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Partie I Fondements 29

C. Transfert de technologie comme règlement de litige

V. Transfert de technologie international

Les aspects internationaux du transfert de technologie font l’objet de développements spécifiques. Dans l’une des premières études importantes sur la question, WILSON

constate que les entreprises transfèrent davantage leurs technologies au plan interna-tional que nainterna-tional. Toutefois, l’analyse ne se concentre pas sur les motivations de cette pratique. L’auteur se contente de la justifier a contrario par les dangers qu’encourent les entreprises lorsqu’elles concèdent des innovations sur leurs propres marchés258.

Les entreprises recourent aux contrats internationaux de licence lorsqu’il leur est im-possible de s’implanter sur le territoire visé en raison des coûts et risques élevés qu’une telle opération implique. En d’autres termes, le transfert de technologie inter-national vise à accroître géographiquement l’activité d’une entreprise. L’importance des coûts et risques est liée aux facteurs suivants : coûts de communication et trans-ports, barrières de la langue, aspects douaniers, mauvaises connaissances des pra-tiques commerciales locales, manque de réseau politique. Dans ce cadre, le recours au marché permet de mettre en commun des actifs complémentaires. D’une part, le don-neur fournit la technologie, d’autre part, le predon-neur apporte ses connaissances du con-texte local259.

§ 4 Synthèse

En substance, une technologie se définit comme un ensemble d’informations qui per-met la fabrication de produits. Une innovation technologique désigne, quant à elle, un ensemble d’informations qui permet la fabrication de produits nouveaux ou amélio-rés.

257 SHAPIRO (2003), p. 392.

258 WILSON (1977).

259 ARORA/FOSFURI/GAMBARDELLA (2001), p. 175. De manière plus générale sur les accords internationaux, cf. DUSSAUGE/GARRETTE (1999), p. 71 ss. Les entreprises communes sont souvent préférées aux simples contrats de licence dans ces cas, car elles permettent à l’entreprise qui détient la technolo-gie de contrôler sa diffusion. On relèvera, par ailleurs, que l’efficacité des droits de propriété intel-lectuelle ne constitue pas un critère déterminant dans le choix d’opérer au plan international. Cf.

FOSFURI (2004).

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La mise au point de technologies est le fruit d’activités de recherche et développe-ments, qui sont coûteuses et requièrent des compétences très spécialisées. Il ne faut toutefois pas négliger que les capacités nécessaires à la fabrication et la distribution des produits incorporant les technologies n’en sont pas moins spécifiques. On les qua-lifie d’ailleurs d’actifs complémentaires spécialisés.

Les industries basées sur les technologies présentent des structures particulières – ce qui doit impérativement être pris en compte dans le cadre de l’analyse concurrentielle –, ne serait-ce qu’en raison des cycles de vie des produits extrêmement courts et de la présence de nombreux droits de propriété intellectuelle. Par ailleurs, la présence d’innovations technologiques modifie drastiquement la nature de la concurrence entre les acteurs sur le marché : elle est acharnée et orientée essentiellement vers la mise au point de nouvelles technologies (et moins vers la réduction des prix).

Bien que cela puisse paraître paradoxal avec la concurrence acharnée mentionnée ci-dessus, les accords de transfert de technologie et les autres formes de coopération sont des pratiques courantes en présence d’innovation. Cela résulte de la spécialisation croissante des compétences. En ce qui concerne plus spécifiquement le transfert de technologie (essentiellement sous la forme de licences croisées), on relèvera qu’il joue également un rôle crucial dans le contexte actuel de la prolifération des droits de pro-priété intellectuelle, car il permet l’exploitation de technologies sans risque de viola-tion des droits appartenant aux entreprises tierces.

L’objet de ce deuxième chapitre est de présenter les principes qui sous-tendent la ré-glementation sur le transfert de technologie et, dans une certaine mesure également, les règles applicables aux autres catégories d’accords. Pour ce faire, il convient de re-venir aux fondements de la politique de la concurrence non seulement communau-taire, mais également américaine260.

Les principes à la base de la réglementation en vigueur peuvent être traités sous trois angles :

- La réglementation doit d’abord être abordée au regard des objectifs poursuivis par la politique communautaire de la concurrence (II).

- Ensuite, le Règl. n° 772/2004 et les Lignes directrices TT doivent être examinés en tenant compte de l’approche moderne concernant la relation entre la poli-tique de la concurrence et la propriété intellectuelle (III).

