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d. Les prénotions et concepts alternatifs : les nouveaux paradigmes du changement

politique des débats

I.2. d. Les prénotions et concepts alternatifs : les nouveaux paradigmes du changement

Si l’on a pu observer que de nombreux facteurs et évènements ont pu fragiliser la prénotion de

sustainable development, on peut aussi remarquer l’émergence de nouveaux termes relatifs à la nécessité

d’un changement à court et moyen terme de notre modèle de société. Ces nouvelles notions ou concepts viennent directement remettre en cause le sustainable development, et pourraient avoir tendance à faire le faire évoluer, voire même le remplacer (Vivien, 2015b). Paradoxalement, cette prénotion avait elle-même remplacé la prénotion phare d’ecodevelopment dans les années 1980. De plus, on est en droit de se demander si cette prénotion s’inscrit vraiment comme un idéal à atteindre, ou si elle ne représente qu’un projet temporaire de transformation de nos sociétés ? À ce sujet, nous verrons comment et pourquoi la notion de transition s’est imposée comme un nouveau paradigme à même de supplanter le succès rhétorique du développement durable. En France, la notion de transition, et plus encore prénotion de transition écologique tend à assurer cette évolution lexicale depuis le milieu des années 2000. À défaut d’avoir été théorisée comme l’a été le sustainable development, cette prénotion s’est tout de même imposée comme le nouvel impératif du XXIème siècle. En effet, elle est utilisée aussi bien dans des stratégies politiques et économiques nationales, que dans les initiatives locales indépendantes.

« L’idée de « transition » est une notion en pleine émergence. Elle semble prendre le relais du

« développement durable » dans la formulation de l’action publique. » (Krauz, 2014, p. 1).

Avant de tendre vers un développement durable qui répondrait aux besoins actuels sans compromettre ceux du futur, il semblerait que l’on cherche aujourd’hui à assurer une transition écologique répondant d’abord aux urgences et problèmes en présence. D’un point de vue rhétorique, la transition écologique n’a pas pour rôle de remplacer le développement durable, elle semble d’ailleurs tout à fait compatible en s’inscrivant simplement dans une temporalité différente. Si le développement durable est un idéal à atteindre, la transition écologique n’est alors qu’une étape concrète pour tendre vers cet idéal.

Cependant, cette nouvelle prénotion à tendance dans la réalité à occulter et des fois même remplacer sa grande sœur. Par ailleurs, si la prénotion de sustainable development a été la source de nombreuses récupérations idéologiques, ce n’est rien en comparaison de la transition écologique et de son imprécision théorique remarquable. Nous veillerons donc à ne pas tout confondre, et nous repositionnerons les quatre principales acceptions données à la transition écologique : la transition écologique et solidaire portée par le gouvernement français, les transition network / transition towns de Rob Hopkins, la transition énergétique issue du mouvement allemand, et la Troisième Révolution Industrielle et Sociale de Rifkin. Dans les courants de pensée et concepts utilisant la notion de transition, et revendiquant une transition écologique, certains sont fondamentalement opposés malgré une volonté commune de changement de modèle de société.

C’est pourquoi cette section mérite un bref travail de clarification des courants de pensée. Pour cela, nous nous appuierons sur la catégorisation proposée par Sylvain Lavelle (2015), qui définit quatre « modèles de changement » fondamentaux. En revanche, Adrien Krauz (2014) montre que le « mouvement de

la Transition » entretient des liens avec certains des modèles urbanistiques32, mais que pour autant il « ne

propose pas de modèle urbain ». Considérant cela, et pour éviter toute confusion, nous préférerons parler de

paradigmes plutôt que de modèles, cette notion étant trop connoté dans notre champ disciplinaire. Nous classerons donc les nouveaux termes émergents au sein de quatre paradigmes du changement :

- Le paradigme individuel « volontariste » : où chacun cherche individuellement à réduire ses impacts écologiques, avec tous les défauts qui peuvent advenir en l’absence de mouvements collectifs. - Le paradigme institutionnel « régulationniste » : en général conduit par l’État, ou s’inscrivant

dans une logique up to bottom, et s’appuyant sur des outils d’incitations et de réglementations. Cette logique « régulationniste » est souvent marquée par un manque de coordination des outils, avec une approche sectorielle.

