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DE LA PARTICIPATION CULTURELLE CHEZ LES JEUNES Comme on l’a vu, les jeunes sont généralement très actifs en matière

Dans le document temps libre (Page 160-164)

LES UNIVERS DES JEUNES Diversité et significations

DE LA PARTICIPATION CULTURELLE CHEZ LES JEUNES Comme on l’a vu, les jeunes sont généralement très actifs en matière

culturelle. Ils vivent intensément au sein d’univers culturels variés.

Il faut ajouter que les jeunes sont également fort actifs en d’autres lieux, tout particulièrement quant à leur participation dans le domaine de l’activité physique et du plein air. Certes, on déplore le manque d’activités physiques chez les jeunes, mais leur taux de participation est parfois le double de celui des adultes. En fait, l’univers social qui entre le plus directement en concurrence avec leurs activités culturelles est bien l’activité sportive.

Mais pourquoi donc un jeune s’intéresserait-il à la culture ? Quelles fonctions peut remplir la participation d’un jeune à la culture et aux arts ?

L’UNIVERS DU TEMPS LIBRE ET DES VALEURS CHEZ LES JEUNES

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© 2007 – Presses de l’Université du Québec

Édifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Québec, Québec G1V 2M2 • Tél. : (418) 657-4399 – www.puq.ca

Tiré de : L’ univers du temps libre et des valeurs chez les jeunes, Gilles Pronovost, ISBN 978-2-7605-1512-3 • G1512N Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés

Les fonctions

J’entends ici par «fonction» le rôle, l’impact, les conséquences implicites ou explicites de la participation des jeunes à la culture. Ces fonctions sont très diversifiées. La brève énumération qui suit ne vise qu’à en donner un aperçu.

Je me permets d’insister tout d’abord sur une fonction sociologique fondamentale : par sa participation à diverses activités culturelles, le jeune témoigne de son intégrationou, à l’inverse, de sa marginalisation par rapport à la société. En d’autres termes, les activités culturelles d’un jeune témoignent de son degré de socialisation aux valeurs, intérêts culturels et manières de faire dominants. C’est une autre façon de rappeler que le jeune est progressivement imprégné de sa culture, par le milieu familial d’abord, par le milieu scolaire et les groupes de pairs ensuite, sans négliger le rôle que jouent les médias.

Il s’agit d’une fonction à double tranchant, puisqu’un contrôle social trop serré peut aboutir à l’effet inverse, par exemple le rejet de la culture que proposent les adultes, sans qu’un tel rejet, faut-il le rappe-ler, mène nécessairement à une marginalisation extrême. Ici on peut faire remarquer qu’il existe au moins deux types de marginalités culturelles chez les jeunes : une marginalité que je qualifierais d’active (le jeune créateur en rupture avec l’univers adulte, le jeune musicien à la recherche d’expériences musicales alternatives, etc.) ; et une marginalité que je qualifierais de tragique, celle du jeune drop-out, en situation d’échecs scolaires, aux projets d’avenir incertains. Dans les deux cas, des choix d’activités culturelles traduisent l’un ou l’autre type de marginalité.

Par la diversification progressive de ses activités culturelles, le jeune prend d’ailleurs de plus en plus distance d’avec son milieu familial et son milieu scolaire pour affirmer ses propres intérêts. Une autre fonction tout aussi fondamentale est celle de la construction de l’identité du jeune. L’engagement d’un jeune dans des activités culturelles lui permet d’affirmer ses goûts et intérêts, de faire preuve d’autonomie, de se construire progressivement une image plus ou moins positive de lui-même. Cette quête d’autonomie ne se fait pas sans mal. Les échecs sont fréquents, les incertitudes presque permanentes. Le parcours du jeune peut parfois être chaotique, ses choix peuvent se contredire.

Ainsi, l’identité du jeune se construit progressivement, au fil de ses choix d’activités, fortement tributaire du milieu familial, de son réseau

social et de la qualité des interactions qui la nourrissent. Dans ses choix de lecture et ses préférences musicales, dans son engagement dans des pratiques en amateur, par exemple, le jeune voit un moyen d’affirmer son identité.

Une autre fonction tout aussi importante et intimement liée à la précédente est celle de l’expression. Car le jeune ne fait pas que cons-truire (ou parfois décons-truire) ce qu’il est ou veut être, il cherche aussi à le dire, à l’exprimer. Or la participation culturelle constitue un moyen puissant d’expression. On pense bien entendu à l’écriture : dans ses carnets intimes, dans son journal personnel, par l’écriture de poèmes.