- Enfin, les nouvelles dispositions doivent être appréciées dans le processus de modernisation ou d’ « économisation » du droit de la concurrence (more eco-nomic approach) (IV).

La théorie économique joue un rôle prépondérant dans l’ensemble de cette probléma-tique. Il convient, par conséquent, d’introduire ce chapitre en présentant quelques éléments fondamentaux de théorie économique, en particulier sur la relation qu’entretiennent l’innovation, la propriété intellectuelle et la concurrence (I).

§ 1 Quelques fondements économiques

I. Innovation et bien-être social

L’économiste SCHUMPETER a, le premier, mis en exergue la composante positive de l’innovation261, ou efficience dynamique (long-run technological efficiency), en tant que changement créatif et utile. Jusque dans les années 1940, l’innovation avait une conno-tation négative en raison des bouleversements dont elle était la cause. Au travers de la

260 COMBE (2005), p. 27, rappelle la difficulté de coordonner la politique de la concurrence et les autres instruments réglementaires tels que la politique industrielle, la politique commerciale ou la politique technologique.

261 L’innovation signifie ici l’introduction sur le marché de nouveaux produits, de nouvelles technologies, de nouvelles sources d’approvisionnements ou de nouveaux types d’organisations.

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notion de « création destructrice », SCHUMPETER est parvenu à concilier les deux com-posantes a priori contradictoires de l’innovation262, ce qui peut se résumer ainsi :

« Les entreprises créatrices mettent au point de nouveaux produits ou de meil-leures technologies qui entrent dans l’économie, mais cela contribue à détruire les entreprises stagnantes » 263.

Dans les années 1950, le prix Nobel d’économie SOLOW a démontré que l’innovation technologique est le principal facteur de croissance économique264. L’observation de l’évolution économique durant les dernières décennies fait largement écho à ce prin-cipe265 :

- Au stade macroéconomique, les Etats qui ont favorisé l’innovation ont connu davantage de croissance que les autres.

- Au stade microéconomique, les entreprises qui investissent massivement en recherche et développement obtiennent les meilleurs résultats.

A l’heure actuelle, deux défis majeurs relatifs au concept d’innovation se présentent.

Premièrement, il est difficile de déterminer ce qui favorise l’innovation. La question est particulièrement délicate en raison de ses multiples « déterminants »266. Deuxiè-mement, il semble impossible de quantifier l’innovation. Cela complique l’appréciation des déterminants du progrès technologique267.

L’Union européenne a pris conscience du fait que l’innovation technologique consti-tue le moteur de la croissance économique. La stratégie de Lisbonne, lancée pendant le Conseil européen de Lisbonne en 2000, en est la confirmation. En substance, elle prévoit que l’Union européenne devienne l’économie la plus compétitive au monde grâce au développement de la société de l’information268.

Historiquement, l’innovation en Europe provient essentiellement du secteur pharma-ceutique, dont elle est considérée comme le berceau. Ce territoire s’est longtemps

262 SCHUMPETER (1942), p. 81 ss. Cf. également MASON (1951).

263 MORCK/YEUNG (2001), p. 1.

264 SOLOW (1957).

265 MORCK/YEUNG (2001), p. 5 ss.

266 MORCK/YEUNG (2001). Les facteurs qui favorisent l’innovation vont bien au-delà de la mise en place d’un système de droits de propriété intellectuelle. Une politique fiscale adéquate ainsi que la créa-tion de parcs technologiques, tels que la Silicon Valley, s’avèrent également indispensables.

267 MORCK/YEUNG (2001), p. 3 ss, mentionnent trois critères de mesure de l’innovation : les dépenses en recherche et développement, le nombre de brevets et le décompte des innovations.

268 Un résumé de la stratégie est disponible à l’adresse internet http://europa.eu/ scad-plus/glossary/lisbon_strategy_fr.htm. La stratégie contient également un pillier social et un pillier environnemental.

53 marqué par la présence des entreprises pharmaceutiques les plus importantes et, en conséquence, par un fort taux d’innovation.

Durant les années 1990, l’industrie pharmaceutique européenne s’est mise à décliner au profit de l’industrie américaine. Cette tendance est clairement établie à l’heure ac-tuelle269. L’explication principale de ce phénomène réside dans le fait que l’industrie européenne a manqué le virage biotechnologique. En d’autres termes, le Vieux conti-nent n’a pas connu l’émergence d’un réseau de NTBFs. Deux éléments doivent être relevés à ce propos270 :

- Les multinationales européennes n’ont pas pu s’appuyer sur les innovations d’entreprises spécialisées dans les sciences de la vie pour mettre au point de nouveaux médicaments271.

