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Les connaissances des étudiants ingénieurs à propos de l’équilibre et

11. Noté R dans les schémas présentés sur la figure 3.1.

3.2.4 Présentation des résultats

Le questionnaire a été proposé à 103 étudiants à la fin du cours d’automatique de juillet 2012. Un nombre quasi équivalent des différentes versions de questionnaires a été administré (voir tableau 3.2).

Variante du questionnaire Quantité distribuée

F1 35

F2 35

F3 33

a 52

b 51

Table 3.2 – Répartition des questionnaire

•Pour la première question, nous avons rassemblé les conditions d’équilibre de même nature avec le codage suivant :

• « NN » : accélération constante nulle, vitesse constante nulle • « NC » : accélération constante nulle, vitesse constante non nulle • « CV » : accélération constante non nulle, vitesse variable

• « CC » : accélération constante non nulle, vitesse constante non nulle

Les trois premiers codes sont issus d’une catégorisation a priori qui rassemble les condi- tions d’équilibre correctes prévisibles. La dernière est issue de l’ajout des réponses trou- vées dans les copies et, bien qu’étant absurde du point de vue mathématique (puisque l’accélération étant la dérivée de la vitesse, ce cas est impossible), regroupe un nombre faible mais non nul d’étudiants (soit un total de 18%). On peut s’interroger sur les causes d’une telle réponse et sur le sens qu’a la dérivée, par exemple, pour ces étudiants16.

La tableau 3.3 récapitule la collecte de ces données : au croisement de la colonne « S1 » et de la catégorie « NN » il y a 92 : il y a donc 92 élèves qui ont trouvé la combinaison « accélération nulle/vitesse nulle » (NN) comme première situation d’équilibre (S1) et si l’on suit la ligne, on remarque que 5 étudiants l’ont trouvé comme deuxième situation (S2). Si l’on regarde le total de la ligne, on peut voir que presque tous les étudiants ont considéré que cette combinaison accélération/vitesse était une condition d’équilibre pour le système ce qui était prévisible et fait état de la bonne compréhension du principe général de fonctionnement d’une partie du système. Ceci est appuyé par les chiffres ré- capitulant les situations d’équilibre identifiées en fonction du système : pour la condition « NN », 94 % des élèves l’ont trouvé pour le système 1, 100 % pour le système 2 et 97 % pour le système 3 (voir table 3.4).

Remarque : Le pourcentage supérieur à 100 dans la colonne « Total » du tableau 3.3

indique que certains étudiants ont fait au moins deux cas avec cette combinaison en considérant que si la tige du pendule par exemple reposait sur le côté, c’était un cas d’équilibre, ce qui est correct (voir figure 3.4). La colonne « Total réel » donne seulement le pourcentage d’étudiants ayant identifié au moins une de ces situations.

On retrouve les résultats de la première partie et en particulier que les situations d’équilibre possibles lors d’un mouvement sont moins bien identifiées (72 % des situations dans le cas d’un mouvement uniforme et seulement 54 % dans le cas d’un mouvement uniformément accéléré) et que cela dépend peu de la forme générale du système (42 % des situations identifiées pour l’arc, 58 % pour le plateau et 62 % pour le pendule en cas d’accélération du chariot, différence cependant non statistiquement significative, p =

16. On peut supputer, ici encore, un effet de contexte, qui pour certains élèves, ferait disparaître le lien entre une variable et sa dérivée. Cela réclamerait cependant davantage d’investigations.

