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METHODOLOGIE ET POPULATION ETUDIEE

2. La population observée

L'enquête sur le terrain devait permettre de relever l'information sur toutes les décisions de libération conditionnelle et de réintégration prises au cours de 1' année 1990 dans les différents cantons romands. Or, divers recoupements et comparaisons - avec les statistiques fédérales officielles et avec les statistiques cantonales - présentent certaines divergences, même si le taux de libération conditionnelle se situe toujours autour de 80%, quelle que soit la source statistique retenue.

Nous rendons donc encore une fois le lecteur attentif à la difficulté de la saisie des statistiques de la criminalité2

2 La difficulté de la construction et de la saisie des statistiques criminelles n'est d'ailleurs ni un phénomène nouveau, ni un phénomène typiquement suisse. Cf., entre autres, RoBERT Ph. Les statistiques criminelles et la recherche, Déviance et Société, 1980, 1, pp. 3 ss.; KITS USE J. et C!COUREL A. A note on the uses of official statistics, Social Problems, 1963, XI, pp. 131 ss.; K!LLIAS M. Précis de crimino-logie, 1991, Berne.

TABLEAU!

Les décisions d'octroi de libération conditionnelle dans les cantons romands en 1990

Canton Enquête Chiffres Chiffres

Uni-GE (N) fédéraux (N) cantonaux (N)

Genève 123 129 !52

Vaud 119 !59 128

Fribourg 37 42 non parvenu

Neuchâtel 35 52 33

Jura 13 12 13

Nous présenterons ici la population relative aux dossiers de libération conditionnelle. Les dossiers concernant la réintégration seront présen-tés au début du chapitre VII.

480 dossiers ont pu être consultés dans les différentes administrations cantonales. 246 dossiers provenaient du canton de Vaud, 138 du canton de Genève, 45 du canton de Fribourg, 37 du canton de Neuchâtel et 14 du canton du Jura. Les dossiers des cantons de Vaud (51%) et de Genève (29%) représentent ainsi à eux seuls 80% de 1' ensemble des dossiers. On ne saurait rendre le lecteur assez attentif au fait que toutes les analyses et les chiffres présentés dépendront fortement de la surreprésentation du canton de Vaud et dans une moindre mesure de celle du canton de Genève. Nous nous sommes interrogés sur la forte représentation, dans notre population, des cantons de Vaud et de Genève. En réalité, ces chiffres s'expliquent parfaitement si on les compare à la densité démo-graphique des cantons concernés, d'une part, et au nombre de condam-nations pénales prononcées par ces deux cantons, d'autre part, comme le montre le tableau ci-dessous.

TABLEAU2

Population, condamnations pénales et dossiers de libération conditionnelle 1990 (en pourcentage)

Population Condamnations Dossiers LC résidente 1990 (1) pénales 1990 (2) 1990

Vaud 42 45 51

Genève 26 30 29

Fribourg 15 Il 9

Neuchâtel 12 10 8

Jura 5 4 3

N 1424.8 (3) 14410 480

(1) Source: Annuaire statistique de la Suisse 1991

(2) Nous rendons le lecteur attentif au fait que les statistiques fédérales recensent, en ce qui concerne les sanctions, trois types de peines et mesures: les peines privatives de liberté, les mesures de sûreté et les amendes dépassant fr 500.- Il s'agit des condamnations inscrites au casier judiciaire. Les amendes, dans cette panoplie de peines et mesures, représentent environ un tiers du nombre global des condamnations. Par contre, les chiffres concernant la population de notre recherche sur la libération conditionnelle tiennent uniquement compte des peines privatives de liberté et des mesures de sûreté.

(3) Chiffre exprimé en milliers d'unités.

Dans ce chapitre sur la population observée, nous présentons des résultats qui portent sur l'ensemble des dossiers. Les cantons de Vaud et de Genève étant les seuls qui permettent une analyse comparative, nous ferons état de cette comparaison chaque fois que cela présente un intérêt.

A. Caractéristiques individuelles et sociales

Les dossiers de libération conditionnelle concernent 34 femmes (7%) et 446 hommes. L'âge moyen des individus est de 33 ans (médiane=30 ans)3, et s'étend de 20 ans pour le plus jeune à 75 ans pour le détenu le plus âgé. Les individus ayant moins de 30 ans représentent 48% de notre population.

