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Les participants aînés seront recrutés au sein de structures d’hébergement collectif partenaires de la recherche. En France, nos interlocuteurs aînés vivent en Bretagne dans une résidence autonomie (ex-Logement Foyer) de statut associatif. Au Québec, les personnes vivent au sein d’une coopérative de solidarité en habitation située en Estrie. Pour le bon déroulement du projet, des conventions partenariales ont été signées entre les structures et les universités concernées. Ces deux lieux de vie ne sont pas complètement identiques mais ils présentent tout de même des similarités concernant leur statut juridique, la présence d’instances participatives, la vie collective, et les préoccupations quant à l’accompagnement et l’autonomie des résidents âgés.

1 Deux lieux de vie aux statuts juridiques proches

Au Québec, une coopérative est « une personne morale regroupant des personnes ou sociétés qui ont des besoins économiques, sociaux ou culturels communs et qui, en vue de les satisfaire, s'associent pour exploiter une entreprise conformément aux règles d'action coopérative. »19. En d’autres termes, une coopérative est une association autonome de personnes qui partagent des aspirations et des besoins économiques, sociaux et culturels communs, unies volontairement dans une entreprise à propriété collective et démocratiquement contrôlée20. Certaines coopératives ont été créées pour des clientèles spécifiques : personnes âgées, familles monoparentales, etc (Legaré, Laverdière et Dugas, 2012). La plupart n'ont cependant aucune vocation particulière.

En France, une résidence autonomie est un mode d’habitat au sein duquel des aînés de plus de 60 ans vivent dans des logements individuels21. Des prestations individuelles ou collectives sont proposées dans le but de prévenir la perte d’autonomie. Au sein de ces établissements, la proportion de personnes dont le niveau d’autonomie est classé GIR22 1 à 3 ne doit pas dépasser 15% du nombre total de résidents. La résidence autonomie partenaire de notre recherche possède un statut juridique ayant des points communs avec les coopératives. En effet, son contrat d’association loi 190123 repose sur le principe légal de convention par laquelle deux ou plusieurs

19 Loi sur les Coopératives (Québec)

20 Voir le site internet de l’Alliance Coopérative Internationale (ICA) : https://ica.coop/fr

21 Loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la Société au vieillissement (France)

22 Six groupes iso-ressources (GIR) catégorisent la perte d'autonomie d’une personne. Ils vont du GIR1, pour les personnes confinées au lit ou au fauteuil et présentant de graves déficits cognitifs, jusqu’au GIR 6, pour les personnes autonomes dans l’ensemble des actes de la vie quotidienne.

23 Loi du 1er Juillet 1901 et la liberté d’association (France), l’association loi 1901 repose sur les principes généraux de la liberté d’association, de la liberté de contrat et de la communauté (de valeurs, d’intérêts, de projets…).

92 personnes mettent en commun leurs connaissances ou leurs activités dans un but qui n’est pas le partage de bénéfices.

2 Les instances participatives

La CQCH24 (2009) spécifie qu’une « coopérative d'habitation, c'est un immeuble ordinaire (…) où habitent des personnes qui sont à la fois locataires de leur logement et collectivement propriétaires de l'immeuble. Comme propriétaires collectifs, les membres assument ensemble la gestion complète et autonome de leur édifice et de la coopérative. Cette gestion collective se concrétise par une participation démocratique aux assemblées, de même que par une contribution active aux différents comités nécessaires à la bonne marche de la coopérative. » Différentes instances participatives permettent la pleine expression du pouvoir démocratique des membres et la mise en œuvre du principe d’engagement communautaire. Ces instances participatives sont l’assemblée générale (où, contrairement aux entreprises à but lucratif, chaque membre dispose d'un droit de vote égal à l'assemblée des membres), le conseil d’administration ainsi que des comités. Les comités prennent en responsabilité les différentes tâches inhérentes au bon fonctionnement de la coopérative, les membres y participent volontairement et selon leurs compétences. Ainsi, « la gestion à court terme et à long terme d’une coopérative relève ultimement de décisions prises collectivement par ses membres » (Légaré et al., ib.). Au sein de la coopérative partenaire de notre recherche il existe par exemple des comités pour l’organisation des animations, l’admission d’un nouveau membre aîné ou encore la sécurité.

