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Par les traités du 25 avril 1883 (« traité Harmand ») et du 6 juin 1884 (« traité Pate- nôtre »), le protectorat fut établi sur le royaume de Đại Nam, divisé désormais en deux parties, le Tonkin au nord et l’Annam au centre. La monarchie était conservée jusqu’en 1945, mais le « protectorat » évolua rapidement vers une domination coloniale pure et simple. Toutefois, la colonisation ne fut pas accomplie d’un coup. D’une part, la guerre avec les forces chinoises continua jusqu’en 1885. En mars 1885, la retraite de l’armée française de Lạng Sơn devant l’offensive chinoise provoqua le renversement du gouvernement Jules Ferry. Le traité de Tian- jin du 9 juin 1885 mit fin aux hostilités entre la France et la Chine, ce dernier reconnaissant le protectorat français sur le Vietnam. Pourtant, à l’intérieur du pays, la résistance armée vietna- mienne était toujours forte et s’intensifiait encore après que Tôn Thất Thuyết, un des régents du royaume, s’enfuit de Huế en juillet 1885 avec le jeune empereur Hàm Nghi et lança un appel

91 AAE, MD, Asie, 40, Ministère de la Marine et des Colonies, Note sur le programme d’action au Ton-

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à un soulèvement populaire (mouvement Cần vương). Par la suite, la « résistance nationale » menée par les lettrés et les paysans frappa tout le pays. Même la capture de Hàm Nghi en 1888 n’atténua pas la situation. La « pacification » du Tonkin ne fut accomplie qu’à la fin des années 1890.92

En même temps, les autorités françaises devaient mettre en place des institutions pour assurer la « mise en valeur » de la colonie. En particulier, elles précipitèrent l’élaboration du régime minier aussitôt que le traité du 6 juin 1884 fut signé. Cette hâte, étonnante au regard de la situation locale, s’expliquait par le désir du gouvernement français de voir la rapide mise en exploitation des richesses minières du Vietnam, un des motifs principaux de la conquête. Ce faisant, il espéra apaiser l’opinion publique hostile à cette expédition, couteuse en vies hu- maines et en argent. C’est ainsi qu’une commission fut instituée en en septembre 1884 à Paris pour étudier des questions des mines de l’Annam et du Tonkin et la convention minière fut conclue en février l’année suivante avec le gouvernement vietnamien. Même si l’exploitation proprement dite était à laisser à l’initiative privée, il appartenait au pouvoir public d’établir le cadre institutionnel. Une série de mesures prises par les autorités françaises entre 1884 et 1888 était donc indispensable pour poser les fondements du développement de l’industrie charbon- nière dans le cadre de la domination coloniale française.

La convention minière du 18 février 1885

Pour que les Français pussent exploiter les richesses minières du Vietnam, les autorités françaises avaient d’abord besoin de s’approprier le pouvoir d’en disposer à leur gré. À ce propos, le traité de protectorat du 6 juin 1884 stipulait seulement : « Des conférences ultérieures régleront […] le régime et l’exploitation des mines » (art. 18). Par conséquent, le gouvernement français se mit à la préparation d’une convention minière à conclure avec le gouvernement

92 Charles FOURNIAU, Annam-Tonkin 1885-1896 : lettrés et paysans vietnamiens face à la conquête

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vietnamien afin de régler définitivement la question du droit souverain sur les mines du Viet- nam.

Le projet de convention, rédigé par le ministère des Affaires étrangères, fut envoyé le 5 décembre 1884 au résident général de France à Huế, Gabriel Lemaire.93 Le texte était simple

dans sa forme, mais lourd de sens.94 Le préambule déclarait qu’il n’existait aucune mine vala-

blement concédée à quiconque, excepté la mine de Nông Sơn,95 et que toutes les autres mines

étaient donc soumises au nouveau régime. Cette déclaration visait, en fait, à nier la validité du contrat de concession que la Cour de Huế avait passé quelques mois plus tôt avec un certain Antoine Bavier-Chauffour. Nous parlerons de cette affaire plus loin.

