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Ethologie des principales espèces

1. Origine de l’accumulation

Trois principaux agents accumulateurs peuvent être à l’origine de la présence des vestiges fauniques dans un site archéologique : l’Homme, les apports exogènes (carnivores, rapaces) et l’apport intrusif (mortalité naturelle). Il est primordial de déterminer la part et le rôle joués par chacun d’eux dans l’accumulation des différentes espèces avant de tenter une interprétation économique des comportements humains à partir des vestiges fauniques. Les accumulations multi-agents ambiguës ne peuvent pas être utilisées comme base pour la reconstitution de la subsistance des Hommes préhistoriques (Lyman 1982 ; Payne 1983 ; Brain et Turner 1984). Concernant les os d’origine anthropique, il est nécessaire de faire une distinction entre ceux qui ont une valeur alimentaire de ceux qui n’en n’ont pas (valeur technique et/ou symbolique) (Lyman 1982 ; Castel 1999b, 2004).

L’action des agents non anthropiques est particulièrement forte dans les abris et les grottes. Ces lieux fournissent des abris à de nombreux animaux (ex. loup, hyène, renard, chouette) et ils correspondent à des espaces confinés qui ont favorisé l’accumulation osseuse par une variété d’animaux. En plein air, les centres d’activités des différents prédateurs étaient probablement séparés en raison du plus grand espace disponible, que la distribution de certaines ressources (eau) a pu entraîner sur le long terme des lieux d’activités et d’accumulations complexes (Avery 1984a, 1984b).

La détermination des agents accumulateurs potentiels s’appuie (Lyman 1982 ; Brain 1988 ; Brain et Turner 1984) sur le contexte archéologique et les vestiges de la culture humaine ainsi que sur la mise en évidence des traces caractéristiques propres à chaque agent (ex. strie de boucherie, traces de dents de carnivores) et sur l’identification dans l’assemblage des restes d’animaux dont la participation dans l’accumulation peut être suspectée.

1.1 Moyens et grands mammifères

Les restes osseux de grands et moyens mammifères peuvent être accumulés par les grands carnivores (en particulier l’hyène) ainsi que par des carnivores de taille moyenne (renard, lynx). En effet, bien que les lagomorphes et les campagnols constituent la plus grande part des proies du renard, il n’est pas rare qu’il intervienne sur des charognes de grandes proies (bœuf, cheval).

Rapport ongulés/carnivores

La part que représentent les restes de carnivores par rapport à l’ensemble des Ongulés est un des critères permettant de faire la distinction entre une accumulation engendrée par l’Homme ou par les grands carnivores (Klein 1975, 1977 ; Cruz-Uribe 1991). Ce critère est fondé sur l’hypothèse que l’alimentation des carnivores contient une part plus importante d’autres carnivores en comparaison de celle des Humains. Ainsi une accumulation serait anthropique lorsque le pourcentage du NMI des carnivores ne dépasserait pas 13% du NMI total (ongulés et carnivores). Néanmoins, ce critère basé sur les repaires d’Hyène doit être nuancé car si les restes osseux d’Hyène sont généralement présents dans les repaires, leur fréquence est extrêmement variable (Hill 1989 ; Fosse 1995 ; Blumenschine 1995).

Homme/Loup

Dans le cas où l’action du loup sur l’assemblage est attesté, il est nécessaire de faire la distinction entre un accès prioritaire aux ossements (chasse puis consommation) et un accès secondaire (charognage des déchets des activités humaines). Les spécificités des modes de consommation des différents prédateurs (Homme/Loup) ont permis de définir plusieurs caractéristiques diagnostiques (Castel 2004 ; Villa et al. 2004) :

Exploitation par l’Homme

L’exploitation par l’Homme des Ongulés de taille moyenne crée des morphologies de fragments très différentes de celles du Loup. La récupération de la moelle contenue dans la mandibule et les os longs est réalisée par des procédures standardisées : les diaphyses sont brisées de manière à laisser un minimum d’os compact près des épiphyses. L’extraction de la moelle implique donc l’absence de cylindres et de longs fragments possédant une épiphyse. Lorsque ces épiphyses ne sont pas intégrées à une autre phase d’exploitation des ressources (bouillon, combustion), elles demeurent intactes.

