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C - Des outils financiers en faveur des pays d’origine des migrations forcées

Plusieurs initiatives diplomatiques menées par l’UE avec des pays tiers, souvent pays d’origine des exilé.e.s, portent plus ou moins directement sur la gestion des migrations forcées. Que ce soit avec son voisinage proche dans le cadre de la politique européenne de voisinage ou avec le continent africain, l’UE a créé plusieurs outils financiers censés permettre le recul des migrations dites forcées.

Le sommet de La Valette en novembre 2015 a marqué une étape importante puisqu’il réunissait pays européens et africains dans une logique de « responsabilité commune », dans le but affiché de s’attaquer aux causes profondes de la migration irrégulière et de renforcer la protection des migrant.e.s et des demandeur.euse.s d’asile. Il a abouti à l’établissement d’un Plan d’action116qui envisage par exemple la migration comme partie intégrante de la coopération au développement et rappelle les obligations des pays d’accueil, tenus de traiter les migrant.e.s dans le strict respect des droits de l’Homme, mais aussi celles des pays d’origine tenus d’appliquer une politique de retour et de réadmission de leurs ressortissant.e.s. Le Sommet a également été l’occasion de dégager des moyens financiers dédiés avec la création du FFU.

Pour la période 2015-2020, son budget est de 2,85 milliards d’euros dont 2,64 milliards issus du Fonds européen de développement et 202 millions d’euros des États membres et autres donateurs117. Les programmes financés à ce titre peuvent concerner différents champs (emploi, développement local, humanitaire, justice-sécurité, …) et on peut considérer que l’approche est relativement intégrée et transversale, d’autant qu’elle s’inscrirait selon l’Ambassadeur français chargé des Migrations, Pascal Teixeira da Silva, dans une démarche more for more, qui se traduit par une méthode plus incitative que contraignante, le respect d’éventuels critères ou objectifs n’étant pas une condition au versement de fonds. Le Plan d’action issu du Sommet de La Valette est toutefois critiqué dans la mesure où le déploiement du FFU viserait avant tout, selon certaines associations, à endiguer les flux migratoires, ce qui revient à conditionner l’octroi d’aide au développement. Ce sont par exemple les conclusions de l’ONG française Action Santé mondiale (ASM) après des missions au Sénégal et au Niger.

En tout état de cause, le FFU finance tout à la fois :

– des projets de développement local, avec une attention particulière à l’emploi des femmes et des jeunes. Ainsi une subvention de 10 millions d’euros issus du FFU a permis en juin 2017, le lancement d’un programme de l’AFD à Djibouti visant à favoriser la formation et l’emploi des jeunes en risque d’exclusion sociale ;

116 http://www.consilium.europa.eu/media/21838/action-plan-fr-2.pdf.

117 Source AFD.

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES – des programmes davantage axés sur la sécurité et l’État de droit, c’est le cas au

Mali avec le programme PARSEC (Programme d’appui au renforcement de la sécurité). Il vise à assister les autorités maliennes dans le cadre du renforcement de la sécurité et de l’État de droit au centre du pays, ainsi qu’aux frontières avec le Burkina-Faso et le Niger, région déstabilisée par le risque terroriste et les trafics (armes, drogue mais aussi trafic d’êtres humains).

L’Instrument européen de voisinage (IEV) est également un outil financier susceptible d’être mobilisé par l’UE au profit des pays de son environnement proche (pays riverains de la Méditerranée comme la Tunisie, l’Egypte, la Syrie, la Libye, ou du Sud-Caucase, ou de l’Est de l’Europe comme l’Ukraine) sur la question des migrations forcées. Depuis les événements du Printemps arabe à compter de 2011 et la révision en 2014 de la Politique européenne de voisinage (PEV) et de l’IEV en conséquence118, la question des mobilités est citée comme l’un des champs d’application de la PEV : « créer les conditions propices à une meilleure organisation des migrations légales et à une mobilité bien gérée des personnes ». Il est doté, pour la période 2014-2020 de 15,4 milliards d’euros.

La création du Fonds fiduciaire de l’UE pour la Syrie, conçu en tant que réponse à la crise syrienne et dont le volume dépasse désormais 1 milliard d’euros, s’inscrit aussi dans le cadre de la PEV. Il doit permettre le financement de programmes d’éducation, de santé, d’inclusion sociale et d’égalité femmes-hommes dans les pays voisins de la Syrie accueillant le plus de réfugié.e.s, comme la Turquie, le Liban et la Jordanie.

Là encore, on peut s’interroger sur le différentiel entre le volume des fonds consacrés à l’asile et aux migrations (FAMI) et celui des fonds accordés par l’UE au titre du contrôle des migrations par les pays tiers – même si l’octroi de ces fonds répond aussi et avant tout à une logique de solidarité – dans un programme plus global d’aides.

Au total, parmi l’ensemble des voies identifiées pour améliorer la politique européenne extérieure de l’asile, la plus sûre comme la plus conforme au respect des droits fondamentaux de l’UE, paraît être le développement de voies légales d’accès à la demande d’asile. Mais cette politique concerne des volumes de personnes faibles, très inférieurs au nombre de personnes qui tentent de demander refuge dans l’UE et franchissent ses frontières externes.

De plus les politiques de développement de l’UE ne paraissent pas avoir limité les départs des migrant.e.s vers le Nord.

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118 Cf ; Règlement (UE) 232/2014 du 11 mars 2014.

Rapport

Compte tenu des enjeux humains, politiques et sociaux, mais aussi du nombre de personnes concernées en rapport avec la population européenne et le niveau de développement de l’UE, la notion de crise des réfugié.e.s doit être relativisée. Mais l’incapacité de l’UE à agir de façon solidaire a fait émerger une véritable crise entre les États membres et les institutions sur ce sujet.

Attentif à la question du respect des droits fondamentaux, le Parlement européen est parfois critiqué par les États membres pour son idéalisme en dépit du sérieux des propositions qu’il porte. Ceux-ci, satisfaits du recours aux solutions purement interétatiques en cas de crise, remettent en cause le développement de la politique commune de l’asile.

Aussi, les États membres s’affranchissent-t-ils de plus en plus souvent des principes de solidarité, de coopération et de responsabilité aux dépens des réfugié.e.s.

Les exigences de la protection internationale, le respect des droits fondamentaux des exilé.e.s ainsi que la relance indispensable du projet européen imposent de s’engager résolument dans une politique commune et partagée de l’asile ainsi que dans une déclinaison ambitieuse de ladite politique dans les différents États membres.

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES

Annexes

N° 1 COMPOSITION DE LA SECTION DES AFFAIRES