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Principaux dysfonctionnements et risques

Mesurer pour piloter

1.3. Pistes de réflexion

2.2.3. Principaux dysfonctionnements et risques

Nos déplacements ont mis en évidence un certain nombre de dysfonctionnements présentés ci-après. Il convient toutefois de préciser que les difficultés rencontrées par les collectivités, en matière de systèmes d’information, sont essentiellement dues à un environnement en bouleversement, de nature à « déstabiliser » l’organisation.

ƒ Appréhension insuffisante de ces bouleversements par la direction générale

Autant les directions générales sont entrées dans une dynamique d’amélioration de la performance, autant elles n’ont pas pleinement intégré les enjeux liés à leur système d’information. Or, le système d’information contribue de manière majeure au pilotage de la performance.

Comme indiqué dans l’introduction, il n’est pas anormal que les collectivités donnent l’impression de tâtonner en raison des bouleversements technologiques. En l’état, il est excessivement difficile d’anticiper les conséquences organisationnelles qu’auront introduit, à terme, les avancées technologiques.

Par ailleurs, le sujet SI est une matière volatile et complexe. Comme nous avons pu le voir dans la première partie, le système d’information est constitué de centaines de sous-systèmes d’information liés entre eux. Imaginer une architecture globale du SI permettant de mieux piloter l’organisation et sa performance relève du défi. C’est pour cette raison que certaines collectivités hésitent fréquemment à réaliser un schéma directeur de leur système d’information.

Au final, les directions générales sont conscientes de la nécessité de réorganiser, voire de refondre leur système d’information sans parvenir à définir clairement une stratégie. Cette

situation s’explique d’autant plus qu’il s’agit de « gros » chantiers mobilisateurs d’énergie et de ressources budgétaires.

ƒ Le SI vu comme le domaine réservé de la DSIT

Le système d’information d’une collectivité est souvent considéré comme la seule affaire de la DSIT. Cette vision est une construction historique. Elle était nécessaire pendant la construction des systèmes informatiques et de télécommunications des collectivités. En l’état, elle devient contre-productive.

Le système d’information n’est plus aujourd’hui le domaine réservé de la DSIT, même si celle-ci en est un acteur important. Le SI d’une collectivité est aujourd’hui l’affaire de tous, et notamment de la direction générale. Quel agent ou quel service peut aujourd’hui travailler sans système d’information ? Aucun. Il est donc devenu hautement stratégique pour la collectivité.

Parmi les principaux dysfonctionnements observés au cours de nos déplacements, on signalera :

‚ absence fréquente d’une réflexion générale sur l’organisation du système d’information. Seulement la moitié des collectivités dispose d’un schéma directeur du système d’information ;

‚ vision trop restrictive du système d’information qui est plus conçu pour la production que pour le pilotage ;

‚ des objectifs fixés à la DSIT quasi-inexistants par rapport aux besoins de pilotage de l’organisation et de sa performance ;

‚ articulation « sous-optimale » entre les ressources fédérales et les ressources fédérées ;

‚ difficultés à anticiper les conséquences organisationnelles des TIC.

ƒ Une DSIT de plus en plus sollicitée

La direction générale et les directions opérationnelles sollicitent de plus en plus la DSIT pour développer des solutions informatiques. Or, cette dernière dispose de moyens limités et ne peut pleinement répondre à l’ensemble des demandes, sauf à jouer sur la qualité et les délais ou à externaliser.

Par ailleurs, les services ont parfois – voire souvent – du mal à définir précisément leurs besoins.

Plus généralement, on observe un « choc » des cultures entre les services opérationnels et les services informatiques.

ƒ Positionnement stratégique de la DSIT insuffisant

On constate que la DSIT est insuffisamment associée en amont de projets. Elle est souvent appelée en « pompier » lorsque les projets patinent.

De façon plus générale, la DSIT est souvent isolée dans la structure et participe insuffisamment aux réflexions sur le pilotage de l’organisation et de sa performance. Les collaborations avec le contrôle de gestion et l’audit sont plutôt rares ou trop ponctuelles. La DSIT est pourtant un partenaire privilégié de l’évaluation.

ƒ Des services qui développent leurs propres solutions

Pris par l’urgence de leurs missions, les services opérationnels et fonctionnels peuvent avoir tendance à développer leurs propres outils, sans forcément se coordonner avec la DSIT, ce qui finit par conduire à un SI non maîtrisé.

Cette situation trouve plusieurs explications et présente de nombreux risques :

‚ Les services peuvent être tentés par de nouvelles applications informatiques répondant à leurs besoins.

