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Le féminisme tunströmien

III. La quête de l’Autre

2. Les moyens pour atteindre l’Autre

2. Les moyens pour atteindre l’Autre

On a besoin d’outils pour pouvoir s’approcher à tâtons de ce qui brille et bouge, autant à l’extérieur qu’à l’intérieur de nous-mêmes.1

Pour trouver l’Autre, il existe différents moyens, ou outils pour reprendre le mot de Tunström dans la citation ci-dessus. Selon Freud, il existe trois moyens d’échapper au

1

L’Oratorio de Noël, p. 239.

2 « låta sina sinnen ligga i träda » Under tiden, p. 126.

3 Nancy HUSTON, Préface d’Un prosateur à New York, p. 12.

4 Stina HAMMAR, Duets torg, p. 276.

5

malheur : « de puissantes diversions », qui nous font oublier le malheur, comme par exemple le travail scientifique, « des satisfactions substitutives », qui diminuent la misère, comme l’art, et « des stupéfiants », qui nous rendent insensibles.2 Freud énumère les différentes méthodes pour augmenter le bonheur, mais constate aussi leurs faiblesses.3 Malgré l’insuffisance de celles-ci, l’homme doit tout tenter pour trouver le bonheur : « Le programme que nous impose le principe de plaisir, devenir heureux, ne peut être accompli, et pourtant il n’est pas permis - non, il n’est pas possible - d’abandonner nos efforts pour le rapprocher d’une façon ou d’une autre de son accomplissement. [...] Sur aucune de ces voies nous ne pouvons atteindre tout ce que nous désirons. [...] Il n’y a pas ici de conseil qui vaille pour tous ; chacun doit essayer de voir lui-même de quelle façon particulière il peut trouver la béatitude. »4 De la même manière, beaucoup de personnages de Tunström essaient de donner un but à leur vie et de trouver cet Autre qui les rendra heureux. Ce que cela implique, de façon concrète, comme comportement varie d’une personne à une autre. Un homme peut employer plusieurs moyens en même temps ou l’un après l’autre. Si une voie ne conduit nulle part, peut-être qu’une autre mènera au but. Il se peut aussi qu’une première tentative donne le fondement nécessaire pour ensuite en entamer une autre.

Constatons d’abord l’influence probable de Charles Baudelaire (1821-1867), avant d’analyser les moyens utilisés par les personnages de Tunström, leur efficacité et leurs faiblesses. Baudelaire a, dans Les Fleurs du mal (1857/1861) et dans Petits poëmes en

prose (1869), également tenté différentes voies pour échapper au mal et au spleen.5

Nous trouvons à plusieurs reprises des références et des allusions à cet écrivain dans l’œuvre de Tunström, par exemple dans Le Livre d’or des gens de Sunne : « J’écris d’un pays très calme pour adresser mes remerciements. Le luxe, la jouissance et la paix règnent ici. »6 Et lorsque Jacob quitte Sunne pour chercher son propre monde, il

1

De Planète en planète, p. 807.

2 Sigmund FREUD, Le Malaise dans la culture, p. 17.

3 Ibid., p. 19-24.

4 Ibid., p. 26-27.

5

Charles BAUDELAIRE, Les Fleurs du Mal ; Petits poëmes en prose, Paris, Gallimard, 1973.

6 Le Livre d’or des gens de Sunne, p. 229-230. Voir Charles BAUDELAIRE, LIII “L’invitation au voyage”, Les Fleurs du Mal, p. 83-84.

