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Phosphorylation des IN rétrovirales

actine IN-EGFP

4. Phosphorylation des IN rétrovirales

a.

Phosphorylation des IN rétrovirales

Afin de déterminer si la phosphorylation de l’IN par GCN2 était un mécanisme spécifique à l’IN du VIH-1, la phosphorylation de cinq IN rétrovirales a été comparée. Pour ce faire un test de phosphorylation des différentes IN en présence de GCN2 dans les conditions préalablement décrites, a été réalisé in vitro (figure 71).

Nous avons constaté que l’IN du VIH-2 est également phosphorylée in vitro par GCN2 (piste 4). De façon intéressante, les IN du virus du sarcome aviaire (ASV) et du virus de la leucine murine (MLV) sont également phosphorylées (pistes 3 et 5). Au contraire l’IN de PFV est peu modifiée par GCN2 (piste 2). GCN2 phosphoryle également d’autres INs rétrovirales telles que l’IN d’ASV et de MLV, suggérant un mécanisme de régulation du cycle viral par GCN2 commun à certains rétrovirus.

Figure 71. Phosphorylation in vitro des intégrases d’autres rétrovirus. Piste 1 : IN VIH-1 WT. Piste

2 : IN de PFV. Piste 3 : IN d’ASV. Piste 4 : IN du VIH-2. Piste 5 : IN MLV.

L’alignement des séquences des quatre intégrases phosphorylées par GCN2, montre que le motif putatif d’interaction 81SGYIE85 identifié sur l’IN du VIH-1, est conservé sur l’IN du VIH-2 et de MLV (figure 72 (a)). Au sein de ce motif en plus du E, les résidus S et I sont très conservés entre les quatre intégrases rétrovirales phosphorylées par GCN2. Il pourrait être intéressant d’étudier le rôle de ces résidus sur la phosphorylation de l’IN du VIH-1.

GCN2-P GCN2-P GCN2-P

Phosphorylation de l’IN du VIH-1

De façon intéressante, l’IN de PFV, qui n’est pas phosphorylée par GCN2, ne possède pas ce motif putatif d’interaction (figure 72 (b)).

Figure 72. Alignement des séquences des INs. L’alignement a été réalisé avec le logiciel en ligne

ClustalW2 (http://www.ebi.ac.uk/Tools/msa/clustalw2/). Les astérisques, les doubles points et les points représentent des résidus identiques, des résidus conservés et des résidus semi conservés respectivement. (a) L’alignement de l’IN du VIH-1 (a.a. 60 à 112), du VIH-2 (a.a. 60 à 112), d’ASV (a.a. 61 à 117) et de MLV (a.a. 121 à 180). Encadré en noir le motif putatif d’interaction avec GCN2. (b) L’alignement des séquences de l’IN du VIH-1 (a.a. 57 à 108), et de PFV (a.a. 121 à 180). Encadré en noir le motif putatif d’interaction avec GCN2.

b.

Identifications des sites de phosphorylations

L’analyse en spectrométrie de masse après phosphorylation des IN par GCN2, nous a ainsi permis d’identifier les résidus phosphorylés sur les différentes IN. L’expérience a été réalisée deux fois pour toutes les IN et un contrôle sans GCN2 a permis d’identifier les phosphorylations dues à la présence de GCN2.

Il faut savoir que pour l’IN du VIH-1, nous avons obtenu entre 60 et 80 % de couverture de séquence, pour l’IN du VIH-2 et celle d’ASV 56 % de couverture de séquence et 49 % pour l’IN de MLV.

Entre les différentes INs rétrovirales, les sites de phosphorylation identifiés sont retrouvés en N et C-terminal des IN (figure 73). Bien entendu la couverture de séquence n’étant pas totale, nous ne pouvons pas exclure qu’il existe d’autre résidus modifiés par GCN2.

a

Figure 73. Alignement des séquences de l’IN du VIH-1, du VIH-2, d’ASV et de MLV. L’alignement

a été réalisé avec le logiciel en ligne ClustalW2 (http://www.ebi.ac.uk/Tools/msa/clustalw2/). Les étoiles, les doubles points et les points représentent des résidus identiques, des résidus conservés et des résidus semi conservés respectivement. Encadrés en noir les résidus phosphorylés.

Conclusions et discussions

5. Conclusions et discussions

5.1. Phosphorylation de l’IN

Phosphorylation de l’IN du VIH-1 sur les sérines 24 et 255

Nous avons pu montrer que l’IN était phosphorylée in vitro par GCN2. Cette phosphorylation n’est pas perturbée par la mutation du résidu E85 du site putatif d’interaction avec GCN2 (figure 56). De plus pour être phosphorylée par GCN2, l’IN doit pouvoir former des oligomères dont on sait qu’ils sont actifs.

