I. INTRODUCTION 14
3. Etude de l’activité de déplacement 78
3.3. Résultats 85
3.3.1. Phase de préparation d’itinéraire 85
Nous nous sommes intéressés tout d’abord à la phase de préparation d’itinéraire afin d’identifier les stratégies mises en œuvre. Nous avons centré l’observation sur les outils d’aide utilisés habituellement par les participants ainsi que sur les difficultés rencontrées.
3.3.1.a) Temps de réalisation de la préparation
Les participants ont préparé leur itinéraire en moyenne en 3 minutes et 48 secondes, avec un écart-‐ type de 2 minutes et 22 secondes, ce qui représente une variabilité importante. Cette variabilité est représentée dans le graphe suivant (Figure 15). On peut remarquer que 12 participants sur 22 ont un temps de préparation d’itinéraire entre 40 secondes et 3 minutes, 4 participants ont un temps de préparation compris entre 3 et 5 minutes et 6 participants ont des temps allant de 6 à 7min 42. Nous avons souhaité analyser de façon plus spécifique l’utilisation du smartphone lors de cette phase de préparation d’itinéraire. En ce qui concerne le temps de préparation, les participants utilisateurs de smartphone ont une moyenne de 3 minutes et 25 secondes alors que les participants n’utilisant pas un smartphone ont un temps moyen de préparation de 4 minutes et 11 secondes. La différence entre les deux groupes n’est pas significative. Le fait d’utiliser un smartphone n’a donc pas d’impact réel sur le temps de préparation. Si l’on regarde à présent la variation dans chacun des groupes, l’écart-‐type est de 2 minutes 34 secondes pour le groupe sans smartphone et de 2 minutes et 12 secondes pour le groupe avec smartphone. La Figure 15, ci-‐dessous présente la répartition des utilisateurs de smartphone en fonction du temps passé à préparer l’itinéraire. On peut constater que la dispersion est important aussi bien pour les participants avec smartphone que sans.
Figure 15. Représentation des différents temps de préparation d’itinéraire pour chacun des vingt-‐deux participants de l’étude. Les utilisateurs de smartphone sont représentés par les losanges oranges et ceux
3.3.1.b) Préparation pour la partie transport et la partie piétonne en zone ouverte
Pour l’ensemble des participants la préparation d’itinéraire se découpait en deux parties distinctes : la préparation d’itinéraire en transport en commun et la préparation du trajet piéton en zone ouverte, correspondant à l’environnement urbain, de l’arrivée en transport jusqu’à la destination. Les 22 participants ont tous réalisé la partie préparation d’itinéraire concernant les transports en commun en amont du déplacement à proprement parler mais seulement 7 ont préparé en amont leur itinéraire piéton. Ces sept participants ne connaissaient pas du tout le quartier de la destination. Pour les quinze autres participants, deux raisons différentes expliquaient le fait de ne pas préparer cette partie de l’itinéraire. La première était que les participants connaissaient le quartier et n’avaient donc pas besoin de préparer l’itinéraire piéton pour trouver leur route, une fois arrivés avec les transports en commun (6 participants sur 22). La seconde était que les participants étaient utilisateurs d’un smartphone et ils comptaient l’utiliser pour obtenir les informations de localisation et de guidage une fois arrivés sur place, grâce à une application smartphone telle que Google Maps (plan de quartier et GPS).
Nous allons nous intéresser tout d’abord à la phase de préparation d’itinéraire concernant les transports en commun.
3.3.1.c) Mise en lumière de deux stratégies de préparation d’itinéraire de transport en commun
Les observations et l’entretien avec les participants de l’étude nous ont permis d’identifier pour chaque participant les différentes étapes de préparation d’itinéraire pour la partie concernant les transports en commun. Deux stratégies différentes de préparation ont été mises en lumière. Nous allons à présent détailler chacune de ces deux stratégies.
Stratégie N°1
La première stratégie consiste à construire son itinéraire soi-‐même sans utiliser d’outil d’aide à la planification. Pour la mise en œuvre de cette stratégie, les outils d’aide utilisés sont un plan de quartier (quartier de départ et d’arrivée) qui peut être au format papier ou bien numérique (exemple : application Google Maps sur smartphone) ainsi qu’un plan du réseau des transports en commun.
Cette stratégie de construction d’itinéraire (représentée sur la Figure 17) se déroule en plusieurs étapes. La première consiste à se localiser sur une carte (lorsqu’on part d’un endroit connu, cette étape n’est pas forcément réalisée) et à identifier les moyens et lignes de transport à proximité. Ensuite le participant réalise la même opération pour sa destination (localisation de la destination et des transports à proximité). Une fois cette étape terminée, le participant étudie le meilleur trajet possible au départ de la station de laquelle il est le plus proche actuellement. Le choix de parcours à cette étape va être pour le participant un compromis à trouver entre nombre de correspondances et temps de marche à pied. Certains (10/13 participants), vont préférer avoir un trajet le plus direct possible quitte à devoir marcher un peu plus ; d’autres vont privilégier une arrivée en métro au plus proche (3/13 participants). Le choix dans ce compromis va également dépendre de nombreux autres facteurs tels que la météo, la connaissance ou nom du quartier de destination, l’envie de passer dans une grosse station ou non.
