• Aucun résultat trouvé

Figure 36. Représentation schématique de la structure de GCN2, et les domaines RWD, kinase (PK) et C-terminal (CTD) résolus par cristallographie [179–181].

Domaine CTD Domaine RWD Domaine PK P P RWD ψPK PK HisRS RB/DD 1 200 400 600 800 1000 1200 1400 1659 GCN2 RWD Domaine Kinase Pseudo Kinase

10%

Kinase HisRS related Liaison aux ribosomes

mGCN2

γGCN2

La protéine Kinase cellulaire GCN2 Uncharged tRNA Stress P Inactive active P

GCN2 est composée de cinq domaines (figure 36) : un domaine RWD de liaison au complexe GCN1/GCN20, un domaine pseudokinase (PK), un domaine kinase, un domaine Histidyl-tRNA Synthetase-like (HisRS) et un domaine C-terminal (CTD, RB/DD)) de liaison aux ribosomes. Les structures des domaines RWD et kinase isolé ont été obtenues par cristallographie aux rayons X ainsi que le domaine CTD sous forme de dimère. Cependant la structure de la protéine entière n’est pas résolue.

La fonction de GCN2 a principalement été étudiée chez la levure. Dans la cellule, GCN2 est retrouvée sous forme inactive. Sous des conditions de stress tel qu’une carence en acides aminés, les tRNA non chargés s’accumulent et se lient au domaine HisRS de GCN2. La liaison de GCN2 avec le complexe GCN1/GCN20 faciliterait le transfert des tRNA non chargés du ribosome vers le domaine HisRS de GCN2. S’en suit alors un changement conformationnel de la kinase qui entraîne une dissociation des interactions entre les domaines HisRS, CTD et le domaine kinase. La dimérisation de GCN2 est alors favorisée induisant l’autophosphorylation sur les Thr882 et Thr887 de GCN2 levure ou sur les Thr898 and Thr903 pour GCN2 de mammifère. Ces phosphorylations sont nécessaires à son activation (figure 37) [177, 182]. Le domaine CTD est également important puisqu’il interagit avec les ribosomes, et permet ainsi à GCN2 d’être à proximité des tRNA non chargés [183].

Figure 37. Modèle d’activation de GCN2 par les tRNAs non chargés. Des interactions entre le

domaine kinase et le domaine CTD, HisRS et pseudokinase contribuent au maintien du domaine kinase sous forme inactive lors de conditions de non carence. Ces interactions bloquent la dimérisation de GCN2 et son autophosphorylation. Une fois que les tRNAs se lient au domaine HisRS un changement conformationnel existe dissociant le domaine CTD du domaine kinase (PK). Le dimère de GCN2 est alors formé et l’autophosphorylation de la kinase permet la liaison et la phosphorylation de son substrat eIF2α. [182].

Une fois activée GCN2 interagit avec eIF2α et le phosphoryle sur la sérine 51 ce qui aboutit à une inhibition de la traduction cellulaire. L’interaction entre GCN2 et eIF2α a été étudiée plus en détails. Des études de mutagenèse ont ainsi permis d’identifier une séquence consensus 79KGYIE83 nécessaire à la phosphorylation d’eIF2α par GCN2 (figure 38). En position 83 de ce site de liaison, seule la mutation du E83 en D permet de conserver une phosphorylation et donc une interaction avec GCN2 [184]. L’acide glutamique de ce motif 79KGYIE83 est particulièrement important pour que GCN2 puisse phosphoryler eIF2α.

Figure 38. Alignement de séquences de plusieurs eIF2α. L’étoile indique la sérine 51 qui est

phosphorylée par GCN2. La séquence consensus 79KGYIE83, trait rose, correspond au site de fixation de GCN2 [184].

L’activation de GCN2 a été beaucoup étudiée en réponse à une carence en acide aminé. Mais plus récemment, il a été décrit d’autres voies d’activation de GCN2 telles que la carence en purine, un stress osmotique, l’irradiation par les UVs, un stress oxydatif et un stress lié au RE. Il n’est pas connu si lors de ces stress une accumulation des tRNAs non chargés a lieu et est nécessaire à l’activation de GCN2. Le domaine HisRS semble cependant important pour l’activation de GCN2 lors de certains de ces stress [185]. Le domaine pseudo-kinase pourrait aussi être impliqué. En effet, ce domaine est capable d’interagir avec le domaine catalytique de GCN2 ce qui inhiberait GCN2 en empêchant empêchant la dimérisation de la protéine, en bloquant son autophosphorylation ou en l’empêchant de reconnaître son substrat [182].

