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B.1.1 D’un libre échange de main-d’œuvre vers une liberté en so

La liberté de circulation et de séjour, une des libertés écrites dans la charte actuelle des droits fondamentaux de l’UE [Art. 45]38, est définie pour la première fois dans le traité de Rome39 en 1957 et signifie, pour les ressortissants de l’UE, le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres. Depuis, le droit de libre circulation connaît des modifications dont les modalités juridiques correspondent au changement de conception de ce qu’est la libre circulation et la construction européenne.

Les prémices de la notion de libre circulation des travailleurs apparaissent dans le règlement n°15 du Conseil de l’Europe du 16 août 1961, qui essaye, en établissant un certain nombre de principes fondamentaux, de répondre aux relations migratoires complexes entre les territoires de ces états membres (MAESTRIPIERI 1970). La croissance économique au cours des Trente Glorieuses et le besoin de main-d’œuvre qui s’ensuit sont par conséquent les arguments principaux pour faciliter la circulation des travailleurs. En effet, le déséquilibre économique en Europe engendre des flux migratoires, qui intéressent progressivement les six pays fondateurs de l’UE, particulièrement en provenance de l’Italie – où la disponibilité de la main-d’œuvre est grande [cf. Annexe Tab. A-28] -, vers la France et l’Allemagne – lieux des plus grands déficits de main-d’œuvre. Ainsi, la France, comme d’autres pays membres, cherche à combler ce besoin en recrutant à l’intérieur comme à l’extérieur de l’UE. Dans ce but, elle signe des accords avec ses anciennes colonies, mais aussi, de façon bilatérale, avec l’Italie en 1946, l’Espagne en 1961, et avec le Portugal en 1963. C’est donc pour être plus flexibles et pour pouvoir mieux répondre aux besoins de main-d’œuvre que les pays ont souhaité améliorer les modalités administratives de déplacement des travailleurs (DE LARY 1992; MAESTRIPIERI 1970).

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Charte des droits fondamentaux des l’UE, Art. 45 « Tout citoyen ou toute citoyenne de l’Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres. La liberté de circulation et de séjour peut être accordée, conformément au traité instituant la Communauté européenne, aux ressortissants de pays tiers résidant légalement sur le territoire d’un Etat membre. »

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La deuxième partie « les fondements de la communauté », titre III « la libre circulation des personnes, des services et des capitaux », Chapitre 1 « les travailleurs », Art. 48, précise que la libre circulation est assurée à l’intérieur de la Communauté au plus tard à l’expiration de la période de transition [§1], la libre circulation comporte le droit … de répondre à des emplois effectivement offerts [§3a], de se déplacer à cet effet librement sur des territoire des Etats membres [§3b] puis de séjourner dans un des Etats membres afin d’exercer un emploi conformément au dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l’emploi des travailleurs nationaux [§3c] (LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE POUR L'UNION EUROPÉENNE 1998)

En 1964, le règlement n°15 de celui de 1961 est modifié40, aboutissant au fait marquant que, à partir de cette date, tout ressortissant d’un Etat membre a le droit « d’occuper sur le territoire d’un autre Etat membre dans les conditions prévues [au règlement], un emploi salarié dont la vacance est notifiée au bureau de main-d’œuvre compétent… »41.

En 1968, la libre circulation connaît une évolution importante : le règlement 1612/68 du 15 octobre parle de suppression de l’autorisation de travail pour les Etats membres ; les travailleurs ont donc le droit d’accès42 à une activité salariée et également le droit de l’exercer. Ce règlement concerne également le droit de famille : l’article 10 assure que « les membres de la famille ayant le droit de s’installer avec le travailleur ressortissant d’un Etat membre employé sur le territoire d’un autre Etat membre, quelle que soit leur nationalité [sont les suivants] :

− le conjoint et leurs descendants de moins de 21 ans ou à charge, − les ascendants du travailleur et de son conjoint qui sont à sa charge ».

Les conjoints et enfants de moins de vingt et un ans ou à charge ont également le droit d’exercer une activité salariée, même s’ils n’ont pas la nationalité d’un Etat membre43.