- Les NTBFs forment en soi une nouvelle industrie avec un fort potentiel de croissance. Le fait que l’Europe ne possède pas un tel réseau d’entreprises lui est directement préjudiciable.

Le secteur européen des TIC semble plus dynamique que celui des produits pharma-ceutiques272. A ce propos, on mentionnera la stratégie i2010 qui a pour objectif la créa-tion d’un cadre de politique publique destiné notamment à améliorer l’innovacréa-tion en matière de technologies de l’information273.

269 Ce problème est ouvertement reconnu par les autorités communautaires. Elles relèvent qu’il est particulièrement significatif compte tenu de l’emploi et des revenus que l’industrie pharmaceutique génère pour l’économie communautaire. Cf. le document intitulé future Post G-10/Pharmaceutical strategy (http://ec.europa.eu/enterprise/phabiocom/docs/20050601_speech-05-311_en_1_.pdf).

270 GAMBARDELLA/ORSENIGO/PAMMOLLI (2000), p. 6 ss.

271 Cela n’est pas en soi un problème aussi longtemps que les entreprises européennes peuvent s’appuyer sur les NTBFs américaines. On mentionnera par exemple le célèbre achat de Genentech par Roche. Cf. CHANDLER (2005), p. 267 s.

272 Une excellente vision globale est fournie sur le site de la Commission CE, à l’adresse internet http://ec.europa.eu/information_society/tl/policy/index_fr.htm.

273 La stratégie i2010 est très bien présentée à l’adresse internet http://ec.europa.eu/ informa-tion_society/eeurope/i2010/index_en.htm.

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II. Propriété intellectuelle et innovation

A. Principes théoriques

1. Objectif d’efficience dynamique

Bien qu’on lui reconnaisse d’autres fonctions274, le système de la propriété intellec-tuelle – plus particulièrement celui des brevets – vise essentiellement à favoriser l’innovation technologique275 ou, en termes techniques, l’efficience dynamique276. Par la délivrance de droits exclusifs aux inventeurs, la propriété intellectuelle apporte une solution au problème de non-exclusivité que présente l’innovation en tant qu’information277. La nature immatérielle de l’information a pour conséquence qu’il est impossible pour l’inventeur d’empêcher des tiers d’exploiter l’information, bien qu’ils n’aient pas participé à sa mise au point (free-riding), ce qui réduit l’incitation à innover des entreprises. La propriété intellectuelle confère aux innovations un carac-tère exclusif et préserve ainsi l’incitation à innover.

La propriété intellectuelle s’efforce de favoriser l’efficience dynamique au moindre coût social. L’information étant de nature non-rivale (public good)278, le bien-être social est maximisé si l’ensemble des entreprises qui souhaitent exploiter l’innovation est libre de le faire. La délivrance de droits de durée limitée ne restreignant que durant la période de validité desdits droits l’accès à l’innovation, la technologie est ensuite ex-ploitée de manière optimale.

274 Les autres fonctions ne sont pas économiques. Sur les différentes fonctions, cf. FIALA (2006), p. 3 ss.

275 LEVEQUE/MENIERE (2004), p. 4 ss, qui offrent du reste une excellente approche globale du système de la propriété intellectuelle d’un point de vue économique. cf. également COOTER/ULEN (2008), p. 120 ss, et LANDES/POSNER (2003). En ce qui concerne les secrets d’affaires, cf. FRIEDMAN/LANDES/POSNER

(1991). Pour le droit d’auteur, cf. LANDES/POSNER (1989). Pour une approche du droit des marques, cf. LANDES/POSNER (1987). Les fondements économiques relatifs au droit d’auteur sur logiciel restent incertains. Cela ressort implicitement de la contribution de LEVEQUE/MENIERE (2004), p. 79 ss. On re-lèvera qu’aux Etats-Unis, les logiciels font toujours plus l’objet de brevets et que cette solution sou-lève énormément de questions. Cf. par exemple COHEN/LEMLEY (2001) et BESSEN/HUNT (2007).

276 L’efficience dynamique fait référence au bien-être social à long terme par le biais de l’innovation. Au contraire, la réalisation de l’efficience statique signifie que les ressources sont parfaitement allouées à court terme.

