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La population de l’UE à Marseille dont la résidence antérieure est à l’étranger lors du recensement en 1968 et en 1975 : composition selon la nationalité à la naissance et indice de concentration dans la population non française à la naissance ayant déclaré la résidence antérieure à l’étranger, par

arrondissement

Population espagnole, italienne, portugaise Population autre UE

Indice de concentration de la population espagnole, italienne, portugaise Population de l’UE arrivée entre 1962 et 1975

Conclusion du Chapitre III

Les modalités d’installation de la population de l’UE dans l’EMM pendant les années 1960/1970 trouvent principalement leur origine dans l’attractivité économique de l’EMM. L’étude de la population espagnole, italienne et portugaise, qui domine largement cette migration, a en effet montré, par l’analyse des caractéristiques sociodémographiques et de la stratégie résidentielle des migrants, une corrélation entre l’activité économique des sous- territoires de l’EMM et la présence de cette population.

Le niveau de qualification des migrants correspond à la demande de main-d’œuvre, quelle que soit leur provenance

La migration de la population espagnole, italienne et portugaise dans l’EMM résulte de deux flux de nature différente. Le premier trouve son origine dans les accords bilatéraux que la France a signé à propos du recrutement de main-d’œuvre avec les trois pays : l’Espagne (1961), l’Italie (1946) et le Portugal (1963). La situation économique en France de forte demande de main-d’œuvre peut être ainsi considérée comme la raison essentielle de départ de leur pays d’origine de travailleurs dont la mobilité est supportée et, pour une grande partie, organisée par l’Etat. L’installation, précisément dans l’EMM, de ces migrants a les mêmes motivations économiques ; elle est rendue possible par la présence, à l’intérieur de cet espace, d’activités susceptibles de recruter ces nouveaux travailleurs.

Le deuxième flux de population espagnole, italienne et portugaise pendant les années 1960/1970 est provoqué par les bouleversements politiques dans les pays maghrébins. La guerre d’Algérie puis son indépendance en 1962 constitue ainsi l’origine d’un mouvement massif de population européenne très bien marqué dans les statistiques migratoires. Pour les flux en provenance de Tunisie et du Maroc, les motivations pour le départ sont plus diverses : déclaration d’indépendance, inscription du mouvement de population dans l’exode des juifs commencé dès les années 1950, ou encore recrutement de main-d’œuvre. Si l’installation dans l’EMM de la population résultant de ce flux est bien sûr due en partie au fait que la migration n’est vraisemblablement pas volontaire et sans possibilité de retour, l’attractivité de l’EMM peut également avoir favorisé son installation durable.

Quel que soit le pays de départ, les personnes espagnoles, italiennes et portugaises montrent des caractéristiques sociodémographiques qui correspondent à un recrutement de travailleurs : la population active (15 à 64 ans) représente une grande majorité du flux ; la faible qualification est en adéquation avec le besoin de main-d’œuvre dans l’EMM, surtout concentré dans le secteur secondaire. Les hommes sont nombreux à travailler comme ouvriers dans les industries

de l’EMM, les femmes comme personnel de service, comme employées ou également comme ouvrières.

La vacance, dans le territoire de l’EMM, de postes susceptibles d’être occupés par la population de l’UE de l’un ou l’autre de ces flux constitue donc en soi une véritable attractivité économique. Toutefois, il semble qu’il faille chercher également chercher les éléments favorisant l’installation des travailleurs dans les caractéristiques sociodémographiques des migrants, et non uniquement dans les propriétés de l’EMM elles-mêmes.

En effet, l’installation parait facilitée par la dimension familiale du mouvement de population ; dans le cadre de la migration en provenance des pays maghrébins, elle est liée aux circonstances politiques qui rendent le retour peu probable : la famille entière a quitté le pays pour s’installer ailleurs. Mais la migration de travail, en provenance des pays d’origine, dans le cadre du recrutement de main-d’œuvre en Espagne, Italie et Portugal, présente elle aussi un caractère familial : la population active est accompagnée par les enfants et par les personnes de 65 ans et plus. Nous verrons de plus dans le prochain chapitre que la présence des familles dans la migration va jouer un rôle déterminant pour la durée de séjour.

Une concentration spatiale dans les zones industrielles : effet d’une stratégie résidentielle fonction du travail

La stratégie résidentielle des migrants décline sur le plan spatial, et à l’échelle des communes, l’attractivité économique de l’EMM pour la migration des années 1960/1970. En effet, l’analyse de leur répartition spatiale a montré une surreprésentation des migrants dans les communes autour de Marseille profitant d’une croissance économique. Les communes autour de l’Etang de Berre, marqués par un fort dynamisme des secteurs liés à l’activité portuaire et de la pétrochimie, sont ainsi celles où la concentration de la population espagnole, italienne et portugaise est la plus élevée. De la même façon, mais dans une moindre mesure, nous observons une concentration des migrants autour d’Aubagne et Geménos où de nouvelles zones d’activités ont vu le jour dans les années 1960, autour de Gardanne, où l’exploitation des mines de charbon soutient l’industrie, puis dans les communes au nord de l’EMM, où la création du site du CEA et l’aménagement de la vallée de Durance créent une forte demande dans le bâtiment et le génie civil.

A l’inverse, bien que la ville de Marseille compte, en effectifs, la majorité des personnes de l’UE, celles-ci y sont sous-représentées en proportion. La délocalisation du port vers Fos sur Mer, la crise des industries traditionnelles et les problèmes d’adaptation aux nouvelles règles de l’industrie, conjugués à la tertiarisation de l’activité, contribuent à un décalage entre les emplois, moins nombreux dans les secteurs préférentiellement occupés par les migrants, et leur niveau moyen de qualification, et peuvent expliquer une attractivité économique plutôt faible de

la ville pour la population de l’UE. Le rôle de la périphérie de l’EMM pour l’économie de cet espace dans son ensemble, et, à l’inverse, celui, plus restreint, de la ville de Marseille même, se retrouve donc dans les importances relatives de ces sous-territoires pour cette migration.

Malgré cela, la distribution spatiale des migrants de l’UE à l’intérieur de la ville souligne que leur stratégie résidentielle est souvent fonction du travail : les plus fortes concentrations sont situées dans les arrondissements au nord de la ville, où l’industrie chimique est implantée et qui sont à proximité des zones industrielles de l’Etang de Berre, ainsi que dans les arrondissements à l’est de Marseille, proches des zones d’activités d’Aubagne et de Geménos.

La primauté des raisons économiques dans les causes de départ et le choix du lieu d’installation confère au facteur travail une importance essentielle dans la migration massive de population de l’UE dans les années 1960/1970. L’attractivité de l’EMM repose ainsi, au cours de cette période, presque uniquement sur un critère économique. Dans ce contexte, comment la population de l’UE a-t-elle réagi après la crise économique en 1973, qui a supprimé la raison principale de son séjour dans l’EMM ? Quels facteurs ont pu jouer sur le projet migratoire des travailleurs pour les amener, en proportion non négligeable, nous le verrons au chapitre suivant, à s’installer durablement ?

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La mutation du flux migratoire après la crise économique de

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