• Aucun résultat trouvé

DES EMPIRIES

Chapitre 1 : La classe de Claire

1.1 Description des modalités d’évaluation retenues avec l’enseignante

1.1.2 Principes retenus à partir du Portfolio Européen des Langues

Cette sous-partie présente les différents principes discutés et retenus avec l’enseignante concernant les choix des activités et des dispositifs susceptibles de favoriser l’installation d’une collaboration dans l’évaluation comme soutien à l’apprentissage au regard de notre hypothèse générale. Nous postulons que la mise en œuvre d’une microculture de classe visant une évaluation-soutien d’apprentissage ne peut se réaliser que si l’enseignant construit des dispositifs didactiques explicitant son importance, d’où la nécessité que les enseignants et la chercheuse-doctorante les co-construisent. Ceci est en écho avec nos questions de recherche suivantes :

Comment un agir évaluatif partagé se construit-il dans l’enseignement et l’apprentissage des langues étrangères ? Quels sont les processus de régulation de l’enseignement et de l’apprentissage que permet cet agir évaluatif partagé en classe ?

Quelle est la contribution de l’enseignant et la contribution de l’élève et comment interagissent-elles dans les moments partagés ? Qu’est-ce qui est partagé collectivement dans cette évaluation ?

Ces principes trouvent leur ancrage dans le cadre conceptuel du Portfolio Européen des Langues (désormais PEL), outil d’autoévaluation promu par le Conseil de l’Europe en 2001.

Pour la présentation de cet outil, nous renvoyons à la section 3 de notre revue de littérature. En nous inspirant de ces différents éléments, nous explicitons ci-après les deux principes retenus avec Claire pour sa classe : la structure du document d’accompagnement de l’étudiant et l’autoévaluation.

124 1.1.2.1 La structure du document d’accompagnement de l’apprenant

Dans sa classe d’espagnol, Claire n’utilise pas le PEL, mais un livret d’accompagnement de l’étudiant, fruit d’un travail en équipe pédagogique des enseignants d’espagnol du CdESP. La fonction de ce livret, selon Claire, est de permettre aux étudiants « de réfléchir à leur travail, de l’analyser et de comprendre ainsi leurs avancées et leurs difficultés pendant le cours et en dehors du cours » (ESP-ENT-EN-1). Pour elle, il est important que les étudiants l’aient avec eux à chaque cours.

Ce livret se présente sous la forme d’un feuillet en format A4, composé de six parties, que nous présentons ci-dessous :

1. Les Attentes et Mes objectifs rassemblent les attentes institutionnelles au sujet du niveau linguistique des étudiants, identifié selon les indicateurs du CECRL, et les objectifs nommés par les étudiants par rapport à ce niveau.

Figure 18. Présentation des niveaux européens (p. 2 du livret d’accompagnement, CdESP)

2. Les Aides au travail personnel où l’enseignante propose aux étudiants différentes sources, lieux, supports pour interagir avec des hispanophones en France. Ici, la fonction de cette partie est de lier la pratique de la langue dans la classe à celle hors de la classe.

125

Figure 19. Aides au travail personnel (p. 3 du livret d’accompagnement, CdESP)

Ces propositions sont complétées par des suggestions de Stratégies et de conseils méthodologiques. L’enseignante nomme ici des propositions de stratégies et de conseils que les étudiants pourraient mettre en œuvre et qui, selon elle, leur permettraient de progresser dans leur apprentissage.

Figure 20. Conseils méthodologiques (p. 4 du livret d’accompagnement, CdESP)

126

Figure 21. Stratégies pour progresser dans l’apprentissage (p. 4 du livret d’accompagnement, CdESP)

3. La biographie langagière L’espagnol et moi constituée par une production écrite dans laquelle chaque étudiant rédige un texte afin de raconter son histoire personnelle avec la langue et la culture espagnoles.

Figure 22. Exemple d’une biographie langagière rédigée par un étudiant (p. 3 du livret d’accompagnement, CdESP

127 4. Les bilans des séances (Bilan du TD du -jour-) : à la fin de chaque séance, les étudiants prennent un temps en classe puis après la classe, pour revenir sur ce qu’ils ont fait en cours, ce qu’ils retiennent, ce qui leur a paru difficile… (nous y reviendrons dans le deuxième principe retenu présenté dans cette sous-partie).

Figure 23. Exemple d’un bilan de séance rempli par un étudiant (p. 6 du livret d’accompagnement, CdESP)

128 5. Les bilans des travaux en autonomie guidées (TAG), nommés TD guidage, ainsi que les grilles d’évaluation des productions écrites renseignées par l’étudiant en autoévaluation et par l’enseignant (lorsque le TAG a comme tâche finale une production écrite).

