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Présentation de la méthode de B raun -B lanquet

Dans le document écologique des milieux naturels (Page 118-125)

Cette méthode de description de la végétation comprend deux étapes :

• une étape analytique sur le terrain qui consiste à réaliser des relevés de végétation ;

• une étape synthétique au bureau qui consiste à classer les relevés afin d’en identifier les associations végétales.

a) Étape analytique (phase de terrain) Cette étape a pour but d’établir une liste complète des taxons présents dans un échantillonnage de surface suffisante. L’étape suivante d’interprétation et d’analyse repose sur la précision et la rigueur des relevés sur le terrain.

La première phase d’une étude phytosociologique consiste tout d’abord à définir des surfaces (aires) de relevés sur l’ensemble du territoire d’étude. Se-lon la physionomie de la végétation, il est possible de distinguer diverses formations végétales : forêt, haie, lande, pelouse, roselière…

Les relevés phytosociologiques peuvent être effec-tués dans des quadrats et selon des transects.

Pour chaque aire de relevé, la liste des espèces présentes est établie.

En plus de la liste des espèces présentes, un coef-ficient d’abondance-dominance est affecté à cha-cune d’elles. Il s’agit d’une échelle mixte, l’abon-dance correspondant au nombre d’individus par unité de surface, et la dominance au recouvrement total des individus de l’espèce considérée.

Un coefficient de sociabilité est ajouté au coeffi-cient d’abondance-dominance. Il exprime l’aptitu-de d’une espèce à former l’aptitu-des groupements plus ou moins denses (cf. fig. 21).

FLORE &

VÉGÉTATION

Prairies humides et tourbières

O. Delzons

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Figure 21

Figure 22

Échelle

d’abondance-dominance (Braun-BLanquet)

Échelle de sociabilité (Braun-BLanquet)

Échelle des coefficients d’abondance-dominance de Braun-Blanquet : 5 : recouvrement de l’espèce > 3/4 de la surface de référence (> 75 %)

4 : recouvrement de l’espèce entre 1/2 et 3/4 (50 à 75 % de la surface de référence) 3 : recouvrement de l’espèce entre 1/4 et 1/2 (25 à 50 % de la surface de référence) 2 : recouvrement de l’espèce entre 1/20 et 1/4 (5 à 25 % de la surface de référence) 1 : recouvrement de l’espèce < 1/20, ou individus dispersés à couvert jusqu’à 1/20 (5 %) + : peu d’individus, avec très faible recouvrement

Deux autres symboles sont parfois utilisés : r : espèce rare

i : espèce représentée par un individu isolé

FLORE &

VÉGÉTATION

+ nombre d’individus et recouvrement très faible (1 à 2 pieds)

1 espèce peu ou assez abondante mais à degré de recouvrement faible

2 nombre d’individus abondant couvrant 20 % de la surface de relevé

4 nombre quelconque d’individus couvrant entre 50 % et 75 % du relevé

1 individus isolés 2 individus en touffe

3 individus en touffes ou

en coussinets 4 individus en colonies

5 individus en populations presque pures

5 espèce numériquement prédominante et occupant plus de 75 % de la surface

3 nombre quelconque d’individus couvrant entre 25 % et 50 % du relevé

Au-delà de la définition des associations végé-tales, les conditions écologiques, présentes dans une association, peuvent être décrites de manière plus détaillée si cela permet d’affiner la compréhension de l’écosystème*. Par exemple, la détermination d’une zone hydromorphe dans un creux, au sein d’une prairie plus sèche, peut être perçue grâce à des communautés végétales différentes.

L’autoécologie* des espèces permet aussi d’amé-liorer le diagnostic écologique du milieu (espèces de milieu acide, de milieu humide…).

Sur chaque relevé, outre la liste d’espèces, plu-sieurs indications peuvent donc figurer : localisa-tion précise (cartographique et GPS*), dates, surface du relevé, recouvrement de la végétation (100 % pour une végétation fermée, 50 % si la moitié du sol est visible), etc.

Les périodes de passage doivent être choisies pour augmenter le plus possible le niveau de dé-termination. La prospection se fait idéalement en période de végétation, entre mai et juillet, pour obtenir des résultats convenables (plus tôt en ré-gion méditerranéenne, et jusqu’en octobre dans certaines situations, par exemple les espèces de la zone de marnage des rivières et des lacs). Il paraît nécessaire d’effectuer un relevé par unité végétale (individu d’association).

Pour valider une unité syntaxonomique (associa-tion végétale), sept relevés floristiques sont un mi-nimum.

Un inventaire systématique et exhaustif de toute la flore peut être effectué en parallèle de ces relevés.

