d’exception. Premièrement, il est nécessaire de rappeler que malgré l’impossibilité persistante
à identifier clairement le contenu de cet ordre public, M. de Vareilles-Sommières soulève que
celui-ci, tel que mis à l’œuvre par l’exception d’ordre public « n’est pas une norme à
proprement parler, mais plutôt un état de fait »
271, un « fond social intangible »
272. Néanmoins,
l’auteur signale qu’il demeure envisageable de prétendre que la loi étrangère est effectivement
confrontée à une norme.
Deuxièmement, et concernant la composition de l’ordre public, il a été soutenu de manière
convaincante en doctrine française que l’ordre public tel qu’à l’œuvre dans l’exception d’ordre
public se caractérise par les valeurs auxquelles le for adhère
273. La doctrine mexicaine, pour sa
269 W. Goldschmidt, Derecho internacional privado, derecho de la tolerancia, basado en la teoría trialistica del
mundo jurídico, 3e éd., Buenos Aires, Depalma, 1977. Egalement, H. Muir Watt, Discours sur les méthodes en
droit international privé, Recueil des cours, 2018, vol. 38, p. 9-410, spéc. p. 237-267.
270 N’est-il pas souhaitable, dès lors que la règle de conflit conduit à un résultat néfaste pour le for, de s’adresser
au juge pour rétablir un équilibre qu’on estime compromis par l’application de la loi étrangère ? Bien d’autre exemples d’un tel recours pour combattre certains excès pourraient être cités.
271 P. de Vareilles-Sommières, Exception d’ordre public et régularité de la loi étrangère, op. cit., p. 191. 272 « On admet qu’un principe est d’ordre public lorsque l’État qui l’a posé ou qui, au moins, l’accueille, le tient
pour tellement essentiel qu’il n’en tolère pas la moindre méconnaissance. Et l’on sait que ce sont les idées morales ou juridiques les plus élémentaires et par conséquent, les plus fondamentales d’un pays qui constituent ce fond social intangible », Louis-Lucas, « Remarques sur l’ordre public », Rev. crit. DIP 1933. 393.
273B. Remy, Exception d’ordre public…, op. cit., n° 319 ss, et n° 368 et s. A cet égard M. de Vareilles-Sommières
affirme que : « Cette vue ne contredit pas l’affirmation que l’ordre public se compose de règles ou plus généralement de normes, dès lors qu’il est admis que « la règle peut être conçue… comme un lieu de
part, s’exprime en termes de respect des « institutions » lorsqu’elle fait référence au contenu de
l’ordre public. Ainsi, par exemple, un auteur mexicain affirme que l’ordre public doit être
compris « comme le contenant des institutions juridiques qui reflètent les sentiments les plus
chers à une société spécifique »
274. Une autre proposition avancée en doctrine admet qu’il existe
un noyau irréductible- nùcleo irreductible constitué par des principes de validité universelle
275lesquels seraient liées au phénomène de l’apogée des Droits de l’Homme caractérisant notre
société du XXIème siècle. De manière concomitante, lorsque la doctrine cherche à identifier le
fondement de l’exception d’ordre public, la notion de « principes »
276est récurrente. Prenons
l’exemple du système juridique mexicain dans lequel il est possible d’observer l’emploi de ces
notions à l’article 15, paragraphe II du Code Civil Fédéral. Ce dernier prévoit que le droit
étranger soit non applicable lorsque ses dispositions ou le résultat de son application sont
contraires aux principes ou institutions fondamentales de l’ordre public mexicain
277. Le terme
« principe » renvoie à un instrument qui se différencie de la norme au sens strict, celui-ci ne
s’attache pas une définition formelle et son identification reste difficile. Malgré les nombreuses
propositions en doctrine, les définitions du contenu demeurent abstraites. Le phénomène n’est
pas rendu plus compréhensible par la pratique. La construction de l’exception de l’ordre public
reconnaissances et de conciliation de valeurs », Exception d’ordre public et régularité de la loi étrangère, op. cit., p. 191, note en bas de page n° 52.
274 « Deseo, sin embargo, aprovechar el contexto para proponer una definición alternativa. El orden público como
causal de nulidad o no ejecución de laudos debe entenderse como continente de las instituciones jurídicas que reflejan los sentimientos más caros de una sociedad determinada » F. González de Cossío, « Orden público en México : del impresionismo al puntillismo jurídico », RDP, Cuarta Época, Ano I, Numero 2, Julio-Diciembre, 2012.
275 E. de Rosas, « Orden público internacional –Tendencias contemporàneas. Orden pùblico en el ordenamiento
del Mercosur ». Le Professeur de Rosas effectue une analyse de tendances contemporaines de l’ordre public dans le cadre du Mercosur, et bien que le Mexique ne fasse pas partie de ladite organisation, l’idée fut avancée lors des journées célébrées en l’honneur du Professeur Friederich K. Juenger, XXVI Séminaire national de droit international privé et comparé, de l’Académie Mexicaine pour le Droit International Privé et Comparé. Pour l’auteur cette tendance va à l’encontre de l’idée selon laquelle l’ordre public international se constitue par de principes de droit privé de nature nationale. Au surplus, il considère nécessaire d’enrichir la notion avec les droits fondamentaux qui donneraient un trait de supranational à une notion conçue à l’origine par un État spécifique. L’auteur emploie ses prémisses pour conclure à la possible existence d’un ordre public transnational « constituido por valores materiales a los que deben atenerse los operadores del comercio internacional ». L’auteur pour le développement de son hypothèse s’appuie fortement sur des décisions qui touchent le droit de la famille (filiation, adoption) et admet que l’ordre public international semblerait être constitué pour, au moins, trois principes : le caractère non patrimonial du corps humain, la protection de l’intégrité de l’espèce humaine et la protection des droits de l’enfant. Il donne l’exemples des contrats de GPA et les décisions issues de cette controverse car contraires à l’ordre public français.
276 Pour un aperçu de la notion de « principe » en droit mexicain V. C. Huerta, « The notion of « principle » in
legal reasoning as understood in mexican law », Mexican Law Review, Vol. II, N° 1, pp. 89-108. L’auteure soulève que la notion de « principe » distincte de celle de « norme » possède un trait particulièrement intéressant : « One of its most attractive characteristics is that this distinction has offered an alternative to “subsumption”, the traditional form of applying norms usually considered a “logical” method, to open the possibility of taking a more explicitly justified decision based on “weighing” and “balancing” ».
277 Art. 15 fracc. II, prévoit les cas de non application du droit étranger : « Cuando las disposiciones del derecho
extranjero o el resultado de su aplicacion sean contrarios a principios o instituciones fundamentales del orden publico mexicano ».