Exploitation primaire par le Loup

La consommation primaire des carcasses par le loup se caractérise par des morphologies particulières des différentes parties squelettiques (cf. infra), induites principalement par leurs habitudes d’attaquer les os par leurs extrémités. De plus, ces os ne possèdent aucune modification anthropique (ex. strie de découpe, combustion).

Charognage par le loup

Dans le cas de charognage des déchets d’activités humaines, les fragments osseux ne montrent pas la morphologie caractéristique de l’activité du loup. Il est également observé une consommation prioritaire des déchets peu exploités par l’Homme contenant encore un peu de moelle (phalanges, calcanéum, épiphyses des os longs, vertèbres). La distribution anatomique des morsures peut alors être très différente de celle observée dans le cas d’une consommation primaire.

En conclusion, le meilleur moyen pour quantifier l’activité des loups (consommation primaire/charognage) est le décompte des os des ceintures fortement modifiés qui ne peuvent résulter que d’une consommation primaire. Le charognage se caractérise quant à lui par l’absence de morphologies spécifiques de la consommation primaire ainsi que par la présence de stries de découpe sur une proportion importante d’os mordus postérieurement.

Renard/Homme

Les renards sont incapables de chasser des artiodactyles de grande taille et de transporter leurs carcasses (Mondini 1995). Ainsi, l’origine de l’accumulation des grands et moyens mammifères possédant une représentation squelettique complète ou quasi complète ne peut lui être imputée. En revanche, il est clairement démontré que ce carnivore peut prélever certains éléments anatomiques sur une charogne de grand mammifère puis les déplacer dans un autre lieu pour les consommer (Hainard et Perrot 1971).

Dans les tanières de renard (Mondini 1995, 2004), la représentation squelettique des grands Ongulés montre une prédominance considérable des éléments du squelette appendiculaire et tout particulièrement des extrémités distales des membres (carpe, tarse, métapode, phalange), suivis par les parties inférieures du membre antérieur. Les parties supérieures des membres et la tête ne sont pas représentées. Pour les Ongulés de taille moyenne (ovicapridés), le contraste entre les parties absentes et présentes est moins frappant : les extrémités distales sont toujours les éléments les plus abondants mais ils sont accompagnés de la tête et des autres parties des membres antérieur et postérieur. Il existe toutefois une variabilité dans la structure des assemblages accumulés par les renards, en lien avec les conditions écologiques et tout particulièrement le degré de compétition entre les carnivores.

1.2. Petits mammifères

Nous nous intéresserons principalement aux lagomorphes, abondamment représentés dans plusieurs des gisements étudiés. Au-delà de la distinction de l’origine anthropique ou non-anthropique de l’assemblage osseux, il est important d’identifier l’espèce particulière de prédateur responsable de l’accumulation. Les lagomorphes ont pu être accumulés par plusieurs agents dont l’Homme, les carnivores (renard, lynx), les rapaces nocturnes (hibou grand-duc) et les rapaces diurnes (aigle royal, faucon). Contrairement au lynx et au renard, les grands canidés (loup/chien) détruisent complètement les os de lapins lorsqu’ils les consomment, entraînant ainsi une fragmentation extrême (< 3 cm et 5 à 10% du poids d’origine du squelette) (Lyon 1970 ; Payne et Munson 1985 ; Hudson 1993 ; Kent 1993 ; Haws et Valente 2006). Néanmoins, la présence de grandes quantités de restes de poissons retrouvés en contexte ethnologique, associés à des chiens domestiques (Casteel 1971), laisse supposer que l’ensemble des restes de microfaunes n’est pas totalement détruit par les canidés de taille moyenne.