Le premier article stipulait que l’exploitation des mines en Annam et au Tonkin serait soumise à la règlementation élaborée par le gouvernement français. Il avait été prévu de joindre le projet de règlement rédigé par la commission des mines de l’Annam et du Tonkin, mais le ministre des Affaires étrangères décida de ne pas le communiquer aux autorités vietnamiennes, jugeant nécessaire de le remanier.Par conséquent, le gouvernement vietnamien devait signer sans même connaitre le contenu du règlement qui allait être mis en œuvre et sans pouvoir pren- dre part à des discussions ultérieures sur son application et sa modification.

Les articles 2 et 3 précisaient que les taxes perçues des mines de l’Annam seraient versées au Trésor royal, tandis que celles perçues des mines du Tonkin seraient inscrites au budget du protectorat. Attendu que la plupart des mines se situaient au Tonkin, ces dispositions, détachant le Tonkin de l’Annam, privaient le Trésor royal de la plus importante source de revenus miniers.

En soumettant le projet de convention à la signature du gouvernement vietnamien, Le- maire prétendit : « il est, en effet, de l’intérêt bien entendu des deux gouvernements de hâter

93 ANOM, IC AF, T10(1), Lettre de Jules Ferry, président du conseil, ministre des Affaires étrangères,

au résident général, 5 décembre 1884.

94 Pour le texte définitif, voir en annexe A-1. 95 Voir supra.

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l’établissement d’un régime qui assure l’exploitation scientifique et régulière d’une des princi- pales ressources de l’Annam et du Tonkin. »96 N’étant pas aussi naïves, les autorités vietna-

miennes protestèrent vivement contre l’attitude unilatérale du gouvernement français et le con- tenu du texte nettement défavorable à leur propre intérêt. Ce n’est que sous la menace du rési- dent général français qu’elles signèrent, le 18 février 1885, la convention minière.97 Ainsi, les

autorités françaises acquirent le droit de disposer formellement des mines du Vietnam.

Le règlement minier de 1888

En même temps qu’il préparait la convention minière, le gouvernement français s’attacha à élaborer le règlement à appliquer aux mines de l’Annam et du Tonkin. En la matière, il n’exis- tait pas de disposition commune à la France et à son empire colonial. L’application de la légi- slation métropolitaine aux territoires d’outre-mer ayant été abandonnée, chaque colonie ou protectorat français se dotait d’un règlement particulier, ou, comme la Cochinchine, n’en avait pas du tout.98 Il était donc nécessaire de préparer pour l’Annam et le Tonkin un nouveau règle-

ment qui convenait le mieux à la situation du pays.

Le sous-secrétaire d’État à la Marine et aux Colonies chargea, d’abord, le général Millot, commandant en chef du corps expéditionnaire au Tonkin, de rédiger un projet de règlement des mines.99 La complexité que représentait ce travail ne permit pas à l’administration locale,

encore embryonnaire, de l’accomplir seule d’une manière satisfaisante.100 Par conséquent, la

96 AAE, MD, Asie, 97, Lettre de Gabriel Lemaire, résident général, au Conseil secret [Viện cơ mật] du

royaume de Vietnam, 26 janvier 1885.

97 AAE, MD, Asie, 97, Lettre de Phạm Thận Duật et Huỳnh Hữu Thường, plénipotentiaires du royaume

de Vietnam pour la convention minière, au résident général, 16 février 1885 ; Lettres de Gabriel Lemaire, résident général, au ministre des Affaires étrangères, 18 février et 13 mars 1885.

98 Louis AGUILLON, Législation des mines française et étrangère, T. 2, Paris : Librairie polytechnique,

Baudry, 1886, pp. 396-448.

99 ANOM, IC AF, T01(3), Lettre de Félix Faure, sous-secrétaire d’État à la Marine et aux Colonies, au

commandant en chef du corps expéditionnaire, 4 juillet 1884.