Toutes les espèces rencontrées seront notées. Ceci permet de mettre en évidence des espèces proté-gées ou à intérêt patrimonial qui n’auraient pas été prises lors de l’inventaire phytosociologique.

b) Étape synthétique (phase de bureau) b. 1) Tri et classification des relevés phytosociologiques

Les relevés phytosociologiques obtenus sont com-parés entre eux : les relevés qui se ressemblent le plus sont rapprochés les uns des autres pour constituer des catégories abstraites, les syntaxons.

Les relevés sont tout d’abord mis en forme en ta-bleaux bruts (de type tableur par exemple).

L’analyse des relevés peut se faire :

• par analyse numérique (en particulier si le nombre de relevés est important), à l’aide d’une méthode d’ordination (analyse fac-torielle des correspondances, AFC) ou de classification (classification hiérarchique ascendante, CHA) ;

• par la méthode des tableaux, dite méthode manuelle, qui repose grandement sur la com-pétence et l’expérience de l’opérateur. Les espèces sont ordonnées dans un tableau, en fonction de leur degré de présence décrois-sant. On recherche alors les espèces diffé-rentielles, qui se retrouvent toujours ensemble dans un certain nombre de relevés, et qui sont généralement simultanément absentes des autres relevés. Les relevés qui renferment les mêmes espèces différentielles sont regroupés.

Ces deux approches, complémentaires, peuvent éventuellement être conduites de manière conjointe.

Elles aboutissent à la séparation de groupes de relevés, assimilables à des syntaxons. Un syntaxon est défini floristiquement par la présence d’es-pèces floristiques, esd’es-pèces constantes (présentes dans tous les relevés) ou différentielles (dans cer-tains relevés).

Un syntaxon ainsi défini peut correspondre à une association végétale ou, le plus souvent, à une subdivision d’une association végétale

(sous-as-sociation par exemple, voir tableau 6).

Exemple de tableau final d’une étude phytosociologique

FLORE &

VÉGÉTATION

Une attention particulière est portée aux facteurs

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jouant sur la végétation, et influençant donc les variations observées. Ces facteurs, en dehors des aspects liés à des problèmes méthodologiques, d’échantillonnage ou liés au hasard, qui sont limi-tés par le choix et la bonne application du proto-cole, sont en particulier :

- les facteurs physicochimiques et biotiques (présence d’ombre, altitude, humidité du sol, etc.) ou synécologiques* (écologie de la communauté) ;

- les dynamiques de population (syndynamique ou dynamique de la communauté) ;

- les aspects historiques ;

- la synchorologie (répartition géographique de la communauté).

b. 2) Identification des associations végétales

Une association végétale est décrite en fonction :

• d’espèces caractéristiques, dont la fréquence est plus élevée que dans les associations voi-sines ; dans beaucoup de cas, on distingue souvent une combinaison d’espèces carac-téristiques, c’est-à-dire un groupe d’espèces

présentes de manière répétitive, mais dont aucune n’est, à elle seule, caractéristique de l’association, plutôt qu’une seule espèce ca-ractéristique ;

• d’espèces différentielles, permettant de distin-guer des sous-associations ;

• d’espèces caractéristiques d’unités supérieures à l’association (classe par exemple) ;

• d’espèces compagnes ;

• d’espèces accidentelles.

Chaque association est nommée, selon le principe de la nomenclature phytosociologique.

Toute classification de la végétation répond à une hiérarchisation emboîtée des unités qui la com-posent.

Une association végétale est nommée à partir du nom d’une ou de deux espèces caractéristiques présentes, auxquelles on ajoute un suffixe (en gras ci-dessous) différent selon que l’on parle d’une classe, d’un ordre, d’une alliance ou d’une asso-ciation végétale. Le système hiérarchique de clas-sification, d’après BRAUN-BLANqUET, est organisé de la manière suivante :

On effectue la correspondance des associations végétales identifiées dans la zone d’étude avec la classification des habitats CORINE Biotopes* et/

ou EUNIS Habitats* qui est devenue aujourd’hui

une nomenclature de référence à l’échelle euro-péenne. La transposition en nomenclature Natura 2000 est ensuite recherchée afin de mettre en évidence les habitats d’intérêt communautaire.

Classe (suffixe –etea) : Querco-Fagetea (forêts feuillues des climats tempérés dominées par les Chênes et le Hêtre)

Ordre (suffixe –etalia) : Fagetalia (forêts feuillues des climats tempérés froids à hêtres, Fagus sylvatica)

Alliance (suffixe –ion) : Fagion (hêtraie et associations voisines montagnardes)

Association végétale (suffixe –etum) : Abieto-Fagetum (hêtraie à sapins de moyenne montagne)

Les sous-unités éventuelles portent des suffixes spécifiques : - etosum pour la sous-association,

- enion pour la sous-alliance, - enalia pour le sous-ordre, - enetea pour la sous-classe.