Plusieurs critères diagnostiques permettent de privilégier l’un ou l’autre des différents agents accumulateurs. Ils reposent essentiellement sur l’établissement de référentiels actuels, transposés ensuite aux assemblages fossiles. Les habitudes d’exploitation des différents prédateurs affectent en effet la composition de l’assemblage des proies, en terme de représentation squelettique, de structure de population ainsi que de degré d’altération des os (Fernandez-Jalvo et Andrews 1992 ; Hockett et Haws 2002 ; Cochard 2004a, 2004b, 2004c). Néanmoins, l’établissement de diagnose des accumulations osseuses est rendu difficile par une forte variabilité intraréférentiel (Hockett 1991 ; Cochard 2004b, 2004c, 2008 ; Cochard et Brugal 2004). Pour un prédateur donné, les caractéristiques de ses accumulations sont susceptibles de varier selon ses spécificités individuelles (âge, sexe, taille), les particularités des accumulations (géotopographie, environnement, fonction) et les modalités de collecte et d’analyse des échantillons. De plus, l’interprétation des assemblages fossiles doit être réalisée avec prudence car contrairement aux référentiels actuels, la formation des premiers résulte le plus souvent de la combinaison de plusieurs apports.

1.2.1. Abondance relative

Les accumulations anthropiques de lagomorphes se distinguent fréquemment des accumulations naturelles par un nombre élevé de restes (ex. : > 5000 restes sur un volume restreint de 3-4 m3), pouvant atteindre 85% des restes fauniques déterminés (Cochard 2004c ; Cochard et Brugal 2004). Les autres agents biologiques ou naturels produisent rarement des assemblages de 1000 à 5000 restes. Cependant cette donnée est difficilement exploitable, étant fortement liée à la surface fouillée.

1.2.2. Distribution spatiale

* Anthropique

Dans une accumulation d’origine anthropique, les concentrations spatiales des éléments squelettiques de lagomorphes sont généralement étroitement associées avec les autres vestiges lithiques ou osseux accumulés par l’Homme (Cochard 2004c). Cela s’explique par la présence de zones de dépotoirs dans lesquels les Hommes rejettent indifféremment les déchets osseux des grands et petits mammifères. De plus certains éléments squelettiques rejetés ensemble peuvent être retrouvés en connexions anatomiques (vertèbres lombaires, bas de pattes…).

* Intrusif

Dans le cas d’apport intrusif, si le gisement n’a pas subi de perturbations majeures, il est fréquent de trouver des « poches à ossements » caractérisées par une faible dispersion des vestiges et des connexions anatomiques plus ou moins lâches, qui témoignent de l’existence de terriers (Cochard 2004c).

* Rapaces et carnivores

Généralement les prédateurs désarticulent leur proie avant de la consommer, ce qui produit une forte dispersion des carcasses (Cochard 2004a, 2004b). Cependant, les hiboux (Payne 1983) peuvent produire des concentrations d’ossements, reflétant les accumulations de pelotes localisées sous les perchoirs.

1.2.3. Structure d’âge

* Anthropique

Alors que dans une biocénose, la proportion d’adultes est d’environ 50%, les lagomorphes issus d’accumulations anthropiques sont systématiquement caractérisés par une très forte proportion d’adultes, souvent supérieure à 85% des individus présents dans l’assemblage (Hockett 1991, 1995 ; Cochard 2004c). Les structures d’âges sont cependant fortement influencées par les méthodes et les techniques de chasses employées (Stiner 1991). De plus, cette caractéristique n’est pas spécifique à cet

agent. Elle se retrouve aussi dans les aires de rapaces diurnes et les tanières de carnivores (Cochard 2004).

* Intrusif

La structure de population d’une accumulation naturelle varie en fonction du type de mortalité. Dans le cas d’une mortalité attritionnelle, le nombre de jeunes (< 9 mois) et d’adultes (> à 9 mois) est

a priori à peu près équivalent. L’accumulation résultant d’une mortalité accidentelle se caractérise par

une abondance des sub-adultes (4-9 mois) et des adultes et par un nombre plus réduit de juvéniles (< 4 mois) (Cochard 2004c). Cependant, l’utilisation des caractéristiques de la population pour mettre en évidence les accumulations naturelles est limitée du fait que la structure démographique des populations vivantes est très variable. Par conséquent les courbes de mortalité établies pour les grands herbivores ne sont pas directement applicables aux taphocénoses de lagomorphes.

