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La persécution antichrétienne à Nankin

Première Partie

I. Alfonso Vagnoni (c 1968 – c 1640) : éléments biographiques

I.2 La biographie d’Alfonso Vagnon

I.2.2 La persécution antichrétienne à Nankin

Malgré le développement rapide de l’Église de Nankin, à mesure que la situation sociale changeait, le père Vagnoni reçut de plein fouet la persécution antichrétienne qui éclata à Nankin en 1616 provoquée par Shen Que (? -1624), l’assesseur du tribunal des rites de Nankin.

66 Louis Pfister, op.cit., p. 86. 67 Idem. p.86.

68 George H. Dunne, Chinois avec les Chinois : Le Père Ricci et ses compagnons jésuites dans la Chine du XVIIe,

34 La persécution antichrétienne de Nankin fut la première persécution que les jésuites rencontrèrent en Chine et aussi le plus grand revers que le Père Alfonso Vagnoni subit. Sur cette affaire, on ne trouve pas de trace dans les œuvres de Vagnoni puisque presque toutes ses œuvres furent rédigées en chinois, dans l’objectif de présenter l’Europe aux Chinois. Pourtant, grâce à d’autres documents historiques rédigés en chinois ou en langues occidentales, nous avons la possibilité de mieux nous rendre compte de cette persécution. Ici, les deux principaux documents auxquels nous faisons référence sont l’Histoire Universelle du Grand Royaume de la Chine69 et Sheng Chao Po Xie Ji70.

L’Histoire Universelle du Grand Royaume de la Chine est une grande œuvre écrite par le Père Álvaro Semedo. Álvaro Semedo ( en chinois Zeng Dezhao 曾德昭 ou Xie Wulu 谢务禄), né en 1585 à Nisa et décédé le 18 juillet 1658 à Canton, était un prêtre jésuite portugais, missionnaire en Chine, sinologue et écrivain. Il fut envoyé à Macao en 1613 et ensuite passa à Nankin. Il était en compagnie d’Alfonso Vagnoni lors de la vague de persécutions antichrétiennes de Nankin en 1616. À la suite de cet événement, il fut renvoyé à Macao où il résida jusqu’en 1621. Après que la situation se fut calmée, il pénétra à nouveau en Chine impériale sous un nouveau nom chinois. Il continua ainsi son évangélisation dans les régions méridionale et centrale de l’empire. En 1649, il vint à Canton et fut désigné vice-provincial des jésuites de la mission de Chine.

Après vingt-deux ans de séjour en Chine, Semedo fit un voyage de Macao en Europe en 1637, et commença à écrire son long rapport intitulé l’Histoire Universelle du Grand Royaume de la Chine. Il en termina la rédaction l’année suivante en Goa (Inde) et l’apporta jusqu’au Portugal. Le manuscrit était en portugais. En 1642, on le

69 Álvaro Semedo, Histoire universelle du grand royaume de la Chine, composée en italien par Semedo et traduite

par Louis Coulon. Chez Sebastien Cramoisy et Garbriel Cramoisy, à Paris, 1645.

70 Xu Changzhi, Sheng Chao Po Xie Ji 圣朝破邪集 Recueil d’écrits de la Dynastie Sacrée sur la Destruction de l’Hétérodoxie, réédité par Xia Guiqi, Hong Kong, China Alliance Press, 1996.

35 traduisit en espagnol, et en 1643, il fut publié pour la première fois en italien. Plus tard, il fut traduit en français et anglais. Semedo passa le reste de sa vie à Canton où il mourut en 1658.

Figure 3 : La couverture de l’Histoire Universelle du Grand Royaume de la Chine71

Ce livre se compose de deux grandes parties. La première partie est une introduction générale de la Chine. Dans cette partie, Semedo montrait au lecteur européen tous les aspects de cet empire lointain : le système politique, les mœurs, les langues et les caractères, les vêtements, les religions, les activités commerciales, etc. Il mentionna également les premières années de l’édification de Macao par les Portugais. Dans la deuxième partie, il relatait minutieusement les activités en Chine des jésuites. Semedo vécut la persécution de Nankin en 1616, et sur ce point, il put nous donner une relation de première main.