emmène trois livres essentiels pour lui, dont un de Baudelaire. Il est probable que Tunström a connu l’auteur français grâce à Ivan Aguéli (1869-1927). Il écrit dans Partir

en hiver que le livre qu’il estime le plus est Ivan Aguéli. L’homme - le mystique - le peintre (1940/1941), une biographie écrite par Axel Gauffin, et qu’il appelle « la saga

du Graal version moderne ».1 Selon Gauffin, ce peintre était un aventurier toujours en quête de la lumière et qui voyait « sans cesse cet Autre » dans l’existence.2 Le livre de Gauffin nous apprend que l’artiste s’intéressait aux théories de Swedenborg3

et de Baudelaire sur les correspondances. Le poème “Correspondances” de ce dernier est traduit en suédois dans la bibliographie. Baudelaire présente le poète comme un médiateur entre la nature et les hommes.4 L’auteur distingue deux plans de la réalité : le naturel (la matière, ce qui est apparent) et le spirituel (la réalité profonde, ce qui n’est pas apparent). Le poète interprète les symboles pour appréhender la réalité supérieure. Les correspondances donnent accès à une connaissance mystique du monde qui apporte le bonheur puisqu’elle est capable de lier l’expérience sensible et l’expérience spirituelle. Ces « correspondances sacrées » qui permettent de relier le visible et l’invisible sont, comme nous l’avons constaté, tout aussi importantes dans l’œuvre de Tunström.5 Les points communs entre les deux auteurs sont nombreux6, mais ce qui nous intéresse ici est la notion de l’Autre et les outils pour l’atteindre. Le spleen est chez Baudelaire le sentiment d’un mal inconnu, qui est causé avant tout par l’impossibilité d’atteindre l’idéal et c’est aussi la menace que fait planer le temps qui rapproche sans cesse l’homme de la mort. L’homme frappé par le spleen se trouve dans un état d’ennui et de mélancolie. Le poète désire, par conséquent, retrouver l’idéal, qu’il ne peut atteindre parce qu’il est emprisonné dans la vie réelle. Cet idéal correspond à l’Autre, au sacré, chez Tunström, car il est divin, parfait et pur, et ressemble à un paradis perdu. Nous avons évoqué la quête d’un centre perdu dans la première partie de ce travail, ce qui signifie d’un point qui lie le ciel et la terre ; le spirituel et le réel. Le poète baudelairien aspire à un autre monde, parce que notre monde n’est pas sa patrie

1 Partir en hiver, p. 153.

2 Ibid., p. 154.

3 Nous reviendrons à Swedenborg dans la troisième partie, p. 320 et ss.

4 Charles BAUDELAIRE, IV “Correspondances”, Les Fleurs du Mal, p. 38.

5

Vol à Montréal, p. 159.

6 Le lien entre l’auteur et l’œuvre, la condition et le rôle du poète, le temps comme ennemi ultime de l’homme, l’adoration de la beauté et de la femme...

véritable : il y est exilé, mais il se rappelle sa vie antérieure.1 Toute recherche de l’ailleurs est aussi une évasion hors de ce monde-ci. Chez Baudelaire, la quête est d’abord un désir de retrouver le paradis perdu, puis elle devient, tout simplement, une quête pour échapper au spleen en trouvant quelque chose de nouveau, d’inconnu.2 Or chez Tunström, l’évolution est inversée. Dans les premiers romans, le but principal est d’échapper à l’ennui, tandis que la quête du sacré prend plus d’importance ultérieurement dans l’œuvre.

Résumons très brièvement les tentatives que fait le poète dans Les Fleurs du Mal pour atteindre l’ailleurs ou, au moins, pour oublier le spleen, en les comparant avec celles trouvées dans l’œuvre de Tunström. L’auteur français commence par essayer la voie de la beauté et de l’art. La première, la beauté, est une partie de l’idéal et permet donc d’oublier le mal.3

De même, l’art permet de faire pousser des fleurs partout, même sur un terrain empoisonné, comme l’indique le titre du recueil. En créant une œuvre d’art, l’artiste imite la création divine et est ainsi capable de transformer la réalité elle-même.4 Le poète tente également le voyage et le rêve, qui lui permettent de s’évader et de trouver un monde différent, un ailleurs, où règne l’harmonie.5

Il essaie ensuite de trouver l’ailleurs grâce à l’amour. Dans Les Fleurs du Mal, il y a deux facettes de celui-ci : l’amour sensuel, érotique, et l’amour pur, spirituel.6 L’amour physique est une fête des sens, mais contient aussi le mal. La femme idéalisée, qui ressemble à un ange, a la capacité de le guider vers Dieu, comme Béatrice le fait pour Dante. Après avoir essayé l’amour, le poète tente d’échapper au spleen par la communion avec ses semblables.7