‚ Face à l’augmentation sensible du volume et des sources d’information, les services doivent s’organiser. On a constaté l’apparition de plus en plus fréquente d’observatoires sociaux dans les conseils généraux et fiscaux dans les villes.

‚ Il est fréquent que les services produisent des chiffres incohérents concernant une même information. La fiabilisation des données du système d’information est un enjeu central des directions. C’est la raison pour laquelle on parle de plus en plus de datawarehouses8.

‚ En certains cas, les services doivent répondre rapidement à une sollicitation, nécessitant le développement d’outils spécifiques et ponctuels. Il reste, qu’une fois développés, ces outils restent utilisés dans le service.

ƒ Une administration à deux vitesses

Enfin, on peut constater, à un degré plus ou moins fort selon les collectivités, l’apparition de deux catégories d’agents : ceux qui ont pleinement intégré l’intérêt des TIC et qui les utilisent sans complexe, même avec un certain enthousiasme ; ceux qui n’ont pas pris le train des TIC et qui sont restés au bord des rails numériques. On assiste à une dualisation de la collectivité, de nature à la déstabiliser.

Pour autant, la stratégie actuelle des collectivités contribue manifestement à réduire la fracture numérique. De plus en plus d’agents ont accès au système d’information.

ƒƒƒ

Le système d’information des collectivités vit un véritable bouleversement qui remet en cause leur organisation historique. Comme dans tous les domaines, les TIC ont contraint et vont contraindre les collectivités à changer.

2.3. Pistes de réflexion

Comme indiqué à plusieurs reprises dans le guide, nous retiendrons qu’être performant c’est se donner les moyens de décider en connaissance de cause. La qualité du système d’information constitue donc un facteur essentiel de la performance des collectivités.

Or, les évolutions technologiques actuelles remettent en cause le système d’information historique des collectivités et leur organisation interne.

A court terme, les collectivités n’auront plus le choix : elles devront substantiellement faire évoluer leur système d’information afin de répondre aux nouveaux objectifs de performance.

Pour conclure cette fiche, les pistes de réflexion suivantes sont proposées.

ƒ Repositionner le système d’information en fonction hautement stratégique

Le système d’information est encore souvent considéré comme un outil technique au service de la stratégie. Or, les évolutions technologiques ont placé le système d’information au centre de la collectivité : la plus grande partie des tâches administratives est réalisée en s’appuyant sur le système d’information. Cette « centralité » rend le système d’information stratégique puisqu’il est présent à tous les niveaux de l’administration territoriale.

ƒ Définir une stratégie concernant le SI

Cette composante stratégique impose à la collectivité de définir les grandes orientations de son système d’information en fonction de ses besoins et de ses moyens. Cette réflexion peut, le cas échéant, prendre la forme d’un schéma directeur. Il ressort de l’enquête AFICUF9 que la moitié des collectivités dispose d’un schéma directeur de leur système d’information.

Concernant les aspects stratégiques, quatre éléments nous paraissent fondamentaux :

‚ L’urbanisation des SI : un grand nombre de collectivités réfléchit à une urbanisation de leur système d’information, c’est-à-dire à la mise en place de procédures de réduction du désordre du SI afin de pouvoir le faire évoluer.

‚ L’organisation de la mémoire de la collectivité : à une période de choc démographique, les collectivités doivent s’organiser pour garder en mémoire les informations nécessaires à la continuité du service public. On prendra l’exemple du développement des Systèmes d’Informations Géographiques (SIG).

‚ Le dépendance vis-à-vis des prestataires externes : quel équilibre retenir en maîtrise interne et délégation externe (pour la maintenance et le développement) ?

‚ La maîtrise budgétaire : comment intégrer l’analyse de la valeur dans les arbitrages budgétaires ?

9 Enquête statistique réalisée entre juin et septembre 2006 sur les thèmes évoqués dans ce guide. 72 collectivités

ƒ Bien organiser le partage des fonctions de production et de pilotage du SI

Le SI répond à deux objectif principaux : la production et le pilotage. La seconde fonction est essentielle mais souvent mise de côté.

ƒ Définir une stratégie du changement et accepter temporairement le désordre

La situation actuelle de « quasi-révolution » conduit à générer du désordre dans les systèmes d’information des collectivités. Il faut savoir accepter ce désordre à court terme pour créer de la valeur à long terme. Il est important de laisser naître les initiatives personnelles, d’analyser les échecs et les réussites, de profiter de cette période riche en expériences pour définir une stratégie. Plus la collectivité tâtonnera, plus elle aura des chances de bâtir une stratégie gagnante. Pour autant, ce désordre doit être géré pour être accepté. C’est la raison pour laquelle il pourrait être profitable de définir une stratégie de « gestion du désordre » avant de stabiliser définitivement la collectivité en matière de SI.