- Le paradigme industriel « énergétiste » : qui met la priorité sur la recherche d’innovations, principalement apportées par l’utilisation d’énergies renouvelables, mais qui a tendance à donner tout pouvoir de gestion et de décision au « marché » et aux « experts ».

- Le paradigme sociétal « émergentiste » : où des initiatives sont proposées et expérimentées par des regroupements d’individus, des « communautés » généralement extérieures à la pensée politique et économique conduite nationalement. Ces mouvements collectifs font alors émerger de nouvelles utopies qu’il est souvent difficile d’entretenir sur le long terme.

32 Krauz (2014) montre les références faites par Rob Hopkins et son mouvement des « villes en transition » aux modèles urbanistiques culturalistes, et aux utopies portées par William Morris, Ebenezer Howard, Kropotkine ou Lewis Mumford.

Le paradigme institutionnel « régulationniste » se traduit en France par un certain nombre de lois ou de stratégies politiques lancées depuis la dernière décennie. Actuellement, la politique environnementale française qui traite des questions écologiques et énergétiques est portée par le bien nommé Ministère de la Transition écologique et solidaire (MTES) depuis 2017. Selon le gouvernement, « la transition

écologique et solidaire est une évolution vers un nouveau modèle économique et social, un modèle de développement durable »33. On observe bien ici la filiation clairement affichée entre transition écologique et développement

durable. Cette politique officielle, qui met en avant la notion de transition, s’est installée depuis 2012

avec la création du Conseil National de la Transition Écologique (CNTE). Cette commission administrative représente officiellement « l’instance de dialogue en matière de transition écologique et de

développement durable » selon la définition qu’en apporte le MTES. Officiellement, les nouvelles

instances se revendiquant de la transition ne viennent pas remplacer l’utilisation de la prénotion de

développement durable dans les politiques nationales, mais complètent (à l’instar de la CNTE) le dispositif

construit autour de la Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD)34, mis en place depuis 2003 avec notamment la Commission National du Développement Durable (CNDD). Cependant, cela relève du bon sens que d’observer la prédominance de la transition écologique et solidaire dans les discours politiques récents. Cela peut s’expliquer en partie par le tournant politique et médiatique qui a eu lieu à la fin des années 2000 : le « Grenelle Environnement »35. Depuis 2012 le CNTE encadre annuellement une « conférence environnementale » qui a pour but de tirer le bilan de la politique environnementale nationale et de poser une « feuille de route pour la transition écologique »36. À l’échelle nationale, dans les dix dernières années, la politique environnementale assumée et affichée est bien celle d’une transition écologique et solidaire plus que celle d’un développement durable.

Intimement liées aux orientations politiques, les dynamiques économiques laissent observer, sans nul doute, une hégémonie du paradigme industriel « énergétiste » dans notre société (Lavelle, 2015, p. 7). On y retrouve de nombreux termes émergents comme : la croissance verte ou économie verte, le Green New

Deal américain ou européen, le concept de Troisième Révolution Industrielle & Sociale (TRI-TRS) de

Jérémy Rifkin, la transition énergétique défendue à la fois politiquement et par de nombreuses associations spécialisées, ou encore le management environnemental de l’écologie industrielle. Loin de constituer une liste exhaustive de ce nouveau champ lexical de la durabilité, la sélection de ces quelques termes de plus en plus usités et médiatisés nous permet avant tout de clarifier le fourre-tout

33 http://www.manche.gouv.fr/Politiques-publiques/Amenagement-territoire-energie/Developpement-Durable/La-transition-ecologique.

34 Nous verrons dans le chapitre suivant les tenants et aboutissants de la SNDD.

35 Voir chapitre 4.

linguistique qui participe de nombre de présupposés erronés. Nous allons donc les développer plus précisément, avant d’aborder le paradigme sociétal « émergentiste ».