Figure 16. Représentation schématique des différentes étapes de la stratégie de préparation d’itinéraire n°1. Sur les 13 participants ayant mis en œuvre cette stratégie, 2 d’entre eux ont ensuite cherché à confirmer que l’itinéraire qu’ils avaient élaboré eux-‐mêmes était bien le plus efficace (temps et nombre de correspondances) en utilisant un outil de planification d’itinéraire, ce qui correspond à la stratégie de préparation n°2 présenté ci-‐après.
Stratégie de préparation N°2
La seconde stratégie (Figure 17) consiste à planifier son itinéraire grâce à un outil d’aide à la planification. Les aides à la planification peuvent être par exemple le site internet de la RATP ou bien encore le site Mappy ou Google Maps lorsque l’on choisit parmi les options proposées le mode déplacement « transport en commun ». Cette stratégie consiste à entrer son point de départ (adresse ou « lieu actuel » ainsi que son point d’arrivée (adresse). C’est le système qui calcule les différents itinéraires possibles et propose ensuite à l’utilisateur un ou plusieurs choix possibles en fonction de différents paramètres : temps de trajet, temps de marche à pied, nombre de correspondances. Les préférences utilisateurs dans le choix de ces paramètres sont plus ou moins détaillées selon les outils d’aide à la planification. Si les informations données par le site de planification proposent un itinéraire où l’utilisateur estime qu’il y a trop de changements, il va vérifier l ‘information en regardant sur un plan s’il n’y a pas un itinéraire plus direct avec moins de correspondances, en marchant un peu plus (stratégie de préparation d’itinéraire n°1). Nous pouvons illustrer cela par les verbatims de deux participants :
« J’ai vu qu’il n’y avait pas trop de correspondances, je me suis dit que ça devait être le chemin le plus court. Donc
je pouvais y aller directement. En général, quand il y a plusieurs correspondances, j’essaie de regarder s’il n’y a pas plus court, dans le sens où j’ai mis juste le nom du métro, mais là comme il n’y avait qu’une ligne directe je me suis dit, c’est bon, j’y vais. Quand l’itinéraire de la RATP donne beaucoup de correspondances, je regarde le plan pour voir s’il n’y a pas un trajet plus court avec moins de correspondance en marchant un peu plus. »
« Normalement je vais sur le site RATP, je tape les adresses et je fais une recherche. Je vois le trajet proposé et si je trouve que ça prend trop de temps, s’il y a trop de changement, je commence à chercher dans le plan interactif pour voir si je ne peux pas trouver un autre trajet. Et si je veux avoir plus d’info, je regarde dans Google Maps. »
Figure 17. Représentation schématique des différentes étapes de la stratégie de préparation d’itinéraire n°2. Sur les 22 participants, 13 ont mis en œuvre la stratégie de préparation n°1 et 8 la stratégie de préparation n°2. La stratégie N°1 consiste à planifier intégralement son trajet, la stratégie N°2 repose sur l’utilisation d’un outil d’aide à la planification. La distinction entre les deux stratégies réside ainsi dans l’utilisation ou non de l’outil d’aide à la planification.
Si nous nous intéressons de façon plus spécifique aux 11 participants utilisateurs de smartphone, 6 d’entre eux ont mis en œuvre une stratégie de préparation d’itinéraire n°1 : ils ont construit eux-‐ mêmes leur itinéraire en utilisant un plan de quartier (exemple : application Google Maps) et un plan du métro accessible sur les applications d’aide au déplacement (RATP, Vianavigo). Cela souligne l’inadéquation ressentie entre les outils d’aide à la planification et les critères de choix d’itinéraire en fonction des contraintes situationnelles de l’utilisateur à un instant T.
3.3.1.d) Informations nécessaires pour la réalisation du trajet en transport en commun issue de la préparation
Les deux stratégies présentées ci-‐dessus permettent toutes deux d’obtenir les informations nécessaires à la réalisation du trajet en transport en commun. Ces informations sont les suivantes : -‐ les stations de départ et d’arrivée
-‐ les lignes de transports à emprunter (numéro et/ou couleur de ligne)
-‐ la direction à emprunter sur chaque ligne, indiquée par le nom de la station terminus
-‐ l’estimation du temps de trajet. Cette estimation du temps de trajet est inférée pour les participants mettant en œuvre la stratégie N°1, en comptant par exemple le nombre de station de métro à parcourir.