Une étude récente montre que lors d’une irradiation aux UVBs, la présence de la DNA-PK est requise pour l’activation de GCN2 [186]. Il est donc important de comprendre le mécanisme d’activation de GCN2 aux différents stress et de déterminer si la liaison des tRNAs non chargés est un phénomène général.

4.3. Les conséquences de l’activation de GCN2

En plus du rôle de GCN2 dans la régulation de la traduction, de récentes études décrivent de nouvelles fonctions de cette protéine kinase avec notamment l’identification de nouveaux substrats (pour une revue [187]).

La protéine Kinase cellulaire GCN2

Il est connu que GCN2 est impliquée dans le contrôle de la réponse immunitaire. L’infection des cellules avec les bactéries Shigella ou Salmonella induit un dommage à la membrane qui provoque une carence en acide aminé. GCN2 est alors activée et contribue par la stimulation de la transcription d’ATF4 à la mise en place d’une réponse immunitaire contre l’infection bactérienne [188].

Des travaux récents ont identifié un nouveau substrat de GCN2 autre qu’eIF2α. Cette protéine est la methionyl-tRNA synthetase (MRS) qui est importante pour l’initiation de la traduction en produisant les Met-tRNAiMet. Lors de l’activation de GCN2 suite à un dommage à l’ADN, MRS est phosphorylée sur la sérine 662 par GCN2. Cette phosphorylation induit un changement conformationnel de la MRS qui a deux conséquences, d’une part l’affinité de la MRS pour les tRNA est diminuée inhibant la production de Met-tRNAiMet ce qui provoque une inhibition de la traduction complémentaire à celle induite par la phosphorylation d’eIF2α. D’autre part, la phosphorylation de la MRS inhibe son interaction avec ARS-interacting multifunctional proteins 3 (AIMP3). AIMP3 peut alors aller dans le noyau où il peut activer la voie ATM/ATR du système de réparation de l’ADN [189].

L’émergence des connaissances des différents rôles de GCN2 ont permis de montrer que GCN2 est impliquée dans de nombreuses maladies telles que les cancers ou la maladie d’Alzheimer. Ces nouvelles données font de GCN2 une cible intéressante pour le traitement de ces maladies. C’est pour cela qu’une meilleure compréhension de son rôle dans la cellule et des mécanismes d’activation de GCN2 est nécessaire.

4.4. GCN2 et les virus

Activation de GCN2 lors des infections virales

Certains travaux ont montré que GCN2 était activé lors des infections virales ce qui induisait une réponse antivirale en inhibant notamment la traduction cellulaire.

Le premier virus décrit pour induire une activation de GCN2 est le Sindbis Virus (SV). C’est un virus ARN enveloppé appartenant à la famille des togaviridae. La liaison directe entre l’ARN génomique viral du SV et GCN2 active la kinase qui phosphoryle eIF2α. Il a ainsi été montré que GCN2 interfère avec la réplication du virus en inhibant précocement la traduction des protéines virales suite à la phosphorylation d’eIF2α [190].

Lors de l’infection par le VIH-1, nous avons pu montrer que GCN2 inhibait la réplication virale [191]. Nos résultats ont été confirmés par ceux de l’équipe de Berlanga qui a démontré que l’ARN viral du VIH-1 est responsable d’une activation de GCN2 in vitro [192].

GCN2 ne semble pas seulement être impliquée dans la réponse aux infections par des virus ARN. En effet, grâce à un modèle de souris transgéniques possédant une protéine GCN2 inactivée par la mutation nommée atchoum, le rôle de GCN2 en réponse aux infections avec des virus ADN tels que les adénovirus et le cytomégalovirus (MCMV) a été étudié. Les souris transgéniques sont plus sensibles à l’infection par les virus ADN double brin que les souris sauvages. Même si les mécanismes par lesquels GCN2 est activée après l’infection par ces virus n’ont pas été identifiés, il semblerait qu’ils soient différents de ceux décrits lors d’une infection par des virus ARN. L’hypothèse est que la synthèse rapide des protéines virales induit une déplétion dans la cellule du pool d’acides aminés libres, activant GCN2 [193].

Mécanismes d’échappement mis en place par les virus

Les virus ont évolué pour mettre en place des mécanismes permettant d’inhiber la réponse anti virale induite suite à l’activation de GCN2.

