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Pièges du diagnostic biologique

Il est important de connaître la possibilité d'un

« effet crochet » [4]. En cas de concentrations extrêmement élevées de PRL, les deux anticorps utilisés pour le dosage sont saturés séparément, les anticorps marqués pouvant réagir avec des molécules de PRL restées en solution. Les concen-trations de PRL sont alors peu élevées, voire nor-males. Le biologiste doit être prévenu par le clinicien de la possibilité d'obtenir des concentra-tions très élevées de prolactine, en particulier lorsque le bilan hypophysaire est réalisé chez un patient avec macroadénome. Une nouvelle mesure de la PRL après dilution du sérum au 1/100 per-met en effet de reconnaître facilement cette situation.

Les formes macromoléculaires de la PRL (big PRL et big big PRL) sont fréquentes [5]. Ces agrégats de PRL ont une activité biologique réduite mais une demi-vie plasmatique augmentée, par diminution de leur clairance métabolique, et sont reconnus par la plupart des systèmes de dosage immuno-logiques automatisés actuellement utilisés, avec néanmoins une sensibilité différente selon les trousses de dosage. Il est important de savoir reconnaître ces « fausses hyperprolactinémies » qui peuvent conduire, si on les méconnaît, à la prescription d'examens complémentaires inutiles et à la mise en route de traitements inadaptés. La chromatographie de filtration sur gel Sephadex® G-100 est la méthode de référence pour déceler la présence d'une macroprolactinémie. Après sépa-ration de la PRL monomérique et des formes de masse molaire plus élevée, les différentes formes sont quantifiées dans les éluats de chromatogra-phie. La lourdeur et le coût de cette méthode en limitent cependant l'emploi à quelques centres spécialisés. Le test de précipitation au polyéthy-lène glycol (PEG), validé pour la plupart des immunodosages actuels, est la méthode la plus

Tableau 8.1. Liste des traitements entraînant une hyperprolactinémie.

Effet hyperprolactinémiant Neuroleptiques

Phénothiazines (Largactyl®, Nozinan®,Tercian®, Melleril®, Moditen®, Piportil®, Neuleptil®, Modécate®, Trilifan®)

+++

Butyrophénones (Haldol®, Dipiperon®, Droleptan®, Semap®) +++

Thioxanthènes (Fluanxol®, Clopixol®) +++

Benzamides

Amisulpride (Solian®) +++

Sulpiride (Aiglonyl®, Dogmatil®, Synédil®) +++

Sultopride (Barnetil®) +++

Tiapride (Tiapridal®) +++

Rispéridone (Risperdal®) +++

Véralipride (Agréal®) ++

Loxapine (Loxapac®) +

Clozapine (Leponex®, Clozapine®) +/–

Aripiprazole (Abilify®) +/–

Olanzapine (Zyprexa®) +

Pimozide (Orap®) +

Antidépresseurs Tricycliques

Clomipramine (Anafranyl®) ++

Amitriptyline (Laroxyl®, Elavil®) +

Désipramine (Pertofran®) Cas rapportés

Imipramine (Tofranyl®) Cas rapportés

Maprotiline (Ludiomil®) Cas rapportés

Amoxapine (Défanyl®) Cas rapportés

Trimipramine (Surmontil®) Cas rapportés

Doxépine (Quitaxon®) Cas rapportés

Inhibiteur sélectif de la mono-oxydase A

Pargyline (Moclamine®) ++

Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine

Fluoxétine (Prozac®, Fluoxétine®) Cas rapportés

Paroxétine (Deroxat®, Divarius®) Cas rapportés

Citalopram (Seropram®) Cas rapportés

Fluvoxamine (Floxifral®) Cas rapportés

Sertraline (Zoloft®) Cas rapportés

Escitalopram (Seroplex®) Cas rapportés

utilisée. Il repose sur la précipitation non spéci-fique de la macroprolactinémie par le PEG, suivie du dosage de la PRL dans le surnageant obtenu après centrifugation.

Les anticorps hétérophiles sont des immunoglo-bulines humaines (principalement IgG) suscep-tibles de reconnaître des immunoglobulines animales et donc de se fixer sur les anticorps uti-lisés pour les dosages de PRL. Ils peuvent suresti-mer ou sous-estisuresti-mer les concentrations de PRL selon qu'ils se fixent aux deux anticorps ou à un seul d'entre eux. Ces interférences sont exception-nelles avec les nouvelles techniques de dosage et peuvent être suspectées par l'obtention de concen-trations de PRL très différentes avec des trousses de dosage différentes.

Diagnostic étiologique

Les étiologies des hyperprolactinémies sont nom-breuses (encadré 8.1). L'objectif est de ne pas méconnaître les causes tumorales, au premier rang desquelles on trouve les adénomes à PRL.