Dans cette perspective, le vin est présenté comme un ami, qui fait tomber les murs de la solitude. Il rend la dignité aux hommes et il est aussi une source d’inspiration poétique. L’ivresse permet d’atteindre un monde plus beau.8

Après le vin, le poète tente de s’oublier dans la débauche.9

Puis, après cet excès infernal d’amour, il se livre au

1

Voir par exemple Charles BAUDELAIRE, LXXVI “Spleen”, et XII “La vie antérieure”, Les Fleurs du

Mal, p. 104 et p. 44.

2 Voir par exemple Charles BAUDELAIRE, XLVIII “Any where out of the world”, Petits poëmes en

prose, p. 146.

3

Charles BAUDELAIRE, XXI “Hymne à la beauté”, Les Fleurs du Mal, p. 52-53.

4 X “L’ennemi”, ibid., p. 43-44.

5 III “Elévation”, ibid., p. 37.

6 XXIII “La chevelure” et XLII, ibid., p. 54-55 et p. 72-73.

7 XCI “Les petites vieilles”, ibid., p. 122-125.

8 CIV “L’âme du vin - CVIII “Le vin des amants”, ibid., p. 140-145.

désespoir blasphémateur et se révolte contre Dieu.1 Chez Baudelaire, toutes ces tentatives sont, pour différentes raisons, des échecs. La beauté est fugitive, car le temps pousse l’être humain vers la mort.2

Les efforts créateurs des artistes se terminent souvent par l’échec. L’art permet de s’enivrer pour un instant, mais, tout de suite après, l’âme se retrouve enfoncée encore plus profondément dans les ténèbres.3

L’évasion par le voyage mène à la déception car l’âme du poète découvre que l’ennui existe partout et que le monde n’est pas aussi grand qu’elle le croyait.4

Et après le retour, la réalité est encore plus difficile à supporter. De même l’amour sensuel ne permet qu’un oubli passager. L’amour spirituel, quant à lui, est un moyen ambigu, car il permet d’apercevoir l’idéal, mais sans véritablement y parvenir. La charité est une communion par l’esprit, mais elle ne permet pas d’échapper au mal. Le vin ne mène qu’à une ivresse passagère, tout comme la débauche. Cette dernière est, de plus, nourrie par le mal, ce qui amène ensuite des sentiments de culpabilité chez le poète. Enfin, accuser Dieu du malheur le console, sans doute, mais ne l’aide pas à trouver l’ailleurs. Cette révolte est plutôt un cri de désespoir. Déçu de la religion et de toutes ces tentatives avortées, le poète de Baudelaire tente une dernière fois de sortir de ce monde. La mort représente en effet un ultime ailleurs possible.

C’est la Mort qui console, hélas ! et qui fait vivre ; C’est le but de la vie, et c’est le seul espoir5

Les artistes et les pauvres, tous ceux que la société a exclus, peuvent enfin trouver l’ailleurs en elle. La mort est victorieuse du temps car, dans celle-ci, le poète est enfin libéré de celui-ci : dans la mort, le temps n’existe plus. La mort, chez Baudelaire, ressemble d’abord à l’entrée dans un paradis, puis elle se transforme en un voyage fantastique vers l’inconnu, que symbolise un capitaine qui mène les âmes vers l’ailleurs. Baudelaire exprime la volonté d’aller vers ce qui n’a pas de nom. C’est une réalité si nouvelle que l’ennui y est impossible. Le poète ne sait pas si ce mystère absolu est divin ou satanique et, après tout, ce n’est plus très important.6

Néanmoins, cette dernière

1 CXVIII “Le reniement de saint Pierre” - CXX “Les litanies de Satan”, ibid., p. 157-162.

2 XXIX “Une charogne”, ibid., p. 59-61.

3

LXIX “La musique”, ibid., p. 100.