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préparation du règlement fut confiée à la « commission chargée d’étudier les diverses questions concernant le régime des mines en Annam et au Tonkin », instituée à Paris le 6 septembre 1884.101 Présidée par Ernest Lamé-Fleury, conseiller d’État et inspecteur général des mines,

elle était composée de représentants des ministères des Affaires étrangères et de la Marine et des Colonies, d’anciens agents officiels au Vietnam, ainsi que d’ingénieurs des mines, dont Louis Aguillon, ingénieur en chef et professeur de législation à l’École des mines, et Edmond Fuchs, qui avait dirigé la mission d’exploration minière au Vietnam en 1881-1882. Le projet élaboré au cours des quatorze séances de la commission, qui se tinrent du 15 septembre au 3 novembre 1884, fut publié dans le Journal officiel, mais ne fut pas mis en vigueur tout de suite.102 L’instabilité politique du Tonkin, créée par l’invasion de l’armée française et par la

résistance armée vietnamienne, ne permettant pas l’exploitation immédiate de ses mines, la mise en œuvre du règlement devint moins urgente.103 En 1886, tandis que cette question restait

en suspens à Paris, Paul Bert, résident général de France en Annam et au Tonkin, critiquant quelques dispositions du projet de la commission de 1884, proposa un contreprojet, qui ne fut pas non plus accepté par le gouvernement.104 Le règlement minier fut finalement institué par

le décret du 16 octobre 1888, retenant presque intégralement les dispositions du projet de 1884.105

fut pas adopté. ANOM, IC AF, T01(3), Rapport de Montalembert, chef du bureau d’informations commerciales, au directeur des affaires civiles et politiques, 20 octobre 1884 ; Lettre de Gabriel Lemaire, résident général, au ministre de la Marine et des Colonies, 4 décembre 1884.

101 Arrêté du ministre de la Marine et des Colonies du 6 septembre 1884, JORF, Lois et décrets, 7 septembre

1884.

102 ANOM, IC AF, T01(3), PV des séances de la commission des mines de l’Annam et du Tonkin, 15

septembre-3 novembre 1884 ; ANOM, IC AF, T01(3), Rapport d’Ernest Lamé-Fleury, président de la commission des mines de l’Annam et du Tonkin, au ministre de la Marine et des Colonies, 13 novembre 1884 ; « Projet de règlement sur le régime et l’exploitation des mines de l’Annam et du Tonkin », JORF,

Lois et décrets, 6 décembre 1884.

103 Charles FOURNIAU, Annam-Tonkin 1885-1896, op. cit.

104 ANOM, IC AF, T10(2), « Projet de règlement sur le régime et l’exploitation des mines de l’Annam et

du Tonkin » ; Lettre de Paul Bert, résident général, au ministre des Affaires étrangères, 29 juillet 1886.

105 Décret du 16 octobre 1888, JORF, Lois et décrets, 17 octobre 1888, promulgué en Annam et au Tonkin

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L’examen des caractéristiques principales de ce règlement, sa comparaison avec la légi- slation métropolitaine et l’analyse des arguments présentés pendant son élaboration nous per- mettent de saisir les différents points de vue présentés à l’égard du développement de l’indus- trie minière du Vietnam, ainsi que les conditions juridiques dans lesquelles ce développement fut effectivement entrepris par la suite. Les controverses autour du règlement minier portaient en gros sur deux points : la nature, les attributs, et le mode d’acquisition de la propriété minière, d’une part, et le mode de perception et le montant des taxes et impôts miniers, d’autre part.

Comme la législation métropolitaine, le règlement minier de l’Annam et du Tonkin dis- tinguait la propriété de la mine de la propriété de la surface (art. 41). Autrement dit, le proprié- taire de la surface ne pouvait prétendre aucun droit sur les matières minières qui se trouvaient sous terre. Pour les exploiter, il devait obligatoirement instituer la propriété minière selon les formalités que nous décrirons plus tard. Il ne pouvait pas non plus empêcher un tiers d’instituer la propriété minière sur son propre terrain. Le règlement ne reconnaissait au propriétaire de la surface que le droit de toucher une indemnité due par l’explorateur ou l’exploitant des mines pour leur occupation de terre, calculée au double de sa valeur (art. 56), et pour les dommages que les travaux d’exploitation causaient aux propriétés de la surface (art. 57). Ces dispositions étaient, à l’évidence, fort avantageuses pour les exploitants des mines, d’autant qu’ils n’étaient pas tenus de payer une redevance tréfoncière annuelle au propriétaire de la surface comme c’était le cas en France.106