Après analyse par spectrométrie de masse, nous avons identifié deux résidus phosphorylés : la sérine 24 et la sérine 255. Après mutation de ces deux résidus par une alanine (mutation mimant une absence de phosphorylation), la phosphorylation de l’IN est fortement diminuée in vitro, confirmant que ces deux résidus sont les sites majoritaires de phosphorylation par GCN2. De plus le niveau de phosphorylation du mutant S24A ou de l’IN ΔN-ter est similaire à celui du WT, tandis que le mutant S255A et l’IN ΔC-ter sont peu phosphorylés. Il semblerait que le domaine C-terminal contenant le résidu 255 soit primordial pour une phosphorylation efficace de l’intégrase par GCN2 et que la position 255 soit le site primaire / majeur modifié par GCN2.

GCN2 phosphoryle également d’autres IN rétrovirales telles que l’IN d’ASV et de MLV, suggérant un mécanisme de régulation du cycle viral par GCN2 commun à certains rétrovirus.

5.2. Rôle de la phosphorylation de l’IN du VIH-1

Pour étudier le rôle de la phosphorylation de l’IN, la S24 et la S255 ont été mutées soit par une alanine mimant une absence de phosphorylation ou par un acide aspartique mimant une phosphorylation. Les effets de ces mutations sur les caractéristiques de l’intégrase in vitro ainsi que sur la réplication virale ont été analysés

Caractéristiques des IN WT et mutées

Nos résultats montrent que les mutations des S24 et S255 de l’IN n’affectent pas de manière drastique l’activité catalytique des IN mutées. L’impact des mutations de ces deux résidus sur la conformation de l’IN a été observé. Pour cela la sensibilité à la digestion par la trypsine des

mutants a été comparée à celle du WT. Aucun changement de conformation important induit par les mutations des sérines S24 et S255 par un acide aspartique n’a été identifié par cette technique.

Réplication des virus WT et mutés

Des lentivirus portant les mutations sur la S24 et/ou la S255 ont été produits pour pouvoir étudier le rôle de la phosphorylation sur le cycle viral.

Nous avons pu ainsi montrer que la mutation S255A entraîne une augmentation significative du nombre de cellules infectées. De plus, la transcription inverse n’est pas modifiée en présence de la mutation S255A tandis que l’intégration est stimulée. De façon intéressante, l’infection avec les virus WT et mutés de cellules n’exprimant pas GCN2, nous a permis de montrer un lien entre l’effet de la mutation S255A et la présence de la kinase GCN2.

Ces résultats suggèrent que l’absence de phosphorylation sur la S255 de l’IN stimule la réplication virale ainsi que l’étape d’intégration.

Etant donné que l’interaction entre l’IN et LEDGF/p75 est importante pour l’infection virale et en particulier pour l’étape d’intégration et que la mutation S255A stimule l’intégration, nous avons cherché à savoir si l’interaction IN-LEDGF/p75 pouvait moduler la phosphorylation de l’IN. Nous avons donc rajouté le cofacteur, LEDGF/p75, dans les tests de phosphorylation de l’IN par GCN2. Nous avons pu montrer que LEDGF/p75 seul contrairement à l’IN n’est pas un substrat de GCN2. Cependant, lorsque les trois partenaires sont présents, une diminution de la phosphorylation de l’IN et une apparition de celle de LEDGF/p75 sont observées. Nous émettons l’hypothèse que dans ces conditions, un complexe à trois partenaires existe au sein duquel une inhibition de la phosphorylation de l’IN par GCN2 est observée.

Nous avons montré que la présence de LEDGF/p75 entraîne une diminution de la phosphorylation de l’IN par GCN2. De plus, lorsque la S255 de l’IN n’est pas phosphorylée par GCN2 in vivo, une augmentation de l’infectivité et de l’intégration est observée. Sachant que l’interaction IN-LEDGF/p75 est importante pour la localisation nucléaire et la stabilité de l’IN ainsi que pour le ciblage de l’intégration, nous avons décidé d’étudier l’effet de la phosphorylation de l’IN sur ces processus.

Nous avons donc observé la localisation cellulaire et le niveau d’expression de l’INs-EGFP WT et des INs-EGFP mutées. Les mutations sur la S24 et/ou la S255 n’affectent pas la localisation cellulaire de l’IN dans ces conditions. De plus la stabilité de la protéine ne semble pas modifiée même si des études plus poussées devraient être réalisées pour confirmer.

Conclusions et discussions

Enfin, nous avons réalisés le séquençage des sites d’intégration pour observer la distribution des sites d’intégration avec les différents mutants de phosphorylation de l’IN. Comme cela a déjà été décrit, une intégration préférentielle dans les gènes RefSeq est retrouvée pour le virus WT. Les mutations des S24 et S255 ne modifient pas le ciblage des événements d’intégration. Nous avons également observé la sélectivité du virus WT dans des cellules « Knock Out » pour GCN2. En présence comme en absence de GCN2, le VIH-1 s’intègre de manière préférentielle dans les gènes. La phosphorylation de l’IN ainsi que le facteur GCN2 ne semblent pas jouer sur la sélectivité d’intégration.