Sheng Chao Po Xie Ji 圣朝破邪集 [Recueil d’écrits de la Dynastie Sacrée sur la Destruction de l’Hétérodoxie] fut publié pour la première fois pendant la douzième

36 année de Chongzhen (année 1639) dans la province de Zhejiang. Ce recueil qui compte cent mille idéogrammes est considéré comme une œuvre antichrétienne importante des dernières années de la Dynastie Ming. Les écrits furent initialement réunis par Xu Changzhi 72 (1582-1672). Il s’agit de huit volumes qui regroupent les textes antichrétiens rédigés par les mandarins, les défenseurs du confucianisme, ainsi que les moines bouddhistes. Ce recueil nous permet de connaître non seulement la situation que les jésuites européens ont rencontrée en Chine pendant la dynastie Ming, mais encore les raisons des activités antichrétiennes lancées par les Chinois. Cela nous aide à mieux comprendre les différences et les conflits de l’époque entre la culture occidentale et la culture chinoise. C’est un document historique important dans l’histoire de la communication entre l’Orient et l’Occident. Parmi les huit volumes du recueil, les deux premiers volumes portent sur les comptes rendus détaillés de la persécution antichrétienne de Nankin de 1616. On peut y trouver les mémoires de Shen Que adressés à l’empereur, les procès-verbaux des interrogatoires, ainsi que les proclamations de l’empereur. Si l’on dit que l’œuvre de Semedo nous montre le point de vue des jésuites, ces textes écrits par les Chinois nous racontent la même histoire d’une autre façon. Ces deux œuvres de première main nous aident beaucoup à connaître le processus de cette persécution dont le Père Alfonso Vagnoni fut victime, et ainsi à constituer une biographie plus complète de ce jésuite italien. 73

72 Xu Changzhi 许昌治 (1582-1672) était fonctionnaire et bouddhiste de la dynastie Ming.

73 Histoire Universelle du Grand Royaume de la Chine et Sheng Chao Po Xie Ji sont deux livres de première main

auxquels on pourrait faire référence. De plus, il y a également des livres et articles dans lesquels les auteurs ont mentionné et analysé la persécution antichrétienne de Nankin : George H. Dunne, Chinois avec les Chinois : Le Père

Ricci et ses compagnons jésuites dans la Chine du XVIIe, traduit par G. Serve, Paris, Éditions du centurion, 1964;

Edward T. Kelly, The Anti-Christianity Persecution of 1616-1617 in Nanking, Ph. D. Thesis. Columbia University, 1971; Adrianus Cornelis Dudink, Christianity in Late Ming China Five Studies, Ph. D Thesis, Rijksuniversiteit te Leiden, 1995, etc.

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Figure 4 : Le premier folio de la préface du Sheng Chao Po Xie Ji74

Cette campagne fut lancée par Shen Que qui avait été nouvellement nommé au poste de vice-ministre des Rites de Nankin en 1615, la quarante-troisième année de l’ère Wanli. Shen était hostile à la propagation du christianisme dans la société chinoise. Dès son arrivée, il commença à renforcer les moyens de contrôle sur les activités des chrétiens à Nankin. Peu de temps après qu’il eut pris ses fonctions, il nota les activités publiques de l’Église de Nankin et il voulut prendre des mesures immédiates pour les attaquer. Dissuadé par ses mandarins qui étaient proches des jésuites, il fut obligé de retarder son projet. L’année suivante, Shen adressa à l’empereur Wanli son premier mémoire :

[…] Durant ces dernières années, un groupe de barbares est arrivéà l’improviste. À Pékin, il y a Diego de Pantoja et Sabatino de Ursis. A Nankin, il y a Alfonso Vagnoni, Emmanuel Diaz, etc. Dans les autres provinces, on peut également trouver des membres de leur groupe. Ils disent qu’ils viennent du pays de l’« Occident », et que leur religion s’appelle « la religion de