Sur la durée du droit minier, un débat vif fut engagé à la commission des mines de l’An- nam et du Tonkin. Albert Grodet, sous-directeur au ministère de la Marine et des Colonies, envisageait de la limiter à cinquante ans. Il soulignait le fait que l’on ne pouvait connaitre la valeur exacte d’une mine lors de sa concession. Si elle s’avérait extrêmement riche, les béné- fices que l’exploitant en tirerait seraient beaucoup plus importants que ceux revenant à l’admi- nistration. Il fallait donc, selon Grodet, que cette dernière se réservât la faculté de modifier l’assiette de l’impôt. Si l’on mettait une limite au droit minier dans le temps, la mine serait

texte intégral, voir en annexe A-2.

106 Louis AGUILLON, Législation des mines française et étrangère, T. 1, Paris : Librairie polytechnique,

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mise à l’adjudication après l’écoulement de ce délai, ce qui apporterait certainement des béné- fices satisfaisants au Trésor public.

S’opposant à cette proposition, les ingénieurs des mines rappelèrent le fait que dans la plupart de pays du monde, y compris la France, la propriété minière était accordée à perpétuité. Ils ajoutèrent ensuite deux arguments essentiels contre la concession temporaire. En premier lieu, celle-ci décourageait fortement les investisseurs, ce qui baisserait nécessairement le prix de la mine lors de l’adjudication initiale : « L’État se réservera un léger avantage pour l’avenir et se créera de grands inconvénients tout de suite, en éloignant les capitaux de l’industrie mi- nière du Tonkin », faisait remarquer Lamé-Fleury.107 En deuxième lieu, la concession tempo-

raire était nuisible à une exploitation rationnelle des ressources minières. Dans ce cas-là, l’ex- ploitant n’entretiendrait pas soigneusement sa mine pendant les dernières années de son contrat, tentant d’extraire tout ce qui pourrait être extrait avec le moins de peine et la moindre dépense. L’entretien défectueux de la mine entrainerait inévitablement sa dépréciation, ce qui réduirait le montant que le Trésor pourrait retirer de la nouvelle adjudication, en même temps qu’il posait des difficultés à l’exploitation ultérieure de la mine. Convaincue de ces raisonnements, la com- mission adopta le principe de la perpétuité de la propriété minière.108

En 1886, Pau Bert remit en cause ce principe, en prétendant qu’il n’était pas adapté à la situation du Tonkin. Il avança le fait qu’au Vietnam, la concession d’une mine avait été, en général, concédée, ou plutôt louée, pour une durée très courte.109 En réponse à cette observation,

Fuchs faisait remarquer : « les emphythéoses [sic.] à court terme n’ont jamais été appliquées qu’à des mines de faible importance ; et ce sont surtout les grands gites de houille, d’étain et peut-être d’argent et de cuivre dont il faut provoquer la mise en valeur et favoriser l’exploita- tion. »110 La controverse entre Paul Bert et Edmond Fuchs reflète une opposition, plus impor-

tante qu’on ne le suppose, des points de vue sur le développement de l’industrie minière au

107 ANOM, IC AF, T01(3), PV de la commission des mines du 28 septembre 1884. 108 ANOM, IC AF, T01(3), Rapport d’Ernest Lamé-Fleury, 13 novembre 1884.

109 ANOM, IC AF, T10(2), Lettre de Paul Bert, résident général, au ministre des Affaires étrangères, 29

juillet 1886. Rappelons que la mine de Nông Sơn avait été concédée en 1881 pour 29 ans.

110 ANOM, IC AF, T10(2), Edmond Fuchs, Observation sur les contreprojet de règlement minier présenté

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Vietnam. En disant que la concession temporaire correspondait mieux à la coutume du pays, le premier envisageait surtout la reprise ou l’extension de l’exploitation traditionnelle faite par les autochtones. Le second ne s’en occupait guère et prévoyait, au contraire, le développement d’une exploitation méthodique et intensive, entreprise à grande échelle et recourant aux tech- niques les plus avancées : en un mot une industrie moderne dirigée par les capitaux et ingé- nieurs français. Cette exploitation nécessitait l’investissement d’une somme énorme pour les premiers établissements, qui ne pouvaient pas être amortie dans un court délai. La perpétuité de la propriété des mines s’imposait donc comme une condition indispensable au développe- ment de l’industrie minière moderne. Enfin, le règlement de 1888 adopta le principe de la pro- priété minière perpétuelle.