* Rapaces nocturnes

Globalement les jeunes individus dominent, avec un ratio juvéniles/adultes de 71%. De nouveau, les assemblages révèlent une grande variabilité, avec une proportion d’adultes oscillant entre 30% et 80% selon les référentiels (Cochard 2004b, 2004c ; Yravedra Sainz de los Terreros 2004)

* Rapaces diurnes

Les juvéniles sont très rares, plus de 80% des extrémités des os longs des membres sont ossifiées. Les assemblages de nids d’aigle contiennent ainsi un plus grand nombre d’adultes que les pelotes de hibou (Cochard 2004c ; Hockett et Haws 2002).

* Renard

Il y a une relative équivalence entre le nombre d’adultes et de juvéniles (Cochard 2004a, 2004c).

1.2.4. Fréquences des éléments squelettiques

* Anthropique

Les données issues des chasseurs-cueilleurs actuels montrent que les petits gibiers sont généralement transportés entiers jusqu’au site de consommation, principalement en raison de leur taille et de leur poids réduits (cf. partie I). Théoriquement ce comportement devrait se traduire dans les accumulations anthropiques par la présence de tous les éléments squelettiques ainsi que par un relatif équilibre des fréquences osseuses. Cependant dans les sites archéologiques, la représentation des éléments squelettiques des lagomorphes est souvent différentielle. Malgré l’existence d’une assez grande variabilité dans les profils osseux observés, plusieurs paramètres communs ont pu être définis (tableau 21), dont la sur-représentation des os des membres antérieurs et postérieurs ainsi que celle des mandibules (Cochard 2004c ; Hockett 2006 ; Hockett et Haws 2002).

Eléments squelettiques Représentation

Généralement abondants

Proportion membre antérieur/membre postérieur équivalente Possibilité d'une légère supériorité de la proportion du membre postérieur

Eléments crâniens Peu représentés à l'exception de la mandibule

Squelette axial Très faiblement représenté Peu représenté

Sur-représentation des métatarsiens/métacarpiens

Os longs et ceintures

Autopode

Tableau 21 : Représentation squelettique des lagomorphes dans les accumulations d'origine anthropique (Cochard 2004c)

En l’absence de processus taphonomiques, les distorsions de la représentation osseuse semblent être dans la majorité des cas le résultat, soit d’un traitement et/ou d’un rejet différentiel des carcasses sur le site de boucherie, soit d’un transport logistique des sous-produits après la boucherie (fig. 16).

Figure 16 : Représentations osseuses attendues des lapins en fonction des activités anthropiques inter- et intra- sites (Cochard 2004c)

* Intrusif

Tous les éléments anatomiques sont présents dans des proportions liées à leur densité (Cochard 2004c).

* Rapaces nocturnes

Toutes les parties anatomiques sont représentées mais de façon non homogène (Hockett et Haws 2002 ; Dauphin et al. 2003 ; Cochard 2004b, 2004c ; Yravedra Sainz de los Terreros 2004) ; les

éléments crâniens et les membres antérieurs des lapins adultes sont sous-représentés alors que les vertèbres et les os des extrémités inférieures (phalanges et métapodes) sont abondants. La représentation squelettique des membres est variable : dans les pelotes, les représentations du membre antérieur (scapula, humérus, radius, ulna) et postérieur (pelvis, fémur, tibia) sont similaires, alors que dans les restes non issus des pelotes, les os du membre antérieur sont plus abondants que ceux du membre postérieur.

Ces représentations squelettiques s’expliquent par le fait que les rapaces nocturnes décapitent les plus gros individus sur le site d’abattage avant de les transporter jusqu’à leurs aires. De plus, ils ne consomment pas systématiquement leur proie dans sa totalité, n’ingurgitant que les parties les plus riches (bassin, membre postérieur). Les proies plus petites (< 500 g) sont quant à elles très souvent transportées entières jusqu’à l’aire puis ingurgitées telles qu’elles.