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Dieu ». […] Ils font de la démagogie, et trompent la masse commune en disant qu’il est inutile d’organiser les cérémonies d’hommage aux ancêtres et aux dieux vénérés. Ils disent au peuple que seuls ceux qui révèrent Dieu pourront aller au paradis au lieu de l’enfer. La théorie sur le paradis et l’enfer existe également tant dans le bouddhisme que le taoïsme. Pourtant, ces deux religions utilisent cette théorie pour encourager les gens à respecter leurs ancêtres et pour menacer ceux qui ne montrent aucun respect et ceux qui ne font que le mal. On peut alors dire que ces deux religions favorisent notre confucianisme. Aujourd’hui, la « religion de Dieu » essaye de persuader le peuple d’abandonner les sacrifices aux ancêtres. Ils n’ont aucun respect pour les ancêtres. Si cela continue, ils mépriseront les aînés, ils mépriseront les mandarins, et ils vous mépriseront aussi ! Ils sont l’ennemi de notre doctrine de Confucius. Il faut absolument les punir, comment pourrait-on leur donner libre cours et laisser tout le monde leur obéir ? […]75

Dans ce mémoire, les jésuites sont blâmés et le Père Alfonso Vagnoni est désigné comme le principal coupable. Shen demandait ainsi à l’empereur de châtier les « barbares ». En vue d’éviter toute divulgation d’information, ce mémoire fut présenté fort secrètement. Néanmoins, ayant beaucoup d’amis qui travaillaient à la cour, les jésuites apprirent cette affaire rapidement. Michel Yang (Yang Tingyun)76 informa les pères sur-le-champ, en leur donnant des avis pour réagir à cette crise. En plus, il écrivit lui-même, en faveur des jésuites, à plusieurs mandarins, et même une lettre à Shen. Dans cette lettre, il critiqua la plainte que Shen avait portée contre les Pères, faisant semblant de ne rien savoir sur ce mémoire. En même temps, il invita les Pères à se retirer chez lui pour attendre que la tempête fût apaisée.77 En attendant, Vagnoni et Semedo rendirent visite au madarin Leon Li, et montrèrent à ce dernier l’apologie que Michel Yang avait composée. Li y ajouta lui-même un discours dans lequel il louait les jésuites et la foi chrétienne, et le fit circuler de main en main dans toute la ville.

Alors que les jésuites à Nankin et les croyants se préparaient à se protéger, n’ayant toujours pas l’ordre de l’empereur, Shen décida de prendre des mesures. Le 20 juillet

75 Sheng Chao Po Xie Ji (圣朝破邪集,Recueil d’écrits de la Dynastie Sacrée sur la Destruction de l’Hétérodoxie),

Tome I. Extrait traduit du chinois. C’est nous qui traduisons, ici et partout.

76 Sur Michel Yang, voir infra.p.51.

39 1616, trois mandarins du ministère des Rites de Nankin arrivèrent à la résidence de Vagnoni. Ils informèrent Vagnoni et Semedo qu’ils étaient chargés de chasser les pères de la Chine. Le soir, un groupe de soldats arriva et encercla la résidence de Vagnoni jusqu’au lendemain matin. Le 21 juillet, les trois mandarins arrivèrent de nouveau. Ils montrèrent à Vagnoni l’ordre d’arrestation donné par Shen. Ils examinèrent tous les objets dans la chambre de Vagnoni, et apposèrent les scellés à la porte de cette chambre. Ils conduisirent Vagnoni devant Shen, en laissant Álvaro Semedo qui était malade dans sa chambre. Deux heures plus tard, Vagnoni fut mis en prison avec deux autres croyants chinois.