Figure 3.4 – Un exemple avec la justification (Vincent J., n°59) Équilibre S1 S2 S3 S4 S5 S6 Total Total % Total réel Nb NN 92 5 6 1 0 0 104 100,97 97 % Nb NC 6 58 9 2 0 0 75 72,8 69 % Nb CV 3 14 29 5 5 0 56 54,4 49 % Nb CC 0 7 6 5 0 1 19 18,4

Stabilité 47 36 23 9 4 0

Table 3.3 – Question 1 : nombres de situations identifiées Équilibre NN NC CV

Système 1 (pendule) 94 % 69 % 54 % Système 2 (arc) 100 % 66 % 40 % Système 3 (plateau) 97 % 73 % 52 %

Table 3.4 – Question 1 : situations identifiées vs systèmes

0,37, test du χ2). On rappelle ici que la seule application d’un bilan des efforts extérieurs

sur le système permet d’arriver à la même conclusion pour n’importe lequel des trois systèmes, ce qui suggère que, soit les étudiants ne possèdent pas cette connaissance procédural (ce qui sera recherché dans les deux autres questions), soit ils la possèdent mais ne savent pas l’exploiter.

Concernant la stabilité, la table 3.5 montre les pourcentages d’élèves qui considèrent le système stable lorsqu’il est en équilibre17 (les élèves qui considèrent la stabilité en

dehors d’un cas d’équilibre ne sont donc pas comptés) en fonction du type de système. On remarque que la bille sur le plateau apparaît comme un système plutôt plus stable que les autres (15 points d’écart) dans le cas statique, ce qui était prévisible en considérant son apparence proche de la balance, et que dans le cas « accéléré » c’est le contraire qui se produit (avec un écart important pour le système 3 en cas d’accélération, ce qui peut laisser penser que les étudiants n’ont pas bien compris que le plateau pouvait être orienté dans le sens voulu justement pour conserver l’équilibre de la bille).

Stabilité NN NC CV Système 1 (pendule) 42 % 58 % 47 % Système 2 (arc) 45 % 48 % 21 % Système 3 (plateau) 59 % 50 % 6 % Table 3.5 – Question 1 : stabilité Vs systèmes

•Pour la deuxième question nous avons compté les réponses correctes aux trois ques- tions et pour la justification, regroupé les réponses en fonction des arguments donnés par les étudiants (« Somme des forces nulles » ou « les forces se compensent », « Somme des moments nulle », « Mouvement rectiligne et uniforme », etc.).

La table 3.6 récapitule ces résultats : nous avons présenté les pourcentages de réponses correctes par rapport aux réponses fournies et non par rapport au nombre total de ques- tionnaires. Les trois premières colonnes donnent les quantités de réponse « oui/non », les trois suivantes, les justifications correspondantes et enfin la colonne « Q2 » indique le nombre de réponses correctes aux trois questions (sans compter la justification), .

Réponses Q2.1 Q2.2 Q2.3 Q2.1J Q2.2J Q2.3J Q2 Correctes 75 % 66 % 86 % 46 % 44 % 19 % 7 % Incorrectes 25 % 34 % 14 % 60 % 56 % 81 % 93 % Nulles 2 3 4 14 24 28 0

Table 3.6 – Question 2 : Réponses et justifications (pourcentage des réponses non nulles données et nombre)

On remarque que 75 % des étudiants interrogés ont affirmé que l’accélération du cube était nulle alors que seulement 66 % pensent qu’il est en équilibre. En fait parmi ceux-ci, on dénombre seulement 55 % qui font un lien entre « accélération nulle » et « équilibre » et seulement 45 % des sondés lient correctement « accélération nulle », « équilibre » et « possibilité de mouvement du cube ».

On peut modérer les résultats en constatant que 18 % des étudiants semblent relier la vitesse du cube au couple du moteur18 ce qui bien entendu peut conduire à une réponse

erronée (puisque le couple du moteur, par le biais de la tension du fil est à considérer comme un effort sur le cube et donc à relier à son accélération) mais qui n’a pas un rapport direct avec la problématique de l’équilibre.

Si l’on ne tient pas compte des justifications, 44 % des étudiants interrogés ont répondu correctement à la question 2 et si l’on tient compte à la fois des réponses et des justifica- tions, ils ne sont plus que 7 % (c’est-à-dire 7). Des exemples de réponses correctement justifiées sont présentées sur la figure 3.5 (on note que la justification de l’étudiante qui a relié le couple et la vitesse du cube n’y est pas présenté, elle est sur la figure 3.6. Pour celle-ci, malgré l’ambigüité des arguments donnés elle considère bien qu’un mouvement rectiligne et uniforme est un cas d’équilibre mais le fait de relier le couple à la vitesse et non à l’accélération l’empêche de considérer le cas où le cube est au repos).