* Rapaces diurnes

La représentation anatomique est très homogène en fonction du type d’échantillons. Dans l’aire, le membre postérieur domine très largement par rapport au crâne et au membre antérieur et le squelette axial est majoritairement représenté par sa partie postérieure (sacrum, vertèbres lombaires). La représentation anatomique observée sur le site d’alimentation est proche de celui de l’aire avec néanmoins des pourcentages de survie supérieurs à 60% pour la majorité des os appendiculaires. Dans les pelotes, en dépit des très faibles effectifs, la représentation osseuse est plus variable ; chez le busard, les mandibules et les os longs du membre postérieur, alors que chez l’aigle royal, les fémurs sont les plus nombreux (Cruz-Uribe et Klein 1998 ; Cochard 2004c ; Hockett 2006).

* Carnivores

Dans les assemblages scatologiques, le squelette entier est représenté. Les phalanges, les dents, les vertèbres et le crâne sont les éléments les plus fréquents. Les os longs sont aussi bien représentés, spécialement l’humérus, l’ulna et le fémur. Les troisièmes phalanges, les tarses et les métatarses ainsi que les fragments de côtes et de vertèbres sont faiblement représentés. Le squelette post-crânien est sous-représenté par rapport au squelette crânien et le membre antérieur est mieux représenté que le membre postérieur (Lloveras et al. 2008). Néanmoins la disponibilité des proies peut affecter cette représentation squelettique (Schmitt et Juell 1994). Quand les proies sont abondantes, les éléments de faible utilité comme les extrémités distales des membres ne sont pas consommés. Inversement, quand les carnivores subissent un stress alimentaire, spécialement durant l’hiver, les carcasses sont entièrement consommées.

Les assemblages non scatologiques (Cochard 2004a, 2004c ; Hockett 2006 ; Hockett et Haws 2002) contiennent des fréquences relativement fortes de coxaux et d’os du membre postérieur, peu d’os du membre antérieur, et un nombre modéré de mandibules et de crânes. D’une façon générale le squelette axial est sous-représenté, à l’exception des vertèbres lombaires.

1.2.5. Fracturation des éléments squelettiques

* Anthropique

Dans les accumulations anthropiques, les os longs sont généralement fortement fracturés, avec un pourcentage d’os complets souvent inférieurs à 10%, voire nul (Pérez Ripoll 2004 ; Cochard 2004c). Cette fracturation résulte de l’extraction de la moelle contenue dans les éléments squelettiques, principalement dans les extrémités du tibia, du fémur et de l’humérus. Trois méthodes permettent de fracturer les os (Hockett et Haws 2002 ; Pérez-Ripoll 2004, 2005-2006 ; Hockett 1991, 1995, 2006) : la flexion, qui produit une fracture nette, transversale ; la percussion, peu fréquente, qui se caractérise par des encoches ; et la morsure, modalité la plus fréquente, qui produit des cylindres diaphysaires d’os longs caractéristiques. La proportion élevée de ces cylindres est l’indice de plus diagnostic des accumulations d’origine anthropique. Même si ces cylindres se retrouvent aussi dans les assemblages créés par les rapaces et les carnivores, leur nombre est toujours très réduit.

* Intrusif

L’apport intrusif est en théorie caractérisé par la présence d’os complets. Leur fragmentation peut toutefois être engendrée par des processus post-dépositionnels (Cochard 2004c).

* Rapaces nocturnes

En raison de la désarticulation limitée de leurs proies, et de leur ingurgitation sans broyage préalable, la proportion d’éléments complets est élevée (79% pour les adultes ; 70% pour les juvéniles) (Mayhem 1977 ; Dauphin et al. 2003 ; Cochard 2004b, 2004c ; Yravedra Sainz de los Terreros 2004 ; Pérez-Ripoll 2004). Toutefois plusieurs ossements présentent un taux d’os complet relativement faible : les mandibules (0% adultes, 15% adultes), les scapulas (< 37%) ainsi que le bassin, le fémur et le tibia, tous les trois représentés par un taux inférieur à 56%. La fracturation préférentielle de ces éléments squelettiques peut avoir été produite avant l’ingestion, au moment de la capture de la proie, du démembrement et/ou lors de la digestion.

