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Pertinence scientifique d’une appréhension du corps à corps

La pertinence scientifique vient compléter la pertinence sociale et pose le problème de recherche à partir des préoccupations des chercheurs (Gauthier, 2009). Le corps à corps n’a pu donner lieu à une approche scientifique, peu de travaux ont porté sur ce mode d’exercice. L’état des connaissances sur le corps à corps en kinésithérapie n’a permis de retrouver, dans les écrits professionnels français, que des thématiques essentiellement formulées autour de la praxéologie du phénomène tels : la technicité, la sécurité, l’interaction des deux corps, la réception des sensations à partir du patient, la distanciation et l’apprentissage. Ces thématiques constituent la particularité du corps à corps en kinésithérapie nécessitant de :

Ø Caractériser les paramètres constitutifs du corps à corps pour le kinésithérapeute, délimitant les circonstances de son engagement corporel et les conditions de son choix pour cette technique,

Ø Établir le fil conducteur qui relie trois temps de la séance, constitués de la rencontre, la rupture proxémique et de la mise en œuvre des praxies en kinésithérapie, avec les trois approches du concept biopsychosociale, proxémique et praxéologique lors du corps à corps,

Ø Juger de l’opportunité d’une pratique du corps à corps par rapport aux récentes évolutions techniques comme la physiothérapie.

5 Question de recherche

La question de recherche a trait aux paramètres constitutifs du corps à corps qui permettent au kinésithérapeute de choisir ce mode de traitement. En conséquence le problème de recherche est abordé à partir de la question suivante :

Quels sont les paramètres constitutifs du corps à corps qui permettent au kinésithérapeute de décider de l’opportunité de ce mode de pratique ?

L’objectif de recherche est double. D’une part, décrire avec les professionnels, à partir des paramètres du modèle proposé par la chercheuse, les pratiques et le processus décisionnel qui permettent de choisir ou non un mode d’exercice avec corps à corps. Le diagnostic kinésithérapique, au cours de son élaboration et au regard de la réflexivité qu’il induit, constitue un ensemble d’informations, à même de remettre en question le choix d’un corps à corps particulier, propre à chaque binôme. Les informations seront confirmées, infirmées complétées ou modulées par les professionnels interviewé(e)s sur leurs pratiques. D’autre part, les informations traitées seront confrontées au modèle proposé par la chercheuse, qui sera soumis à validation auprès des professionnels.

DEUXIÈME CHAPITRE : CADRE DE

RÉFÉRENCE

Ce chapitre nous amène à penser la pratique du corps à corps en kinésithérapie. La démarche est élaborée à partir de l’état des connaissances, ainsi que d’un sondage empirique effectué, en amont de la présente recherche, auprès des professionnels experts. Elle nous permet la construction initiale du cadre conceptuel.

Pour le kinésithérapeute son corps est son premier instrument de travail. Selon les travaux de Mauss, le corps est « le premier et le plus naturel instrument de l’homme » (Mauss 1934, p. 372). Les sciences et ingénierie de la kinésithérapie s’inscrivent dans les techniques du corps qui constituent « les façons dont les hommes société par société, d’une façon traditionnelle, savent se servir de leur corps » (ibid., p. 5). Pour l’auteur, les gestes n’existent pas de façon naturelle chez l’adulte. La gestuelle professionnelle est donc vue comme résultant du produit d’une activité apprise et conscientisée. Prel (2001) mentionne que « les kinésithérapeutes construisent leurs corps comme instrument dans un corps à corps » (p. 135). Ainsi nous pensons, d’un point de vue ergonomique, qu’au cours de la réalisation d’un acte professionnel le kinésithérapeute se saisit du corps du patient, à bras le corps. Il rapproche son centre de gravité de celui du patient pour diminuer le bras de levier réalisé durant la portée. De plus, la portée qu’il effectue avec ses bras, ses avant-bras, son tronc ou ses cuisses lui permettent une tenue plus sécuritaire et plus confortable pour le patient. Le corps du kinésithérapeute dans l’ensemble de sa gestuelle s'organise dans un objectif thérapeutique prenant en compte la corporalité et la corporéité du patient. L’objectif thérapeutique est à destination du patient, son harmonisation est guidée et ajustée sur les dispositions physiques et psychiques du patient donnant lieu, ou non, à une thérapie avec corps à corps.

Le corps à corps apparaît en lien avec le raisonnement clinique. Le kinésithérapeute, après avoir pris connaissance des données du patient, mène des investigations pour la réalisation de son bilan. Le bilan est élaboré à partir des stratégies non analytiques de reconnaissance et d’un raisonnement hypothético-déductif. Ce dernier est composé d’une suite d’opérations logiques, concourant à des investigations successives qui prennent en compte les résultats des investigations précédentes. Ces résultats de l’ensemble des opérations de bilan permettent l’élaboration du diagnostic kinésithérapique.

Cette démarche, globale et hypothético-déductive, est constitutive du raisonnement clinique qui apparaît comme le fil conducteur de la prise de décision et semble concourir au mode d’exercice avec corps à corps.

1 Les paramètres constitutifs du corps à corps chez le

kinésithérapeute

La démarche est élaborée à partir de l’état des connaissances, du sondage empirique effectué, en amont de cette démarche auprès des professionnels kinésithérapeutes. Ces termes, issus de l’état de connaissance et du sondage, constituent le socle du corps à corps, ils sont catégorisés au regard du déroulement de la séance de kinésithérapie. Une telle démarche permet de proposer un modèle provisoire que les données recueillies lors de notre démarche de recherche permettront de confronter.

1.1 Le recours à l’approche biopsychosociale par le kinésithérapeute