agent MEN YH État 𝐓𝐑𝐀𝐍𝐒𝐅é𝐭𝐚𝐭,é𝐭𝐚𝐭 - 𝑺𝑼𝑩𝒃𝒍é 𝑻𝑰𝒃𝒍é + 𝑺𝑼𝑩𝒃𝒍é 𝒀é𝒕𝒂𝒕 Branche J Blé 𝑉𝑋𝑏𝑙é Autres 𝑉𝑋𝑎𝑢𝑡𝑟𝑒𝑠 …….. …….. Produit I A gr icu lt ur e Blé 𝑺𝑼𝑩𝒃𝒍é 𝑽𝑿𝑫𝒃𝒍é A ut re s 𝑉𝑋𝐷𝐴𝑢𝑡𝑟𝑒𝑠 ………. …… Total 𝑌ℎ 𝒀é𝒕𝒂𝒕 …… 𝑽𝑿𝑫𝒃𝒍é 𝑉𝑋𝐴𝑢𝑡𝑟𝑒 𝑉𝑋𝑗

Source : synthèse de l’auteur

En lisant ce tableau, on voit clairement les modifications apportées. À partir de la MCS initiale pour 2009, nous avons divisé le secteur agricole en deux comptes « blé » et « autres cultures », et nous avons introduit les subventions à la consommation du blé, à l’intersection du compte « État » et du produit composte « blé ». Enfin, nous avons réajusté d’autres variables (TRANSFétat,état et 𝑇𝐼𝑏𝑙é) afin que la cohérence globale de la MCS soit respectée.

Nous terminons cette étape de modification de la MCS par la vérification de l’équilibre macroéconomique. Comme nous l’avons déjà effectuée pour la MCS agrégée, nous reprenons les trois équilibres présentés dans la partie précédente, à savoir31 :

Y + M = C + G + IT + E Et M + REV = E + TR + SR Ou IT = SP + SG + SR

L’équilibre macroéconomique de la MCS est une fois encore respecté, le fait d’avoir éclaté les données agricoles en deux sous comptes économiques n’a pas affecté le résultat final. Le fait d’avoir ressorti les subventions à la consommation dans les flux de la MCS n’a également pas affecté sa cohérence globale. La MCS est de ce fait prêt pour calibrer le MEGC prenant en compte le marché du blé et les subventions à la consommation.

Nous passons maintenant à l’étape de la modélisation du marché du blé. Nous tenterons dans ce qui va suivre de présenter étape par étape, les particularités du fonctionnement de ce marché, et de les inclure dans le MEGC initiale.