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L'obligation d'information des candidats ou soumissionnaires écartés de la

PREMIERE PARTIE

39. L'obligation d'information des candidats ou soumissionnaires écartés de la

procédure d'adjudication n'a de réel intérêt que si le candidat ou concurrent évincé est dans la capacité de faire bon usage des informations qui lui ont été transmises. En d'autres termes, il importe également que le requérant potentiel puisse bénéficier d'un certain laps de temps, d'une part, pour s'assurer de l'opportunité d'introduire son recours et, d'autre part, pour construire une argumentation solide à partir des éléments communiqués. Le délai de suspension de signature à partir de la communication de la décision d'attribution du contrat – autrement appelé délai de standstill - participe ainsi à l'effectivité et à l'efficacité du référé précontractuel.

Les directives « Recours » dans leur version originale n'évoquaient pas de délai de suspension de signature à compter de la communication de la décision d'adjudication. Les directives marchés n° 2004/18 et n° 2004/17 restaient également silencieuses sur ce point. Le silence des textes communautaires n'empêchait toutefois pas la Cour de justice des communautés européennes de considérer la nécessité d'un tel délai : « l'absence d'une

disposition expresse [relative au délai entre la décision d'attribution d'un marché et la conclusion du contrat] ne saurait justifier une interprétation de la directive 89/665 selon laquelle les décisions d'attribution des marchés publics échapperaient de façon systématique aux mesures qui, selon l'article 2, paragraphe 1, de la directive 89/665, doivent être prises aux fins des recours visés à l'article 1er »89. L'effet utile des directives « Recours » explique

qu'« un délai raisonnable doit s'écouler entre le moment où la décision d'attribution est

communiquée aux soumissionnaires évincés et la conclusion du contrat, afin de permettre, notamment, d'introduire une demande de mesures provisoires jusqu'à ladite conclusion »90.

La directive n° 2007/66/CE comble à nouveau les lacunes des directives « Recours » originales91. Les articles 2 bis, 2°, nouvellement créés dans chacune des directives « Recours »

88 Si les directives marchés distinguent trois types d'informations communiquées au concurrent évincé en fonction du stade d'avancement de la procédure de passation du contrat (candidat écarté, soumissionnaire écarté, soumissionnaire écarté ayant présenté une offre recevable), la variabilité du contenu de l'information en droit interne ne dépendra pas du stade d'avancement de la procédure, mais de la diligence du pouvoir adjudicateur dans l'accomplissement de cette formalité : dès rejet de la candidature, notification motivée devra en être faite au candidat écarté ; si cette notification n'a pas lieu dans un temps relativement proche de la prise de décision mais en fin de procédure, la notification deviendra intégrale à l'instar de celle du soumissionnaire dont l'offre n'a pas été retenue, indépendamment de toute distinction quant à sa recevabilité ou non. V. DELALOY Guillaume, « L'information des candidats évincés : une étape à ne pas manquer »,

in CJFI, n° 61, p. 199 et s., spéc. p. 200.

89 CJCE, 28 octobre 1999, Alcatel Austria AG e.a., Siemens AG Österreich, Sag-Schrack Anlagentechnik AG et Bundesministerium für Wissenschaft und Verkehr, aff. C-81/98, Rec. p. I-7671, pt. 40.

90 CJCE, 24 juin 2004, Commission contre Autriche, préc., pt. 23 ; confirmé par CJCE, 3 avril 2008, Commission contre Espagne, préc., pt. 39.

disposent désormais que « la conclusion du contrat qui suit la décision d'attribution d'un

marché relevant du champ d'application de la directive 2004/18/CE [directive 2004/17/CE] ne peut avoir lieu avant l'expiration d'un délai d'au moins dix jours calendaires à compter du jour suivant la date à laquelle la décision d'attribution du marché a été envoyée aux soumissionnaires et candidats concernés si un télécopieur ou un moyen électronique est utilisé ou, si d'autres moyens de communication sont utilisés, avant l'expiration d'un délai d'au moins quinze jours calendaires à compter du lendemain du jour où la décision d'attribution du marché est envoyée aux soumissionnaires et candidats concernés, ou d'au moins dix jours calendaires à compter du lendemain du jour de réception de la décision d'attribution du marché »92.

Ce délai ne doit pas être trop court au risque de ne pas assurer au requérant potentiel un droit au recours effectif93. A l'inverse, ce délai ne doit pas non plus être trop long, dans la

mesure où le temps de la signature du contrat est d'autant plus repoussé ce qui ne manquerait pas de préjudicier à la satisfaction des missions d'intérêt général dont l'administration a la charge. Le Code des marchés publics de 2006, dans sa rédaction issue du décret du 27 novembre 2009, chiffre ce délai de standstill94 dans son article 80-I-1° aux termes duquel « un délai d'au moins seize jours est respecté entre la date d'envoi de la notification prévue aux alinéas précédents et la date de conclusion du marché. Ce délai est réduit à au moins onze jours en cas de transmission électronique de la notification à l'ensemble des candidats intéressés. La notification de l'attribution du marché ou de l'accord-cadre comporte l'indication de la durée du délai de suspension que le pouvoir adjudicateur s'impose, eu égard notamment au mode de transmission retenu »95.

92 Ce principe souffre néanmoins d'exceptions limitativement énumérées à l'article 2 ter, alinéa 1er. Les États membres peuvent, en effet, prévoir que les délais précédemment visés ne s'appliquent pas dans trois cas : lorsque une des directives « marchés » n'impose pas la publication préalable d'un avis de marché au Journal officiel de l'Union européenne ; si le seul soumissionnaire concerné est celui auquel le marché est attribué et en l'absence de candidats concernés ; lorsqu'il s'agit d'un marché fondé sur un accord-cadre visé à l'article 32 de la directive n° 2004/18/CE et lorsqu'il s'agit d'un marché spécifique fondé sur un système d'acquisition dynamique.

93 Avant le Code des marchés publics 2001, l'information des candidats évincés n'était soumise à un quelconque délai et quand bien même un texte spécial prescrivait un tel délai, sa méconnaissance ne rendait pas les décisions prises par l'autorité compétente illégales. V. en ce sens : CE, 7 juillet 1967, OPHLM de la ville du Mans, req. n° 63219. La jurisprudence administrative a, par la suite, admis qu'un délai raisonnable d'information des candidats évincés devait être respecté en vertu de la garantie substantielle que constitue l'accès au juge. V. en ce sens : CAA Bordeaux, 14 février 2006, Syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable du Confolentais, confirmé par CE, 19 décembre 2007, Syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable du Confolentais, req. n° 291487, T., p. 939.

94 Dont la computation se fait de date à date : CE, 2 août 2011, Société Clean Garden, req. n° 347526.

95 Sous réserve des exceptions envisagées par les directives « Recours » et transposées dans le Code des marchés publics à l'article 80-I-2°. V. CE, 1er juin 2011, Société Koné, req. n° 346405, Rec. p. 266 et le Décret n° 2011-1000 du 25 août 2011 modifiant certaines dispositions applicables aux marchés et contrats relevant de la commande publique, JORF n° 197 du 26 août 2011, p. 14453, art. 24.