Apprenant que le Père Alfonso Vagnoni avait été emprisonné, les convertis chinois de la région de Nankin, menés par le fervent Yao Ruwang, se précipitèrent vers l’église chrétienne pour protester contre l’arrestation de Vagnoni. Leur protestation fut empêchée par les soldats, et Yao Ruwang fut également arrêté :

La nouvelle de l’emprisonnement du P. Vagnoni ne fut pas plutôt sue, que les Chrétiens enflammés de ce feu, qui embrase les saintes âmes, coururent à notre maison, sans que les gardes pussent leur en empêcher l’entrée, leur courage étant plus fort que les barrières. Celui qui fit plus éclater sa ferveur & son zèle en cette action, fut Jean Yao78, qui mettant sur sa tête

une de ces bannières, & tenant en sa main un papier, où était couchée la loi de Dieu, & la nécessité de l’observer, étonna les soldats par cette nouveauté; qui enfin lui demandèrent ce qu’il voulait, & ce qu’il prétendait faire? De mourir en chrétien, répondit-il, & de verser mon sang avec celui des Pères pour la foi de Jésus-Christ. Jamais on ne vit des gens plus étourdis, que furent ces soldats à cette réponse, qui lièrent incontinent cet illustre confesseur, lui mirent la corde au col, & le menèrent devant les mandarins.79

Les actions éperdues des adeptes chrétiens à Nankin exaspérèrent Shen. En même temps, il apprit que l’autre jésuite européen Álvaro Semedo n’était pas en prison. Dès lors, il ordonna d’arrêter Semedo et tous les autres croyants chrétiens. En août de la

78 Jean Yao désigne le converti chinois Yao Ruwang. 79 Matteo Ricci et Nicolas Trigault, op.cit., p.310.

40 même année, il adressa le deuxième mémoire à l’empereur :

[…] Ils trompent les gens avec leurs pratiques frauduleuses qui sont interdites explicitement par la loi. En tant que responsable du Ministère des Rites de Nankin, mon devoir me commande de les punir avec sévérité. Les barbares convoitent notre peuple, ils s’entendent partout sur notre territoire, notamment dans les deux grandes villes (Pékin et Nankin). Ils apporteront du malheur latent pour notre empire, et il faut l’éviter ! Sire, vous faites toujours attention à la stabilité du pays, pourquoi ne réfléchissez-vous point sur ce problème ? De plus, les situations des deux villes diffèrent, et sur ce point, je n’ai pas dit tout ce que je voulais dire dans la lettre précédente. La capitale est le lieu où votre majesté résidez, et elle est illuminée par le soleil et la lune. Même s’il y a des pervers qui s’y cachent, de crainte tant de la puissance du ciel que des commentaires des ministres de la cour, ils n’osent pas encore afficher leur arrogance démesurée. Quant à Nankin, c’est la ville repose notre empereur Hongwu80. Son tombeau,

entouré de monts et rivières, reste toujours silencieux et digne. C’est une ville tellement importante qu’il faut absolument éviter que les gens s’y comportent anormalement. Mais le coupable Alfonso Vagnoni habite près de l’ancienne résidence de l’empereur Hongwu ouvertement. Il suspend même le portrait d’un barbare dans l’église qu’il a fait construire, et d’innombrables d’habitants ont été séduits par son argent et ont été trompés par lui. […] Ce qui est le plus odieux, c’est que non seulement sa résidence est près de celle de notre ancien empereur, mais aussi que ce coupable possède un autre logement à l’extérieur de la ville, juste devant le tombeau. Nankin est une ville où se love le tigre et où se tapit le dragon81, mais pas

un endroit où les renards et les rats se répandent partout. […] Sire, je vous supplie de penser à la stabilité du pays et de traiter ces coupables le plus vite possible, afin de montrer au peuple votre sagesse. Les esprits du peuple seraient calmés, et les mœurs seraient de nouveau unifiées.

80 Hongwu (洪武), né dans l’actuel province d’Anhui en 1328, et mort dans la palais Ming à Nankin en 1398, ayant

pour nom de naissance, Zhu Yuanzhang, est l’empereur fondateur de la dynastie des Ming. Il a régné en Chine de 1368 à 1398.

81 On surnomme Nankin « ville gardé par le Tigre et le Dragon ». Ce surnom fut donné par un grand stratège Zhu

Liang (220-280) à l’époque de Trois Royaumes. Le « tigre » désigne la majesté de Nankin dominant le fleuve Yangtsé, et le « dragon » décrit la configuration géographique difficile du mont de de Pourpre et d’or qui s’élève à l’est de Nankin. Par ce surnom, Zhu Liang mettait en valeur la position stratégique de Nankin qui était capitale de plusieurs dynasties dans l’histoire de Chine.