277 On doit à ARROW (1962) les premières théories sur l’économie de l’information. DREXL (2008), p. 19 ss, précise que le droit de la propriété intellectuelle ne vise pas la création d’un pouvoir de marché qualifié mais un pouvoir de marché suffisant, c’est-à-dire un pouvoir qui permette de commercialiser des produits sur la base de la technologie.

278 La non-rivalité signifie que la quantité disponible d’un bien ne diminue pas en fonction du nombre d’utilisateurs.

55 LEVEQUE/MENIERE résument ainsi la tension qui est à la base du système de la pro-priété intellectuelle :

« Intellectual property law thus attemps to strike a balance between the incentive to create and innovate, and the diffusion of the results obtained. This contradiction between incen-tive and use translates into economic language as a trade-off between dynamic and static efficiency »279.

En plus de la concession de droits exclusifs, il est important de souligner que le sys-tème de la propriété intellectuelle favorise l’innovation dérivée ou cumulative par l’obligation imposée aux inventeurs de révéler le contenu de leurs innovations. Sur la base des informations publiées, toute entreprise peut améliorer la technologie exis-tante280.

2. Durée et étendue des brevets

Deux paramètres sont déterminants dans la mise au point d’un système de brevets optimal, i.e. qui réduit au minimum le bien-être social tout en favorisant l’innovation : la durée (patent length) et l’étendue des brevets (patent breadth). Plus récemment, il a été relevé que ces paramètres doivent être appréciés à la lumière de la nature cumula-tive de l’innovation (cumulacumula-tive innovation).

Les brevets doivent être délivrés pour une durée permettant à l’inventeur de couvrir ses dépenses en recherche et développement afin qu’il soit incité à innover. Au-delà de cette période, l’effet des brevets est négatif. Par l’exclusivité qu’ils confèrent, ils permettent à l’inventeur de fixer des prix au-dessus de ceux du marché sans que cela ne soit plus justifié. C’est pourquoi les brevets doivent être limités dans le temps. La durée fixée dans la grande majorité des ordres juridiques se situe entre quinze et vingt ans.

Le système prévoyant une uniformité de durée des brevets a été affiné afin de tenir compte des réalités économiques variées qui sous-tendent les diverses innovations.

Par exemple, la mise au point d’un nouveau médicament se révèle être plus longue et plus coûteuse que celle d’un appareil ménager. Ainsi, la plupart des ordres juridiques connaissent un mécanisme de renouvellement des brevets. Le détenteur du brevet doit verser des taxes au terme de chaque période de cinq ans (jusqu’à l’échéance de la durée de vingt ans) afin que son droit soit renouvelé281.

Compte tenu des coûts faramineux liés à la mise au point de médicaments ainsi que du laps de temps entre la délivrance du brevet et l’autorisation de mise sur le marché,

279 LEVEQUE/MENIERE (2004), p. 5.

280 GALLINI (2002), p. 132.

281 CORNELLI/SCHANKERMAN (1999); LEVEQUE/MENIERE (2004), p. 29.

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les détenteurs de brevets sur des médicaments peuvent obtenir une prolongation de la durée de leur droit de cinq ans. La durée totale est par conséquent de vingt-cinq ans. Le droit supplémentaire de cinq ans est dénommé certificat complémentaire pour produits pharmaceutiques282.

La notion d’étendue du brevet est synonyme de portée du droit conféré par le brevet.

En d’autres termes, l’étendue du brevet détermine dans quelle mesure le détenteur du brevet peut interdire aux tiers l’utilisation de l’invention. Cela s’effectue par une liste de revendications (claims), c’est-à-dire d’applications industrielles attachées à l’exploitation du brevet, étant précisé que chaque revendication peut en soi être plus ou moins large283.

L’étendue du brevet se mesure en fonction des possibilités d’imitation des tiers.

L’imitation est définie comme le fait de mettre au point une technologie substituable à celle qui fait l’objet du droit de propriété intellectuelle, sans pour autant le violer. A ce propos, on parle généralement de possibilité pour les tiers de contourner le brevet (to invent around the patent) 284.

