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2 Organisation spatiale

Toutes ces unités et les détachements et antennes des Services ont donc été installés dans le Camp retranché au fur et à mesure de l’avancement et de l’évolution du centre et de la constitution de la garnison. Le Camp retranché de Diên Biên Phu n’a pas été organisé de manière aléatoire ni uniquement dicté par les réalités du terrain. Les différentes étapes de sa mise en place à partir de janvier 1954 et jusqu’au déclenchement de la bataille, ont relevé de décisions prises à l’échelon des FTNV, et d’adaptations conjoncturelles.

Le Camp retranché de Diên Biên Phu s’organise en trois grands secteurs géographiques : le secteur Nord, le secteur Centre et le secteur Sud ; chacun d’eux a son propre Etat-Major et est responsable directement d’une zone géographique bien précise regroupant plusieurs Centres de résistance, intégrant les différents Points d’appui sur lesquels sont stationnées les unités. Le site même est traversé du nord au sud par la piste Pavie, qui rejoint au sud du PC Gono, la RP 41. Ces deux axes routiers principaux relient le PC aux installations périphériques que sont les différents Centres de résistance32. Ces Centres de

résistance et Point d’appui sont organisés, pour la plupart, en fonction du relief : ils sont adossés ou posés sur des collines, et ils surplombent et protègent les axes stratégiques et vitaux du Camp retranché.

Le Camp retranché est donc d’abord organisé, dans son secteur central, autour du PC Gono, le centre décisionnel, concentrant à la fois des hommes et des services. Autour du PC du colonel de Castries, situés au bout de la piste d’aviation et au bord de la rivière Nam Youm, sont organisés les Centres de résistance « Huguette » qui domine la piste d’aviation à l’ouest, face aux « Dominique » à l’est, puis « Claudine » et « Eliane », encadrant le PC de Castries respectivement au sud-ouest et sud-est. « Françoise » est un petit avant-poste à l’ouest, construit sur le village abandonné de Ban Cong Na, à 500 mètres à peine de

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« Claudine ». Un peu plus vers le nord-est, sur la RP 41, a été créé le Centre de résistance « Béatrice ». Les unités combattantes de Légion et tirailleurs sont placées sur les différents Points d’appui. Les soldats des unités stationnées dans cet espace central, sont majoritairement issus d’unités non combattantes, des divers détachements d’unités affectés au PC Gono, et d’unités de réserves. Effectifs auquel il faut ajouter quelques 2 440 Prisonniers et Internés Militaires (PIM), non compris dans les effectifs, dont le rôle est de servir de coolies pour toutes les besognes possibles, mais dont le camp d’internement est bien réel, encadré de barbelés et composé de multiples tentes.

Parmi les services nécessaires à toute garnison, et présents au centre de Diên Biên Phu, se trouvent l’antenne chirurgicale, les services d’Intendance, de Poste, de Sécurité militaire, d’Essences. Ainsi chaque service est composé d’une ou plusieurs compagnies d’unités de Services ou de combat, comme le 31e Génie qui y a deux compagnies, ou l’Artillerie, avec des

compagnies de mortiers, une batterie de 105, ou encore l’escadron de chars. Il faut ajouter à ces effectifs FTNV, le détachement Air. Officiellement créé début janvier 1954, il existe de fait depuis la fin novembre 1953 avec la présence de quatre avions pour l’appui des troupes, les personnels mécaniciens, ceux du contrôle aérien et pour la création de la piste d’aviation. Ce détachement est dirigé par Yvon Chancerelle, commandant en second du groupe de chasse 1/22 Saintonge, remplacé à Diên Biên Phu par le commandant Guérin au début du mois de janvier 1954. Le tout concentré sur la rive droite de la Nam Youm, à proximité du terrain d’aviation. Au fur et à mesure de l’avancée de la bataille, les Centres de résistance et Points d’appui ont beaucoup évolué : ils ont disparus ou ont été transformés, ils ont été adaptés ou encore créés, comme « Lili » à l’ouest du secteur central, « Epervier »33 et « Junon » dans le

réduit central.

Tous les Centres de résistance sont organisés selon le même schéma : ils comprennent de manière structurelle des PC, une popote, voire plusieurs en fonction des grades, et une infirmerie. À ces installations traditionnelles, sont affectés des éléments d’unités dites combattantes. Ils forment les deux autres secteurs géographiques, Nord et Sud. Les unités combattantes sont alors regroupées sous des autorités directes différentes : les troupes parachutistes appartiennent aux GAP, Groupements aéroportés, et les tirailleurs, légionnaires

33 L’existence même de ce PA est remise en question par certains témoins qui estiment qu’il s’agit en réalité de

« Dominique 4 » qui aurait sciemment été occulté par leurs supérieurs dans leurs propres témoignages. Cette querelle a notamment opposé le Cdt Tourret, chef de bataillon du 8e Choc, au lieutenant de Sallins, chef de la 1ère

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et bataillons thaïs appartiennent à des GM, Groupes mobiles, tous répartis dans les trois grands secteurs. Le secteur Nord est composé des Centres de résistance « Anne-Marie », dominant le Centre au nord du terrain d’aviation et sur lequel est stationné au 12 mars le Bataillon Thaï n°3, et « Gabrielle » tenu par le 5e bataillon du 7e Régiment de Tirailleurs

Algériens, situé plus en périphérie en allant vers le nord par la piste Pavie. Le secteur Sud est également situé sur en bordure de rivière et le long de la RP 41, mais est éloigné de cinq kilomètres du Centre. Il est représenté par le Centre de résistance « Isabelle », précédé le long de la route, du petit centre « Marcelle », par ailleurs rapidement abandonné. Ce secteur, occupé par des bataillons de Légions, de tirailleurs, et des compagnies de supplétifs composant le Groupe Mobile n°6, fonctionne en autonomie avec son petit terrain d’aviation et du fait de son éloignement par rapport au Centre.

Finalement, Diên Biên Phu, est devenu un Camp retranché relativement étendu qui dans son organisation, ressemble à une petite ville organisée autour d’un centre-ville, le PC et secteur central. Il présente la plupart des services nécessaires à son entretien et à la vie locale. Autour de ce centre-ville s’organisent différents quartiers annexes, les Centres de résistance, bien reliés au centre, puis une banlieue périphérique, « Isabelle », elle aussi reliée à la ville centre par un axe routier principal et la rivière.