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L’adhérence armature-béton

4.3.3 Modélisation analytique

Au delà des études expérimentales introduites précédemment, le développement de la fissuration de scission peut être étudié de manière analytique. On se base pour cela sur une analogie, dite hydraulique, qui consiste à établir un parallèle entre la contrainte radiale σ exercée par l’armature sur le béton et le cas d’école du tube rond soumis à une pression interne. En effet, ce rapprochement peut être justifié par la contrainte de traction circonférentielle qui se développe théoriquement dans l’épaisseur de la paroi du tube [Timoshenko et Goodier,1951], analogue à celle mise en évidence dans le cadre d’un essai d’arrachement (§4.3.2).

Cette analogie hydraulique est à la base du modèle analytique du « double cylindre », développé parTepfers [1973], qui permet de décrire l’évolution de la contrainte radiale de confinement σ agissant à l’interface a-b en fonction du niveau d’endommagement du béton d’enrobage (i.e. de la progression de la fissuration de scission). Dans le cadre du modèle du double cylindre, la distribution de la contrainte radiale σ agissant à l’interface a-b est supposée uniforme (i.e. constante sur tout le périmètre de l’interface a-b). La corrélation introduite au §4.3.2.1entre la géométrie des verrous et l’existence d’un plan principal de poussée, conduisant à la formation d’un PPR (figure 4.11), n’est donc pas introduite par le biais du chargement.

L’intégralité des développements mathématiques relatifs au modèle du double cylindre peut être retrouvée dans la littérature :

— les fondements du modèle [Tepfers,1973,1979] ;

— les développements basés sur une fissuration discrète (où chaque fissure est considérée en tant qu’entité) [Den Ujil et Bigaj,1996;Talaat et Mosalam,2007] ;

— les développements basés sur une fissuration répartie (où la fissuration est prise en compte de manière homogénéisée) [Nielsen et Bićanić,2002;Wang et Liu,2003]. Pour cette raison, et compte tenu de l’identification par Plizzari et al. [1998] d’un nombre précis de fissures de scission (§ 4.3.2.1), seules les hypothèses et les équations fondamentales relatives au modèle du double cylindre suivant l’approche discrète de la fissuration seront rappelées dans ce manuscrit.

Le modèle du double cylindre se focalise sur la contrainte normale radiale de compres-sion σr(r) et la contrainte normale circonférentielle de traction σθ(r) qui se développent dans l’épaisseur du tube (figure4.13-a). Du fait de l’écart entre les résistances du béton en compression et en traction, la contrainte circonférentielle de traction σθ(r) gouverne ma-joritairement l’endommagement et la rupture de l’enrobage. De plus, compte tenu du sens de variation de σθ(r), dont l’intensité diminue quand r augmente [Timoshenko et Goo-dier,1951], il est supposé que la fissuration s’amorce au droit de l’interface a-b (r = rs) et s’étend radialement à travers l’épaisseur de l’enrobage, jusqu’à éventuellement atteindre la surface du béton (r = rc).

En supposant un comportement élastique linéaire du béton jusqu’à l’atteinte de sa résistance en traction fctm, l’ensemble du volume de béton d’enrobage reste dans le do-maine élastique jusqu’à ce que la traction circonférentielle σθ(rs) au droit de l’interface a-b (où elle est maximale) atteigne la valeur fctm. En effet, bien que le béton soit soumis à un état de contrainte bi-axial (à la fois comprimé selon la direction radiale et tendu selon la direction circonférentielle),Talaat et Mosalam[2007] montrent via une analyse de sensibilité que l’influence de la contrainte de compression σr(r) est négligeable vis-à-vis de la contrainte de traction σθ(r).

Figure 4.13 – Modèle du double cylindre : a) paramétrage, b) équilibre des forces appliquées à l’anneau interne endommagé.

Au delà du seuil σθ(rs) = fctm précédemment introduit, la progression de l’endomma-gement est modélisée en divisant l’enrobage de béton en deux anneaux (figure 4.13-a) :

— un anneau interne endommagé (rs ≤ r ≤ rcr), dont la réponse est décrite par la théorie de l’endommagement et la mécanique de la rupture ;

— un anneau externe élastique (rcr ≤ r ≤ rc), dont la réponse est décrite par les équations de la mécanique des matériaux [Timoshenko et Goodier,1951].

La frontière entre ces deux anneaux est identifiée par le rayon rcr (rs≤ rcr ≤ rc) qui correspond à l’endroit où la traction circonférentielle σθ(rcr) est égale à la résistance en traction du béton fctm. Cette condition de raccordement permet de calculer la contrainte radiale de compression σr(rcr) (équation4.4) [Den Ujil et Bigaj,1996] agissant à la jonction entre l’anneau interne endommagé et l’anneau externe élastique (figure 4.13-b).

σr(rcr) = γcrfctm avec γcr = r2c− r2 cr r2 c+ r2 cr (4.4) Ainsi, il est possible de remplacer l’anneau externe élastique par la contrainte radiale de confinement σr(rcr) qu’il exerce sur l’anneau interne endommagé. La réponse de l’enrobage

SECTION 4.3 - Comportement transversal

dans son ensemble peut alors être décrite par l’équilibre des forces appliquées à l’anneau interne endommagé. Un secteur circulaire arbitraire de l’anneau interne endommagé, défini par un rayon inférieur r0 donné (rs ≤ r0 ≤ rcr) et par son rayon supérieur rcr, est alors soumis aux actions suivantes (figure 4.13-b) :

— une contrainte radiale de compression σr(r0) agissant contre la paroi interne du tronçon d’anneau endommagé considéré ;

— une contrainte radiale de compression σr(rcr), due au confinement exercé par l’an-neau externe élastique ;

— une contrainte circonférentielle de traction σθ(r) (r0 ≤ r ≤ rcr), distribuée le long de l’épaisseur endommagée.

On déduit des conditions d’équilibre du secteur circulaire l’équation 4.5 [Den Ujil et Bigaj, 1996]. Elle exprime la contrainte radiale de compression σr(r0) agissant contre la paroi interne du tronçon d’anneau endommagé considéré en fonction de la position rcr du front de la fissuration de scission.

Il apparait que cette contrainte résulte de la somme de deux contributions :

— le confinement exercé par l’anneau externe élastique (premier terme de l’équation

4.5) ;

— l’effet de cerceau exercé par l’épaisseur endommagée (second terme de l’équation

4.5). σr(r0) fctm = rcr r0 γcr+ 1 r0 Z rcr r0 σθ(r) fctm dr (4.5)

D’une part, l’équation 4.5 montre que la contrainte radiale de compression σr(r0) dépend du profil de traction circonférentielle σθ(r) qui varie selon la position r le long de l’épaisseur endommagée. D’autre part, nous avons vu au §3.4 que les contraintes σD

dans le béton endommagé peuvent être corrélées avec le paramètre w dit « d’ouverture de fissure fictive », de manière à modéliser l’endommagement du béton. Une relation linéaire entre les paramètres w et r (équation 4.6, où n est le nombre de fissures de scission), issue de la littérature [Den Ujil et Bigaj,1996;Talaat et Mosalam,2007], permet d’établir un lien entre la contrainte radiale de compression σr(r0) et le comportement du béton endommagé en traction σD− w.

w(r) =

n fctm

Ecm(rcr− r) (4.6)

Soulignons par ailleurs que la variation linéaire de l’ouverture de fissure le long de l’épaisseur endommagée de l’enrobage traduite par l’équation4.6 est en adéquation avec la mesure expérimentale de la progression d’une fissure de scission réalisée parGhandehari et al. [1999].