Figure 3.5 – Les quatre justifications correctes pour la deuxième question (Xavier M., n°74, Guillaume R., n°75, Pierre C., n°56 et Célia B., n°72), de haut en bas et de gauche à droite

•Pour la troisième question nous avons comptabilisé tous les arguments des étudiants

18. De manière très directe comme Noemie J. qui écrit : « Le couple est constant, donc la vitesse est constante. » (voir figure 3.5) ou Sophie K. : « Le couple exercé est constant donc la vitesse de déplacement est constante, […] ».

Figure 3.6 – Justification partiellement correcte de Noémie J., n°1 dans la table 3.7.

Réponses Nombre % Correctes 64 68,8 Incorrectes 29 31,2 Somme des forces 56 60,2 Somme des moments 8 8,6 Somme complète 8 8,6 dEp 18 19,4

dEp nulle 6 6,5

Table 3.7 – Réponses à la question 3, n=103

Les critères donnés par les étudiants sont, dans leur majorité, relativement imprécis ou partiels comme « P ~F = ~0 »19, « accélération nulle », « ~v=cste et mvt translation

rectiligne uniforme »20 ou encore « Forces se compensent »21. Dans la table, on a rangé

dans la catégorie réponses correctes tout argument correct, même partiel, les arguments comptés comme incorrectes sont par exemple « dEc=0 »22 ou « E totale constante »23,

etc.

En ce qui concerne la somme des efforts extérieurs, il y a très peu de réponses strictement correctes et l’on a donc décomposé ensuite les arguments des élèves en « somme des forces », « somme des moments » et « somme complète ».

Il apparaît, dans les formulaires analysés, que tous les élèves qui ont évoqué la somme

19. Alexandra D (n°47). 20. Diane N. (n°67). 21. Morgane M. (n°49). 22. Noemie J. (n°1). 23. Sophie K. (n°17).

des moments, ont évoqué la somme des forces (il y a donc seulement deux groupes, celui avec les élèves qui connaissent le critère complet et ceux qui ne se souviennent que de la somme des forces)

En ce qui concerne les critères liés à l’énergie, nous avons compté comme correcte la réponse « dérivée de l’énergie potentielle nulle »24 bien qu’étant imprécise (on ne sait

pas quelle est la variable de dérivation) et incorrecte la réponse « Ep est à un extremum (dEp

dt = 0) »

25 car ce n’est pas la dérivée par rapport au temps qui permet de conclure

mais la dérivée par rapport à une variable du système (une coordonnée généralisée du système, plus précisément) comme montré sur la réponse de la figure 3.7.

Finalement, les étudiants qui donnent au moins une réponse correcte - même partielle - représentent 68 % des sondés (qui donnent une réponse).

Figure 3.7 – Un exemple de réponse correcte relative à un critère énergétique (Jimmy D., n°2)

3.2.5 Analyse

Premièrement, on remarque que l’ordre de présentation des arguments « vitesse » et « accélération » n’a pas d’influence sur le nombre des situations d’équilibre identifié (questionnaires « a » et « b »), l’ordre d’apparition des arguments ou même le nombre de réponses « impossibles » comme le couple {Accélération non nulle, vitesse constante}. Ensuite, on constate que le nombre d’étudiants qui connaissent - ou proposent - des critères d’équilibre corrects (strictement) est plutôt faible, inférieur à 10 %, bien que presque 70 % proposent un critère « acceptable » (la somme des forces dans la majorité

24. Alexis T.(n°83). 25. Guillaume B. (n°10).

des cas26) ce qui indique une connaissance approximative des lois de la mécanique clas-

sique dans ce domaine (et pas seulement au sujet des lois de Newton mais aussi en ce qui concerne les critères énergétiques).

