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4.1. Cohabitations-mariages, naissances

Les analyses basées sur les unions et non les mariages sont développées de longue date en France (Lefèvre et Filhon, 2005 ; Leridon et Villeneuve-Gokalp, 1994 ; Toulemon, 1996). Le développement de l’union libre en France comme un « remplacement » du mariage rend indispensable l’étude du couple à un niveau plus large que le mariage. Notamment, les naissances étant de plus en plus associées à des couples non-mariés, l’étude du mariage seul n’apporte plus une image exhaustive des comportements de couple. L’accès à des données sur les unions libres est cependant limité puisqu’elles ne sont pas enregistrées à l’État Civil comme le sont les mariages. Seuls les registres de population des pays Scandinaves sont d’un apport tout particulier pour l’étude de ces comportements familiaux (Lyngstad, 2004). En France, ce sont les enquêtes ESF puis EHF qui ont permis un grand pas dans l’étude du couple.

4.2. Hommes-femmes

La question de l’après-rupture est d’ordre « genré », dans le sens où les problèmes qui émergent dans cette phase sont souvent distincts pour les hommes et pour les femmes. Les « mères seules » avec un enfant à charge, les « beaux-pères » en famille recomposée, la distribution des allocations et les pensions pour les enfants sont généralement abordés avec l’idée d’une forte différence entre les sexes après la rupture.

L’étude des questions démographiques pour les hommes a longtemps été limitée, particulièrement celle de leur descendance. Les principaux indices et taux qui décrivent la fécondité sont calculés à partir des données sur les naissances des femmes. Une des raisons est d’ordre pratique : le rattachement des enfants à leur mère est plus sûr que celui des enfants à leur père, du moins dans les données de l’état civil. Notamment se pose le problème des naissances hors union. Le recensement de données fiables pour les hommes est difficile, et a donc limité le développement d’indicateurs masculins. Pourtant, les indices ne sont pas équivalents lorsqu’ils sont calculés pour les hommes et les femmes (Coleman, 2000). Un indicateur qui tiendrait compte à la fois de la fécondité des hommes, de celle des femmes et des équilibres des marchés conjugaux serait cependant fortement complexe. Même si des enquêtes menées dans les dernières années1 ont permis de mieux cerner les caractéristiques des pères, le calcul des indicateurs démographiques de fécondité reste rattaché à la femme.

En matière de comportements de couple, ou plutôt de nuptialité, les connaissances portent en revanche autant sur les hommes et que sur les femmes. De fait, des données d’état civil sur le mariage sont disponibles pour les hommes comme pour les femmes. La connaissance des différences entre hommes et femme en matière de nuptialité est donc plus développée.

Cependant, des problèmes méthodologiques forts persistent dans l’étude des différences démographiques entre les hommes et les femmes. Pour l’étude des trajectoires conjugales et des naissances dans les couples, la forte différence d’âge au début des unions et les calendriers différés de conjugalité et de naissance posent des problèmes de comparaison. Nous y reviendrons au fil de la thèse.

En France, des études sur la fécondité tardive (Bessin et al., 2005) mais aussi sur l’infécondité (Köppen et al., 2007 ; Robert-Bobée, 2006) ou la fécondité dans les familles recomposées (Toulemon et Knudsen, 2006 ; Toulemon et Lapierre-Adamcyk, 2000)

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enquête sur les situations familiales (ESF), 1985, 1994 ; étude des histoires familiales (EHF), 1999 ; étude des relations familiales intergénérationnelles (Érfi), 2005

tracent un portrait assez complet des différences en matière de fécondité entre les hommes et les femmes. Les différences concernant la recomposition familiale sont également esquissées (Cassan et al., 2001). On trouve plus généralement des articles sur le désir d’enfant du point de vue des hommes et des femmes (Berrington, 2004 ; Régnier- Loilier, 2006a) et quelques uns sur les naissances dans les familles recomposées en Europe (Vikat et al., 1999). Remises en couple et séparations sont également approchées pour les deux sexes (Kalmijn et Poortman, 2006 ; Lampard et Peggs, 1999).

4.3. Des structures familiales aux trajectoires individuelles

Aujourd’hui, les deuxièmes unions tiennent une place importante dans l’étude de la vie familiale. Lieu éventuel d’une nouvelle naissance ou d’un mariage, elles peuvent également être la première union que la personne considérera comme significative. En France, il existe une littérature abondante sur le divorce (Sardon, 2005), les familles monoparentales (Algava, 2003) et les familles recomposées (Barre, 2003).

L’étude des séquences de vie conjugales est difficilement dissociable de la trajectoire plus générale des individus. Quelques études quantitatives couvrent les enchaînements de phases conjugales faisant suite à une séparation en France (Delbès et Gaymu, 2005 ; Festy, 1988 ; Villeneuve-Gokalp, 1991 ; Villeneuve-Gokalp, 1994a). L’emploi, le lieu d’habitation aussi bien que la situation économique sont fortement reliés aux évolutions de trajectoires conjugales et fécondes. Le remariage notamment ne peut être étudié sans sortir du contexte plus global du pays mais aussi de la trajectoire de l’individu (Uhlenberg, 1989). La remise en couple est soumise à des contraintes extérieures comme le marché conjugal (Ní Bhrolcháin, 2000), mais les individus portent aussi avec eux les expériences de l’union antérieure. Dans ce contexte, l’étude des remises en couple en France est donc la conséquence de circonstances aussi bien conjoncturelles qu’individuelles. Nous adopterons une perspective de « cycle de vie familiale » (Glick, 1989 ; Höhn, 1987) dans une forme élargie (qui inclut divorces, remariages, unions en général, ainsi que les familles sans enfant).

L’étude transversale des familles donne une vision statique des ménages, même lorsqu’elle détaille les beaux-enfants, et ne suffit pas pour appréhender les nouveaux comportements conjugaux. L’étude du couple selon une logique de cycle de vie répond avec plus de précision aux questions sur les déterminants sociaux du changement et sur les transformations démographiques à venir. Des études couvrant la fécondité des femmes dans le cadre plus large de leur trajectoire conjugale ont été menées récemment

(Bracher et Santow, 1990 ; Mills, 2004). Les méthodes de table de survie ou d’analyse des trajectoires (avec classification ou appariement optimal) offrent des visions globales sur les évolutions possibles. En France, les différentes transitions qui ont lieu après la séparation – remises en couple, naissances, séparations – sont étudiées indépendamment les unes des autres, et les conséquences globales de la rupture sur la fécondité pour les hommes et pour les femmes n’ont pas été développées.

L’un des objectifs principaux de cette étude des trajectoires conjugales après la rupture est de comprendre quelles options individuelles s’offrent à chaque âge après une séparation, quelles sont les contraintes et dans quelle mesure la vie féconde se trouvera affectée par la rupture. En se focalisant sur les âges féconds, il s’agira d’établir les âges auxquels une reconstruction familiale devient improbable. Notre travail détaillera notamment où se trouvent les grands points de divergence dans les comportements des hommes et les femmes après la rupture, notamment au vu de leur passé familial. Il s’agit également de déterminer si les nouveaux comportements de couple ont un effet sur la descendance finale, et particulièrement si les deuxièmes unions ont toujours le temps d’être fécondes. Nous utiliserons pour mener à bien nos analyses des outils tels que des modèles de durée pour l’étude des transitions, des représentations des risques par âge ou encore des décompositions de descendance finale selon la trajectoire conjugale. De ce point de vue, notre travail s’axe sur les étapes et leurs imbrications plus que sur la vision globale de la trajectoire d’après-rupture.

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