Le concept de croissance verte, autrement appelé économie verte, est très présent depuis le « Sommet de la

Terre » de Rio+20 en 2012. Ce concept n’est pas nouveau puisqu’il a été esquissé dès la fin des années

1980 par des économistes de l’École de Londres37 (Vivien, 2015b), mais il sera institutionnalisé et repris dans les discours officiels que depuis une dizaine d’années38. L’objectif affiché derrière ce concept est de permettre une relance de l’économie d’après crise, en proposant de nombreux investissements publics dans les technologies dites « vertes ». On parle ici principalement de financements pour développer l’utilisation d’énergies renouvelables. Si la croissance verte ne s’oppose pas à la prénotion de sustainable development, et en propose même une assimilation, elle a toutefois tendance à prendre une place de plus en plus importante dans les discours notamment en France (à l’instar de la transition écologique et solidaire). Il est par ailleurs assez cocasse d’observer la critique qui est faite à l’égard de la croissance verte sur son flou épistémologique et son favoritisme envers les pays développés : ces mêmes critiques ayant été portées quelques décennies plus tôt à l’encontre du

sustainable development. Concrètement, plusieurs politiques d’investissements publics ont été portées

dans un objectif de croissance verte, comme le fameux Green New Deal américain de 2018, et sont pendant européen.

Une des théories liées directement à ce souhait de croissance verte est la très médiatisée Troisième

Révolution Industrielle et Sociale (TRI) de l’économiste américain Jeremy Rifkin. Ce dernier propose un

« plan de transition écologique » mis en œuvre sur plusieurs dizaines d’années, permettant un développement conséquent des énergies renouvelables. C’est sur ce « modèle industriel » que se sont tournés tous les regards ces dernières années, avec notamment une considération sans égard de la part de l’Union Européenne (Lavelle, 2015). Depuis 2007, la théorie de la Troisième Révolution Industrielle est officiellement portée par l’Union Européenne, et Rifkin est choisi comme conseiller de la Commission européenne et du Parlement européen. En 2011, il publiera son ouvrage manifeste : « The Third Industrial Revolution : how lateral power is transforming energy, the economy, and the

world ». Concrètement, cette théorie repose sur cinq leviers d’action : l’énergie, l’habitat, les

équipements, les réseaux, et les transports. Selon Lavelle (Ibid., 2015, p. 7), l’objectif affiché est de « faire de chaque habitat une petite centrale énergétique en visant une autarcie individuelle qui permet la consommation

des ménages et l’échange avec d’autres au moyen d’une sorte d’internet de l’énergie ». Cette TRI s’accompagne en

parallèle d’une « Troisième Révolution Sociale » fondée sur cinq piliers elle aussi, qui est présentée substantiellement par Rifkin mais qui n’est pas assumée comme telle : une nouvelle organisation, une

37 Notamment David W. Pearce considéré comme un des pères de la prénotion de green economy.

38 Après la crise économique de 2009, les termes d’ « économie verte » ou de « croissance verte » sont apparus de façon récurrente dans les publications de la Banque Mondiale, de l’OCDE, et du PNUE (Vivien, 2015b).

nouvelle représentation de la richesse, de la coopération, de l’éducation et du travail. La principale critique qui est faite à Rifkin, c’est son déterminisme technique, et qui est d’ailleurs partagé par l’ensemble des mouvements relevant du paradigme industriel « énergétiste » :

« Chez Rifkin, le modèle social de la transition entretient avec le modèle industriel un rapport tel

que les changements sociaux apparaissent comme la conséquence, et non comme la condition des changements industriels. […] Pour Rifkin, les régimes énergétiques déterminent la nature des civilisations – leur façon de s’organiser, de répartir les fruits de l’activité économique et des échanges, d’exercer le pouvoir politique et de structurer les relations sociales » (Lavelle, 2015, p. 9).

