Patrimoine scientifique et hydraulique
3.2. Patrimoine hydraulique
La notion de patrimoine hydraulique, telle que nous allons l’aborder dans cette étude, se rapporte à la science de l’ingénierie hydraulique. En effet, il ne faut pas la confondre avec la dimension patrimoniale de l’eau en tant que bien commun, qui ne sera pas abordée.
3.2.1. Essai de définition
La notion de patrimoine hydraulique se rattache, de fait, à la définition du patrimoine scientifique énoncée précédemment. Selon Holman (2007, p. 6), il s’agirait de l’ensemble des ouvrages architecturaux en lien avec l’eau, présentant un intérêt patrimonial et reflétant l’identité passée et présente du territoire.
Pour reprendre les termes employés dans la définition du patrimoine scientifique, cette première définition du patrimoine hydraulique prend en compte l’ensemble des « productions scientifiques » issus de l’ingénierie hydraulique. Ainsi, il convient de la compléter en ajoutant au patrimoine hydraulique les matières premières, les connaissances et les objets faisant partie du processus de recherche scientifique.
La définition du patrimoine hydraulique regroupe donc les outils et instruments, les expérimentations et les démarches scientifiques, les savoir-faire et les connaissances des ingénieurs en hydraulique, ainsi que les produits de cette science, que sont les ouvrages hydrauliques.
3.2.2. Typologie
Le patrimoine hydraulique, tant matériel qu’immatériel, fait partie de la grande catégorie du patrimoine culturel. L’ingénierie hydraulique ayant divers champs d’application, détaillés dans le chapitre précédent, le patrimoine qui en découle est tout autant varié et comprend à la fois la recherche scientifique et le produit de celle-ci.
Ainsi, nous pouvons reprendre la typologie de l’ingénierie hydraulique et décliner les types de patrimoines hydrauliques de la manière qui suit :
- Le patrimoine lié aux aménagements hydroélectriques, tels que les barrages, les vannes et autres conduits d’eau. Bossum (2015, p. 66) illustre ce type de patrimoine en prenant le cas de la centrale hydroélectrique de Tombetta, en Italie, construite au début du XXème siècle, dont l’ancienne machinerie, objet
patrimonial, a été mise hors d’usage pour laisser place à un système automatisé. - Le patrimoine hydraulique fluvial, constitué des travaux de recherche et des ouvrages de navigation fluviale, tels que les barrages et les écluses, ainsi que le réseau de canaux en lui-même. Il s’agit par exemple du Canal du Midi, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre des biens culturels et des paysages culturels, mais aussi de l’ensemble des travaux de recherche qui ont permis sa construction.
- Le patrimoine hydraulique maritime, comprenant les ports, les digues et les jetées, ainsi que la recherche liée à l’érosion des plages, aux phénomènes d’ensablement et d’envasement, et à l’étude des marées. À ce titre, nous
- Le patrimoine hydraulique urbain, qui regroupe la recherche et les ouvrages d’adduction, d’épuration, de distribution et d’évacuation de l’eau en ville. Les vestiges du réseau d’égouts parisiens construits à l’époque de l’Empire romain en sont un exemple.
- Le patrimoine hydraulique agricole, qui concerne les ouvrages d’alimentation des cultures en eau. Par exemple, les systèmes d’irrigation en Oman datant du VIème siècle sont classés au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre de bien
culturel43.
- Le patrimoine hydraulique souterrain, constitué de la recherche scientifique sur l’infiltration de l’eau, ainsi que des ouvrages de captation de l’eau souterraine. Par exemple, c’est le cas de la mine polonaise de Tarnowskie Góry et son système de gestion hydraulique souterrain, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre de bien culturel44.
- Le patrimoine lié aux commandes hydrauliques. Par exemple, les portes d’écluse du port de Miike, au Japon, intégré aux sites de la révolution industrielle Meiji classés au patrimoine mondial de l’UNESCO, conserve des commandes hydrauliques actionnées à la vapeur datant du début du XXème
siècle45.
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Le patrimoine scientifique est une branche relativement récente de l’étude du patrimoine. Bien que le domaine du patrimoine scientifique soit vaste, il paraît évident que les éléments de la recherche scientifique, ainsi que les découvertes et produits issus de ces recherches, ayant fortement contribué à façonner les sociétés, fassent partie intégrante de
43 UNESCO. Système d’irrigation aflaj d’Oman [en ligne]. Disponible sur https://whc.unesco.org/fr/list/1207/. (Consulté
le 23-4-2020).
44 UNESCO. Mine de plomb, argent et zinc de Tarnowskie Góry et son système de gestion hydraulique souterrain [en
ligne]. Disponible sur https://whc.unesco.org/fr/list/1539/. (Consulté le 23-4-2020).
45 UNESCO. Sites de la révolution industrielle Meiji au Japon : sidérurgie, construction navale et extraction houillère [en
leur identité. De ce fait, ces objets scientifiques font patrimoine, car ils sont représentatifs des époques aujourd’hui révolues. Ces « témoins » des sociétés nous ayant précédé fascinent le grand public, de par leur capacité à nous transporter dans le temps.
Ce patrimoine hydraulique, porteur d’identité, fait partie de la culture de la société. Il convient donc d’étudier la notion de culture au sein d’une société, ainsi que le rôle de ce patrimoine dans le développement d’une culture scientifique.
Le schéma ci-dessus synthétise les apprentissages de ce second chapitre, en faisant ressortir les notions clés à retenir.
Figure 4 : Synthèse du chapitre 2 (partie 1)46