L'IRM hypothalamohypophysaire est l'examen morphologique de référence. Elle est, en pratique clinique, volontiers réalisée très tôt, dès la mise en évidence d'une augmentation de la concentration plasmatique de PRL. Cette attitude est justifiée si l'élévation de la PRL, en l'absence de traitement hyper-prolactinémiant, est importante (> 250 ng/ml), car le diagnostic d'adénome à PRL est alors très probable.

Lorsque l'hyperprolactinémie est modérée, situation la plus fréquente en pratique, toutes les étiologies

Effet hyperprolactinémiant Neuroleptiques

Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline

Venlafaxine (Effexor®) Cas rapportés

Traitements des nausées et vomissements Benzamides

Alizapride (Plitican®) +++

Métoclopramide (Primpéran®, Prokinyl®) +++

Dompéridone (Motilium®, Motilyo®, Péridys®, Bipéridys®) ++

Dérivés des phénothiazines

Métopimazine (Vogalène®, Vogalib®) +++

Antihistaminiques H2

Cimétidine (Tagamet®) +

Ranitidine (Azantac®) +

Famotidine (Pepsidac®) Cas rapportés

Antihypertenseurs

Vérapamil (Isoptine®, Tarka LP®) ++

Méthyldopa (Aldomet®) +

Réserpine (Tensionorme®) +

Autres

Indoramine (Vidora®) +

Estrogènes à forte dose +

Morphine, morphiniques +

Méthadone +/–

Cocaïne +

sont possibles et il est important de garder une démarche diagnostique dont le but sera d'éliminer les causes non tumorales d'hyperprolactinémie avant de recourir à l'imagerie afin d'éviter la réalisa-tion d'une imagerie par résonance magnétique (IRM) inutile.

Le test de grossesse est systématique chez les femmes en période d'activité génitale.

L'existence d'une insuffisance rénale chronique ou hépatique est généralement connue et est une donnée de l'interrogatoire.

L'hypothyroïdie périphérique est une étiologie classique d'hyperprolactinémie. L'interrogatoire recherche systématiquement des signes cliniques d'hypothyroïdie et la palpation cervicale un goitre. Un dosage de TSHus (ultrasensible) est classiquement recommandé. Néanmoins, l'hy-perprolactinémie est peu fréquente au cours de l'hypothyroïdie (moins de 5 %) et n'est

qu'excep-tionnellement le mode de découverte d'une hypo-thyroïdie périphérique [6].

La macroprolactinémie doit être recherchée lorsque la présentation clinique n'est pas typique (absence d'hypogonadisme clinique et/ou biolo-gique, galactorrhée isolée sans troubles de l'ovu-lation, infertilité sans galactorrhée ou troubles menstruels évidents…), lorsque les troubles du cycle peuvent avoir une autre explication (syndrome des ovaires polymicrokystiques [SOPMK], insuffisance ovarienne périphérique, périménopause, anovulation hypothalamique fonctionnelle…), lorsqu'il existe une différence significative entre les concentrations plasma-tiques de PRL mesurées avec des trousses de dosage différentes plus ou moins « sensibles » à la macroprolactinémie [7]. L'existence de signes cli-niques d'hyperprolactinémie n'est cependant pas incompatible avec le diagnostic de macroprolac-tinémie. Vingt-deux à 46 % des patientes ont une galactorrhée. Une oligospanioménorrhée existe chez 30 à 59 % des femmes et une diminution de la libido ou une dysfonction érectile est retrou-vée chez 50 % des hommes présentant une macroprolactinémie [8]. La chromatographie de filtration sur gel Sephadex® G-100 est la méthode de référence. Le test de précipitation au PEG, moins lourd et moins coûteux, est validé pour la plupart des immunodosages utilisés actuelle-ment. Classiquement, le diagnostic de macropro-lactinémie est retenu si le pourcentage de récupération de la PRL dans le surnageant est inférieur à 40 %. Le résultat reste incertain pour des pourcentages compris entre 30 et 60 %. Ce mode d'expression des résultats n'exclut pas la possibilité d'une augmentation simultanée de la valeur absolue de PRL monomérique. Pour cer-taines équipes, le diagnostic de macroprolactiné-mie ne peut donc être retenu que si la PRL dosée dans le surnageant après précipitation par le PEG est inférieure à des valeurs seuils établies avec la technique utilisée dans des groupes témoins. Ce test peut être pris en défaut dans les rares formes où seule la big PRL est en excès, puisque la préci-pitation de la big PRL par le PEG n'est pas établie.

Hyperprolactinémie et syndrome :