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L’hydraulique fluviale : usages, gestion et réglementation

Contextualisation du secteur de l’ingénierie hydraulique

1.2. L’hydraulique fluviale : usages, gestion et réglementation

L’ingénierie hydraulique fluviale est un élément majeur d’aménagement du territoire. Ainsi, il convient d’étudier les relations entre l’eau et les aménagements hydrauliques fluviaux d’une part, et le développement territorial et sociétal d’autre part.

1.2.1. Contexte spatial : les usages des cours d’eau

Avant d’aborder les applications et les usages de l’hydraulique fluviale, il convient de revenir à la source. En effet, l’eau est une ressource naturelle qui couvre plus de 70% de la surface de la Terre, soit environ 1,4 milliards de kilomètres cubes. La majeur partie de cette eau se trouve dans les océans et les mers, et est donc salée. Seulement 2,8% de l’eau sur Terre est de l’eau douce. Celle-ci est majoritairement stockée dans les glaces polaires (76,8%), mais aussi dans les nappes souterraines (22,5%). Seulement 0,7% de l’eau douce est accessible en surface dans les lacs et les cours d’eau162. Ainsi, seulement un quart de

l’eau douce est exploitable par l’homme, soit environ 9 millions de kilomètres cubes. Bien que cette quantité d’eau soit suffisante pour répondre aux besoins de la population, sa répartition reste inégale et peut provoquer des conflits.

L’eau douce qui s’écoule dans les cours d’eau naturels ou artificiels est prélevée afin de répondre aux besoins de différents usagers163. Tout d’abord, elle est prélevée afin de

produire de l’eau potable indispensable à la vie de tous les jours. L’eau est également utilisée pour répondre aux besoins des activités industrielles, agricoles, ou encore

pour les activités d’itinérance douce et de bases de loisirs. Ces voies d’eau, autrefois majoritairement utilisées pour le commerce fluvial, pourraient voir cette fonction refaire surface dans un contexte de développement durable, offrant une alternative moins polluante au transport routier.

Figure 35 : Divers usages des cours d'eau164

Ces différents usages de l’eau nécessitent l’installation d’équipements pour l’exploitation de la ressource, structurant le territoire. Sur la carte ci-dessus figurent, par exemple, une base de loisirs aménagée permettant le développement d’activités touristiques sur une retenue d’eau artificielle, ainsi qu’une station balnéaire consommatrice d’eau de ville en saison estivale. Divers centrales de pompage de l’eau sont

aussi représentées et jalonnent le cours d’eau d’amont en aval afin de satisfaire les besoins liés à la production d’électricité, à l’irrigation des cultures, à l’industrie et à la captation d’eau de source pour la commercialisation d’eau potable. Ces équipements sont complétés par des ouvrages hydrauliques permettant la maîtrise de l’eau, tels qu’un barrage, un pont, ou encore des écluses, des digues ou des canaux.

Cependant, la cohabitation de ces différents secteurs d’activité peut être source de conflits d’usage au sein du bassin versant, le long du cours d’eau et de ses affluents. En effet, les activités en amont du cours d’eau impactent la disponibilité et la qualité de l’eau en aval. Par exemple, un pompage excessif d’eau pour l’agriculture, qui consomme déjà 70% de la ressource à l’échelle mondiale, peut impacter les activités industrielles et touristiques en aval du cours d’eau. Ainsi, le partage de l’eau est un enjeu majeur du XXIème

siècle, dans un contexte de raréfaction de la ressource, lié à l’accroissement démographique et aux besoins de la population grandissants, ainsi qu’au changement climatique.

1.2.2. Contexte socio-économique : la gestion de l’eau en France

En France, l’eau est gérée de façon concertée et intégrée à l’échelle des bassins versants165, et sa gestion fait l’objet d’une planification pluriannuelle. Divers acteurs sont

impliqués dans la gestion de l’eau.

Au niveau européen, l’Union Européenne établie des directives, qui sont transposées dans la législation nationale de chaque pays membre, dont notamment la

comme tel »166. Elle accorde aussi des subventions en faveur des actions de préservation

de la ressource en eau.

Au niveau national, « le Ministère en charge de l’environnement organise

l’intervention de l’État avec d’autres ministères impliqués (santé, agriculture…) »167. Il a

sous sa tutelle deux instances nationales à travers lesquelles il applique les directives européennes. D’une part, le Comité National de l’Eau (CNE), qui est « consulté sur les

grandes orientations de la politique de l’eau, sur les projets d’aménagement et de répartition des eaux ayant un caractère national ou régional, ainsi que sur l’élaboration de la législation ou de réglementation en matière d’eau »168. D’autre part, l’Office National des

Milieux Aquatiques (ONEMA), dissout pour intégrer l’Agence française pour la biodiversité (AFB) au 1er janvier 2020, exerce une mission de police de l’eau, d’appui aux politiques

publiques et de gestion et préservation des espaces naturels169.