Dans les résidences autonomie, la dimension participative est une obligation légale25 qui se traduit notamment par la création d’un conseil de vie sociale ou d’un conseil de résidents au sein de l’établissement. Le conseil de vie sociale comprend « au moins deux représentants des personnes accueillies ou prises en charge (…), un représentant du personnel et un représentant de l'organisme gestionnaire »26. Cette instance « donne son avis et peut faire des propositions sur toute question intéressant le fonctionnement de l'établissement ou du service, notamment sur l'organisation intérieure et la vie quotidienne, les activités, l'animation socioculturelle et les services thérapeutiques, les projets de travaux et d'équipements (…) l'animation de la vie institutionnelle et les mesures prises pour favoriser les relations entre ces participants ainsi que les modifications substantielles touchant aux conditions de prises en charge »27.

3 Principes de vie collective

Sur le site internet de la CQCH, on peut lire que « un membre d'une coopérative d'habitation, c'est une personne qui s'associe avec d'autres personnes pour se donner accès collectivement à l'usage

24 Confédération québécoise des coopératives d'habitation

25 Loi 2002-2 de janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale (France).

26 Ib., article 3, décret du 25/03/2004

93 d’un logement. C'est aussi une personne qui souscrit aux valeurs particulières qui sont propres à l'ensemble des mouvements coopératifs à travers le monde : solidarité, égalité, équité, démocratie, prise en charge de son devenir et responsabilité personnelle ». La dynamique des coopératives s’avère ainsi favorable au développement d’une identité collective et d’un sentiment d’appartenance fort à la communauté au sein de laquelle chaque membre s’engage, vit, mais aussi vieillit. Sur notre terrain de recherche, ces principes de vie collective se traduisent par :

- des prises de responsabilités au sein de la communauté. Des habitants prennent en charge l’animation, la sécurité des lieux partagés (vidéosurveillances et réponse aux éventuels incidents) ainsi que des personnes (habitants préposés formés aux premiers secours).

- des activités partagées au fil de la vie quotidienne. Les activités d’animation collectives jalonnent la semaine, un service de restauration collective est également proposé.

- la construction d’un projet d’habitat pour qu’un établissement d’hébergement pour aînés dépendants soit construit à proximité de la coopérative, permettant ainsi une continuité résidentielle et des liens sociaux au fur et à mesure de la perte d’autonomie.

Des modalités de vie collective sont en partie similaires en France. Les résidents de la résidence autonomie partenaire de la recherche Amelis se voient offrir collectivement une prestation de service pour l’animation, la restauration et la sécurité. Néanmoins, la place des professionnels est plus accentuée que dans la coopérative d’habitation et nous avons constaté moins d’investissement des résidents dans la mise en œuvre et la gestion d’activités partagées.

4 Accompagnement et autonomie

L’Enquête sur le profil socioéconomique des résidents de coopératives d’habitation (2012, CQCH) révèle une hausse continue de la moyenne d’âge des résidents depuis 1996, avec la proportion des 65 ans et plus qui a doublé entre 1987 et 2012 (passant de 13 % à 28 % de l’échantillon représentatif interrogé). A ce titre, la question des possibilités pour les coopératives d’habitation de maintenir une personne aînée en perte d’autonomie dans son logement se pose globalement (CQCH, 2009) mais aussi localement au sein de la coopérative partenaire. En effet, une partie des résidents présente des difficultés motrices et/ou cognitives engendrant une dépendance en partie compensée par l’aide apportée par les autres résidents. En France, la résidence autonomie est un établissement accueillant principalement des aînés dont l’autonomie ne requiert pas d’assistance médicale continue. La moyenne d’âge des résidents de l’institution française partenaire était de 85 ans en 2013, cette moyenne reste stable mais l’âge médian des résidents augmente ainsi que les difficultés liées à la perte d’autonomie.

La question de l’autonomie traverse les deux institutions dont les résidents, en avançant en âge, nécessitent un soutien de plus en plus fort de la part des aidants de sorte qu’ils pourraient être obligés de quitter l’établissement pour rejoindre une institution médicalisée ou pour personnes dépendantes. Pourtant, la volonté de vieillir dans leur lieu de vie, familier, est forte pour les aînés en France comme au Québec. C’est justement sur cette reconnaissance des besoins et souhaits spécifiques des aînés, ainsi que de leur expertise quant à leur vie quotidienne, que se construit le projet Amelis dans le but de développer des technologies utiles au maintien de la participation sociale et de l’autonomie.

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Bloc Méthodologique 1.