Figure 24. Exemple d’un bilan de TAG rempli par un étudiant (p. 10 du livret d’accompagnement, CdESP)

Figure 25.Exemple d’une fiche d’évaluation de production écrite remplie par un étudiant (p. 11 du livret d’accompagnement, CdESP)

129 6. Le dossier dans lequel les étudiants peuvent joindre toutes les productions qu’ils estiment représentatives de leur niveau et qui illustrent les travaux réalisés au fur et à mesure de l’avancée du semestre.

Figure 26. Exemple d’une production écrite rédigée par un étudiant dans le cadre du TAG (p. 6 du livret d’accompagnement, CdESP)

Ainsi, nous mettons en lien le PEL présenté au début de cette sous-partie et le livret d’accompagnement de l’étudiant de la classe de Claire. Nous retrouvons des similitudes concernant la structure et la constitution des deux outils, notamment la biographie langagière, la place de l’autoévaluation et le dossier des productions. Le tableau ci-dessous résume les correspondances entre les deux outils.

Tableau 13. Correspondances entre le PEL et le livret d’accompagnement du CdESP Correspondances Portfolio Européen des Langues

(Conseil de l’Europe, 2001)

Livret d’accompagnement de l’étudiant (CdESP)

Partie 1 Biographie langagière « L’espagnol et moi »

Partie 2 Passeport des langues et autoévaluation « Les attentes », « Mes objectifs », « bilan du TD du (date) », « TD guidage »

Partie 3 Dossier « Dossier »

130 Nous constatons que la structure et l’organisation des deux outils sont fondées sur les mêmes principes, que nous développons dans la section suivante.

1.1.2.2 L’autoévaluation en lien avec l’utilisation du Portfolio Européen des Langues dans la classe de Claire

Lorsque nous avons mis en parallèle la structure du livret d’accompagnement utilisé par Claire et celle du PEL, nous avons mis en exergue des similitudes. Un deuxième rapprochement est possible avec les principes qui président à ces outils : le recours à l’autoévaluation dans sa prise en charge par l’apprenant lui-même, comme nous l’avons développé dans la revue de littérature.

Dans les entretiens ESP-ENT-E-1 et ESP-ENT-E-2 avec Claire, il est apparu important d’utiliser ces éléments comme point de départ. L’enseignante a donc choisi de mettre en place des activités spécifiques d’autoévaluation lors de bilans réflexifs en cours et en fin d’apprentissage. Claire utilise ces bilans réflexifs de plusieurs manières, et notamment pour :

- Demander à l’étudiant de se positionner par rapport au CECRL en début d’année et/ou de période ;

- Mettre en place, dans le cadre de la classe, des temps permettant de faire le point avec les étudiants sur leurs parcours : acquisitions, difficultés rencontrées, suite à donner à la formation ;

- Instaurer des entretiens individualisés où chaque étudiant peut, à partir de ses travaux, apporter la preuve à l’enseignant de l’acquisition de ses compétences à des fins de validation.

Le retour réflexif se fait lorsque les apprenants s’autoévaluent. Dans ce cas, le résultat final n’est plus uniquement perçu comme central, car le processus occupe le cœur de l’apprentissage.

Relevant de ce processus, le retour réflexif peut être plus ou moins long à mettre en place avec les apprenants. Pour cette raison, il peut faire partie intégrante des apprentissages et donc de la formation. En effet, lorsqu’ils arrivent dans le classe de Claire, les étudiants ne savent pas forcément s’autoévaluer. Certains, d’ailleurs, ont de réelles difficultés à prendre de la distance et à revenir sur ce qu’ils ont réussi ou non (nous y reviendrons plus tard). Pour tenter de favoriser ce processus dans la classe, à chaque étape de production, est proposée une grille d’autoévaluation (les critères de la grille sont discutés et négociés avec les étudiants), ce qui a permis de renforcer la compréhension et le contrôle des attendus de l’évaluation par les étudiants eux-mêmes. Ces grilles étaient à chaque fois en lien avec les descripteurs du CECRL, pour assurer l’adéquation entre les objectifs de l’enseignement et les descripteurs, mais aussi pour permettre aux étudiants d’établir le lien avec le cours au moment de l’autoévaluation.

Toutefois, en croisant nos questions de recherche, nous pouvons nous demander comment un apprenant entreprend de s’autoévaluer, c’est-à-dire d’utiliser les critères définis sur son propre travail. La section 3 aura pour but de documenter cet aspect. Ces bilans visent une plus grande explicitation des objectifs, une plus grande cohérence dans les situations d’apprentissage, mais demandent plus de souplesse dans la gestion de la planification du semestre, ainsi qu’un réel échange concernant les critères d’évaluation. Cela nous permet de croiser les enjeux de cette autoévaluation, tels que nous les avons développés dans la revue de littérature, et les pratiques de classe que nous allons présenter dans la partie suivante.

131

1.2 Description des séquences d’enseignement observées dans la classe de