4 CXXVI “Le voyage”, ibid., p. 166-172.

5 CXXII “La mort des pauvres”, ibid., p. 164.

tentative elle-même reste incertaine chez Baudelaire. La déception ultime, la pire après tous ces échecs serait qu’il n’y ait rien de nouveau même après la mort. Le poème “Le rêve d’un curieux” est un cauchemar où le rêveur attend la mort avec impatience, mais découvre qu’il n’y a rien.1

Il nous appartient maintenant d’analyser les outils possibles pour atteindre l’Autre dans l’œuvre de Tunström.

La nature

Comme chez Baudelaire, la nature est un endroit de mystères et de transition entre le réel et le sacré. Elle a également la capacité de guérir les âmes malades. Elle joue souvent un rôle consolateur dans la littérature romantique, qui, nous le constaterons dans la partie suivante, a influencé Tunström.

Dans les livres de Tunström, il y a des gens qui comprennent la nature et qui sont différents parce qu’ils ont grandi en harmonie avec elle. Elle est décrite comme une force, souvent féminine, qui donne la vie et qui donne de la sécurité comme une mère. Elle est quelque chose que la société ne contrôle pas, puisque si c’était le cas, elle ne serait plus la nature. Etant à l’opposé de la civilisation, la nature donne aux personnages une possibilité d’échapper à celle-ci. Paula est un de ces personnages qui ne se plaisent pas dans la société, tandis que son mari est un pur produit de celle-ci. Il n’a même pas les vêtements qu’il faut pour accompagner sa femme dans la nature. Voici l’un des fondements de leur différence, qui fait qu’ils ne peuvent pas se rencontrer de manière absolue. Pour Paula, la nature représente un refuge, où elle s’enfuit quand elle est déçue de son mari. Lorsque les êtres de la nature se rencontrent, il y a, au contraire, une reconnaissance et un contact immédiat. C’est ce qui arrive entre Paula et Joel. Ils n’ont même pas besoin de mots pour se comprendre et se plaire mutuellement. Paula se sent plus à l’aise avec lui qu’avec son mari, qui par conséquent, et à raison, se sent exclu. Dans Champagne avant le dîner (Champagne före middagen), le personnage principal est un véritable homme de la nature.2 Il a été initié par son père et passe sa vie à s’intéresser à la terre. Par amour, il abandonne la nature et entre dans la civilisation, mais il le vit très mal. Sa femme, elle, ne supporte pas son obsession pour les scarabées.

1

CXXV “Le rêve d’un curieux”, ibid., p. 166.

2

Leur relation est vouée à l’échec, parce qu’ils ont grandi dans deux mondes différents. De même, dans Le Cas des framboises, les personnages principaux sont issus de mondes différents : celui de Sara est la nature libre de l’archipel ; celui de Johan la ville. Mais ce dernier fait un effort pour s’approcher de Sara en tenant un journal où il note la météo, ce qu’il appelle “un livre de la nature”, où il n’est pas question des hommes. Le livre de Tunström dans lequel la nature joue le rôle le plus important est Le Buveur de

lune. En Islande, la société est peut-être moins dominante, ce qui laisse un peu plus libre

cours à la nature. Lára, la mère de Pétur, connaît bien le volcan et n’a pas besoin d’instrument pour faire des enregistrements sismographiques. Elle entend des bruits que personne d’autre ne peut entendre. Elle cherche l’ailleurs à l’intérieur du monde, dans le souterrain. Là, se trouvent aussi les êtres de sous la terre, les houldres. Lára n’est pas comme les autres et ne supporte pas de vivre en ville, comme eux, car c’est comme si les murs des maisons lui écorchaient la peau. Elle a du mal à respirer une fois descendue du glacier, parce que l’air, en bas, est trop lourd. Pour elle, les hommes sont des parasites sur la terre, qu’elle voit comme un organisme vivant. « Il y avait de l’espace autour de ses mots, il y avait de la tendresse dans son sentiment pour la terre considérée comme un organisme vivant parcourant l’espace en solitaire. »1