On assiste donc à une extension sensible du nombre de personnes concernées par le droit de libre circulation : des travailleurs bénéficiant de mesures spécifiques à n’importe quelle personne susceptible d’occuper un emploi, puis à sa famille. La libre circulation reste toutefois, dans les années 1960, fondamentalement liée au marché de l’emploi, puisque seules la main- d’œuvre et sa famille sont concernées. En 197344, les Etats membres se voient obligés45 d’appliquer à l’accès aux activités non salariées et à leur exercice par des ressortissants de l’UE les mêmes règles que celles qu’ils appliquaient à leurs propres ressortissants. La directive de 1973 prévoit également la suppression des restrictions au déplacement et au séjour du conjoint et des enfants de moins de 21 ans, quelle que soit leur nationalité, ainsi que ceux des ascendants et descendants ou de leur conjoint qui sont à leur charge [Art.1§1c et d].

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c’est le règlement n°38/64 CEE du 25 mars 1964

41

Art. 1, §1 du règlement n°38/64 CEE du 25 mars 1964

42

A partir de 1968, tous les ressortissants d’un Etat membre ont le droit d’accéder à une activité salariée et de l’exercer. Contrairement aux règlements de 1961 et 1964, il n’existe plus une priorité d’embauche pour les travailleurs du marché national. Voir DE LARY 1992.

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Art. 11 du règlement 1612/68

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Conseil des Communautés européennes. – Directive n°73/148/CEE du 21 mai 1973 relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des ressortissants des Etats membres à l’intérieur de la Communauté en matière d’établissement et de prestations de services. Voir MOPIN 1987

45

L’article 54 du traité de Rome décide la mise en place de programmes généraux pour la suppression des restrictions à la liberté d’établissement et de prestation de services (LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE POUR L'UNION EUROPÉENNE 1998), mais, si le droit de libre circulation pour les travailleurs est appliqué depuis les années 1960, les travailleurs non salariés ont toujours des restrictions pour s’établir dans les Etats membres. L’article 5 de la directive 64/224/CEE (1964) oblige ensuite les Etats membres à supprimer les restrictions qui empêchent les bénéficiaires de s’établir dans les pays d’accueil, ou d’y fournir les prestations de service aux mêmes conditions et avec les mêmes droits que les nationaux. Depuis, plusieurs directives élargissent le droit de libre circulation à plusieurs services, mais l’obligation d’application existe seulement à partir de 1973.

La libre circulation reste donc longtemps un outil du libre échange économique (MATH et RODIER 2003) : c’est uniquement dans les années 1990 qu’a été prise la décision d’inclure, à côté des personnes actives, les inactifs. Ainsi, les trois directives suivantes sont adoptées le 28 juin 1990 et entrent en vigueur le 1er juillet 1992 :

− selon la directive 90/366, tout étudiant ressortissant d’un Etat membre bénéficie de la libre circulation [Art. 1]. Comme pour les travailleurs, le conjoint et les enfants à charge de l’étudiant ont le droit d’accéder à toutes activités salariées ou non salariées [Art. 2]. L’étudiant reçoit une carte de séjour en tant que ressortissant de la CEE, dont la validité peut être limitée à la durée des études.

− la directive 90/365 accorde le droit de séjourner de façon permanente dans un autre Etat membre à tous les retraités ressortissants d’Etats membres. Ce droit est également valable pour le conjoint et les enfants à charge. Les personnes concernées reçoivent une carte de séjour dont la validité peut être limitée à cinq ans, renouvelables.

− pour toutes les personnes qui ne bénéficient pas du droit de séjour en tant que travailleur, étudiant ou retraité, la directive 90/364 accorde le droit de libre circulation aux inactifs et aux membres de leur famille.

Il faut, néanmoins, pour ces trois catégories de personnes, remplir certaines conditions de ressources et d’assurance maladie, afin de ne pas représenter une charge pour l’assistance sociale du pays d’accueil.

B.1.2 Les nouvelles mesures de libre circulation des

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