3 La médiane est la valeur qui sépare une population en deux parties égales.

TABLEAU3 Répartition par âge (Net%)

Age 20-24 25-29 30-34 35-39 40-44 45-50 50 ans ans ans ans ans ans ans et plus NSP

N 93 133 83 71 29 26 38 7

% 19.7 28.1 17.5 15.0 6.1 5.5 8.0

%cumulé 19.7 47.8 65.3 80.3 86.5 92.0 100.0

L'état civil du condamné n'était mentionné que dans 228 dossiers (47%). Pour ceux-ci, nous avons 123 célibataires (54%), 53 mariés (23%), 42 divorcés (18%) et 1 veuf.

Les données concernant la formation du condamné et son activité professionnelle sont difficilement utilisables puisque seuls 31% des dossiers consultés mentionnaient le niveau de formation du condamné et 42% faisaient état de son activité professionnelle. De plus la présence ou l'absence de cette information est fortement liée à la provenance cantonale. En effet si pour le canton de Genève ces informations étaient disponibles pour la plupart des cas (78% pour la formation et 89% pour 1' activité professionnelle), la totalité des dossiers du canton de Vaud n' apportaiènt aucun renseignement à ce sujet.

Enfin la dernière caractéristique personnelle retenue concerne la nationalité du condamné. Les dossiers font état de 272 condamnés de nationalité suisse soit 58% de la population, de 198 condamnés de nationalité étrangère (42%) et de 12 individus dont l'origine n'a pu être établie. Parmi les condamnés de nationalité étrangère on trouve 75 ressortissants de pays limitrophes (France, Allemagne et Italie), 67 ressortissants d'autres pays européens (y compris la Turquie et les pays de l'Est), 30 Africains, 9 individus originaires du Moyen-Orient et de l'Asie et 15 individus originaires du continent américain. Il nous faut noter que nous ne pouvons malheureusement pas opérer une distinction importante parmi les condamnés de nationalité étrangère entre les résidents et les non-résidents. En effet seuls 18 dossiers relatifs aux condamnés étrangers mentionnaient explicitement cette information.

Remarquons encore que la proportion des étrangers est plus impor-tante dans le canton de Genève que dans le canton de Vaud. Les

étrangers représentent 54% des dossiers de libération conditionnelle à Genève et 41% dans le canton de Vaud.

B. Caractéristiques pénales

Au contraire des informations précédentes, le relevé des éléments nous renseignant sur la condamnation et le passé pénal de l'individu s'est révélé plus consistant. Nous avons ainsi retenu, pour nos analyses, quatre caractéristiques essentielles: la durée de la peine, l'infraction la plus «grave»4 mentionnée dans la condamnation (ces deux éléments portant sur la condamnation qui a conduit l'individu en prison), la présence ou l'absence d'éléments permettant de parler de récidive et une hypothétique période de détention préventive5

Une condamnation de 21 mois représente la durée moyenne de la peine. Cependant cette moyenne relativement élevée est due à certaines valeurs extrêmes comme une durée de 240 mois mentionnée par l'un des dossiers. Aussi la médiane nous paraît-elle plus appropriée dans ce cas.

En effet, cette mesure nous indique une durée de 14 mois ce qui correspond au tableau ci-dessous dans lequel nous constatons que près de la moitié des individus qui composent notre population ont été condamnés à une peine inférieure à un an.

TABLEAU4

Répartition par durée de la peine (Net%) Durée de

1-3 mois 4-6 mois 7-12 13-18 + 18

la peine mois mois mois NSP

N 35 132 63 53 184 13

% 7.5 28.3 13.5 11.3 39.4

%cumulé 7.5 35.8 49.3 60.6 100.0

4 Chaque individu pouvant être condamné pour plusieurs infractions simultané-ment, nous avons choisi de retenir, pour l'analyse, une seule infraction en sélectionnant celle que la loi punit de la peine la plus lourde.

5 La présence d'une durée de détention préventive n'a pas été relevée en tant que telle dans les questionnaires. Elle a été reconstruite sur la base d'autres informa-tions recueillies (voir plus bas).