D’autre part, les étudiants qui font les liens (corrects) entre équilibre, accélération et

mouvement dans une situation relativement simple de mécanique des solides en trans-

lation ne représentent que 43 % des sondés et ceux qui sont en mesure de justifier correctement ces liens, à peine 5 %.

On remarque cependant que les taux de réponses correctes à la première question rela- tivement à l’équilibre sont en moyenne de l’ordre de 97 % dans un cas statique et de l’ordre de 48 à 69 % en cas de déplacement (le plus faible taux étant constaté pour le mouvement uniformément accéléré) et ceci indépendamment de la « forme du système ». Concernant la stabilité, on constate des taux de réponses correctes proche de la moyenne quel que soit le système dans les cas statiques et uniformes et une disparité importante entre les systèmes en cas de mouvement uniformément accéléré. Finalement, les étu- diants répondant correctement aux trois questions ne représentent que 12% des sondés si l’on accepte les justifications erronées et seulement 3% si l’on considère seulement les réponses exactes.

3.3 Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons cherché à vérifier les connaissances déclaratives, procé- durales et schématiques des étudiants des cursus ingénieurs relativement à l’équilibre et la stabilité en mécanique. On constate que même si les deux tiers d’entre eux connaissent des critères, définitions et procédures liées à ces concepts, à peine 10 % eux est en capa- cité de l’énoncer correctement. Comme cela a été montré dans des recherches antérieures (Solaz-portolés & López Sanjosé, 2008, par exemple), la possession de connaissances dé- claratives est une condition nécessaire pour mener à bien une résolution de problème. On peut constater que les étudiants de notre panel, ne possédant pas ces connaissances de manière pleine et entière, ne sauraient donc être en mesure de résoudre adéquatement ce type de problème. Malgré cela, ils sont assez nombreux à conclure correctement dans le cas de la question 1 pour ce qui concerne les systèmes au repos ou en mouvement uniforme par rapport au sol ce qui laisse à penser que les connaissances testées dans les questions 2 et 3 ne sont pas les seules utilisées. Ceci est tout-à-fait cohérent avec les

travaux précédents dans ce domaine et ceux du chapitre 1 : les aspects de surface des si- tuations sont utilisés en priorité pour résoudre le problème posé lorsque les connaissances sont « morcelées », c’est-à-dire lorsqu’il y a un manque de structuration de ces connais- sances. Ceci permet donc aux étudiants dans certains cas de réussir la tâche demandée (par exemple si la situation ressemble suffisamment à une situation connue) relativement indépendamment des connaissances déclaratives possédées sur le sujet mais lorsque la situation est suffisamment inhabituelle (par exemple dans les situations de mouvement accéléré), comme elle implique à la fois la mobilisation des connaissances déclaratives, procédurales et schématiques, le taux d’échec est élevé. On constate aussi que moins d’un dixième des étudiants interrogés fait des liens opérationnels entre ces connaissances déclaratives (procédures, critères et lois) leur permettant de les utiliser en situation, et ce, en fin de niveau L3 d’un cursus ingénieur généraliste.

En conclusion, une part des difficultés rencontrées par les étudiants peut être im- putée à un manque de connaissances déclaratives, procédurales et schématiques. Cela les pousserait en particulier à appliquer des stratégies alternatives de résolution de pro- blèmes comme celles identifiées dans le chapitre 1, qui sont relativement peu structurées et donc peu opérationnelles dans des situations « non standards ». On peut remarquer aussi sur cet exemple de questionnaire, que l’évaluation des connaissances déclaratives et procédurales ne donne pas d’informations sur le caractère opérationnel de celles-ci, c’est- à-dire sur les connaissances schématiques (et stratégiques), et qu’une évaluation basée sur les connaissances schématiques, comme celle proposée en premier dans le question- naire présenté, ne permet pas d’évaluer les connaissances déclaratives et procédurales, ce qui est cohérent avec les travaux de Shavelson et al. (2005), par exemple (qui propose des méthodes d’évaluations adaptées à chaque type de connaissances).

Exploration des origines possibles des