Certains virus vont ainsi inhiber l’activité de GCN2 par compétition avec son substrat. C’est le cas pour le virus de la vaccine. La protéine virale K3L inhibe la phosphorylation d’eIF2α in vitro en se liant directement au domaine kinase de GCN2. Cette protéine virale présente 28% d’identité avec la partie N-terminal d’eIF2α zone où se trouve la sérine 51 et elle possède le domaine de liaison KGYID avec GCN2. K3L agit donc comme un pseudosubstrat pour GCN2 bloquant la phosphorylation d’ eIF2α et permettant de restaurer la traduction cellulaire et virale [194]. Lors de l’infection par le virus ARN de la stomatite vésiculeuse (VSV), les kinases GCN2 et PERK limitent la réplication virale. Il a été montré que malgré la phosphorylation d’eIF2α, les protéines virales continuent à être traduites. Le virus a donc développé un système pour contrecarrer l’effet inhibiteur de la phosphorylation d’eIF2α. GCN2 et PEKR diminuent la réplication par un mécanisme indépendant de l’inhibition de la traduction des protéines virales résultant de la phosphorylation d’eIF2 [195].

Dans d’autres cas, le virus induit la dégradation de la protéine GCN2. En effet, lors des étapes tardives de l’infection par le VIH-1, une dégradation protéolytique de GCN2 est observée. Ce clivage est réalisé par la protéase virale. Cette dégradation de GCN2 lors des étapes tardives du cycle viral pourrait restaurer la traduction des protéines virales inhibée par l’activation de GCN2 par l’ARN viral [192].

La protéine Kinase cellulaire GCN2

D’autres processus d’échappement ont été décrits dans le cadre de la kinase PKR. En effet l’activation de PKR par les virus et les effets sur la réplication virale ont été plus largement étudiés que dans le cas de GCN2 qui a été identifiée relativement récemment dans les cellules de mammifères (pour une revue [196]). Il a été montré que certains virus pouvaient bloquer l’activité de PKR en inhibant sa dimérisation, en bloquant la phosphorylation d’eIF2α par compétition ou en induisant la dégradation de PKR. De manière intéressante, certains virus vont au contraire stimuler la déphopshorylation d’eIF2α. Lors de l’infection avec le virus syncitial respiratoire, PKR est activé mais l’affinité d’interaction entre PKR et eIF2α est réduite au profit de l’interaction d’eIF2α avec la phosphatase PP2A ce qui favorise la déphosphorylation d’eIF2α [197].

5. Les objectifs de l’étude

Il y a quelques années, au laboratoire une étude de double hybride a été réalisée en utilisant comme appât l’intégrase du VIH-1 et une banque génomique de levure. Parmi les protéines identifiées se trouvait GCN2. Les partenaires que nous avons étudiés à l’époque étaient impliqués dans le transport du virus vers le noyau et GCN2 n’a pas été étudiée à ce moment-là. Plus tard, nous nous sommes intéressés à la régulation de l’activité de l’intégrase par les PTMs. La présence de phosphorylation ayant été identifiée, nous avons étudié plus en détail le rôle possible de GCN2 au cours de l’infection.

Dans un premier temps, nous nous sommes donc intéressés au rôle de GCN2 au cours de l’infection par le VIH-1. Nous avons montré que GCN2 était activée par le VIH-1 et qu’une inhibition de la traduction générale est observée dès les premières heures de l’infection.

Enfin nous avons pu montrer que l’IN est phosphorylée dans les cellules humaines et dans la levure. De plus in vitro, GCN2 est capable de phosphoryler l’IN sur deux résidus. Nous nous sommes intéressés à l’étude de l’effet de ces phosphorylations lors de la réplication du virus. De plus nous avons pu identifier un motif 81SGYIE85 présent sur l’IN qui est similaire au motif de liaison de GCN2 sur eIF2α. Pour savoir si ce motif était impliqué dans l’interaction avec GCN2, nous avons décidé d’introduire la mutation E85A au sein de l’IN. A l’heure actuelle nous n’avons pas pu conclure quant au rôle de cette séquence dans la liaison IN/GCN2.

Cependant, l’introduction de la mutation E85A de l’IN dans les virus inhibe de manière drastique l’infection. Nous avons donc décidé de caractériser l’effet de cette mutation sur la réplication virale. Nos résultats nous ont permis de montrer que le résidu E85 de l’IN est important pour les étapes tardives du cycle viral.

MATERIELS ET