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Nominalisation et désignation in situ

2. Désignation in situ dans le contexte à émetteur particulier

2.4. Désignation in situ dans l’espace perceptif imaginaire

2.4.3. Nominalisation et désignation in situ

La nominalisation est déjà largement traitée dans LEFEUVRE (1999, 2004a) et LEFEUVRE et NICOLAS (2004) dans le cadre de la phrase existentielle. Certes, les nominalisations sont relativement nombreuses parmi les séquences nominales syntaxiquement autonomes à l’écrit. Elles servent à décrire un événement, une activité ou un état dans le récit.

En ce qui concerne le pointage, la nominalisation peut s’analyser de manière corollaire à celle de la description d’une perception que nous venons d’aborder. Ainsi, les séquences nominales composées à partir d’une nominalisation, et aussi les séquences nominales dénotant un événement, une activité ou un état, peuvent se classer en deux.

L’une des deux classes correspond à la description d’une occurrence de perception auprès du personnage comme :

Tenez, par exemple, cet horloger Joly. Il avait été sergent au régiment de Flandre ; il se fait chef vendéen ; il commande une bande de la côte ; il a un fils, qui est républicain, et, pendant que le père sert dans les blancs, le fils sert dans les bleus. Rencontre.

Bataille. Le père fait prisonnier son fils, et lui brûle la cervelle.

(Reprise de (74))

et l’autre à la description d’une scène (à l’intérieur de laquelle il y a une division) comme :

Très remarqué lors de la dernière Documenta de Kassel, cet artiste indien explore la limite entre Pakistan et Inde dans une œuvre mêlant autobiographie et documentaire. Valse solennelle des

PREMIERE PARTIE Ch. VI Désignation in situ et énoncés nominaux en français écrit

gardes so british, passage incessant des marchandises...

(Le Monde.fr,

http://abonnes.lemonde.fr/cgi-bin/ACHATS/ARCHIVES/archives.

cgi?ID=452f3a2587416a923aeaed9af15bca38d23a7bc521d8bee8)

Le premier cas (85) décrit une occurrence événementielle, il s’agit donc de description dynamique, et le dernier (86) décrit une scène, c’est plutôt une description stative.

Dans le premier cas, nous avons des occurrences au trait télique et dans le dernier, des occurrences au trait atélique. Concernant cette distinction télique / atélique172 à propos des énoncés nominaux, nous renvoyons surtout aux travaux de et LEFEUVRE et NICOLAS (2004) et.

le caractère télique ou atélique d’une phrase nominale existentielle dépend non seulement du type de nom utilisé, mais aussi de facteurs syntaxiques (circonstant, complément, adjectif et déterminant du nom) voire contextuels (l’énoncé précédent)173

D’abord « Rencontre » en (85). Par son sémantisme, il renvoie à une occurrence télique.

Comme, dans ce contexte, ce mot signifie un contact fortuit, il n’accepte pas le complément « pendant X temps » compatible avec le trait atélique, alors qu’il accepte le complément « en temps » au sens de « au bout de X temps » compatible avec le trait télique ponctuel174. Ce que signifie que nous avons affaire à une occurrence télique. En revanche la séquence nominale « Bataille » dénote par son sémantisme une occurrence atélique, car nous pouvons dire « bataille pendant une journée » par exemple. Mais ici le contexte lui donne le caractère télique. Cela peut se confirmer, comme le dit LEFEUVRE (2004a) et LEFEUVRE et NICOLAS (2004), parce qu’ici la lecture en

172 Cf. BEAUSEROY (2009) ; HEYDE & KNITTEL (2009).

173 LEFEUVRE et NICOLAS, 2004 : 1-2.

174 BEAUSEROY, 2009 : 50.

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succession est préférée. Ici, l’occurrence de « rencontre » et celle de « bataille » ne peuvent pas être prises comme concomitantes. De plus, l’occurrence télique qui précède

« bataille » marque l’entrée de « bataille », donc lui donne le caractère télique. Ainsi, ces deux séquences nominales désignent toutes les deux une occurrence télique. Il s’agit ici de la description d’une occurrence télique d’un événement ou d’une activité. Ces entités désignées par la séquence nominale sont chacune « pointées » par le narrateur.

Dans ce sens, leur enchaînement n’est pas sollicité concernant la désignation in situ.

Nous pouvons donc n’avoir que la séquence nominale « Rencontre » :

(85’) Il avait été sergent au régiment de Flandre ; il se fait chef vendéen ; il commande une bande de la côte ; il a un fils, qui est républicain, et, pendant que le père sert dans les blancs, le fils sert dans les bleus.

Rencontre. Le père fait prisonnier son fils, et lui brûle la cervelle.

Par contre il est difficile d’avoir « bataille », mais cela parce que c’est justement l’enchaînement qui lui donne le trait télique. L’enchaînement n’est directement pas concerné par le pointage.

En (86), nous n’avons que des occurrences atéliques ; la séquence « valse » dénote une activité, compatible avec le complément « pendant 30 minutes », et de même pour la séquence « passage » que l’adjectif « incessant » lui donne le trait atélique. De plus, la lecture des deux séquences penche plutôt vers celle de concomitance. Il s’agit de la description d’une scène. L’enchaînement joue ici pour la désignation in situ. En effet, la suppression de la séquence nominale qui suit, rend la séquence « Valse… » moins naturelle :

(86’) Très remarqué lors de la dernière Documenta de Kassel, cet artiste indien explore la limite entre Pakistan et Inde dans une œuvre mêlant autobiographie et documentaire. ?Valse solennelle des gardes so british.

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Identiquement au cas précédent de la description d’une scène faite à partir du personnage, c’est dans un enchaînement que les occurrences de chaque entité se distinguent l’une de l’autre ; les entités désignées par la séquence nominale sont

« pointées » par le narrateur comme une parmi les autres.