Ce déterminisme, et l’idéologie de la rupture portée par Rifkin, sont largement rejetés et réfutés par de nombreux historiens ayant travaillé sur les grandes révolutions industrielles. Chaque révolution industrielle ayant été le fruit d’un changement de contexte social ou national sur un temps long (Ibid., 2015, p. 9). En outre, critique est faite de la confiscation de cette « révolution » par les élites, du fait justement de la primauté de la révolution industrielle sur la révolution sociale. La TRI se révèle alors être pensée et mise en œuvre seulement par certains groupes d’experts et de décideurs à l’échelle européenne, alors qu’elle défend théoriquement un « pouvoir latéral ». L’autre critique qui lui est faite c’est la promotion irraisonnée de certains choix techniques comme l’hydrogène et les high-tech (notamment les « smart grid »). C’est une double critique, à la fois technique et économique, puisqu’elle émet la crainte de prioriser invariablement des solutions de hautes technologies relativement couteuses, à défaut d’étudier les possibilités offertes par certaines low-tech. Tout cela en considérant aussi l’utilisation préférentielle de solutions techniques qui basent leur fonctionnement sur une « abondance supposée des ressources, garantie par le recours aux énergies renouvelables » (Ibid., 2015, p. 10) 39. La principale ambiguïté du modèle proposé par Rifkin, c’est son incapacité à s’émanciper du système économique et politique préexistant. Selon Lavelle (Ibid., 2015, p. 11) : « Rifkin […] demeure encore

lui-même prisonnier d’un certain imaginaire du développement ».

Dans la continuité de la proposition de Rifkin, et participant du paradigme industriel, on observe l’émergence d’autre modèle de révolution : les scénarios de transition énergétique. Il est important de savoir que la notion de transition, relative aux problématiques écologiques, a été utilisée, dans un premier temps, à travers le prisme de l’énergie et de la déplétion des ressources fossiles, au début des années 1980. En effet, le concept de transition énergétique est né en Allemagne, et tire ses origines d’un ouvrage scientifique publié par l’association Öko-institut en 1980 (Krause, Bossel, Müller-Reißmann, 1980), intitulé « Energiewende » et que l’on peut traduire par « tournant énergétique ». Ce livre blanc propose toute une série de propositions pour sortir de la dépendance au pétrole et à l’uranium

39 Lavelle (2015, p. 10) cite alors une tribune publiée dans Libération en 2014 et rédigée principalement par Hélène Tordjman : « Cette nouvelle utopie technicienne […] hors-sol […] rejoint (celle) de la transition énergétique, conciliant l’inconciliable : croissance verte autoproclamée et pénurie de matière. ».

(énergie atomique), partant du constat qu’au moins 80% de la consommation mondiale d’énergie repose sur des ressources fossiles non renouvelables. La même année, se tiendra aussi à Berlin le premier « Congrès sur la transition énergétique, le retrait du nucléaire et la protection de l’environnement », encadré par le Ministère de l’environnement allemand (Hammiche, 2015, p. 15).

Par la suite, ce concept a été repris et théorisé en France à la fin des années 200040. Cet objectif de

transition énergétique se traduit encore aujourd’hui par une volonté de diminuer la part des énergies

fossiles dans la consommation énergétique de nos sociétés. Contrairement à ce qui est couramment pensé, cette diminution n’est pas motivée en priorité par la diminution des ressources fossiles, mais plus par rapport aux émissions de gaz à effets de serre associés à l’extraction et à la combustion de ces ressources dans l’atmosphère (Criqui, 2015). En France, la politique officielle de transition

énergétique s’est construite depuis 2013, avec dans un premier temps la mise en place du « Facteur 4 » :

l’objectif est alors de diviser par quatre les émissions de gaz à effets de serre à l’horizon 2050, par rapport aux émissions de 1990. De nombreuses questions se sont alors posées sur les orientations de « décarbonation » à mettre en œuvre, puisqu’il semblait logique qu’une simple copie du modèle allemand ne soit pas adaptée. Un débat national a été constitué, entre différentes ONG, des syndicats, des entreprises, les grandes administrations françaises, et des parlementaires (Ibid., 2015). À l’issu de ces échanges, quatre scénarios ont été esquissés :

- « SOBriété » : qui favorise une basse consommation énergétique avec une sortie du nucléaire ; - « EFFicacité » : qui propose une forte réduction de la demande avec une diversification ; - « DIVersité » : qui s’oriente sur une importante diversification de la production ;

- « DECarbonisation » : qui représente le maintien du modèle énergétique français.