ƒ Optimiser les interfaçages entre systèmes d’information

Comme indiqué dans la modélisation du SI présenté dans cette fiche, les systèmes d’information sont interconnectés entre eux. De la qualité de l’interfaçage dépend la qualité du système d’information. Une cartographie des liens entre couches interfacées pourrait permettre de bénéficier d’une meilleure lisibilité des échanges entre couches. On parlera d’interopérabilité entre systèmes d’informations.

ƒ Améliorer l’articulation entre SI fédéral et SI fédérés

Se pose la question du positionnement du curseur entre l’autonomie nécessaire au bon fonctionnement des services et les procédures formalisées indispensables à la stabilité de l’organisation. C’est une question clairement stratégique pour la collectivité

ƒ Développer une stratégie de fiabilisation des données

Environ un tiers10 des collectivités travaillent sur la fiabilisation des informations dans le cadre d’une démarche formalisée, type datawarehouse. Comme vu précédemment, il pourrait être utile de construire une cartographie des processus de validation des données intégrées.

ƒ Promouvoir les avantages des nouvelles technologies

Les nouvelles technologies n’étant pas forcément acceptées par tous, il est essentiel d’en promouvoir l’utilisation : pour l’agent, le confort de travail est amélioré ; pour la collectivité, la productivité s’accroît ; pour l’usager, la qualité du service public augmente ; pour les organes de direction, le pilotage de l’organisation et de sa performance est facilité.

ƒ S’organiser pour réduire la fracture numérique

Dans ces périodes de fort changement, il faut éviter de construire une collectivité à deux vitesses : les agents qui suivent les évolutions technologiques et ceux qui préfèrent ne pas s’engager dans cette voie. Une fracture numérique trop importante conduirait mécaniquement à créer deux types d’organisation respectant des circuits d’information et de décisions

différents. Il faut donc veiller à ce que les agents les plus réfractaires avancent tout de même à une vitesse suffisante.

ƒ Maîtriser le développement « sauvage » des TIC

Le développement débridé des nouvelles technologies a de telles conséquences organisationnelles qu’il convient de stabiliser l’organisation en certains domaines. A titre d’illustration, certaines collectivités produisent des chartes d’utilisation du mail.

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Fiche n°3. Evaluation

Si la performance consiste à se donner les moyens de mesurer pour piloter et pour décider, alors, après le système d’information, qui donne les outils de mesure, et le contrôle de gestion interne, contribuant au système de pilotage de la collectivité, nous abordons la notion d’évaluation.

Évaluer signifie attribuer une valeur, autrement dit mesurer pour parvenir à un résultat sur lequel on portera un jugement. La notion d’évaluation est donc consubstantielle de celle de performance, elle en est même l’étape ultime et déterminante. C’est grâce à l’évaluation que la collectivité peut toucher la réalité de son action, tenter sinon de la quantifier, du moins de la qualifier. La collection de ces jugements va ainsi permettre à la collectivité d’ajuster ses actions de manière à atteindre les buts qu’elle s’est fixés, c’est-à-dire de piloter son action.

Et si l’évaluation est bien au cœur de notre sujet, au cœur de la performance, c’est sans doute parce qu’elle est à la croisée de la mesure et du pilotage.

Pourtant, il ressort des résultats de l’enquête statistique que 61% des collectivités interrogées ne mènent pas de démarches d’évaluation des politiques publiques, avec une forte disparité entre niveau de collectivités. Par ailleurs, on constate que, parmi les collectivités qui pratiquent l’évaluation, cette démarche se fait, en proportion égale, selon un calendrier déterminé et de manière non programmée. Deux autres faits saillants ressortent de l’enquête : dans 75% des cas, l’évaluation est faite avec le concours de prestataires extérieurs, et dans 75% des cas également, les résultats ne sont pas systématiquement rendus publics.

De ces chiffres, quelques impressions ressortent que nous tâcherons d’expliciter dans notre propos : non seulement l’évaluation (pour ne parler que d’évaluation des politiques publiques) est peu développée, mais en plus, là où elle l’est, elle est réalisée grâce à des compétences extérieures à la collectivité, et ses résultats ne sont pas toujours connus. Pourquoi l’évaluation connaît-t-elle cette situation délicate dans les collectivités ? Cela tient-il à l’étroitesse de son périmètre (les politiques publiques), à la difficulté intrinsèque de l’exercice ou encore à l’insuffisante préoccupation des collectivités pour la culture du résultat ?

3.1. Définition