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Non seulement je remplirais mes fonctions, mais encore les menaces de notre pays disparaîtraient définitivement.82

Dans ce mémoire, Shen souligne que la cour devrait maintenir une haute vigilance face aux activités des jésuites européens. Par rapport à son mémoire précédent, il signale que les actions d’Alfonso Vagnoni menaçaient déjà la stabilité du pays. N’ayant toujours pas de réponse de l’empereur, il lui présenta son troisième mémoire dans lequel nous seulement il continuait à mettre l’accent sur la nocivité des jésuites européens, mais il prit aussi le Père Alfonso Vagnoni pour un complice des colonisateurs qui avaient déjà occupé des îles des Philippines. D’après lui, la cour ne devait en aucun cas relâcher sa vigilance :

Le barbare coupable Alfonso Vagnoni prétend être venu à Nankin après des dizaines de milliers de kilomètres de voyage. Cela fait longtemps qu’il désoriente le peuple en se posant en chrétien. Je vous ai déjà adressé deux lettres sur ce problème, et il y avait d’autres ministres de plusieurs provinces qui l’ont fait aussi. Néanmoins, aucun ordre impérial n’a été donné de votre part. Sire, ne voyez-vous pas encore la culpabilité de ce barbare ? En plus de ses activités absurdes, le « Dieu » dont il parle tout le temps est en réalité un pécheur de l’Occident ! Figurez-vous leur complot ! Pourquoi ces jésuites ont-ils occupé arbitrairement l’endroit près de l’ancienne résidence de l’empereur Hongwu? Par admiration pour l’air impérial ? Et pourquoi ont-ils construit un jardin sans permission à côté du tombeau de Hongwu? […] Je me suis renseigné récemment auprès des habitants du sud sur l’origine d’Alfonso Vagnoni. Il est effectivement Folangji83. Selon ce que les habitants m’ont dit, il y a quelques années,

Vagnoni et ses complices ont trompé le roi du pays de Luçon84 par les mêmes moyens, et ils ont finalement pris ce pays de force. Les provinces du sud de notre pays sont près de Luçon, comment pourrait-on croire qu’il est venu « après des dizaines de milliers de kilomètres » ? […] Sire, je vous prie, encore une fois, de donner votre ordre impérial immédiatement, et de me permettre d’exécuter les coupables pour montrer la puissance de votre Majesté ! J’attends votre ordre avec impatience.85

82 Sheng Chao Po Xie Ji, op.cit., p. 201.

83 Les Chinois de la Dynastie des Ming appelaient les Portugais « Folangji » ( « Frank »). 84 Luçon est la plus grande île des Philippines.

42 À partir du milieu de la dynastie Ming, avec les activités coloniales des Espagnols et des Portugais qui étaient de plus en plus fréquentes en Asie du Sud-Est, les frontières en Chine du sud étaient déjà sous la menace. Aussi, le souverain Ming se méfiait-il toujours de ces étrangers. Le troisième mémoire de Shen fut finalement considéré comme très important par l’empereur. Le 28 décembre 1616, la cour promulgua un décret dans lequel on exigeait que Vagnoni et ses compagnons fussent expulsés :

Les étrangers comme Alfonso Vagnoni, avec une intention inavouable, ont trompé le peuple par leur religion. J’autorise le Ministère des Rites de Nankin à les arrêter et à les envoyer à Guangdong. Il faut impérativement les presser de rentrer en Occident, afin de rendre la paix à notre terre sacrée.86

Ce décret qui interdisait l’enseignement et la pratique de la religion chrétienne en Chine fut strictement appliqué à Nankin. Vagnoni et Álvaro Semedo furent arrêtés. Vagnoni fut condamné à la bastonnade et avec Semedo, il fut emporté dans une cage à Canton d’où il fut expulsé du pays.