FLORE &

VÉGÉTATION

3 - Limites

Cette approche permet d’inventorier la quasi-tota-lité des espèces présentes dans l’aire choisie, sous réserve qu’elles soient identifiables en période de floraison. Pour être déterminées avec précision, certaines espèces nécessitent l’observation des fleurs, des fruits, voire des parties souterraines, ces organes n’étant que rarement visibles au même moment. La répétition des passages permet d’ob-server différents stades des plantes et de recenser les espèces précoces ou tardives, ceci dans le but d’affiner la liste des espèces patrimoniales et de préciser la nature des groupements végétaux.

Le recours à un spécialiste peut être nécessaire pour la détermination précise d’espèces peu com-munes.

Une bonne image des caractéristiques station-nelles de la zone d’étude est ainsi obtenue pour chacun des groupements végétaux en présence.

Cependant, le recours à d’autres méthodes est quasiment indispensable. Les informations resti-tuées par les oiseaux, notamment, ouvrent l’inter-prétation sur des notions de structure du paysage, de fonctionnement, non plus à l’échelle station-nelle mais de l’écosystème dans sa totalité.

Suivis extensifs d’espèces ou de communautés végétales

L’approche phytosociologique nécessite un effort d’échantillonnage important, suivi d’une phase d’analyse et d’interprétation longue et complexe.

Selon les objectifs visés, d’autres approches sont aussi utilisées.

C’est notamment le cas pour des suivis de flore, qui correspondent à l’étude de l’évolution dans

l’espace et dans le temps de certains taxons.

On peut chercher à caractériser les variations temporelles des populations, la dynamique et la régulation de ces populations ou les interactions société/plantes. Un suivi peut, par exemple, être mis en place pour s’assurer du maintien d’une es-pèce très rare et fragile, pour surveiller l’extension d’une espèce invasive, ou encore pour évaluer les effets de mesures de gestion (pâturage).

Tableau 7 Caractéristiques d’application d’un diagnostic phytosociologique

Méthode Diagnostic phytosociologique

Domaines d’application Tout territoire d’étude.

Limites Nécessité d’inventorier le site dans sa totalité pour avoir une liste d’espèces plus complète.

Compétences requises

Une bonne connaissance technique botanique est indispensable (identification sur le terrain et détermination en laboratoire) avec des notions d’écologie végétale et de phytosociologie, avec des connaissances spécifiques si les relevés incluent mousses, algues et champignons.

Coûts

Ils sont variables selon l’accessibilité du territoire d’étude, la richesse des milieux qu’il recèle, les espèces en cause, la précision souhaitée. Sur le terrain, 10 à 15 relevés phytosociologiques sont effectués en moyenne par jour. Le temps de traitement des données, de transcription et les déterminations en bureau ou laboratoire doublent le temps de travail.

Certains milieux nécessitent plusieurs relevés ou plusieurs visites en cours d’année. Prévoir en outre les temps d’interprétation (bilan, diagnostic), à savoir environ une journée pour 25 relevés et de mise en forme des résultats (une demi-journée pour 25 relevés).

FLORE &

VÉGÉTATION

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Tableau 8

Caractéristiques d’application d’un diagnostic phytosociologique

Exemples de protocoles de suivis d’espèces ou de communautés végétales (d’après Bernoux & quagheBeur, 2003)

Orpin d’Angleterre Sedum anglicum

Caractéristiques de l’espèce suivie

Méthodes

Type biologique Démographie Comportement Habitat Dispersion et reproduction

Cryptophytes Densité forte Plante invasive Friche

Reproduction

Marquage de 20 plantes distantes de + de 50 cm, et mesure de leur hauteur et statuts phénologiques. 4 quadrats de 2 x 2 m placés aléatoirement dans des parcelles pour estimer les densités de la plante. Étude des rhizomes (orientation, âge, en croissance, etc.). Suivi une fois par mois au moins.

Hémicryptophytes régime de broutage différent (hivernal, estival, permanent, aucun). Estimation de la hauteur moyenne de la couverture végétale. Mesure du nombre total de rosettes, de leur diamètre, du nombre de plantes fleuries. Suivi annuel.

Hémicryptophytes

Transects permanents. Cartographie et comptage de tous les individus le long du transect, mesure de la longueur de la plante, des stades de floraison.

Un suivi par an, à la fin de la période de floraison.

Phanérophytes

4 parcelles de 2000 m², recensement et marquage de tous les individus, mesure de la hauteur du tronc. Suivi annuel.

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V. Gaudillat

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