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F ONCTION DU NON VERBAL DANS LES INTERACTIONS SOCIALES

▪ I NTRODUCTION THEORIQUE

1 L E NON VERBAL DANS LES INTERACTIONS

1.3 F ONCTION DU NON VERBAL DANS LES INTERACTIONS SOCIALES

Il est difficile de dresser la liste des fonctions du non verbal dans les interactions sociales. Néanmoins, nous pouvons au départ repérer trois fonctions : une fonction de production langagière, une fonction de communication d'un message et enfin une fonction d'interaction avec autrui. A ce sujet, Ekman et Friesen (1969) parlent de décodage, d'encodage et de gestes interactifs.

Le message d'une communication est transmis dans un certain code. Ce code est un ensemble de signes et de règles de combinaison de ces signes, le destinataire y puise pour constituer son message : c'est l'encodage, et le destinataire identifie ce système de signes : c'est le décodage. Ekman et Friesen (1969) ont distingué les gestes, que leur sens soit donné par l'observateur ou le gesticulateur ou bien les deux. Cela correspond à trois types de gestes :

 Informatifs : Réfère uniquement au décodage. Cela concerne les gestes qui sont interprétés de la même manière par un ensemble d'observateurs. Un acte informatif n'est pas nécessairement transmis correctement et justement par celui qui fait le geste. Ce qui est décodé peut être tronqué, par exemple, vu au travers des stéréotypes. La signification qui est interprétée par un acte informatif varie énormément.

 Communicatifs : Contrairement aux gestes informatifs, les communicatifs concernent l'encodage des comportements. Ce sont les actes qui sont clairement et consciencieusement transmis par celui qui émet l'acte pour transmettre un message à celui qui le reçoit. Les comportements informatifs sont exclus. Les actes qui envoient des messages de manière non volontaires sont exclus de cette définition.

 Interactifs : Ce sont les actes d'une personne en interaction qui modifie ou influence le comportement interactif d'une autre personne. Tous les comportements ne sont pas interactifs, seuls ceux qui influencent ou modifient l'interaction le sont, et ils n'ont pas besoin d'être informatifs.

Ekman et Friesen (1969) ont conjugué ces trois dimensions avec le fait que les informations peuvent aller du geste idiosyncrasique (c.à.d. associé à un individu particulier) à celui qui est culturellement partagée par un grand nombre d'individus. La figure suivante illustre les relations entre ces termes (Ekman & Friesen, 1969).

Figure 2 : Relations entre différents termes (issus d'Ekman et Friesen, 1969)

Les points suivants légendent les lettres de la figure précédente :

a) Comportement informatifs : ce sont les comportements qui sont informatifs partagés mais pas communicatifs ni interactifs. Le gesticulateur ne produit pas le comportement pour adresser un message à ses interlocuteurs. Néanmoins ces comportements sont interprétés par les observateurs. De plus, tous les observateurs l'interprètent de façon identique.

b) Comportement interactifs et informatifs : l'influence sur les interactions est partagée.

c) Comportements idiosyncrasiques mais interactifs : l'influence des actes ne concerne seulement qu'un interlocuteur ou varie pour chaque interlocuteur. Par exemple, un geste du mari qui n'est compris que par sa femme et qui obtient un effet sur celle-ci.

d) Comportements interactifs mais pas communicatifs : celui qui a produit le geste n'avait pas l'intention de transmettre un message mais les observateurs en déduisent une information.

e) Comportements communicatifs mais ni interactifs ni informatifs : ce sont par exemple les gestes d'un schizophrène qui sont faits dans un but communicatif mais qui ne sont pas informatifs pour les observateurs et n'ont pas d'action sur eux.

f) Comportements à la fois communicatifs, informatifs et interactifs.

Un certain nombre de données empiriques ont mis en évidence que les interlocuteurs gesticulent, même en l'absence d'interlocuteur. Une partie des gestes produits ont une fonction propre pour le locuteur, au-delà de l'objectif de communiquer un message. Pour preuve, lorsque des locuteurs aveugles parlent, ils font autant de gestes lorsqu'ils parlent à des aveugles, que lorsque des locuteurs voyants parlent à des voyants (Iverson & Goldin-Meadow, 1998). De plus, lors de discussions, les locuteurs produisent des gestes durant 11 % du temps (Bly, 1988).

Le non verbal donne à la fois des informations sur «le vécu effectif de l'émetteur, en situation» (Abric, 2008), mais également sur la représentation qu'il se fait de lui-même. DePaulo (1992), qui a étudié l'effet du non verbal pour l'auto- présentation, a dressé la liste des nombreuses fonctions du non verbal.

1. Tout d'abord, elle souligne que le non verbal est irrépressible, c'est-à-dire qu'on ne peut pas ne rien transmettre, au mieux, on transmet une bonne impression. 2. Il est également lié à l'émotion, les liens entre expressions faciales et émotions

ont été démontrés (cf. Ekman, 1992).

3. Le comportement non verbal est confidentiel dans la mesure où les comportements non verbaux sont moins facilement reproductibles.

4. Les comportements non verbaux communiquent leur propre signification. En effet, les significations et émotions sont difficilement converties de manière adéquate sous forme de mots.

5. Le non verbal est moins accessible aux acteurs qu'aux observateurs, on a seulement accès au feedback indirect de la réaction d'autrui, qui est médiée par d'autres aspects cognitifs comme par exemple la confiance en soi.

6. Enfin, les comportements non verbaux arrivent rapidement : la réaction non verbale est immédiate. C'est pour cela qu'on lui attribue de la sincérité (Ekman, 2003), tandis que le verbal peut être davantage réfléchi et est vu comme plus "calculé", certains comportements non verbaux sont peu contrôlés. Les types de gestes se distribuent sur un continuum de contrôlabilité (Ekman & Friesen, 1969).

Les comportements non verbaux servent également de régulateurs à l'interaction entre émetteur et récepteur ; ils sont souvent des éléments essentiels du feedback nécessaire à l'efficacité de la communication. Par exemple, les regards servent à indiquer que l'autre veut prendre la parole ou qu'il s'apprête à la donner

(Kendon, 1967). D'autre part ils jouent un rôle de complément par rapport au verbal. L'acte non verbal peut répéter, augmenter, illustrer, accentuer ou contredire le verbal ; le non verbal peut être synchronisé avec le verbal, anticipé, substitué ou suivre le comportement verbal ou bien être sans rapport (Ekman & Friesen, 1969). Ainsi le non verbal joue un rôle indéniable dans les interactions sociales. Il a différentes fonctions mais leur expression est très liée à des facteurs culturels, sociaux et personnels.