Modélisation

Nos travaux ont permis de mettre en évidence la phosphorylation de l’IN par GCN2 sur les sérines 24 et 255. L’analyse de l’infectivité des virus mutés montre que la mutation S255A de l’IN entraîne une augmentation du nombre de cellules infectées. Cependant même si nous avons montré que l’absence de phosphorylation stimule l’intégration, nous n’avons pas pu mettre en évidence par quel mécanisme.

Nous avons réalisé, en collaboration avec M. Laguerre à l’IECB (Pessac), une étude de la modélisation de la structure d’un tétramère d’intégrase du VIH-1 en interaction avec l’ADN viral reconstruit à partir de la structure de PFV. A l’aide de ce modèle nous avons donc essayé de comprendre quel pouvait être l’impact des phosphorylations sur les sérines 24 et 255. Cette modification entraîne l’ajout d’une charge négative sur le résidu. Ceci peut alors permettre l’interaction avec des résidus chargés positivement ou au contraire empêcher une interaction avec un résidu chargé négativement. Dans notre modèle, la sérine 24 se trouve à proximité de l’ADN viral tandis que la S255 est proche de l’ADN cible. Si la sérine 24 est phosphorylée des interactions avec les Lys 211 et 215 chargées positivement pourraient avoir lieu. Ceci induirait un changement structural de la protéine rapprochant le domaine N-terminal de l’ADN vira (figure 74).l. Tandis que la phosphorylation de la S255 pourrait repousser l’ADN. Cependant la S255 est à proximité de la Lys 258 et l’acétylation de cette dernière favoriserait l’interaction entre les deux résidus et donc la liaison avec l’ADN

La phosphorylation des sérines 24 et 255 pourraient donc avoir un effet sur la liaison à l’ADN même si nous n’avons pas observé de différences d’activité entre les IN mutées et l’IN WT. Il serait donc intéressant d’observer la liaison à l’ADN de ces différentes IN. Cette analyse va être réalisée par RMN en collaboration avec C. Di Primo.

Figure 74. Modélisation de la structure d’un tétramère d’intégrase associé à l’ADN viral. Les

monomères intèrieurs sont en vert et saumon. Les monomères extérieurs sont en jaune et bleu. Les ions Mg2+ et les ions Zn2+ sont représentés par des sphères vertes et grises respectivement. Les flèches indiquent les sérines 24 en rose et les sérines 255 en rouge.

5.3. Rôle de la phosphorylation de LEDGF/p75

Par ailleurs, LEDGF/p75 est phosphorylée en présence d’IN par GCN2. Il a déjà été montré que LEDGF/p75 est une protéine hyperphosphorylée dans la cellule, mais le rôle de ces modifications à l’heure actuelle, n’est pas résolu. Cependant, l’équipe de Llano a identifié des résidus de LEDGF/p75 phosphorylés et a étudié le rôle de ces PTMs sur la réplication virale. Ils ont pu montrer qu’en absence de phosphorylation, la réplication et l’intégration sont diminuées sans pour autant que la liaison avec la chromatine ou avec l’IN ne soit modifiée [81]. Les PTMs de LEDGF/p75 régulent donc son activité au cours du cycle viral.

Dans le laboratoire, la recherche de phosphorylation a été entreprise à partie de la protéine LEDGF/p75 exprimée chez la bactérie et incubée avec l’IN et GCN2. Six phosphorylations ont été identifiées (figure 75). Une des phosphorylations est située dans le domaine PWWP dont le rôle est d’ancrer LEDGF/p75 à la chromatine. De ce fait, la phosphorylation pourrait avoir un impact sur l’interaction de LEDGF/p75 avec la chromatine. Ensuite, une phosphorylation dans le domaine CR1 et quatre dans le domaine CR3 ont été trouvées. Ces domaines CR (Charged Region) sont impliqués dans l’interaction avec l’ADN. La phosphorylation de ces résidus par GCN2 entraîne une augmentation des charges négatives présentes dans les domaines CR et pourrait donc diminuer

S255 S255 S255 S24 S24 S24 S24 S255

Conclusions et discussions PWWP CR1 A/T CR2 CR3 IBD NLS 1 93 199 266 325 347 429 530 P P P P P P

l’affinité de LEDGF/p75 pour l’ADN. Ces modifications sont d’autant plus intéressantes qu’elles se situent dans la même région que celle identifiée précédemment par l’équipe de Llano et qui sont importantes pour la réplication.

Les différents résidus de LEDGF/p75 ont été mutés par une alanine ou par un acide aspartique et l’effet de ces mutations sur la capacité de LEDGF/p75 à stimuler l’intégration concertée, à interagir avec l’ADN et l’intégrase et finalement à être phosphorylées par GCN2 en présence de l’intégrase sont en cours d’étude.

Figure 75. Identification des sites phosphorylés par GCN2 sur LEDGF/p75 en présence d’IN. Les

résidus phosphorylés sont la sérine 62 dans le PWWP, la thréonine 134 dans le CR1, et les thréonines 267, 270 et 272 dans le CR3.

Partie 3 : caractérisation du