La nationalité de l’exploitant fut aussi une question délicate. En France, les étrangers pouvaient se faire concessionnaires des mines au même titre que les Français.111 En revanche,

la commission de 1884 décida de ne pas autoriser les étrangers à posséder et à exploiter les mines de l’Annam et du Tonkin : « Il y a intérêt à réserver aux Français une source de richesses qui peut être considérable ».112 En ce qui concerne les Vietnamiens, les membres de la com-

mission acceptèrent à l’unanimité qu’ils fussent traités comme les Français en matière des mines, leur interdire d’acquérir les mines dans leur pays étant considéré comme dangereux du point de vue politique. Le règlement de 1888 précisait que « les sujets ou protégés français et les sociétés françaises » pouvaient seuls posséder et exploiter les mines, les sociétés françaises étant définies comme celles constituées sous la loi française et dont le conseil d’administration était composé en majorité de membres français (art. 20).113 Ainsi, contrairement à ce que cer-

tains historiens croient,114 aucune restriction juridique n’était apportée aux Vietnamiens pour

111 Louis AGUILLON, Législation des mines française et étrangère, T. 1, op. cit., p. 112. 112 ANOM, IC AF, T01(3), PV de la commission des mines du 28 septembre 1884.

113 Les « sujets » indiquent les ressortissants de la colonie (Cochinchine), les « protégés » ceux des pro-

tectorats (Tonkin et Annam).

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l’exploitation des mines. En revanche, ce règlement avait pour conséquence d’écarter définiti- vement les Chinois de l’exploitation des richesses minières du Vietnam, secteur qu’ils avaient prédominé pendant longtemps.115

Quant au mode d’acquisition du droit minier, la formule adoptée pour l’Annam et le Tonkin était fondamentalement différente de celle en vigueur en métropole. En France, l’ad- ministration pouvait choisir le concessionnaire, délimiter l’étendue de la concession et même décider s’il y avait lieu ou non de concéder la mine. Si plusieurs demandeurs concurrentiels se présentaient pour la même mine, elle sélectionnait celui qui lui semblait le plus qualifié pour l’exploitation. Ce régime avait pourtant l’inconvénient d’accorder à l’administration un pou- voir trop étendu et une responsabilité trop lourde. Plusieurs projets de réformes avaient donc été proposés par quelques ingénieurs des mines depuis le milieu de siècle, mais restaient sans effet.116 Étant parmi ces ingénieurs partisans de la réforme de la législation métropolitaine,

Lamé-Fleury et Aguillon voulurent faire du Vietnam un terrain d’essai pour un nouveau régime minier.117

Le principe de l’institution de la propriété minière élaboré par ceux-ci et retenu par le règlement de 1888 se basait sur la distinction des mines déjà connues et celles découvertes par l’individu. Dans ce premier cas, c’est-à-dire pour les mines dont l’existence était reconnue depuis longtemps ou celles découvertes par les ingénieurs de l’administration, la propriété était octroyée à celui qui offrait le prix le plus élevé aux enchères publiques. À cet effet, l’adminis- tration détenait la faculté de désigner les régions où les mines ne pouvaient être acquises que par adjudication. Le règlement de 1888 classait toutes les mines de charbon des provinces de Quảng Yên, Hải Dương et Bắc Ninh dans cette catégorie (art. 19).

115 Voir Thomas J. ENGELBERT, « The Chinese in Vietnam (Hoa) : data sources and historical overview »,

in Jean-Pascal BASSINO, Jean-Dominique GIACOMETTI & ODAKA Konosuke (dir.), Quantitative economic

history of Vietnam, 1900-1990, Tokyo : Hitotsubashi University, 2000.

116 Lionel LATTY, « La loi du 21 avril 1810 et le Conseil général des mines avant 1866 : les procès-

verbaux des séances », Documents pour l’histoire des techniques, no. 16, 2008.

117 Ernest Lamé-Fleury était auteur d’un projet de nouvelle loi minière française présenté au gouverne-