Ces assemblages sont caractérisés par une très faible quantité de cylindres diaphysaires. Ceux de juvéniles résultent majoritairement de la disparition des extrémités par digestion.

* Rapaces diurnes

Les os du squelette post-crânien trouvés dans les aires de rapaces diurnes sont faiblement fragmentés, à l’inverse des mandibules (Cochard 2004c). Globalement, plus de 70% des os longs des membres sont complets à l’exception du tibia qui présente des pourcentages un peu plus faibles. Dans les pelotes de rejection, le pourcentage d’os complets est également très élevé. Cette faible fracturation des os distingue nettement les rapaces diurnes, mais également nocturnes, des mammifères carnivores.

* Carnivores

Les os retrouvés dans les assemblages constitués de fèces de carnivores (Schmitt et Juell 1994 ; Lloveras et al. 2008) sont fortement fragmentés, avec un pourcentage d’os complet inférieur à 50%. Seuls les éléments de petite taille (carpe, tarse, phalange, rotule, dents isolées) présentent de forts pourcentages.

Dans les terriers de renard (Cochard 2004a, 2004c), le pourcentage d’os complets est relativement élevé (65%). Ce résultat masque toutefois une fracturation différentielle : les éléments distaux des pattes (phalange, métapode, autopode), les vertèbres ainsi que les radius sont peu fracturés à l’inverse des os longs qui ont subi une fracturation plus forte. Les cylindres diaphysaires sont très peu nombreux.

1.2.6. Les traces Traces anthropiques

* Stries de boucherie

Les stries de découpe sont considérées comme l’une des meilleures manifestations des activités humaines. Elles sont cependant assez rares sur les ossements de lagomorphes issus de gisements archéologiques, généralement inférieurs à 2% des restes déterminés, alors que ce pourcentage peut être plus élevé pour les lièvres (> 10%) (Hockett 1991 ; Cochard 2004c). Cette rareté s’explique d’une part par le fait que les stries de découpe observées ne sont que les stigmates d’accidents fortuits, et d’autre part par l’existence de méthodes de consommation qui ne nécessitent aucune préparation bouchère. Les exemples ethnologiques (Yellen 1991a) indiquent que les petits gibiers peuvent être cuits entiers (bouillis ou rôtis). Une fois la proie cuite, l’utilisation d’outil coupant n’est pas nécessaire pour désarticuler ou décharner sa carcasse ; le seul emploi des dents permet de récupérer la viande et la moelle contenue sur et dans les os. Par conséquent, le mode de consommation (découpé cru/cuit) peut être défini par la proportion d’os portant des stries de découpe (Pérez-Ripoll 2004, 2005-2006). Il est envisagé que la décarnisation systématique des carcasses non cuites de lagomorphes témoigne d’une exploitation en vue d’une consommation différée car ce n’est pas la méthode la plus pratique pour leur consommation immédiate.

En dépit de la taille réduite des carcasses de lagomorphes, les différentes étapes d’exploitation de la carcasse (dépouillement, éviscération, désarticulation, décarnisation) mises en évidence pour les grands et moyens Ongulés (Binford 1981 ; Nilssen 2000), ont aussi été mises en évidence sur ce petit gibier (Pérez-Ripoll 2004 ; Cochard 2004c). Ainsi à partir de la localisation anatomique et de l’orientation des stries de découpe, il est possible de déterminer le schéma opératoire du traitement des carcasses.

* Traces de cuisson

Lorsque la carcasse est rôtie non désossée (entière ou en quartiers), des brûlures se produisent au niveau des zones de contacts entre l’os et la flamme. Ces brûlures sont caractérisées par leur