À l’échelle des 12 grands bassins hydrographiques170, un Comité de bassin

« rassemble les représentants des pouvoirs publics, des collectivités territoriales, des

usagers économiques et associatifs pour décider de la stratégie en faveur de la protection de l’eau et des milieux aquatiques » 171. Il se charge aussi de rédiger le Schéma Directeur

d’Aménagement et de Gestion de l’Eau (SDAGE) pour une durée de 6 ans, qui fixe les priorités de gestion de l’eau. Ce plan de gestion est approuvé par les préfets de bassins, en lien avec les préfets départementaux. L’Agence de l’eau, quant à elle, est chargée d’appliquer le SDAGE, de collecter les redevances auprès des usagers de l’eau, et de verser

166 Sénat. Gestion de l’eau : agir avec pragmatisme et discernement [en ligne]. Disponible sur https://www.senat.fr /rap/r15-807/r15-8076.html. (Consulté le 30-6-2020).

167 Centre d’information sur l’eau (CIEAU). Quels sont les acteurs de l’eau en France ? [en ligne]. Disponible sur https://www.cieau.com/le-metier-de-leau/quels-sont-les-acteurs-de-leau-en-france/. (Consulté le 30-6-2020).

168 Ministère de la transition écologique et solidaire. Comité national de l’eau [en ligne]. Disponible sur https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/comite-national-leau. (Consulté le 30-6-2020).

169 Agence française pour la biodiversité. Nos missions [en ligne]. Disponible sur https://www.afbiodiversite.fr/.

(Consulté le 30-6-2020).

170 La France compte 12 bassins hydrographiques : 7 en métropole (Rhin-Meuse ; Artois-Picardie ; Seine-Normandie ;

Loire-Bretagne ; Adour-Garonne ; Rhône-Méditerranée ; Corse) et 5 en outre-mer.

171 Centre d’information sur l’eau (CIEAU). Quels sont les acteurs de l’eau en France ? [en ligne]. Disponible sur https://www.cieau.com/le-metier-de-leau/quels-sont-les-acteurs-de-leau-en-france/. (Consulté le 30-6-2020).

des subventions aux collectivités et aux acteurs économiques pour la mise en place de mesures de préservation des milieux aquatiques.

À l’échelle régionale et départementale, les services déconcentrés de l’État, tels que la Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL), la Direction régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (DRAAF), l’Agence régionale de la Santé (ARS), et la Direction départementale des Territoires (DDT), appliquent la réglementation concernant les différents usages de l’eau. Les Conseils régionaux et départementaux sont chargés d’appliquer la politique nationale de gestion de l’eau, en lien avec l’aménagement du territoire, en apportant un appui technique et financier aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) chargées de la distribution de l’eau potable et de l’assainissement.

À l’échelle locale, les communautés de communes, les communautés d’agglomération, les métropoles ou les communautés urbaines (EPCI) sont compétentes pour la Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI). Cependant, elles peuvent décider de déléguer tout ou partie de cette compétence à des syndicats intercommunaux ou des syndicats mixte, regroupant des représentants des collectivités territoriales, des conseils départementaux et régionaux, reconnus comme établissements publics territoriaux de bassin (EPTB) ou établissements publics d’aménagement et de gestion des eaux (EPAGE). Ceux-ci se chargent notamment de mettre en place le Schéma d’Aménagement et de Gestion de l’Eau (SAGE).

Figure 36 : Système d’acteurs de la gestion de l'eau en France172

1.2.3. Contexte légal

La gestion de l’eau a fait l’objet de réglementations en France, notamment depuis la Première loi sur l’eau de 1965 « relative au régime et à la répartition des eaux et à la

lutte contre leur pollution »173 et la Seconde loi sur l’eau de 1992. En Europe, malgré la

promulgation de directives relatives à l’usage de l’eau ou portant indirectement sur les milieux aquatiques, c’est la Directive cadre sur l’eau, en 2000, qui permet d’harmoniser la réglementation européenne. Celle-ci est transposée en France en 2006 à travers la Loi sur l’eau et les milieux aquatiques (LEMA), qui a pour but de conforter le financement de la politique de l’eau, à travers les principes « l’eau paie l’eau » et « pollueur-payeur »174.