Il y a aussi les arts plastiques, la création musicale, etc. Ce sont là des formes directes d’expression ; par elles, le jeune peut parler de lui-même, de ce qu’il cherche, de ses angoisses, de ses amours et de ses peines. Il se dit aux autres ou à lui-même ce qu’il pense être ou veut devenir. Mais tous les jeunes ne maîtrisent pas à ce point le langage, ou l’écriture artistique, ou encore ne se sentent pas nécessairement à l’aise avec ce moyen d’expression. La participation culturelle offre aussi des médias d’expression, des moyens indirects mais tout aussi puissants. Je pense notamment au jeu théâtral, par lequel, en jouant le rôle d’un autre, en exprimant les émotions d’un personnage qui peuvent correspondre à ses propres émotions, le jeune livre une partie de sa personnalité et de son intimité. Ou encore, s’il est moins habile en écriture ou en musique, le jeune peut trouver une façon de se faire connaître et reconnaître par ses habiletés en danse, en musique, chant, etc. Dans l’expression culturelle par médias interposés, le jeune joue son per-sonnage, ou en joue un autre qui lui ressemble.

Une autre fonction que je veux signaler est la construction des rapports au temps. En effet, la participation culturelle exige persévé-rance, par exemple dans le cas des pratiques en amateur. Elle impose de s’intégrer dans des activités structurées, par exemple par des cours, des activités de groupe s’étendant sur une certaine période. Elle oblige le jeune à s’inscrire dans la durée. En apprenant peut à peu à diver-sifier ses choix culturels, en faisant l’expérience d’une multiplicité de milieux de vie à mesure qu’il se détache de l’influence familiale, le jeune doit composer avec son passé et son présent. Plus encore, certains choix d’activités culturelles supposent implicitement une certaine repré-sentation de l’avenir, dans la mesure où ils font partie d’un projet personnel qui peut même traduire des aspirations professionnelles.

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Tiré de : L’ univers du temps libre et des valeurs chez les jeunes, Gilles Pronovost, ISBN 978-2-7605-1512-3 • G1512N Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés

À ce sujet, on a souvent souligné comment les jeunes vivent dans l’instant présent, comment ils sont tournés vers leur univers immédiat, comment ils tentent de vivre intensément le temps présent. Chez les jeunes, il y a ainsi un temps à court terme dont il faut savoir profiter : les valeurs du plaisir et de l’aventure y prédominent nettement ; les médias de masse y prennent la plus grande importance. Mais il y a aussi le temps à moyen terme, qui appartient assurément à l’horizon temporel des jeunes et qui fait en sorte que l’on retrouve chez eux l’idéal clas-sique d’une vie familiale chaleureuse et d’un travail gratifiant, des attentes très fortes de scolarisation et de gratifications professionnelles.

Mais il y a aussi la tension entre le travail rémunéré et l’école, entre l’activité culturelle et les activités de groupe. Entre la jouissance de l’instant présent dans le loisir et la culture, l’ordre du temps scolaire, le temps de sociabilité et les exigences des emplois occasionnels, le passage peut être difficile, aléatoire, fait de va-et-vient. Les loisirs et les amis servent de refuge, de défense. La vie culturelle et sociale des jeunes est marquée par des pratiques de solidarité et de sociabilité en attendant d’accéder au monde des adultes auquel ils aspirent par consommation interposée.

On ne peut passer sous silence une autre fonction qui relève de l’histoire de la culture. La participation des jeunes à des activités cultu-relles peut constituer une source profonde de renouvellement culturel.

Par exemple, la majorité des enquêtes de participation culturelle indique bien comment la culture des générations d’aujourd’hui diffère de celle de la culture « classique », voire savante. On observe une distan-ciation indéniable par rapport à la « culture cultivée », un investissement beaucoup moins exclusif dans une seule discipline artistique et un certain éclectisme des goûts, des choix musicaux éclatés, une progres-sion indéniable des pratiques artistiques en amateur, etc. Bref, les transformations profondes des rapports à la culture ont été en partie le fait des « jeunes générations » (Donnat, 1998). Elles ont été portées, il faut aussi le rappeler, par l’avènement des nouvelles technologies de l’information et de la communication, de même que par la montée des médias de masse.

PARTICIPATION CULTURELLE, PARTICIPATION POLITIQUE

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