d’acceptabilité normative, de proximité et d’équité
707. Néanmoins, un obstacle majeur à la
proposition de l’homologation des conditions se retrouve dans les changements opérés par le
règlement Rome I, notamment concernant le traitement des lois de police étrangères
708. Le
705 « À la double condition que le lien retenu par le législateur étranger comme devant exister entre une situation
et l’État au nom duquel il légifère pour déclencher l’applicabilité de la loi édictée à la situation en cause se révèle pertinent aux yeux du for, et que le contenu de la politique législative suivie par la loi demeure compatible avec les valeurs et exigences du for telles qu’elles se formulent dans son ordre public international » P. de Vareilles- Sommières, « Lois de police et politiques législatives », op. cit., n° 62.
706 Notamment par le contrôle de constitutionnalité, qui vient affiner les mécanismes d’ordre public, comme sera
étudié par la suite, voir infra § 534 et s.
707 « Un pareil test combiné d’acceptabilité normative, de proximité et d’équité est très voisin de celui préconisé
par le défunt article 7 de la Convention de Rome. Il pourrait être partiellement généralisé, surtout sous les aspects « proximité » et « équité », aux lois de police quelconques et contribuer ainsi à l’unification souhaitable de leur régime d’application, sans distinction d’origine. », L. d’Avout, « Les lois de police », op. cit., p. 120.
708 Pour une analyse approfondie de ces changements voir S. Francq et F. Jault-Seseke, Les lois de police, une
approche de Droit Comparé, op. cit., p. 371 et s., notamment lorsqu’il est observé qu’« en vue de réduire l’insécurité juridique attachée selon certains à l’ancienne formulation, les lois de police étrangères pouvant entrer en ligne de compte sont désormais identifiées quant à leur origine (« lois de police du pays dans lequel les obligations découlant du contrat doivent être ou ont été exécutées ») et quant à leur objet (« dans la mesure où lesdites lois de police rendent l’exécution illégale ») ». Les auteurs rappellent que la formulation de l’article 7 (1) de la Convention de Rome constituait le principal obstacle à la participation du Royaume-Uni « au nouveau règlement qui voyait dans la formulation de l’article 7(1) de la Convention de Rome une source grave d’insécurité juridique, une limitation exagérée de l’autonomie de la volonté et une potentielle menace pour le marché financier et juridique londonien », ibid., note n° 56.
paragraphe 3 de l’article 9 précise que : « Il pourra également être donné effet aux lois de police
du pays dans lequel les obligations découlant du contrat doivent être ou ont été exécutées, dans
la mesure où lesdites lois de police rendent l’exécution illégale. Pour décider si effet doit ou
non être donné à ces lois de police, il est tenu compte de leur nature et de leur objet, ainsi que
des conséquences de leur application ou de leur non-application. »
229. L’article 9 § 3 viendrait imposer donc un double filtre, par l’objet et par le contenu de la
norme, pour l’application d’une loi de police étrangère
709. A cet égard la doctrine n’a pas
consolidé une interprétation de la portée d’une telle disposition
710. Néanmoins, on observe que
la réponse à ces questions est conditionnée par des particularités nationales et s’attarde sur le
contenu de la règle, elle nous semble distraire le débat de son volet conflictuel. À notre sens,
l’inclusion de ces filtres correspond à l’exigence d’un rattachement pertinent. Qu’il s’agisse de
la prestation caractéristique de l’obligation litigieuse, d’autre obligation contractuelle entre les
parties (paiement du prix, livraison de la chose) ou des obligations précontractuelles, l’idée
sous-jacente est celle de l’identification des points de contact. Il serait excessif d’imposer au
juge l’obligation d’analyser toutes les lois étrangères des pays dans lesquels les obligations du
contrat doivent être exécutées
711. En revanche, il est possible de considérer qu’il s’agit d’une
double condition pour l’application d’une loi de police étrangère : elle doit au moins avoir un
709 Il a été affirmé que la disposition trouve sa source d’inspiration dans la décision Ralli Bros v. Compañía Naviera
Sota y Aznar, [1920] 2 K.B. 287, CA. La portée de cette décision est discutée « certains auteurs hésitent quant à la qualification du principe établi par la jurisprudence Ralli Bros : s’agit-il d’une règle de conflit de lois soumettant la question de la validité du contrat à la loi du lieu d’exécution ou d’un principe de droit matériel anglais selon lequel un contrat (soumis au droit anglais) est invalide si son exécution paraît contraire au droit du pays d’exécution ? V. Dicey, Morris & Collins, The Conflict of Laws, op. cit., p. 1596, n°32-148. », S. Francq et F. Jault-Seseke, Les lois de police, une approche de Droit Comparé, op. cit., p. 372, note n° 59.
710 S. Francq et F. Jault-Seseke, Les lois de police, une approche de Droit Comparé, op. cit., p. 373 et s., « la
nouvelle formulation présente l’avantage de constituer un compromis acceptable pour tous les États membres et ce faisant, d’uniformiser le sort des lois de police étrangères. La situation antérieure était, on le sait, marquée par la formulation d’une réserve de la part de plusieurs États membres à l’égard de l’article 7(1) de la Convention de Rome. Cette uniformité nouvelle, acquise à grand peine, risque néanmoins de se briser rapidement, tant sont nombreuses les questions d’interprétation soulevées par le nouveau texte ».
711 « Les incertitudes entourant l’identification du lieu d’exécution des obligations découlant du contrat ont été
déjà montrées. Elles sont cruciales puisqu’une loi de police ne correspondant pas au lieu d’exécution des obligations découlant du contrat n’est tout simplement prise en considération, quel que soit son objet ou son effet. Même si une telle loi de police interdisait l’exécution du contrat, elle ne serait pas consultée, dans la mesure où aucune obligation découlant du contrat n’est exécutée sur le territoire de l’État qui l’édicte. Tel pourrait être le cas d’une mesure d’embargo », S. Francq et F. Jault-Seseke, Les lois de police, une approche de Droit Comparé, op. cit., p. 384. Nous rallions volontiers à cette logique car, à notre sens, une loi de police ne serait pas prise en compte, même au cas où elle rendrait le contrat illicite, car ce n’est pas suffisant, il faut en plus un point de connexion c’est à dire que l’une des obligations découlant du contrat s’exécute dans l’État qu’interdit l’exécution, pour que la politique législative sous-jacente soit susceptible d’être rendue efficace. En ce sens, Bonomi donne l’exemple de deux parties établies dans les États A et B, ayant opté pour l’application de la loi B et dont les obligations contractuelles doivent être effectuées dans les États B et C. La mesure d’embargo décrétée par l’État A à l’encontre de l’État C n’a aucune chance d’être mise en œuvre devant les tribunaux d’un autre État. Un tel exemple (bien que cela ne soit pas explicitement précisé par l’auteur) suppose sans doute que l’on s’en tienne à une conception étroite de l’exécution des obligations découlant du contrat ; voir A. Bonomi, « Overriding Mandatory Provisions in the Rome I Regulation on the Law Applicable to Contracts », YPIL, 2008, p. 285-300, spéc. p. 299.