Ces scénarios ont permis d’élaborer la Loi n°2015-992 relative à la transition énergétique pour la croissance

verte, adoptée le 17 août 2015. Ce cadre législatif est un document majeur puisqu’il énonce pour la

position énergétique française pour les prochaines décennies. Substantiellement, cette position se révèle être à mi-chemin entre le scénario d’ « EFFicacité » et celui de « DIVersité », reposant sur environ 50% d’énergie nucléaire produite en France en 2025 (Ibid., 2015). La transition énergétique à la française implique alors de passer en partie d'un modèle centralisé, dominé par de grandes centrales, à une structure plus décentralisée accordant une part plus importante à des énergies renouvelables alimentant des réseaux basse et moyenne tension. Sans rentrer dans le détail des critiques techniques, cette approche française est remise en cause au regard du marché économique international des énergies renouvelables, et qui favorise plutôt des centrales de grande taille connectées au réseau haute tension. Surtout, la question du stockage de ces énergies dépendantes du climat reste une

problématique considérable concernant le scénario souhaité de transition énergétique. Dans cette approche énergétique de la transition, vue comme une nouvelle révolution industrielle, des scénarios concrets ont vu le jour : comme « NégaWatt » porté par l’association française du même nom depuis 200141, ou bien le « ShiftProject » dont l’association a été montée en 2010 avec comme porte-parole l’ingénieur et conférencier Jean-Marc Jancovici. Si la question énergétique est au cœur des débats sur la durabilité aujourd’hui, nous ne développerons pas plus précisément cette thématique dans ce chapitre, au risque de perdre en pertinence et en clarté.

Enfin, le paradigme sociétal « émergentiste » se construit sur des initiatives alternatives apportées par des mouvements communautaires42. Ces mouvements, portés aussi bien par le milieu scientifique, par la société civile, ou par des collectivités locales, sont bien souvent dans une posture hétérodoxe par rapport à la représentation « officielle » d’un développement durable. On peut citer par exemple le mouvement des « villes en transition43 » initié par le Britannique et enseignant en permaculture Rob Hopkins, depuis 2006. Cet ensemble « d’expérimentations locales et citoyennes » (Krauz, 2014, p. 1) a pour objectif de rendre nos sociétés plus autonomes et moins dépendantes au pétrole. Depuis la publication de l’ouvrage de Rob Hopkins, intitulé le « Manuel de transition44 » en 2008, qui pose les grands principes des « villes en transition », ce mouvement a connu un essor incroyable, notamment dans de nombreuses villes françaises.

Le réseau des « villes en transition » (ou « transition network ») s’est implanté dans plus de 50 pays, et compte aujourd’hui plus de 2000 « villes ou territoires en transition », dont 150 en France45. À la différence des mouvements issus du paradigme institutionnel ou industriel, on observe ici une initiative qui remet en cause directement la prénotion de développement durable, comme l’exprime Adrien Krauz au sujet des « villes en transitions » :

« Le mouvement de la Transition pose la question d’une rationalité d’aménagement cherchant à

dépasser les logiques de « développement durable » en s’appuyant sur le local et ses singularités »

(Krauz, 2014, p. 4).

Ce mouvement part du territoire local, avec un souhait de provoquer à terme un changement du système global. Cette logique bottom-up s’explique par les racines théoriques du mouvement de

41 Le concept de NégaWatt avait toutefois été imaginé par l’écologiste américain Amory B. Lovins, dès 1989.

42Sans aucun sous-entendu péjoratif, nous avons préféré la notion de communauté à celle de collectif pour décrire ces regroupements fondés sur des principes ou des idéalismes communs.

43 Traduit de l’anglais « transition towns ».

44 Traduit de l’anglais « The transition handbook ».

Transition porté par Hopkins : la permaculture comme mode d’action dans une société46. De la même façon, la majorité des mouvements issus du paradigme sociétal « émergentiste » trouve leurs origines théoriques dans les réflexions anticapitalistes des années 1970.

C’est notamment le cas de la décroissance. Ce courant de pensée a pris de l’ampleur en France ces dernières années, mais elle n’est pas récente non plus, et prend ses racines dans les écrits de Georgescu, motivées aussi par le rapport « Meadows », au début des années 197047 (Sémal, 2015). La