Bien sûr, elle est fortement critiquée par les scientifiques, selon lesquels ce qu’elle dit est impossible. La quête de Lára est de s’unir complètement avec la nature. C’est pourquoi elle disparaît sous la terre après la naissance de Pétur. Le père de Pétur croit qu’elle s’est laissée prendre par le volcan, puisqu’elle a rempli son devoir envers la nature, en donnant la vie, et qu’elle est prête à quitter définitivement la vie humaine. Halldór lui aussi est proche de la nature, mais d’une autre façon, qui se montre avant tout par une sorte de culte de la lune. A chaque pleine lune, il sort ramasser le lait de lune qui coule de l’astre jusqu’à ses mains. Puis une fée apparaît. Il a aussi un grand respect pour la nature, car chaque fois qu’il sort dans le jardin, il s’incline comme s’il s’agissait d’une visite officielle. Pétur a compris cela comme « de la vénération devant les mystères de ce qui pousse et son mystère. »1 Johan, dans Le Voleur de Bible, a besoin de la nature pour se sentir libéré du regard des autres. Il est seul dans la nature, comme il l’est en ville, mais ici c’est une solitude naturelle, puisqu’il n’y a personne autour de lui. En ville, il y a des gens tout autour mais avec lesquels il n’a pas de relation.

Se retrouver seul à Marina di Ravenna était plus facile qu’en ville. La nature n’a pas les exigences qu’implique la certitude de multiples présences derrière des portes fermées.2

La nature peut être une aide dans l’émancipation. Cecilia, dans Les Filles des dieux, devient capitaine et prend le large. A partir de ce jour, elle ne remet jamais plus les pieds sur terre, car elle ne peut être elle-même que sur mer, loin de la civilisation. Son frère Ivan, qui est complètement dominé par sa mère, considère que son meilleur ami est un cheval. Lorsqu’il se révolte enfin, il est accompagné de ce cheval et se sent, grâce à lui, rassuré. Mais sa libération est finalement un échec. Le cheval est blessé, meurt et Ivan le suit peu après dans la mort. Enfin, certains personnages trouvent leur dignité à travers la nature, comme le grand-père de Johan, dans Le Voleur de Bible. Il est vieux et dépendant des autres, mais lorsqu’il arrive à la lisière de la forêt, il entre dans un autre monde, son royaume, où il est fort et libre. Le jour où il n’a plus la force de cueillir des baies, il se couche pour mourir.

Mais Baudelaire montre aussi un autre aspect de la nature, dans lequel elle est implacable et cruelle. De même, chez Tunström, elle peut être menaçante pour certains, parce qu’ils ont peur de ce qu’ils ne connaissent pas. Les gens font partie de l’environnement où ils ont grandi, que ce soit la ville, la mer, la forêt, etc. Ainsi, Tunström explique dans Partir en hiver que Koster, où il passe ses vacances, n’est pas son monde, car il n’a pas l’habitude de la mer. « Les vagues étaient contre moi », dit-il.3

Il parle aussi d’un certain Américain qui était venu trouver refuge sur l’île. Après sa première promenade, il était désespéré :

Dans la première forêt de sa vie, il s’était égaré, de corps et d’esprit. Des arbres l’avaient dévisagé, lui avaient parlé une langue totalement incompréhensible et même menaçante. Ils

1 Ibid., p. 64.

2 Le Voleur de Bible, p. 721.

avaient courbé leurs branches sur lui pour l’aplatir par terre. Il avait rampé en rond pendant des heures, au milieu d’un grouillement de souches, de vers de terre, d’oiseaux. ‘So, please,

take me away…’1

Marta, dans Les Saints géographes, va en ville par amour, pour apprendre à connaître le monde de son fiancé, mais lorsqu’elle abandonne la nature, elle change. C’est comme si la société lui avait enlevé quelque chose d’essentiel. Quand, plus tard, elle essaie de se réintégrer dans la nature, celle-ci est devenue hostile. « Elle semblait étrangère parmi les choses. Effrayée et pourtant attirée, comme si elle essayait de retrouver le chemin vers