3.3.1.e) Préparation de l’itinéraire piéton en environnement urbain
Une fois l’itinéraire en transport en commun défini, les 7 participants sur 22 n’utilisant pas un smartphone et ne connaissant pas le trajet ont préparé l’itinéraire piéton de la station de métro de destination jusqu’au lieu d’arrivée du scénario (adresse). Tous ont utilisé un site internet leur permettant d’avoir une carte du quartier (Google Maps ou Mappy). Ils ont entré le nom de la station et l’adresse d’arrivée et ont obtenu une vue globale du trajet tracé sur la carte, vue dans laquelle ils pouvaient zoomer plus ou moins en fonction du niveau de détail souhaité. Le participant regardait alors les rues à emprunter pour se rendre à destination ainsi que la forme globale du trajet. Chaque
participant a noté ces informations sur un bout de papier (de type post-‐it) de façon à pouvoir les conserver pour les utiliser une fois sur place sans avoir à les mémoriser.
3.3.1.f) Difficultés rencontrées lors de la phase de préparation
L’analyse de la préparation d’itinéraire nous a également permis de recenser les difficultés rencontrées par les utilisateurs pendant cette phase.
-‐ Difficultés pour connaître les ressources existantes (5 participants sur 22)
La stratégie choisie est fortement influencée par les outils connus et à disposition de ces participants. Les difficultés peuvent venir de l’ignorance des ressources informationnelles existantes. Cette difficulté concerne de façon quasi exclusive les participants de l’étude ayant une connaissance très restreinte du réseau (profil d’usager : touriste). Nous pouvons illustrer cette difficulté par le verbatim suivant :
Quand on ne connait pas c’est difficile de savoir les stations qu’il y a à côté et les lignes qui y passent. J’ai noté le nom de la station d’arrivée et le numéro des lignes passant à cette station sur mon agenda et la même chose pour l’arrivée. Je ne savais pas trop quoi faire. Puis je me suis dit qu’il devait bien y avoir un site RATP. En tapant sur google RATP, j’ai eu la chance de tomber sur un lien « itinéraire ». Je n’avais jamais utilisé, mais je me suis dit que ça devrait m’aider. »
-‐ Difficulté pour mémoriser l’itinéraire (4 participants sur 22)
L’itinéraire doit être gardé en mémoire durant tout le trajet et, au fur et à mesure les informations sont effacées. La mémorisation de l’itinéraire est en double tâche avec la réalisation de l’itinéraire. Avant de se lancer dans la réalisation de l’itinéraire, les voyageurs de ce groupe notent sur un pense-‐bête les instructions à suivre aussi bien pour le trajet en transport que le trajet à pied dans le quartier de destination ce qui est le cas 4 participants parmi les 11 voyageurs occasionnels.
-‐ Vide informationnel sur les noms et numéros de sorties de station de métro (20 participants
sur 22).
Une grande majorité des participants ont verbalisé la difficulté qu’ils éprouvent à ne pas pouvoir obtenir d’information sur le numéro ou sur le nom de la sortie à suivre pour sortir de la station de métro au plus proche de sa destination en surface. Cette information n’est disponible avec aucun outil d’aide à la planification à l’heure actuelle.
-‐ Manque d’adéquation entre les besoins des utilisateurs et les critères de planification (19
participants sur 22)
La plupart des participants utilisent de façon complémentaire les stratégies de préparation n°1 et n°2 de façon à pouvoir choisir leur itinéraire en fonction de critères qui leurs sont propres et que les sites d’aide à la planification ne prennent pas forcément en compte, tel que le fait de vouloir ou ne pas vouloir passer par une station donnée (éviter les grosses stations par exemple).
3.3.1.g) Synthèse sur la phase de préparation d’itinéraire
La préparation d’itinéraire pour l’activité de déplacement piéton dépend des outils d’aide à disposition et de la situation dans laquelle elle est réalisée. Les informations issues de cette phase sont nécessaires pour la réalisation du trajet.
L’utilisation du smartphone permet d’avoir accès à des informations en temps réel tout au long du trajet. Cela permet de libérer cognitivement la personne de la mémorisation d’instructions de déplacement. Nous pouvons ainsi constater que la stratégie de préparation d’itinéraire va également dépendre fortement de la situation et du contexte dans lesquels cette phase de préparation est réalisée. L’utilisation du smartphone pour la préparation permet de réduire l’obligation d’anticipation d’un trajet inconnu. En effet, grâce aux applications mobiles, un voyageur peut planifier de façon instantanée un nouvel itinéraire avec son téléphone. La stratégie de préparation va également dépendre du niveau de connaissance et d’expertise avec les outils d’aide existants. Les novices du réseau ont eu des difficultés liées à ce manque de connaissance des outils.