Nous avions demandé aux étudiants de noter, pour chaque dossier, l'ensemble des infractions associées à la condamnation. L'infraction la plus grave ou la plus importante a ainsi été retenue pour construire une catégorisation des types de délits ou d'infractions. Une catégorisation selon les grands titres du code pénal donne la distribution suivante:

TABLEAU5

Répartition par type d'infraction (Net%)

Catégorie!fype d'infraction N %

Vie, intégrité corporelle 27 5.7

Liberté 4 .8

Moeurs 16 3.4

Patrimoine 214 45.1

Famille 8 1.7

Danger collectif 4 .8

Paix publique 2 .4

Autorité publique 3 .6

CPM 48 10.1

LCR 48 10.1

LFStup 100 21.1

pas d'information 6

Total 480 100.0

On voit très bien que certains types d'infractions comme les délits contre le patrimoine ou ceux se rapportant aux dispositions pénales de la Loi fédérale sur la circulation routière ou de la Loi fédérale sur les stupéfiants sont fortement représentés alors que d'autres, plus hétérogè-nes, concernent une très faible proportion des dossiers. Afin d'avoir des groupes consistants pour les analyses ultérieures, nous avons créé une variable de synthèse en ne retenant que les infractions les plus citées.

Cette variable présente ainsi trois grandes catégories d'infractions et nous permet d'obtenir des regroupements plus précis pour les délits

contre le patrimoine, nous n'avons retenu que les infractions ayant trait aux articles 137 et 139 du Code pénal pour constituer une catégorie homogène. Les infractions relatives au code pénal militaire forment, il est vrai, un groupe aussi important que celles relatives à la Loi fédérale sur la circulation routière. Toutefois 60% des premières concernent exclusivement le refus de servir; c'est pourquoi nous n'avons pas retenu cette catégorie.

TABLEAU6

Les catégories retenues pour l'analyse (Net%)

Types d'infraction:

Autres infractions 189 39.4

Total 480 100.0

L'information concernant la récidive s'est révélée multiple. D'une part il s'agissait pour 1' étudiant de noter si il y avait eu révocation d'un sursis antérieur, réintégration d'une libération conditionnelle antérieure, ou condamnation antérieure en relevant les infractions retenues. D'autre part l'étudiant indiquait si l'individu pouvait ou non être considéré comme un récidiviste soit en s'appuyant sur les éléments indiqués ci-dessus soit sur la base d'informations plus ou moins précises faisant état d'un antécédent pénal (condamnations dans d'autres pays, passé pénal, etc.).

Ces divers éléments nous ont permis de reconstruire une variable de récidive en distinguant deux catégories de détenus qui peuvent être traités de façon différente quant à l'octroi d'une éventuelle libération conditionnelle:

a) les détenus dits «primaires». Aucun élément dans le dossier n'indi-que n'indi-que l'individu a déjà, d'une manière ou d'une autre été confronté à l'institution pénale. Cette catégorie concerne 41% de notre popu-lation, soit 195 individus.

b) les détenus «récidivistes». Les dossiers font explicitement référence à des antécédents pénaux (mention d'une condamnation antérieure, révocation d'un sursis, passé pénal, etc.). Cette catégorie concerne 285 individus, c'est-à-dire 59% de la population. 43 des ces «récidi-vistes» sont des détenus dont la libération conditionnelle a été révoquée. Mentionnons aussi que les «récidivistes» sont plus nom-breux dans le canton de Vaud (65%) que dans le canton de Genève (57%).

La présence ou l'absence de la détention préventive a pu être mise en évidence grâce à deux informations indiquant la date du début de détention et celle de la condamnation. En effet 1' éventuelle détention préventive du détenu n'a pas été systématiquement mentionnée dans les décisions. Le calcul de l'intervalle de temps entre les deux moments précités nous a ainsi permis de vérifier l'existence d'une telle période de détention. Cependant nous ne nous prononcerons pas quant à la durée de la détention préventive puisque nous ne savons pas dans quelle mesure elle s'est prolongée jusqu'au moment de la condamnation. En excluant les 45 cas pour lesquels l'une des deux dates n'est pas connue, nous avons 63% des détenus restants qui ont subi une période de détention préventive.

3. Comparaison entre la population observée et celles des