Plus un brevet est large, plus il confère de pouvoir à son détenteur. Par conséquent, la délivrance de brevets larges augmente l’incitation à innover. Compte tenu du principe selon lequel le système des brevets doit être aménagé pour favoriser l’innovation au moindre coût social, la délicate question se pose de savoir quelle est l’étendue opti-male des brevets. Ce paramètre doit du reste être apprécié en fonction de celui de la durée des brevets. La question est âprement débattue en théorie économique285. Une partie des auteurs défend un système de brevets étroits de longue durée, au mo-tif qu’un brevet large porte davantage atteinte au bien-être social qu’un brevet de longue durée286. D’autres soutiennent qu’il est préférable de concéder des brevets larges de courte durée287.

282 Cf. infra Partie II, Chap. 1, § 2, II.A.

283 La durée du brevet est fixée par la loi et ne requiert aucune appréciation. Au contraire, l’étendue du brevet dépend des autorités qui délivrent le droit et, en cas de litige, des tribunaux. Ce paramètre est par conséquent sujet à d’importantes variations, Cf. LEVEQUE/MENIERE (2004), p. 30, qui précisent par ailleurs que la notion d’étendue du brevet n’est pas une notion juridique.

284 GALLINI (1992). On relèvera que certaines imitations donnent lieu à des technologies plus performantes.

285 LEVEQUE/MENIERE (2004), p. 32.

286 GILBERT/SHAPIRO (1990). Cf. également KLEMPERER (1990).

287 GALLINI (1992). Selon cet auteur, des brevets étroits de longue durée encouragent les entreprises concurrentes à contourner le brevet. Ainsi, le droit de propriété intellectuelle est inutile et ne favo-rise pas l’innovation.

57 Prenant en considération la possibilité du détenteur de brevet de concéder sa techno-logie sous licence, MAURER/SCOTCHMER défendent un système de brevets étroits de longue durée288 :

- Premièrement, la concession de licences aux entreprises qui essaient de con-tourner le brevet rapporte au détenteur de droits de propriété intellectuelle des redevances. Cela l’incite à innover indépendamment du fait que l’exclusivité conférée par son droit ne soit que guère effective.

- Deuxièmement, ce système présente l’avantage, sous l’angle du bien-être so-cial, de la création d’une concurrence sur le marché de produits. En outre, une duplication des dépenses en recherche et développement est évitée.

La problématique de la durée et de l’étendue optimales des brevets acquiert une nou-velle dimension lorsqu’on considère que la propriété intellectuelle doit favoriser l’innovation cumulative. D’une part, la délivrance de larges brevets réduit l’incitation à innover des entreprises susceptibles de mettre au point des innovations dérivées car le risque de violer le brevet de base est élevé. D’autre part, la délivrance de brevets étroits permettant à d’autres entreprises de développer des innovations dérivées sans violer les brevets de base risque de supprimer toute mise au point d’innovations de base289.

Force est d’admettre qu’à l’heure actuelle, la théorie économique n’est pas parvenue à déterminer quelle est l’étendue optimale des brevets, en particulier si on considère la nature cumulative de l’innovation dans les industries dynamiques290.

B. Renforcement des brevets dans la pratique

1. Solution largement adoptée

Durant les vingt dernières années, la tendance dans les pays de l’OCDE a été de ren-forcer le système des brevets afin de garantir l’innovation. Le renforcement a été effec-tué au moyen de plusieurs actions, parmi lesquelles la brevetabilité d’innovations

288 MAURER/SCOTCHMER (1998).

289 MERGES/NELSON (1990) sont favorables à un système de brevets de base étroits. CHANG (1995) sou-tient la délivrance de brevets de base larges afin de garantir les innovations de base, indépendam-ment du fait qu’elles aient une valeur intrinsèque. Par la prise en considération de nombreux fac-teurs, GREEN/SCOTCHMER (1995) parviennent à des conclusions plus nuancées. On regrettera cepen-dant le manque de clarté dans leurs conclusions.

290 LEVEQUE/MENIERE (2004), p. 41. On relèvera encore qu’une protection trop forte a l’effet pervers d’engendrer une « course au brevet ». Cf. LEVEQUE/MENIERE (2004), p. 23 ss.

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dans de nouveaux domaines291, l’extension de l’étendue des droits ou encore l’amélioration des autorités et tribunaux spécialisés dans ce domaine292.

Dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, l’Union européenne s’apprête à poursuivre sur cette voie. L’accent est essentiellement mis sur la création d’un brevet unique pour

Dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, l’Union européenne s’apprête à poursuivre sur cette voie. L’accent est essentiellement mis sur la création d’un brevet unique pour